Alors que les éditeurs avaient encore tous les yeux braqués sur la seconde guerre mondiale, SCi préférait miser sur l'originalité et nous envoyer batailler dans le sable du Golfe avec Conflict : Desert Storm. Aujourd'hui, la série continue son bout de chemin mais s'affranchit de la singularité qui la caractérisait en cédant à la mode du Vietnam.
Sans pour autant délaisser totalement la période 39-45, les jeux de guerre s'intéressent de plus en plus à l'enfer du Vietnam. Chacun à leur manière, ils se proposent tous de nous plonger dans la moiteur de la jungle pour dégommer du Vietcong, et tous tentent par tous les moyens de se démarquer du concurrent en soignant autant que faire se peut l'ambiance. Certains privilégient l'action, d'autre misent sur les séquences chocs. Quoiqu'il en soit, rares sont ceux qui parviennent vraiment à nous emballer plus que ça, car sous les musiques rock des années soixante, et derrière le langage qui se veut toujours très cru, se cache généralement un vide ludique qui passe rarement inaperçu.
SCi a pour sa part décidé de cuisiner au Nuoc Nam sa série Conflict et donc de reprendre les mêmes ficelles que celles utilisées dans ses deux Desert Storm. On jurerait presque que SCi a repris quasi tel quel tous les éléments de Conflict : Desert Storm, pour lui coller du Paint It Black des Stones en fond sonore, lui rajouter deux ou trois fougères par-ci par-là et troquer les soldats de Saddam contre des Viet-Congs hargneux. J'exagère à peine, mais l'idée est là. Du coup, on renoue directement avec le gameplay de la série. Logique. Ce gameplay, justement, c'est à la fois ce qui fait la particularité du titre. On aime où on aime pas. Se voulant tactique sans trop l'être, il nous donne un groupe de quatre soldats à diriger. On peut passer de l'un à l'autre à volonté, leur donner quelques ordres assez succincts (suivez-moi, restez en position, feu à volonté, cessez le feu...) ou échanger des objets entre eux. Les possibilités tactiques s'arrêtent là, donc il n'y a franchement pas de quoi rivaliser avec un ténor du genre tel que la série Rainbow Six.
Cet aspect tactique aurait pu être sympa s'il n'était pas complètement écrasé par le poids de l'action bien trop bourrine. Même si sur PC, on ne retrouve pas la visée assistée de la version console (les fameuses armes qui visent toutes seules), il n'en demeure pas moins que le coefficient d'action éclipse totalement les caractéristiques tactiques. On se retrouve à switcher entre ses soldats dans l'unique but de trouver celui qui détient les trousses de pansements pour qu'il soigne ses petits camarades. C'était déjà le cas dans Desert Storm, en fait. On pourrait alors se forcer à se la jouer fine pour profiter pleinement de ce que le jeu a dans le ventre, mais le level design ne nous y pousse même pas. On se dit que les balades dans la jungle doivent être propices à tendre des embuscades à l'ennemi, à le prendre à revers, en se cachant au milieu de la nature luxuriante, mais ce n'est malheureusement pas le cas. La jungle de Conflict : Vietnam est plutôt du genre avant-gardiste puisqu'elle s'inspire directement de ce à quoi ressemblera la jungle amazonienne dans quelques années : une immense autoroute. Dans ces conditions, jouer à cache-cache avec les Vietcongs devient très difficile, et il vaut mieux tenir son fusil toujours armé pour se défendre. Je vous avouerais qu'évoluer dans de telles conditions n'est pas forcément stimulant, et lasse assez rapidement.
Reste donc à voir ce que donne l'ambiance qui, si elle s'avère réussie, pourrait à elle seule sauver le titre. Malheureusement, ce n'est pas de ce côté là qu'il faut chercher pour trouver un point fort à Conflict : Vietnam. Bien sûr, quelques efforts ont été fait, on entend des musiques de l'époque et les bruitages sont réussis, mais question doublage et réalisation graphique, ce n'est pas encore ça. Les voix sont dignes d'un gros nanard, caricaturales à souhait. Quelle que soit la situation, les personnages se sentent obligés de beugler comme des sourds. Ca devient usant dès le tutorial, c'est dire ! Les graphismes sont quant à eux très moyens. Entre les modélisations anguleuses des persos, leur animations très raides et les forts ralentissements qu'il faut subir de temps à autre, on ne rentre jamais vraiment dans l'ambiance, que ce soit en vue à la première ou à la troisième personne. Sur tous les fronts (technique, intérêt, réalisation) Conflict : Vietnam s'embourbe et s'enlise. Là, où on aurait aimé tirer avantages de la jungle pour mettre en place un plan tactique, on se retrouve dans des couloirs à peine tortueux. Si l'approche n'est pas la même, le résultat n'est donc pas très loin d'un Shellshock Nam '67, un titre très moyen qui surfe sur la vague du Vietnam sans apporter rien de plus par rapport à un Vietcong, bien plus convaincant sur ce terrain là.
- Graphismes10/20
Dans la mesure où un choix à été fait pour creuser d'énormes couloirs dans la jungle, on ressent difficilement l'étouffement qu'un tel environnement est censé procurer. Les personnages perdent pas mal de points de charisme en raison de leur modélisation peu détaillés. Les ralentissements n'arrangent rien au tableau, déjà peu flatteur.
- Jouabilité13/20
Merci à la souris, la maniabilité est plus aisée sur PC que sur console, notamment pour viser les ennemis. Malheureusement, le côté trop shooter bête et méchant prend le dessus sur la tactique. Dommage pour un titre qui partait pourtant avec des ambitions tout autres.
- Durée de vie11/20
Ultra répétitif du fait de son gameplay très redondant, on voit les niveaux s'accumuler dans le rétroviseur. Tout comme les anciens jeux de la série, aucun mode multijoueur à l'horizon.
- Bande son9/20
Les voix décrédibilisent l'ambiance en lui donnant un caractère caricatural mal venu. Pour les musiques et les bruitages par contre, pas de problèmes, des bons bruits de flingues et des hits rock des sixties.
- Scénario/
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Niveau ambiance, l'expérience vécue dans un Vietcong prévaut largement à celle offerte par Conflict : Vietnam. La réalisation n'aidant pas, on a du mal à rentrer dans le jeu. Et puisqu'il délaisse son aspect tactique au profit d'une action pas forcément très enrichissante, on peine à lui trouver un réel intérêt. Visiter des autoroutes verdoyantes peuplées de soldats Vietcongs n'a jamais été très stimulant...