L'infiltration est un art. Un art que certains s'amusent pourtant à rabaisser dans des jeux bas de gamme à l'intérêt insignifiant. Heureusement, le maître de la discipline consent à venir nous redonner une leçon de ce qu'est vraiment l'infiltration. Faites place, Sam Fisher is back !
Il n'aura pas fallu attendre longtemps avant de retrouver un Sam Fisher en plein forme, prêt pour une nouvelle mission de la plus haute importance. Par chance, on est invité à le suivre ce qui nous permet de constater qu'en un an et demi, notre homme n'a absolument rien perdu de son amour de la discrétion, et qu'il a même eu le temps de peaufiner deux, trois nouvelles techniques qu'il exécute aujourd'hui avec toute la classe qui le caractérise. La première nouveauté porte le doux nom de 360° et consiste à passer une porte sans être repéré, comme une ombre en quelque sorte. Plaqué contre le mur près de la porte, Sam effectue alors un mouvement rapide et imperceptible pour se retrouver en une fraction de seconde de l'autre côté de l'ouverture. Concernant les autres nouvelles techniques il s'agit avant tout de déclinaisons de ce qu'il savait déjà faire avant. On a ainsi droit au semi split jump et au cochon pendu. Le premier sert essentiellement dans les passages étriqués où le grand écart facial à deux mètres au-dessus du sol "VanDamme Style" n'est plus possible. Cela dit que ce soit le split jump ou le semi split jump, cela revient au même. La seule différence c'est qu'avec le semi, Sam peut alors enchaîner avec un autre saut pour atteindre des passages surélevés. Malheureusement, ce mouvement se révèle aussi utile que le split jump original et les occasions de l'utiliser se feront bien rares. On termine donc avec le cochon pendu qui permet simplement à Sam de se suspendre par les pieds à une canalisation et de sortir son arme pour viser la tête en bas. Un mouvement pas vraiment utile non plus mais très rigolo à utiliser.
Il serait cependant malhonnête de limiter les évolutions du jeu à ces simples mouvements inédits. En effet, Splinter Cell Pandora Tomorrow c'est plus que ça, c'est même beaucoup plus que ça ! En fait, depuis le premier volet, on sent très bien que les développeurs n'ont pas chaumé pour offrir une expérience de jeu plus complète avec toujours comme but principal le souhait de pousser le trip infiltration à un niveau supérieur. Déjà, le scénario gagne en intensité. Mieux construit, on se sent naturellement mieux impliqué, plongé dans des niveaux et des cinématiques à la mise en scène impeccable. Splinter Cell faisant partie de la franchise Tom Clancy, l'intrigue se déroule bien évidemment dans un climat de crise géopolitique. Dans Pandora Tomorrow, la crise vient du Timor Oriental,théâtre d'une prise d'otages musclée menée par un certain Sadono. Cette action spectaculaire intéressera au plus haut point la NSA qui décidera d'envoyer Sam sur les lieux afin de découvrir ce que cachent ces événements. Après cette escapade en Indonésie, la piste à suivre passera entre autres par la France et puis Israël assurant déjà une bonne diversité d'environnements et de situations.
Les sensations de jeu, si elles restent assez proches du premier volet - on éprouve toujours un immense plaisir à se déplacer dans l'ombre, à alterner entre les visions normale, thermique et infrarouge, à assommer les gardes, à cacher leur corps - se trouvent tout de même plus riches et plus palpitantes encore. Grâce à un level design peut-être plus inspiré, on n'a jamais l'impression de faire deux fois la même chose. C'est d'ailleurs assez fort puisque les niveaux sont finalement linéaires quand on y pense. Les situations nous sont présentées dans un ordre bien établi et pour caricaturer, on pourrait presque dire que chaque zone n'est en fait qu'un grand couloir à suivre pas à pas. Cependant, et c'est ça la grande force de Pandora Tomorrow, le jeu parvient à se renouveler assez régulièrement. Sam se retrouve bien souvent dans des situations encore inédites comme si les créateurs avaient voulu à tout prix se détacher de la rengaine habituelle à ce type de jeux. Ainsi, on trouvera des missions en environnements très particuliers (dans un train, un sous-marin) et une bonne poignée de séquences insolites comme par exemple la petite cour qu'il faut traverser en restant sous le spot d'un projecteur pour tromper la vigilance du garde équipé de lunettes à vision nocturne.
