Les amateurs de la série des Settlers, véritable référence en matière de jeu de gestion, attendaient ce cinquième volet avec impatience mais aussi avec une certaine inquiétude. En effet, les développeurs ont annoncé depuis déjà un petit moment vouloir dépoussiérer leur concept et opérer un véritable virage pour rendre leur titre plus accessible et plus intéressant. L'Héritage des Rois lorgne au final plus vers le STR que ses prédécesseurs. La nouvelle recette sera-t-elle digeste ?
La particularité des Settlers a toujours résidé dans le fait que la phase de gestion des ressources et de construction de son village tenait une place prépondérante au détriment des batailles qui se limitaient à la portion congrue. Il fallait en l'occurrence veiller à la bonne combinaison des matières premières pour arriver à ses fins ce qui fesait que l'économie de l'ensemble était réellement complète et structurée. Et bien dans L'Héritage des Rois, tout ceci a été largement simplifié. On se retrouve en fait avec cinq ressources de base à collecter : le bois, l'argile, le fer, la pierre et le souffre. Il est possible de les collecter avec de simples serfs qui sont des personnes à tout faire, mais il est plus efficace de construire des mines pour la plupart des matières premières. Les mines fonctionnent grâce à des ouvriers qu'il n'est possible ni de créer, ni de diriger. En effet, ceux-ci sortent automatiquement du centre de village et se mettent seuls au travail.
Les mines tournent à plein régime lorsque les ouvriers disposent d'un habitat et de nourriture. Pour fournir ces deux éléments, il faut bâtir à proximité des mines des fermes et des habitations. Si jamais vos citoyens ne disposent pas de ces deux éléments, leur productivité baissera. Il n'est donc plus nécessaire d'outiller les ouvriers et les autres citoyens de votre bourg puisqu'ils se mettent automatiquement au travail. Puisqu'on n'a plus à se soucier des outils, la gestion s'en trouve forcément simplifiée et les puristes risquent de regretter les moments où le simple manque d'un outil pouvait paralyser votre évolution. Les développeurs de L'Héritage des Rois ont voulu simplifier les choses. Mais du coup on se retrouve avec un jeu beaucoup moins riche et moins tourné vers la gestion qu'auparavant. Ce qui faisait la particularité des anciens Settlers, à savoir une phase de gestion très complexe, s'est un peu émoussé dans ce dernier volet qui lorgne vers le STR classique.
Outre la gestion des ressources qui a été comme nous l'avons vu très simplifiée, la création d'une armée est elle aussi plus simple qu'avant. Mais il y a tout de même quelques différences avec un jeu de stratégie classique. La plus flagrante est qu'on ne crée pas chacune des unités qui seront sous vos ordres mais seulement les commandants et ce sont eux qui auront un certain nombre d'hommes sous leurs ordres en fonction de leur expérience. Pour partir au combat, vous disposez aussi de héros, qui, un peu comme dans Warcraft 3 ont des pouvoirs spéciaux tels que le soin d'unités proches ou le camouflage. Hélas, le nombre d'unités et de héros différents fait peine à voir et on est très en deçà des grands noms de la stratégie sur ce point. Comme on peut s'en douter, ce manque de variété nuit forcément à la diversité des tactiques que l'on peut mettre en place. Et ce n'est pas tout, car il semble que malgré le fait que les développeurs aient voulu axer leur jeu plus sur la stratégie et moins sur la gestion, ils ne se sont pas donnés les moyens pour.
Il faut en effet dire que ce qui fait tout l'intérêt d'un STR c'est bien l'intelligence artificielle qui se doit d'être parfaitement réglée. En solo, c'est elle qui détermine une grande partie de l'intérêt des batailles. Et bien dans Settlers 5, l'IA n'est vraiment pas fantastique : on remarque que l'ordinateur fait des choix souvent très peu judicieux et répond globalement très mal à une attaque en masse sur ses villages. Pour vaincre, le joueur n'a donc qu'à développer au maximum ses technologies et son armée puis lancer une seule grosse attaque pour détruire la base adverse. Les parties se suivent et se ressemblent. On aurait aimé que l'IA tente des rush, des diversions, des attaques sur deux fronts en simultané... Hélas, il n'en est rien et on se retrouve avec un intérêt tactique très, très limité. Autre point sur lequel le jeu pèche : le pathfinding n'est pas loin du catastrophique et pour peu que vous cliquiez sur un lieu un peu éloigné, il y a de fortes chances pour que vos troupes restent bloquées en chemin ou partent dans la mauvaise direction.
Heureusement, la durée de vie du jeu sauve un peu la mise. La campagne est longue, il y a un mode escarmouche et multijoueur complet. Ce dernier propose d'ailleurs de s'affronter jusqu'à 8 joueurs sur trois modes distincts : dans le premier il faut détruire le QG des autres, dans le second il s'agit d'avoir développé le premier toutes les technologies, tandis que le dernier consiste en une partie en temps limité : celui qui a le meilleur score à la fin du temps imparti l'emporte. Tout cela est plutôt bien fichu et d'ailleurs, le jeu étant très facile à prendre en main il plaira certainement à un public novice. Hélas, les inconditionnels de la série des Settlers en voyant que ce cinquième volet est à mi chemin entre le STR et le jeu de gestion risquent d'être assez déçus en voyant qu'aucun des deux aspects n'est assez complet pour convaincre réellement.
- Graphismes13/20
Les graphismes sont assez jolis à défaut d'être extraordinaires. En revanche, on regrette un peu qu'il soit impossible de faire des rotations de caméras librement (l'angle revient à celui par défaut dès que vous lâchez la touche de rotation) et que les décors ne soient pas plus variés.
- Jouabilité12/20
L'interface a été très simplifiée comparé aux précédents Settlers. Le problème, c'est que c'est la richesse du gameplay qui en pâtit : phase de gestion du village pas assez complète et intérêt stratégique limité. Mais les défauts principaux se situent au niveau de l'intelligence artificielle et du pathfinding vraiment défaillants.
- Durée de vie14/20
Entre la campagne solo assez longue, les cartes escarmouche et le mode multijoueur complet, il y a de quoi faire.
- Bande son14/20
La bande-son du jeu est globalement réussie que ce soit pour les musiques, les bruitages ou encore les voix françaises.
- Scénario12/20
Ca sent fortement le réchauffé : background classique, histoire banale d'un jeune homme qui va apprendre qu'il peut devenir roi s'il rassemble des morceaux d'amulettes : c'est sans surprise.
Ceux qui ont apprécié les opus précédents risquent d'être assez déstabilisés par ce cinquième volet. En effet, le gameplay a été totalement modifié et se rapproche beaucoup d'un jeu de stratégie "classique" type Age of Empires agrémenté d'un brin de gestion. Ce n'est pas un problème en soi, mais ça le devient lorsqu'on s'aperçoit que l'intérêt stratégique est plus que limité à cause d'un nombre d'unités trop faible, d'une l'IA et d'un pathfinding vraiment pas au point. Heureusement, la durée de vie est bonne et le jeu est globalement bien pensé mais cela ne suffit pas pour en faire un hit.