Qui n'a jamais regretté de s'être réveillé au beau milieu d'un doux rêve sans pouvoir jamais en connaître la suite ? De la même manière, combien de joueurs ont regretté d'avoir dévoré d'une traite l'aventure de Syberia, se retrouvant alors obligés d'attendre pratiquement deux ans pour découvrir la suite ? On est tous comme ça, quand quelque chose nous plaît, on aimerait que cette chose ne finisse jamais. Pourtant, tout a une fin, même l'incroyable voyage de Kate Walker en direction des contrées gelées de Syberia. Son voyage se termine, mais les rails qui la guident lui réservent encore de beaux moments.
On a quitté Kate Walker alors qu'elle avait fait son choix, celui de suivre Hans jusqu'au bout de son rêve, et d'aider le vieil homme à terminer sa vie heureux, lui qui a passé la sienne à rendre le quotidien de son entourage un peu meilleur. On la retrouve exactement au même endroit, dans le train qui la conduit vers l'inconnu, vers le nord, vers Syberia, vers les mammouths. Comment pouvait-elle un jour penser qu'elle serait dans ce train, elle, l'avocate new-yorkaise arrivée il y a quelques jours à Valadilène dans les Alpes françaises pour racheter une usine d'automates ? Elle qui s'est ensuite lancée à la recherche de Hans, l'unique héritier de la fabrique, sans même considérer le périple qui l'attendait ? Son voyage l'a conduit à travers l'Europe, toujours plus à l'est, lui permettant de mieux comprendre la vie de Hans au fil de géniales inventions que ce dernier a laissé partout où il a séjourné. A la fin de Syberia 1, Kate avait rejoint Hans, et décidé de partir dans ce train filant vers le nord, laissant définitivement derrière elle ce pour quoi elle était venue en Europe. Elle conduirait Hans jusqu'à Syberia et verrait avec lui les fameux mammouths. Aujourd'hui, on est heureux de la retrouver pour découvrir ce qui l'attend.
La seconde partie du voyage de Kate Walker s'inscrit directement dans la continuité de ce qu'on a déjà vécu en sa compagnie. Le train qui les emmène, elle, Hans et l'automate Oscar, quitte la civilisation "moderne" pour les terres gelées du nord. Loin des villes, l'ambiance de Syberia 2 se veut logiquement plus froide, et elle l'est effectivement. Les décors, toujours aussi magnifiques, héritent d'une beauté glacée nous faisant une nouvelle fois réaliser que Kate s'est embarquée dans un périple insensé, qui la dépasse parfois. Paradoxalement, au milieu de tout ce blanc et de tout ce froid, le jeu prend une dimension peut-être plus chaleureuse, en tout cas plus humaine, laissant transparaître davantage de sentiments et accentuant notamment le lien qui uni désormais Kate à Hans. Le rêve de l'inventeur est devenu un rêve commun, ils iront ensemble le réaliser, chacun ayant besoin de l'autre pour y arriver.
Mis à part des décors plus naturels, Syberia 2 nous fait renouer avec l'ambiance globale du premier volet. On est toujours séduit aussi bien par le scénario que par la réalisation. Comme dans le premier épisode, l'histoire suit son cours tranquillement. Le rythme est effectivement très lent, mais il convient parfaitement à un jeu d'aventure, laissant le temps au joueur de s'imprégner de la beauté de chaque lieu, du caractère de chaque personnage et de la logique de chaque énigme. A ce sujet, Syberia 2 ne renie pas son héritage de jeu dit "facile". La solution de chaque puzzle n'est jamais longue à trouver, plaçant du coup le titre à la frontière entre l'aventure pure et dure et l'histoire interactive. Disons qu'il s'agit d'un jeu qui préfère offrir à ses joueurs une belle et riche histoire, plutôt que des maux de têtes découlant d'énigmes trop complexes à résoudre. C'est en tout cas un choix tout à fait assumé, un parti pris qui lui donne un cachet particulier, calme et reposant.
