Sans vous raconter ma vie, Street Fighter 2 (Turbo pour être précis) est un peu mon titre fétiche. En effet, il fut le premier jeu accompagnant le rêve de mes nuits, la Super Nintendo, qui allait devenir par la suite mon terrain favori de RPGiste forcené. Que de souvenirs, et pas des moindres. Souvenez-vous de ces nuits entières à dompter le Hadoken, à tenter de battre Bison avec le nombre d'étoiles de difficulté maximale. Un vrai challenge pour les êtres naïfs que nous étions. Mais maintenant ce temps est révolu, ce que Capcom ne semble pas avoir compris.
Tout le monde dans cette vaste assemblée connaît la signification du mot "adaptation" ou "portage". Non ? En voici donc l'explication. Il s'agit en fait de prendre un soft, de n'importe quel type, sur une console de jeu particulière et de le transférer sans son consentement vers une autre plate-forme ludique sans l'améliorer, ou très succinctement. Nombre d'initiés qualifient cette méthode de déplacée. Si certains cas les font mentir, l'exemple présent ici devant vos yeux corrobore parfaitement leur avis. L'annonce d'une compilation, réunissant tous les Street Fighter 2 sortis à ce jour, à savoir Street Fighter 2 classique, Turbo, Champion's Edition, Super, et enfin Super Turbo. Une sorte de Graal en somme, d'où un nectar nostalgique et subtilement relevé s'écoulerait (conditionnel de rigueur) doucement et suavement. Mais à l'essai, on s'aperçoit bien vite que ce n'est pas du tout le cas, la fraîcheur fruitée se transformant en un goût amer et tenace. Quelles peuvent bien être les raisons de la chute d'un tel monument d'ébène ? L'une d'elle s'apparente à une sorte de paresse représentative de nombre de studios ayant trait au loisir vidéoludique en ce moment. Si vous vous attendiez à connaître une nouvelle révolution émotionnelle à la découverte de vos souvenirs ressuscités devant vous vêtus de la toge du bonheur, vous risquez d'être fortement désappointé. Dans sa grande complaisance, plutôt que de proposer aux fans fidèles depuis plus de 10 ans une refonte graphique légitime, Capcom se laisse aller à nous mettre entre les mains un produit suranné, contenant en son sein les graphismes d'époque, ainsi que les ralentissements faisant partie du patrimoine, en passant par les voix digitales grésillantes. Ces défauts auraient pu aisément passer inaperçus si seulement le contenu s'était aligné sur les attentes de la population d'aficionados de Ryu et consorts.
Une mise en commun de tous les épisodes de la série (incluant le Third Strike (comme dans le prochain Street Fighter : Anniversary Collection) ainsi que les opus Alpha), accompagnée de bonus conséquents et d'un véritable fond se serait sans aucun doute possible fait une place de choix dans le coeur des joueurs adeptes de combats à mains nues. Malheureusement, ce n'est pas le cas, et la version qui nous est proposée est d'une vacuité sans commune mesure. Profitant d'une bande-son "réorchestrée" (avec des synthétiseurs de meilleure qualité en fait), et de la présence du très bon film d'animation intitulé Street Fighter 2 : The Animated Movie qui néanmoins se trouve en anglais non sous-titré, comme bonus, ce pot-pourri se dévoilait pourtant de manière alléchante. La planche de salut qui le soustrait à une noyade en tout point assurée, se révèle être tout simplement l'aspect mythique de la licence employée. Une telle compilation d'une autre franchise que celle-ci n'aurait pas connu le plaisir de se voir plonger dans les méandres d'une PS2. Véritable monument, la série belliqueuse des géniteurs de Megaman, s'est imposée rapidement et de façon relativement incroyable dans le Monde entier, comme vecteur d'un nouveau style de jeu, novateur et passionnant. Et c'est avec affection que l'on retrouve désormais ses plus valeureux guerriers.
Au nombre de 16, ce qui n'est pas énorme, ni suffisant, loin de là, les combattants charismatiques de Street Fighter se retrouvent pour un ultime affrontement. Il est d'ailleurs assez "inquiétant", de par une vision nouvelle de notre environnement direct, de s'apercevoir des clichés véhiculés par ces personnages, et par leur décor respectif. Notre enfance revenant des tréfonds de nos souvenirs à notre vue, s'est vue bercée d'approximations culturelles impressionnantes. Les russes boivent tout le temps (le stage de Zangief), ils sont massifs et barbus, les chinois sont restés dans un système féodal, les américains sont tous des militaires épris de jeunes femmes blondes (surtout pas brunes), les indiens (habitants de l'Inde) pratiquent une ascèse très stricte et ne pèsent qu'environ 40 kilos, tout un microcosme utilisant les plus grandes idées préconçues dans un seul DVD, qui dit mieux ? Heureusement, rien de tendancieux là dedans, tout était mis en oeuvre pour représenter de la manière la plus simple qui soit une atmosphère inscrite dans l'esprit des personnes lorsque l'on évoque tel ou tel pays. Mais cet aspect gène quand même un tant soit peu dans notre 21ème siècle fraîchement débuté (pas en beauté en tout cas). Les novices comme les maîtres de la discipline martiale proposée par Capcom, trouveront rapidement leurs marques. D'une part parce que les mouvements s'avèrent très simples d'accès et peu nombreux, trop peu nombreux peut-être, et d'autre part parce qu'ils n'ont pas changé. En fait, avant chaque pugilat, il vous faudra choisir votre personnage parmi la palette hétéroclite proposée, mais pas seulement. Un menu inédit fait en vérité son entrée, vous octroyant la possibilité de définir le style de votre avatar. Sera t-il le Ken de Street Fighter 2 Turbo, ou celui de Champion's Edition ? Bien entendu celui-ci bénéficiera des améliorations consécutives à son époque. N'espérez par exemple pas exécuter des boules de feu avec la Chun-Li de l'édition classique. De même, les artworks représentant les différents visages se trouvent modifiés selon l'époque. Toutefois l'un des plus importants écueil demeure en ces lieux.