L'IA a subi quelques modifications également, toujours dans le but de parfaire le titre en le rendant plus crédible. Ainsi, les gardes se montrent plus méfiants et n'auront de cesse de vous traquer si par malheur vous leur montrez le bout de votre nez. Même tapi dans l'ombre, ils peuvent vous repérer et donc faire échouer la mission. Le système des trois alarmes propre au premier volet est ici remplacé par trois niveaux de sécurité. Si par exemple vous vous laissez surprendre par une caméra ou alors si vous faites un peu de bruit à proximité d'un garde, le niveau 1 de sécurité peut être enclenché. Les ennemis porteront alors des gilets et se montreront plus méfiants. Si par contre quelqu'un vous voit, alors le niveau 2 est mis en place. Là, c'est carrément l'enfer pour échapper aux gardes. Mais ce n'est pas impossible et si vous parvenez à vous faire oublier suffisamment longtemps, le niveau d'alerte pourra retomber, vous donnant alors une autre chance. En fait de chance, je devrais plutôt parler d'intelligence car le titre ne laisse pas vraiment de place au hasard. Tout est fait pour que vous mesuriez le risque de chaque action. Le câble optique devient un réflexe avant l'ouverture d'une porte, de même que les visions thermique et nocturne. On avance pas à pas, en vérifiant tout autour de soi s'il n'y a pas un danger qui traîne (caméra, mine, détecteur de mouvements ou que sais-je encore). Comme le dit le jeu lui-même, la paranoïa est un maître mot quand il s'agit d'infiltration. C'est pas faux. Seul sur le terrain, Sam ne peut compter que sur les précieux conseils que lui transmettent directement ses supérieurs, et sur la panoplie de gadgets qui l'accompagnent. Des gadgets pas toujours au point d'ailleurs, à l'image du brouilleur de caméra qui m'aura posé bien des soucis et dont je me suis finalement passé. Enfin, moi et les gadgets...
Si la réalisation ne délivre peut-être plus la même claque qu'il y a un an, elle ne se prive pas de nous impressionner au plus haut point. Disons juste que cette fois, on s'y était préparé. La gestion des lumières dynamiques - et donc forcément aussi des ombres dynamiques - est sans nul doute ce que l'on fait de mieux à l'heure actuelle. Que ce soit en intérieur ou en extérieur, on reste scotché devant chaque décor, devant la finesse des textures, le nombre de détails affichés (on voit même les toiles d'araignée se balancer au souffle du vent) et devant la parfaite animation de ce monde virtuel. L'aspect sonore n'est franchement pas en reste. Rares sont les jeux à gâter de la sorte nos oreilles. Le doublage est à ce titre parfaitement assuré donnant une personnalité bien marquée à chaque personnage. On retrouve bien évidemment la voix grave et posée de Sam qui lui donne tout le charisme et l'assurance qu'on peut attendre d'un tel personnage. Pour le reste du son, c'est tout aussi bon. Les ambiances extérieures traduisent superbement les environnements traversés. Dans les rues d'un village, on peut entendre des chiens aboyer au loin, dans les couloirs d'un labo, ce sont les ronronnements des ordinateurs qui nous accompagnent. Les musiques servent également le jeu en s'adaptant d'une part aux situations mais aussi aux environnements avec des arrangements spécifiques à chaque niveau. Du grand art !
