Facilement éligible en tant que personnage de série animée le moins charismatique du monde, notre bon ami Jimmy Neutron, censé être un garçon formidable, traîne sa condition d'hydrocéphale avec joie et bonne humeur. Ressemblant à une cacahuète géante sur laquelle on aurait scotché une perruque rappelant de la glace à l'italienne, ce dernier se voit en plus confier une mission périlleuse et peu glorifiante. Il doit en résumé débarrasser la planète d'une invasion de petites boules de poils inoffensives, parvenant tout de même à évoluer en des monstres de 1m02 à peu près, au contact d'ondes sonores. L'apocalypse approche, voire même doublée du Jugement Dernier.
Et oui, encore un jeu à licence. Doit-on pour autant commencer à pleurer sur notre sort, à se rouler par terre en hurlant : "Enfermez-moi, enfermez-moi" ? Il ne semble pas nécessaire d'en arriver là dans l'immédiat, même si la simple vue de la jaquette entreprend déjà une certaine sollicitation nerveuse. Equipé d'un rictus désarmant de fierté, à l'image du héros au sourcil négligemment levé trônant sur un à-plat violet déstabilisant, vous débuterez votre aventure intergalactique par le simple fait d'insérer une cartouche dans votre GBA qui ne s'attendait pas à ce coup en traître. Un geste à l'apparence banal, mais qui réserve des répercussions insoupçonnées. Doté d'un habillage dynamique et intégré à merveille dans l'ambiance dégagée par le soft, le menu principal ne vous propose qu'une seule et unique voie à emprunter, celle de l'aventure, la vraie, la tatouée. Votre quête se démarque par une originalité scénaristique à l'épreuve des balles de toute critique. Vous plaçant dans le rôle d'un jeune garçon, ou plutôt d'une cacahuète en jean, que personne ne daigne croire lorsqu'il déblatère sur la présence de créatures extraterrestres, vous allez supporter la pression d'un rôle de sauveur de la veuve et de l'orphelin face à une invasion insidieuse. Effectivement, des Twonkies, êtres minuscules et tout velus, ressemblant un peu au Cousin Machin de la Famille Addams en nettement plus mignons, se sont glissés sur Terre par le biais de la navette de ce "génie" de Jimmy. Peu dangereux à l'état "boule amusante", ceux-ci deviennent plus inquiétants une fois exposés à des sons de leur "couleur".
En fait, les Twonkies normaux réagissent aux sonorités techniques et aux chants d'oiseaux, les élémentaires électriques à la voix , et les élémentaires de glace aux clapotis de l'eau. A vous donc, non pas de trouver un moyen de les en écarter, mais de réduire ces nuisances sonores dans le but d'éviter de multiples transformations. Pour ce faire, vous disposez d'ustensiles assez étranges, allant du réducteur de taille au Sheenographe, permettant de réduire l'évolution des Twonkies en les ramenant à leur statut gentillet. En effet, vous étant donnée la tâche de capturer l'ensemble de la population des mini-poufs sauteurs à l'aide d'une sorte d'aspirateur nommé "démodulateur réciproque", mieux vaut pour cela que ces derniers soient de taille respectable. Vous écumerez donc la majeure partie des niveaux en recherchant ces formes de vies étrangères et en tentant également de dénicher les pièces nécessaires à la construction de vos outils indispensables dans cette lutte. Un principe sympathique qui repose en fait sur plusieurs schémas vous indiquant la forme des morceaux à ramener dans le but de vous forger un Jetpack 2000 ou encore un Lanceur de hamster invisible. Impliquant un degré d'immersion supplémentaire de par la sensation de se débrouiller seul, en utilisant les ressources d'un environnement à son compte, ce système trouve toutefois ses limites très rapidement. On se retrouve malheureusement face à un glissement terrifiant de l'intérêt, induit par l'immense linéarité de cette poursuite. En effet, les fragments dont vous avez grandement besoin se trouvent tous regroupés au sein d'un même niveau pour chaque invention, et agissent en tant que condition de clôture d'un stage.
