Les hommes, ou plutôt leurs créations, ont enfin dépassé les limites des voyages spatiaux à courte distance en créant un ascenseur orbital reliant la Terre et son satellite luminescent. Motivée par un sentiment de survie face à la guerre contre les réploïdes renégats (Mavericks), cette construction apparaît comme l'unique salut d'une humanité sur le déclin. Nommé Jacob, ce passage vers un univers détaché de conflits viscéraux intéresse évidemment au plus haut point les androïdes rebelles désirant façonner un nouveau monde dans lequel les errances du présent ne seront plus qu'un vague souvenir. Une nouvelle génération de réploïde voit alors le jour, disposant de la capacité de synthétiser l'ADN de n'importe qui, afin de créer des clones parfait de manière immédiate. C'est alors que X découvrit l'ampleur d'un futur assombri.
Réutilisant les codes génétiques de Sigma, les nouveaux modèles robotisés occupent alors son apparence et conservent une plaie que tout le monde pensait vaporisée. Peu de temps après, des révoltes éclatèrent dans de nombreuses régions, menées par des Mavericks souhaitant simplement un nouvel avenir. Mais, bien que ce souhait soit légitime en soi, les moyens pour y parvenir dépassent les cadres d'un équilibre commun cher au coeur de l'organisation employant les trois "Maverik Hunters" qui nous intéressent aujourd'hui, à savoir X, Axl, et le légendaire Zero. Confrontés à leur expérience commune de Sigma, et à des moments de leur existence assez opaques, ces derniers vont devoir enquêter et mettre fin aux turbulences d'un monde gangrené. Ce qui veut dire, en résumé, tirer sur tout ce qui bouge et qui ressemble de loin à un opposant. En effet, Megaman X reste Megaman X, et ce n'est pas ce huitième épisode qui va changer les habitudes dynamiques d'un titre d'action nerveux et retors. Une constatation rassurante pour les nombreuses personnes n'ayant pas accroché à l'opus X-7 du fait d'un gameplay mou, peu intuitif, et surtout d'un parti-pris graphique en opposition totale avec ses aspirations profondes. Néanmoins, cette annonce réjouissante va de paire avec une lacune dommageable, reposant au sein d'un manque global d'innovations. Effectivement, vous retrouverez avec un plaisir mêlé de lassitude le système séculaire des huit boss thématisés en fonction d'un animal ou d'une plante, qu'il vous faudra éliminer avant de découvrir, ô surprise, que ce n'étaient que les sbires de l'ombre dirigés d'une main de fer par un commanditaire secret. On se laisse par conséquent prendre par cette partition maintes fois jouée et simple d'accès, sans parvenir vraiment à pénétrer dans le soft à cause justement de cette facilité de construction décevante. Heureusement, mais à de trop rares occasions, vous aurez la possibilité de participer à une "intermission" vous proposant de survivre à une épreuve, souvent basée sur les réflexes purs, et sans réelle intégration dans le scénario général. Simple contre-temps à régler pour le bien du peuple, ces dernières vous rapporteront souvent un nombre de métaux rares conséquent, vous octroyant ensuite le pouvoir de faire évoluer votre équipement.
En effet, le concept intéressant soutenant ce Megaman X-8 se révèle être une sorte d'aspect gestion, certes peu poussé, mais motivant la collecte de métaux, dans le but de concevoir des avatars pratiquement invincibles, et dotés de capacités fascinantes. L'ensemble des modifications apportées se fait à base de puces, demandant plus ou moins de crédits pour favoriser leur transformation. Celles-ci se divisent en quatre catégories, All (concernant l'ensemble de l'équipe), X (pour X), Axl (vous avez compris), et Zero (là aussi), sachant que chaque changement influe sur la capacité d'attaque de vos héros. Si par exemple vous actionnez "Arme Supp", augmentant la puissance de votre arme, ou même "Récup Rapide" garantissant une réserve de santé plus rapidement mise à niveau, il est plus que probable que votre pourcentage de puissance augmentera en conséquence. Vous aurez alors le loisir de participer à la "création" en choisissant avec intelligence quelle propriété fournir à tel personnage. Tout en sachant bien évidemment qu'il vous est encore possible de subtiliser leurs pouvoirs aux différents boss que vous aurez croisés. S'appliquant de manière variée suivant l'individu du trio concerné, ces capacités spécifiques auront plus au moins d'impact au gré des affrontements, et surtout face au type d'ennemis en présence. Autre nouveauté relative au fait que vous dirigiez désormais un groupe et non pas un robot bleu seul avec son X-Buster, un système de "tag" fait une apparition pas vraiment remarquée. Le principe du "tag" s'apparente à un passage de témoin entre deux compagnons.