Et attendez, ce n'est pas tout, il me reste encore à vous parler du multijoueur ! Oui, vous avez bien lu, Splinter Cell possède désormais son mode multijoueur, enfin SES modes multijoueur puisque via le Xbox LIVE ou en réseau local, Pandora Tomorrow permet d'opposer jusqu'à quatre joueurs sur trois modes distincts. Alors qu'il aurait été facile et prévisible d'inclure des deathmatches et des captures the flag en bataille (ce qui n'aurait pas spécialement collé à l'esprit Splinter Cell, il est vrai), Ubisoft a choisi la voie de l'inventivité. Après des séances de brainstorming que l'on imagine intensives, les développeurs sont arrivés avec l'idée d'approfondir l'une des parties du scénario, celle où une unité d'élite est chargée de retrouver des containers de virus. Ainsi, le multi oppose deux équipes : les Shadownet et les Argus. Shadownet représente une unité proche d'Echelon, ses membres agissent pratiquement de la même manière que Sam Fisher à la différence qu'ils sont un peu plus rapides et qu'ils ne disposent pas d'armes léthales. Leur but est de trouver les containers et de les neutraliser afin d'éviter que le virus ne se répande. On joue un Shadownet de la même façon que Sam, en vue à la troisième personne et en profitant du même type de vue infrarouge et thermique. Face à eux, le groupe de mercenaires Argus. En contrôlant l'un d'eux, on passe alors obligatoirement en vue à la première personne, rapprochant les sensations à celles que procure un shooter. Privé de night google, les Argus ont à la place un détecteur de mouvements et un détecteur électromagnétique. Ils peuvent aussi tuer directement grâce à leurs armes mais ne profitent pas d'une vision globale de l'environnement en raison du type de vue imposé. En faisant s'affronter deux équipes aux spécificités bien distinctes, mais sans jamais avantager l'une ou l'autre, les modes multi vont à coup sûr devenir une référence du genre, et ça ne m'étonnerait pas qu'ils participent à booster les abonnements Xbox LIVE de la console. Splinter Cell Pandora Tomorrow est donc bien la suite que l'on attendait tous. Le scénario mieux construit, la réalisation toujours aussi impeccable, les niveaux variés ou le multijoueur pour le moins original... autant d'ingrédients qui font du titre la nouvelle référence de l'infiltration. Quand on sait que l'ancien maître étalon n'était autre que le premier volet, on ne peut que s'incliner.
- Graphismes19/20
Même si on était préparé à découvrir un jeu magnifique, on reste admiratif devant une telle qualité visuelle. Le travail effectué sur les ombres et les lumières force le respect. Tout est géré en temps réel, et avec le nombre de détails à l'écran, on se demande comment le jeu fait pour tourner sans ralentissement. Les animations du personnage principal sont une nouvelle fois parfaitement coulées. Sam a vraiment la classe.
- Jouabilité17/20
Les actions de Sam sont intelligemment réparties sur les touches de la manette. Une fois le niveau de tutorial passé, diriger Fisher se fait donc de manière totalement intuitive.
- Durée de vie17/20
Entre le premier épisode et cette suite, on peut constater que le niveau de difficulté a quelque peu grimpé. D'où, une durée de vie plus élevée. Parallèlement au mode solo, le multijoueur prolonge le plaisir avec des heures de jeu en perspective. Si vous n'avez pas le LIVE, voilà une bonne raison de vous y mettre.
- Bande son18/20
Absolument sublime. Les voix donnent littéralement vie aux personnages. Tout le caractère posé de Sam se ressent au travers de sa voix grave (le même que Schwarzenegger) lui donnant du coup pas mal de charisme. Côté bruitages et musiques, on n'est pas en reste puisque quelque soit le lieu, l'immersion est totale.
- Scénario15/20
Splinter Cell reprend les thèmes chers à Tom Clancy. Le point de départ n'est pas vraiment original, mais au fil des niveaux, Sam visitera plusieurs pays et se verra confronté à plusieurs situations totalement inédites.
Encore meilleur que le premier Splinter Cell, Pandora Tomorrow réalise la performance de nous surprendre encore tout en respectant les bases établies il y a plus d'un an. Que ce soit pour son mode solo ou pour le multijoueur, ce titre mérite votre plus grande attention. C'est ce que l'on appelle une réussite totale et indiscutable.