Avec Steel Battalion, Capcom frappe un grand coup dans le monde froid et métallique des jeux de méchas. Souvent arcade et rarement simulation, ce genre de titres offre d'habitude l'occasion de se défouler sauvagement sans trop se poser de questions. Ici, l'approche est toute autre. Steel Battalion, c'est un peu le Flight Sim du jeu de mécha, ou plutôt le Combat Flight Sim du jeu de mécha. Oui voilà, c'est exactement ça.
Avant de commencer le test, il faut savoir qu'à l'heure où j'écris cet article, Steel Battalion est déjà disponible depuis environ un an. Seulement quelques centaines d'exemplaires distribués pour toute la France, un prix prohibitif situé aux alentours de 200 Euros... deux raisons qui nous ont fait passer à côté du test lors de sa sortie. Alors pourquoi nous y atteler aujourd'hui ? Tout simplement parce qu'au hasard d'une boutique spécialisée, nous sommes tombés sur un exemplaire du titre. Nous nous sommes alors dit qu'il vous est peut-être déjà arrivé vous aussi de croiser ce jeu sans savoir ce qu'il valait réellement, et surtout sans savoir ce que contenait cette grosse et imposante boîte. Ce qu'elle renferme, c'est justement cela qui fait tout le charme de Steel Battalion et qui au passage justifie la somme rondelette qu'il faut dépenser pour l'acquérir. Ce qu'elle renferme c'est la plus imposante et la plus chouette manette qu'il est possible de trouver aujourd'hui pour un jeu vidéo. Un accessoire gargantuesque composé d'un pédalier, de deux manches à balai et d'une quarantaine de boutons, de switchs et de loupiottes vertes et rouges !
Cette manette se place au coeur de Steel Battalion. L'histoire veut d'ailleurs que Capcom se soit mis en tête de créer le controller le plus démentiel et le plus cool de la planète pour seulement après développer le jeu qui irait avec. C'est ainsi que Steel Battalion a vu le jour et c'est exactement pour cela qu'il est si intéressant, parce que tous les boutons de la manette trouvent leur utilité dans le jeu et l'on obtient du coup une expérience ludique encore jamais offerte sur quelque support que ce soit. Le fait est qu'avec un si gros attirail entre les mains et sous les pieds, on se sent directement investi dans Steel Battalion. Si bien que finalement, la question de savoir si on aime ou n'aime pas les méchas passe totalement au second plan. Ici, c'est plus l'apprentissage de la manette qui importe.
C'est qu'elle n'est pas simple à apprivoiser la bestiole ! Si au niveau des pieds, ça va encore, avec une pédale pour accélérer, un autre pour ralentir et une troisième pour faire des esquives, le tableau de bord pose pour sa part bien plus de problèmes. Pourtant, si on prend le temps de l'étudier attentivement, avec l'épaisse notice posée sur ses genoux, on arrive peu à peu à s'y retrouver. Au bout de quelques heures, on se sent même assez à l'aise avec le levier de vitesse à gauche, les boutons de démarrage à droite, le manche à balai pour diriger les fusils, celui pour faire tourner le robot, tout le dispositif de communication entre les deux, le bouton pour laver la vitre, celui pour déclencher les extincteurs, et même avec le précieux bouton rouge de survie qui permet de s'éjecter de l'appareil avant qu'il n'explose.
Vous en conviendrez, une telle manette ne servirait à rien si le jeu qui l'exploitait n'était pas à la hauteur. Capcom n'a alors pas fait les choses à moitié et Steel Battalion va jusqu'au bout de son trip simulation. Le maniement du robot se veut le plus réaliste possible, si tant est que l'on puisse trouver la conduite d'un robot réaliste. Rien que la séquence de démarrage demande un rituel précis qu'il faut respecter sous peine de faire caler sa machine. Même chose pour la faire avancer, sautez des rapports de vitesse et vous la verrez peiner à se déplacer. De même, prenez un angle trop réduit à grande vitesse et vous la ferez chavirer. Je vous l'avais dit, Steel Battalion s'engouffre pleinement dans la voie de la simulation, se plaçant ainsi diamétralement opposé à Mechassault, pour ne prendre que cet exemple. Bien sûr, il s'agit toujours d'un environnement futuriste, terrain de jeu propice à une guerre des machines, mais l'approche est tellement différente que l'on ressent des sensations totalement inédites.