En fait, au début de chaque mission vous devrez choisir deux des trois principaux rédempteurs, ainsi qu'une navigatrice, parmi les trois présentes, vous donnant, selon son type, des informations diverses sur les phases dissimulées du niveau, sur le boss, ou un avis plus général sur votre progression. Une fois ce choix cornélien achevé, vous partirez donc en guerre avec la possibilité d'intervertir vos troupes quand vous le souhaitez au cours d'une expédition. Possédant chacun des points forts et faibles, vos amis les androïdes devront intervenir au moment opportun sur votre ordre. Par exemple, il sera plus aisé de détruire un opposant se dissimulant derrière un bouclier avec Axl, qu'avec X ou Zero. A vous donc de vous adapter et de connaître sur le bout des doigts les caractéristiques de vos antagonistes. De plus, par le biais de cette approche inédite, il vous sera possible de venir en aide à un camarade piégé, simplement en changeant de personnage principal à ce moment précis. Ce dernier viendra le délivrer puis prendra sa place. Une bonne idée, qui dynamise le soft, sans toutefois donner de réelle utilité à ce mode "tag" un peu gadget. Dans le même ordre d'idées, il vous incombera de gérer la santé de vos deux compères. En effet, si l'un d'eux meurt terrassé par un ennemi, vos serez obligé de faire tourner votre effectif, et de ce fait d'utiliser le guerrier restant. Une fois cela mis en place, votre jauge d'attaque se remplira de bleu. Si vous parvenez à tuer suffisamment d'ennemis à la suite pour la remplir en entier, votre coéquipier ressuscitera avec quelques points de vie. Comme vous le voyez, et au travers de quelques heures de jeu, on se rend compte aisément que le partenaire s'apparente plus à une sorte de "continu sur pieds", qu'à une réelle source d'aide notable. Même s'il est possible d'effectuer une attaque combinée reprenant un style graphique à la Matrix, le "tag" en lui-même s'avère sous-exploité, ce qui est dommage à la vue du développement qu'il aurait pu avoir.
Un ajout négligeable donc, mais qui apporte tout de même un certain renouveau dans un gameplay relativement classique, au contraire du level-design, inventif et assez probant. La série Megaman ne s'est jamais vantée de posséder une architecture de niveaux tortueuse, ou bien encore des phases surprenantes au sein des ces dernières, même si de nombreux recoins délicats à atteindre dissimulaient les pièces d'armure secrètes de X. Pourtant cet épisode expose des environnements ludiques dans l'ensemble suffisamment ouverts et tentaculaires, toutes proportions gardées, dans lesquels il est agréable de se déplacer, en enchaînant les prises de risque les plus inconscientes, se glissant parmi les plus petits interstices, et découvrant diverses voies menant à la clôture d'un niveau, sans avoir totalement l'impression de suivre une ligne directrice étouffante. A ce propos, deux stages disposent d'un souci d'originalité flagrant et réjouissant. L'un d'eux fonctionne sur le principe du changement de gravité, et nécessitera quelques réflexions bienvenues, et l'autre se base sur une succession de mini-jeux influant ensuite, suivant votre réussite, sur l'architecture du donjon. Surprenant. D'autre part, la jouabilité apparaît fort convaincante, même si elle n'égale pas, et loin s'en faut, la précision maladive des volets 2D. Il est de ce fait extrêmement curieux de rencontrer deux niveaux, reposant sur des sortes de courses de vitesse, qui souffrent terriblement d'une prise en main catastrophique abaissant d'un coup la confiance posée dans le gameplay. Heureusement que sur la longueur, le plaisir remplace ces images cauchemardesques, sans quoi le syndrome X-7 aurait montré le bout de son canon. Toujours dans le même esprit, la difficulté, pendante directe de la maniabilité, se montre dans l'ensemble mesurée, même si elle surgit parfois férocement au coin d'une phase d'acrobatie entre des murs recouverts de pieux aiguisés aux contours mal définis. Pour finir, et malgré une désaffection profonde pour le tournant 3D qu'a pris la série, il apparaît toutefois que la représentation utilisée ici, proche dans sa mise en place d'un scrolling 2D conserve quelques bribes salvatrices d'un esprit que l'on croyait éteint.
