Redoublant de précautions pour ne pas faire le moindre bruit susceptible d'attirer l'attention de mes collègues plongés dans leur rude labeur, je me faufilai discrètement sous la table de test à la recherche des congas. Ragaillardie par le fait que ma délicate manoeuvre était passée complètement inaperçue, j'osai relier l'accessoire maudit à la console et m'apprêtai à jouer incognito lorsqu'une maladresse de ma part débrancha la prise casque et fit résonner dans toute la pièce un horrible grognement de singe venu du jeu. Je sus alors que ma partie de DK Jungle Beat ne passerait pas inaperçue.
C'est une évidence, Donkey Kong Jungle Beat fait partie de ces jeux qui respirent la convivialité et la bonne humeur. Remarquez, entre les bruits de tam-tam et les hurlements d'hystérie que génère ce titre, je vois mal comment on peut résister à l'envie de venir voir de quoi il retourne. Pourtant, là où Donkey Konga se jouait volontiers à plusieurs, DK Jungle Beat est un titre qui se joue résolument en solo. Rien à voir d'ailleurs avec son aîné puisqu'il ne s'agit plus d'un soft musical. Cet épisode tente plutôt de renouer avec le genre plates-formes en y introduisant un changement de taille : le maniement avec les congas ! Et laissez-moi vous dire qu'en termes d'innovation, le nouveau Donkey fait très fort.
Vu de l'extérieur, on pourrait presque voir en Donkey Kong Jungle Beat un nouveau chapitre de la saga Donkey Kong Country. Le jeu se découpe en niveaux clairement tournés vers la plate-forme pure, et l'on retrouve la plupart des mouvements caractéristiques de Donkey. Seulement voilà, le fait de déplacer le primate à l'aide des congas relance complètement la donne en installant un tout nouveau type de gameplay. Il faut taper des mains pour que DK effectue lui-même cette action pour attraper des bananes, saisir quelque chose ou s'agripper à un ennemi, ce qui se révèle on ne peut plus immersif. La vitesse de déplacement dépend de la rapidité avec laquelle on tape sur les congas de gauche ou de droite, et une pression simultanée permet de faire un saut. Ca n'est pas toujours très intuitif, mais c'est parfaitement jouable et ça oblige le joueur à rester attentif et concentré. On se retrouve à frapper les tambours comme un fou en s'y mettant à deux mains pour accélérer la course de DK en faisant fi de tout ce qui se passe autour. Et peu importe si les autres s'arrachent les cheveux en vous suppliant de couper cette musique infernale et d'y aller plus doucement avec les congas. Quand on voit la sauvagerie avec laquelle Donkey se jette sur ses ennemis, on ne s'embarrasse plus de faire preuve de retenue.
Il y a certes beaucoup de choses à dire sur ce titre, mais ce qui fait le plus plaisir à voir c'est certainement cette folie furieuse dont fait preuve le primate dans Jungle Beat. Jamais on n'avait vu l'ami Donkey faire preuve d'autant de sauvagerie vis-à-vis des autres bestiaux de la jungle. Je vous assure que votre mine va se décomposer en voyant le gorille se jeter sur le dos de pachydermes plus gros que lui pour les terrasser à coups de poings. On assiste à des scènes démentielles où Donkey sort ses griffes (!?) pour déchirer la coquille d'un oeuf géant, d'autres où il tire sans vergogne sur la langue d'un poisson (!!??) ou sur la crête d'un poulet rouge de colère pour lui voler dans les plumes. Les bourdons se prennent pour des avions de chasse et vous mitraillent à l'aide de leurs dards. A chaque fin de niveau, Donkey s'agrippe comme une ventouse parasite sur des fruits qui font dix fois sa taille pour en savourer le goût. C'est du grand n'importe quoi et il en résulte un humour omniprésent qui nous fait redécouvrir l'univers de DK sous un jour nouveau.
C'est vrai que le jeu n'a rien d'extraordinaire d'un point de vue technique. C'est vrai aussi que si la jouabilité est intéressante et particulièrement originale elle n'en est pas non plus irréprochable. Mais le titre parvient pourtant à sortir du lot à force de détails qu'on ne peut noter sans sourire. Les graphistes ne se sont pas gênés pour multiplier les animaux à fourrure afin de mettre en valeur le rendu incroyable de leur pelage qui va encore bien au-delà de ce qu'on avait vu dans Starfox Adventures. Les déformations des ennemis victimes des attaques terribles de Donkey sont criantes de vérité, et la plupart des effets semblent repris de Zelda : The Wind Waker. Qui plus est, les niveaux parviennent étonnamment à se renouveler entre les parcours sous l'eau, les courses-poursuites ou les environnements gélatineux. Le joueur va de surprise en surprise et il en redemande, quitte à s'y brûler les mains. J'en profite d'ailleurs pour remercier Jihem qui m'a gentiment servi de cobaye pour me permettre de prendre des screens.
C'est bien joli tout ça mais il est peut-être temps de se demander si l'intérêt de Donkey Kong Jungle Beat n'est pas quelque peu factice. Il faut admettre qu'on ne peut pas être déçu par ce titre lorsqu'on en fait l'expérience pour la première fois. La variété des situations compense le manque d'actions possibles et l'ambiance décalée du jeu ne peut que donner envie d'en voir plus. Maintenant, il ne faut pas non plus se leurrer. Les 16 niveaux qui composent le jeu se terminent en quelques petites heures, et même si le challenge est intéressant dans la mesure où l'on peut tenter de se surpasser pour obtenir la meilleure médaille sur tous les niveaux, le titre accuse une longévité trop faible. Par ailleurs, le fait de ne pas pouvoir s'y essayer à plusieurs ne permet pas de renforcer la durée de vie globale, et une fois la surprise passée on se lasse assez rapidement. Voilà pourquoi Donkey Kong Jungle Beat n'obtient pas une note supérieure. Maintenant, vous pouvez foncer sans la moindre hésitation si vous possédez déjà les congas.
- Graphismes14/20
Autant le jeu regorge d'effets vraiment réussis, comme la fourrure ou les explosions, autant l'ensemble n'est pas non plus totalement convaincant. Les décors les plus originaux sont souvent les plus vides, et on retrouve plusieurs fois les mêmes boss, ce qui est dommage. Après, que dire du design des ennemis ?
- Jouabilité15/20
Je ne saurais vous dire à quel point ça fait du bien de fracasser furieusement les congas tout en voyant Donkey s'acharner sauvagement sur ses adversaires. Ce qui est sûr, c'est que la maniabilité est aussi originale qu'efficace, même si ce n'est pas ça qui révolutionnera le jeu de plates-formes. Le titre est également jouable au pad, mais quel intérêt ?
- Durée de vie12/20
Quelques heures suffiront pour faire le tour des 16 niveaux de jeu, mais il est beaucoup plus difficile d'obtenir le meilleur score sur chaque étape. De plus, une fois la surprise passée, on y revient beaucoup moins facilement.
- Bande son13/20
Aux dires de mes chers collègues qui ont subi ce test avec beaucoup de patience, la bande-son de Donkey Kong Jungle Beat est extrêmement soûlante. Le joueur en revanche trouvera les musiques tout à fait adaptées au style de jeu.
- Scénario/
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On pouvait vraiment craindre le pire pour ce titre qui tente le pari fou de proposer des parcours de plates-formes jouables avec des congas. Le résultat est pourtant fort réussi et le gameplay fonctionne plutôt bien. Donkey Kong Jungle Beat peut également compter sur son ambiance délirante pour vous faire passer un agréable moment, mais si vous ne possédez pas déjà les congas vous serez peut-être déçu par sa durée de vie.