Je ne dis pas seulement ça uniquement à cause de la manette, mais aussi parce qu'il règne une réelle tension lorsqu'on joue à Steel Battalion. Le niveau de difficulté particulièrement élevé fait de lui-même sa propre sélection naturelle entre les passionnés et les autres, entre ceux qui accepteront de passer des heures et des heures d'apprentissage et ceux qui trouveront le jeu original mais par moment trop extrémiste dans ses choix. Un exemple parmi d'autres : le Game Over. Celui-ci intervient de manière brutale et irrévocable si on ne prend pas soin de sa machine. En fait, si notre robot explose, c'est la fin. Pas de sauvegarde pour se rattraper. Juste un Game Over en travers de l'écran et une immense frustration à encaisser. En fait, le seul moyen de continuer sa partie, c'est de s'éjecter de sa machine avant de finir carbonisé dans le cockpit, et espérer qu'il reste d'autres méchas dans l'entrepôt – on peut en effet acheter de nouveaux robots entre les missions, mais ils coûtent chers et les crédits ne sont pas infinis.
Steel Battalion a aussi pour lui une forte personnalité graphique. On peut certes lui reprocher une technique assez moyenne (un fort taux de clipping et des cinématiques ridicules), il n'empêche que l'ambiance est là. Coincé dans le cockpit de son mécha, la vue du terrain s'entoure de tous les appareils de mesure et de tous les écrans de contrôle qu'on peut imaginer trouver dans un tel endroit. Le champ de vision se trouve donc assez restreint (pour la première génération de robot en tout cas, la troisième nous faisant profiter d'un panorama plus important) mais l'immersion n'en est que plus forte. Le filtre graphique nous donne vraiment l'impression de regarder à travers une vitre. Par moment, ça en devient même photo-réaliste, et on se prend à croire que les robots existent réellement, qu'ils se tiennent là devant nous, prêts à nous pulvériser avec leurs nombreuses armes. Si par bonheur vous avez la chance de posséder une grande télé, alors le trip sera total.
Cela dit, tout aussi réussi qu'il puisse l'être, Steel Battalion n'est pas non plus parfait. Pour un jeu qui se veut le plus réaliste possible, ça fait quand même bizarre de voir son robot bloqué par une palmeraie sans pouvoir l'enjamber, ou encore gêné par une petite colline qu'il pourrait aisément dépasser en levant la patte. On pourrait aussi trouver à redire sur les briefings de missions, assez obscurs et pas toujours explicites sur nos objectifs. Tout cela fait partie des défauts que l'on aurait aimé ne pas voir mais qui n'entachent en rien le plaisir de jeu. Car même si Steel Battalion est difficile, et exigeant, on a de cesse de vouloir y revenir jusqu'à voir la fin de la 23ème et dernière mission. Une fois terminé, je dis pas, mais avant d'en arriver là, vous avez encore beaucoup de chemin à parcourir.
- Graphismes16/20
Effectivement, le clipping est assez monstrueux, et les cinématiques plutôt vilaines, mais le reste du jeu assure plutôt pas mal ! Nous baignant dans une ambiance très marquée par un filtre graphique au top, Steel Battalion a un charme que certains n'hésiterons pas à qualifier d'hypnotique.
- Jouabilité16/20
Il est clair que Steel Battalion exige du joueur beaucoup de persévérance avant de lui permettre de maîtriser pleinement tous les contrôles. Le sentiment de confusion qui règne lors des premières parties s'estompe finalement au profit d'un grand plaisir de jeu. Le tout est de ne pas baisser les bras. A noter que l'imposante manette vendue avec le jeu est indispensable pour commencer une partie.
- Durée de vie14/20
La campagne comprend 23 missions de plus en plus difficiles. Puisqu'il n'existe pas de système de sauvegarde pour reprendre sa partie et que le game over est fatal, vous allez mettre un bon bout de temps avant de voir la fin. Il n'est pas dit que vous y reviendrez ensuite, où alors juste pour le plaisir de ressortir votre grosse manette.
- Bande son13/20
Malheureusement, les briefings de missions n'ont pas fait l'objet d'une traduction. S'il est possible de choisir entre l'anglais et le japonais pour les dialogues, le joueur francophone aura un peu de mal à suivre, notamment lorsque les objectifs vous seront donnés via la radio, dans le feu de l'action. Les musiques d'ambiance parviennent à nous mettre dans le bain, malgré des thèmes pas toujours réussis. Pendant la partie, vous pourrez récupérer des cassettes audio pour vous les passer dans le cockpit.
- Scénario11/20
Les ordres de missions sont souvent très confus et pas forcément originaux non plus. Le gros du travail consistera à sécuriser des zones au moyen de vos gros canons. Dommage que le scénario ne soit pas plus étoffé.
Ce qui nous plaît le plus avec Steel Battalion, c'est de voir que Capcom est allé au bout de ses envies. L'éditeur a voulu produire une manette de folie, il y est parvenu. Il a voulu développer un jeu qui exploite parfaitement l'accessoire, il l'a fait aussi. La combinaison des deux donne un titre unique en son genre chaudement recommandé pour les amateurs de nouvelles sensations.