Evidemment le tout n'est pas des plus fluides, et l'animation pèche par moment, mais on retrouve un tant soit peu des sensations complètement mises à néant par Megaman X-7. On peut espérer beaucoup mieux pour de la PS2, c'est certain, et on imagine ce qu'aurait pu donner une 2D léchée à la Legend Of Mana, sans toutefois dénigrer le fait que Capcom ait décidé de remanier en connaissance de cause ses erreurs sur le précédent opus. Malgré tout, on reste sereinement sur une impression mitigée, composée de doutes sur une réalisation datée et soumise à des ralentissements étranges, sur un gameplay revu mais pas assez original, et d'un principe inchangé depuis des lustres. Un épisode honnête, mais encore coupé de ses fières influences. N'est pas Megaman Zero qui veut.
- Graphismes12/20
Décidément, la 3D ne va pas vraiment avec le teint de ce bon vieux Megaman. Soumis aux lois d'un marché décidant que la 2D souffle ses dernières bougies, le titre de Capcom gagne en ralentissements et en animation saccadée, sacrifiant sa fluidité légendaire au profit d'une représentation moins détaillée. Néanmoins, par le biais des décors suffisamment fins et diversifiés, pétris d'animations agréables, et d'une recherche sur la mise en scène des phases scénaristiques, Megaman X-8 évite de peu l'écueil de son grand frère.
- Jouabilité13/20
La prise en main, comme dans la majorité des opus de la série ne pose aucun problème dans sa globalité, mais chute lourdement dans deux stages, basés sur des espèces de courses-poursuites à bord de véhicules. Une lacune étrange, qui étonne quelque peu. Dans le même esprit, il est regrettable de retrouver au mot près la construction trop typique de la saga, qui commence sérieusement à tourner en rond, malgré l'ajout sympathique du système de puces et dans une moindre mesure du tag. En revanche, vous serez agréablement surpris par un level-design travaillé.
- Durée de vie12/20
Malgré quelques pics de difficulté, le jeu n'est pas très long, et ne vous demandera qu'une demi douzaine d'heures pour être achevé dans sa globalité. Par contre, il doublera votre attention, si tant est que vous désiriez découvrir toutes les puces dissimulées dans des recoins difficiles d'atteinte. Honnête.
- Bande son10/20
Les divers thèmes présents dans le titre sont fidèles à la série, c'est à dire assez peu mélodiques et assez classiques dans leur composition sans toutefois devenir lassants. Ils correspondent souvent bien aux situations et accompagnent les phases scénarisées avec retenue. Les effets sonores quant à eux sont assez percutants, et les doublages américains pas vraiment. On ne sent pas spécialement d'implication dans des voix qui collent parfois mal aux personnages.
- Scénario12/20
La trame développe les rapports tendus qu'entretiennent les réploïdes (Mavericks inclus) et les humains dans une société qui n'a visiblement pas de place pour un compromis. L'idée de départ est intéressante, mais le développement n'est pas assez approfondi pour convaincre. Malgré tout, l'histoire se laisse suivre. A noter les scènes cinématiques réalisées de façon convaincante, et utilisant un mix entre 3D/Cel Shading et dessin animé.
Nettement plus convaincant que son prédécesseur ce Megaman X-8 ne parvient tout de même pas à retrouver les morceaux d'un squelette d'une saga qui a connu des heures de gloire légitime. Tout cela manque de dynamisme, bien qu'un effort imposant ait été effectué, de nouveauté, et surtout de caractère. Une 3D de cet acabit ne convient pas du tout au fond de la série Megaman X et décrédibilise quelque peu l'un des fleurons du jeu d'action nerveux. Megaman X-8 n'est pas un mauvais jeu, emportant avec lui des idées intéressantes et une certaine honnêteté, mais il n'applique pas assez bien ces dernières, et se complaît un peu dans ses acquis.