De manière plus claire, vous ne pourrez sortir d'un monde sans avoir mis votre main de cacahuète en baskets sur l'ensemble des pièces réparties en son sein. D'autre part, impossible de les combiner vous-même, et surtout n'essayez pas de tenter de deviner la nature de celle qui vous ferait défaut, car cela ne vous servirait vraiment à rien. Il est véritablement dommage d'avoir littéralement gâché une idée dont la base demeurait solide et propice à une construction intéressante. Mais bon, il est évident qu'étant donné la cible visée, il vaut toujours mieux se concentrer sur la fidélité avec une marque plutôt que la mise en place d'un fond solide. Définition même d'un jeu tablant sa réussite sur sa licence, ce constat ne s'éloigne jamais bien loin de l'apparition de lacunes de gameplay. Evidemment Jimmy Neutron n'y coupe pas et propose une approche ludique vraiment décevante. S'il est vrai qu'il ne comporte peu ou pas de problèmes de jouabilité pure, il affiche un schéma de progression vraiment mou et à la teneur en lassitude imposante. Basé sur une architecture de niveau semblables tout au long de l'aventure, ne variant que durant des phases en mode 7 à bord de vaisseaux incontrôlables, le jeu se contente de se ruer dans le carcan d'un type plate-forme insipide et dénué de toute innovation. Plat et sacrifiant ses bonnes idées sur l'autel d'un conformisme mercantile, Jimmy Neutron dispense également une lourdeur de déplacement titanesque, donnant l'impression de passer son temps à diriger un garçon génial par deux mille mètres de fond, ou bien portant des semelles de plomb compensées. Son maniement demeure précis, mais le titre accuse ce heurt maladroitement et perd énormément en dynamisme.
Dans un ordre d'idées semblable, et au delà des inventions inutiles comme les chaussures anti-gravité pouvant freiner votre chute mais à partir de deux mètres du sol seulement, la qualité graphique du soft de THQ se présente dans un déséquilibre certain. Affichant des décors détaillés, agrémentés de couleurs vives et chaudes, dans une variété notable, celui-ci met aussi en avant des personnages grossiers, étrangement pixélisés, et surtout d'une raideur cadavérique. Vectrice d'une certaine souplesse d'animation, la 2D est de ce fait le meilleur moyen de donner à voir des décompositions de mouvements fluides et vigoureuses, conférant aux divers sprites une sorte de vie. Ce n'est ici pas le cas, et malgré un univers proche et chaleureux, le jeu ne parvient pas à convaincre. Et comme si cela ne suffisait pas, la bande-son est éreintante au possible, axée sur une seule mélodie distillée tout au long de votre quête. Limitée et utilisant des sonorités se rapprochant de la Gameboy originale, celle-ci provoque rapidement un degré d'énervement certain, et un désintérêt exponentiel. Au final donc, et malgré certaines trouvailles qui auraient mérité un développement plus important, Jimmy Neutron, de par son utilisation abusive de sa licence et sa faiblesse générale s'avère plus que décevant. Non que l'on en attendait énormément, mais les enfants auraient pu ne pas être pris comme cible marketing désincarnée. Et ben si !
- Graphismes9/20
Offrant un déséquilibre certain, la réalisation graphique n'est vraiment pas à la hauteur de ce que peut proposer la GBA. Fade, grossière et pixélisée, la représentation des personnages effraie plus qu'elle interroge, au sein d'environnements pour leur part corrects et chaleureux. De plus, l'animation, assez poussive et parfois chaotique entreprend un travail de sape ludique constant. Un peu le syndrome du jeu à licence en résumé.
- Jouabilité8/20
Non que le maniement du héros soit imprécis ou inaccessible, mais il apparaît clairement que la jouabilité se révèle bien trop limitée, et excessivement molle. Les sauts de la cacahuète à oreilles se transforment en de longues secondes d'attentes malvenues, qui plombent une progression trop répétitive pour éveiller un intérêt quelconque. Malgré tout, le soft s'avère relativement permissif, et si vous buterez sur l'inutilité d'un système de collecte intéressant à la base, vous trouverez vos marques rapidement.
- Durée de vie5/20
Les niveaux ne sont vraiment pas nombreux, et l'on arrive véritablement rapidement à la fin de l'aventure. De plus l'absence de mini-jeux, ou de modes secondaires entache grandement la durée de vie du titre. Enfin, même après avoir admiré la conclusion, vous n'aurez plus jamais envie d'y revenir.
- Bande son4/20
Répétitive jusqu'à l'épuisement, la bande sonore tourne dans votre tête de très, très, mais alors très longues minutes, dans une féerie d'ascenseur regrettable. Enervante et insupportable, la composition du jeu vous obligera à couper le son au bout de seulement cinq minutes. Ecoutez plutôt l'ost de Star Ocean 3 en jouant, c'est plus reposant et d'une qualité infiniment meilleure.
- Scénario4/20
Ce sont des boules de poils inoffensives qui attaquent la terre, et vous devez toutes les capturer. Espérons que la fin réserve un rebondissement de situation. Si ça se trouve Jimmy n'est autre que l'inventeur de ce fléau dans le futur. Alors il s'est envoyé dans le passé pour éviter cette erreur.
Pur produit commercial destiné à tromper les parents dans leur achat en misant sur la confiance d'une marque, Jimmy Neutron fait fi de tout plaisir ludique. Se raccrochant à une simple licence, le soft de THQ n'arrive pas à convaincre une seule seconde, et se voit un tantinet sauvé par des embryons d'idées intéressants, et une réalisation à peu près correcte. Je vous avais bien dit que c'était une cacahuète géante !