Tout au long du jeu, on est bercé par de fabuleuses mélodies, encore meilleures que dans le premier volet. Les thèmes explorent toujours le même style de musiques venues de l'est, avec des orchestrations magnifiques, largement dignes d'un long métrage. L'ensemble des acteurs qui composent le casting de voix fait du très bon travail. Les dialogues sont bien joués et si je puis me permettre, moins soporifiques que ceux du premier Syberia, car moins longs et moins nombreux. Concernant l'autre aspect de la réalisation, la partie graphique, je reste sans voix. Les environnements sont absolument sublimes. L'imagination débordante de tous les artistes ayant participé à la création de Syberia 2 nous permet d'admirer de splendides écrans tout au long du voyage. Le design des décors, la finesse du trait et des textures, les petites animations pour insuffler de la vie à ces écrans fixes, la cohérence de l'ensemble, c'est sûr, Syberia 2 a encore gagné en beauté, et nous en émerveillement.
Une chose qui n'a pas changé par contre : le principe même du jeu. Syberia conserve un système point and click très sobre mais performant. Par rapport au précédent jeu, les plus observateurs remarqueront que le curseur, lorsqu'il désigne une sortie, inclus désormais une petite flèche pour indiquer de quel côté l'issue se trouve. Cela peut être pratique lorsque plusieurs zones se frôlent, ne serait-ce que pour repérer d'un coup de souris s'il y a plusieurs chemins à cet endroit. Le reste n'a absolument pas changé. L'inventaire est fidèle à lui-même ainsi que la manière de l'utiliser. Les joueurs du premier Syberia trouveront donc instantanément leurs marques en installant cette suite.
Syberia 2 est donc bien le jeu que l'on attendait tous. Une suite à la hauteur de nos espérances qui nous emmène doucement mais sûrement vers la fin du voyage. Le dénouement, sublime, ne pose finalement qu'un seul problème : il nous oblige à quitter Kate Walker... Comme beaucoup de séparation, c'est avec tristesse qu'on laisse la new-yorkaise, quand même bien heureux d'avoir vécu à ses côtés de magnifiques moments.
- Graphismes17/20
Noter la technique ou l'artistique ? Pour moi, la question ne se pose même pas. Syberia 2 est beau, un point c'est tout. On s'en fiche que les personnages ne soient pas toujours parfaitement intégrés aux décors, ou qu'il n'y ait pas d'ombre très détaillées à leurs pieds, le titre parvient à dégager suffisamment de personnalité avec ses environnements somptueux et riches en détails.
- Jouabilité15/20
Du point and click tout ce qu'il y a de plus simple à prendre en mains. Le seul ennui avec la jouabilité c'est qu'il ne soit pas possible de faire courir Kate plus vite. Les allers retours sont fréquents et on perd souvent du temps dans ce genre de déplacements.
- Durée de vie12/20
La durée de vie se situe exactement dans la même moyenne que le premier volet. Puisque le jeu est facile, à nous de nous limiter en le savourant petit à petit pour ne pas le terminer trop rapidement.
- Bande son17/20
Rares sont les bandes-son à être aussi maîtrisées. Les musiques bénéficient d'une qualité de composition et d'orchestration qui fait réellement plaisir à entendre. Puisqu'en plus elles savent se faire discrètes et que les voix sont dans le ton, l'aspect sonore de Syberia 2 s'avère plus que réussi.
- Scénario16/20
Je n'ai volontairement rien dit dans ce test concernant le scénario de Syberia 2. Le plaisir de la découverte n'en sera que plus grand. Si vous avez aimé le premier tome, vous adorerez cette suite, qui clôt, apparemment, le voyage de Kate vers Syberia. Même si un résumé du premier Syberia est proposé, il est vivement recommandé d'y jouer avant de se lancer dans le 2. Pas forcément pour le scénario, seulement pour le plaisir.
Il nous aura fallu patienter deux années avant de partager la fin des aventures de Kate. L'attente est largement récompensée par un excellent jeu d'aventure pile poil dans la continuité du premier. Si vous ne connaissez pas Syberia, il est grand temps de vous y mettre, en commençant de préférence par le début du voyage, histoire de ne rater aucun détail de ce formidable conte vidéoludique.