Imaginons que vous décidiez de réduire à néant le dentier d'un Blanka issu de SF2 première version avec une Cammy s'extirpant de Super SF2. Un combat inédit, certes, mais qui impose un poids non négligeable, la jauge de puissance. Cette dernière se remplit au fur et à mesure des coups donnés et reçus, permettant une fois pleine de déclencher une attaque dévastatrice pour le pauvre corps de votre opposant. Cependant, dans le cas présent, l'être verdâtre et électrique ne dispose pas de cet atout. Il ne pourra donc pas participer à jeu égal avec vous. Ce qui aboutit en mode Versus au fait qu'il sera très rare que l'un de vos amis choisisse l'un des anciens guerriers dans le but d'asseoir sa puissance sur vous. Vous préférerez certainement utiliser les derniers en date. Si l'on suit cette logique, donc, on se rend aisément compte que le principe même du titre ne convainc pas du tout, posant la question de la légitimité de cet opus "ultime". Bien entendu, l'âpreté des combats est toujours présente, la technicité et la précision se révèlent encore des valeurs sûres d'une implication sans borne, le plaisir est à jamais présent, mais on ne peut s'empêcher de ressentir une certaine colère à la vue de ce qu'aurait pu effectuer Capcom, dans l'optique de contenter ses fans et nos pas ses économistes. L'absence de modes de jeu intéressants, et surtout la communication outrancière étant donné la réelle qualité de l'édition ne fait au final que souligner la faiblesse de ce coup marketing. Pourtant, il ne fait pas de doutes que les nostalgiques de la difficulté exacerbée et des quarts de cercle en pagaille ne laisseront pas passer cette réunion de famille. Allez, j'y retourne, mais pas d'aussi bon coeur qu'avant.
- Graphismes9/20
Difficile de se faire un véritable avis sur la question. Il est vrai que la qualité graphique s'avère celle d'une Super Nintendo, ou d'une Megadrive à la rigueur, mais on ne peut décemment pas comparer cet aspect aux standards actuels, ce serait inutile et idiot. Pour l'époque c'était véritablement stupéfiant. Par contre, Capcom aurait pu faire un effort, et affiner les sprites, les faisant profiter de la puissance de la PS2. Dommage vraiment.
- Jouabilité15/20
Une prise en main immédiate et intuitive qui n'a d'égal que le plaisir ressenti lors de la maîtrise totale d'un personnage. Néanmoins, la manette de la PS2 ne se prête pas vraiment à cet exercice, et il est énervant (mais bon c'est d'époque) de se faire attraper au corps-à-corps alors que l'on se trouve à trois mètres d'un opposant. La maniabilité 2D s'impose encore et toujours comme une référence.
- Durée de vie8/20
Si vous désirez terminer le jeu avec tous les personnages, dans le niveau de difficulté le plus haut, vous n'êtes pas prêt de voir la fin de vos longues nuits blanches. Néanmoins étant donné le peu de modes disponibles vous ne chercherez pas spécialement à continuer l'expérience. En plus vous ne pouvez pas sauvegarder, donc... A noter la présence plus que notable du film d'animation vraiment intéressant : Street Fighter 2 : The Animated Movie, qui vous fera passer un très agréable moment devant votre petit écran. Si seulement il avait été traduit, sous-titré, et non censuré...
- Bande son8/20
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- Scénario/
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Ayant créé un petit soubresaut nerveux dans le coeur des fans lors de son annonce, Hyper Street Fighter 2 : The Anniversary Collection, semblait combler les attentes et les fantasmes de toute une génération. Malheureusement, cette patience fut vaine au regard du produit final. Vide et peu ou pas légitimée, cette production marketing, exhalant une bonne odeur de travail peu appliqué semble irréelle, tellement ce qu'elle aurait pu comporter semblait immense à la vue de ce qui nous est posé devant les yeux. Le symbole de la désillusion. Reste tout de même l'âme de Street Fighter, ses combats sur le fil du rasoir, son challenge conséquent, la précision de son gameplay, et surtout son plaisir de jeu si particulier. Maintenant à vous de choisir si vous désirez encourager Capcom dans cette voie où si vous cédez à une nostalgie bien naturelle. Hadoken !