« Prend garde aux souhaits que tu formules, ils pourraient bien se réaliser ». Un avertissement qui aurait pu changer la face d'Evil Twin si le jeune Cyprien en avait eu connaissance. Une fois encore, un héros naïf est victime de sa folie, de ses phobies et de son imagination. Cyprien, l'orphelin traumatisé par la mort de ses parents, perd toute notion des réalités lorsque ses amis le convient à fêter avec eux son anniversaire, ravivant dans son esprit le souvenir terrible de la disparition des seuls êtres qui lui assuraient encore une prise dans le réel. Le garçon rebelle en vient à souhaiter la mort de ses amis sans s'apercevoir que les quatre orphelins ont déjà un pied dans la tombe, ou plutôt dans le néant. Cyprien a tout juste le temps de s'apercevoir que tout bascule avant d'être projeté malgré lui dans les dédales les plus sombres de son esprit. Ne subsiste alors plus que l'espoir de sortir un jour de ce labyrinthe inextricable où il est à l'évidence piégé pour toujours. Mais comme toute chose a son contraire, toute situation a aussi une issue que découvrira Cyprien au fil de sa progression avec l'aide d'alliés inattendus. C'est ainsi que l'on incarne un personnage torturé, inconscient des pouvoirs dévastateurs qui sont en lui et des dangers qui l'attendent sur la voie qui mène vers le réel. Evil Twin, ce sont les chroniques de ce jeune garçon pas comme les autres qui n'aura que ses rêves pour combattre ses pires cauchemars.

L'ambiance s'installe dès les premières minutes alors que l'on découvre le maniement classique d'un enfant qui évolue comme n'importe quel personnage héros d'un jeu de plate-forme 3D. Armé seulement d'un lance-pierres et capable de sauter pour écraser ses ennemis, Cyprien trouvera le côté positif de son imaginaire dans sa capacité à se transformer en Super-Cyp, super-héros aux pouvoirs improbables mais ô combien efficaces, mais aussi dans la présence d'alliés inattendus qui l'aiguilleront dans sa quête vers la réalité. La dimension obscure se traduira dans tout le reste : les créatures monstrueuses qui vous assaillent constamment, les personnages étranges aux intentions douteuses, et les gigantesques environnements surréalistes qui regorgent de pièges traîtreusement dissimulés.

En pratique, c'est une vaste quête qui vous attend, avec huit contrées scindées en 76 niveaux qui vous conduiront de l'Ile de la D'mie jusqu'à l'île de David. Autant de territoires dangereux qui feront appel tantôt à votre dextérité, tantôt à votre réflexion pour progresser. Les environnements sont vastes et l'on ne sait pas toujours où il convient d'aller, ce qui apporte au jeu une dimension exploration non négligeable. Si les contrôles se révèlent nettement plus jouables sur PS2 qu'avec un clavier, la maniabilité souffre encore de quelques approximations qui perturbent le déroulement des parties. Lors des sauts par exemple, le mouvement s'arrête brusquement lorsque vous lâchez le stick analogique et le personnage retombe verticalement, contrairement à la majorité des jeux de plate-forme où le saut se prolonge systématiquement suivant un arc de cercle en fonction de la pression que vous avez exercée. Même les habitués des jeux de plate-forme devront donc « réapprendre » à jouer, d'autant que les occasions de faire preuve de dextérité pullulent tout au long du jeu. Les caméras sont toujours quelques fois agaçantes et requièrent une parfaite maîtrise du stick analogique. Quelques défauts que l'on arrivera toutefois à pallier avec un peu d'acharnement.

Comme dit précédemment, Cyprien pourra collecter des bonus qui lui conféreront certains pouvoirs à condition de s'approvisionner régulièrement en énergie. Dommage que la jauge se vide en permanence même lorsque vous n'utilisez pas la transformation ; résultat, on prend moins le temps d'examiner l'architecture des environnements et l'on se retrouve bien souvent perdu. Mais si la progression se révèle finalement sans surprise, c'est surtout pour son atmosphère étrange et sombre que le titre de In Utero marquera les esprits. On se retrouve projeté dans un univers improbable à mi-chemin entre un American Mc Gee's Alice et la Cité des Enfants Perdus. Evil Twin avoue bien des similitudes avec le titre d'EA Games, non seulement dans la narration (des enfants tout deux livrés à leurs pires cauchemars et qui font naître de leur imaginaire un monde absurde et terrifiant), mais aussi dans la progression. On a donc affaire à un titre destiné à un public mature, qui mise tout sur l'ambiance avec une mise en scène bluffante et une bande-son totalement immersive. Pourtant, ceux qui connaissent American Mc Gee's Alice ne pourront s'empêcher de reprocher à Evil Twin de ne pas aller assez loin dans l'aspect gore et malsain. L'univers est envoûtant mais peut-être pas suffisamment glauque pour réellement convaincre. Reste un jeu particulièrement soigné et suffisamment original pour satisfaire pleinement une grande majorité des joueurs sur Playstation 2.