Après un somptueux épisode 2017, Codemasters revient cette année avec F1 2018, qui a donc la mission de corriger les quelques menus défauts de son prédécesseur. Une tâche pas aussi évidente qu’elle n’en a l’air, à vrai dire. Pour autant, le studio anglais s’en sort les doigts dans le nez, avec un nouveau jeu de course à même d’emballer tous les fans de Formule 1. On finirait presque par s’y habituer.
Depuis quelques années, la série F1 de Codemasters a le vent en poupe. Il faut dire qu’après une période de vache maigre, pour ne pas dire de vache complètement morte de faim, le studio basé à Southam avait réveillé les fans de leur torpeur avec un épisode 2016 très solide. Et depuis, il enchaîne les uppercuts, le dernier en date étant ce F1 2018. Plus joli, plus technique, plus riche, les superlatifs ne manquent pas pour ce nouvel opus qui va vite faire oublier son grand-frère.
Un moteur flambant neuf
On s’en était rendu compte lors de notre aperçu, et cela s’est confirmé avec la version complète du titre: les développeurs ont remanié leur moteur de jeu et sur la partie strictement visuelle, cela s’en ressent. Sans dire que le fossé entre 2017 et 2018 est énorme, F1 2018 offre une évolution plus qu’appréciable. Si l’on pouvait reprocher à son aîné une certaine… sécheresse graphique, disons, son petit frère débarque tout pimpant, la texture vive, l’effet de lumière racé. Bien entendu, on est encore loin des cadors du genre, mais cela fait son petit effet. Forcément, c’est lorsque l’on possède une Xbox One X ou une PlayStation 4 Pro que l’écart est le plus important, puisque le jeu s’affiche alors en 4K, à 60 images par seconde ; avec ses couleurs plus marquées, ses textures léchées et de nombreux effets très réussis, F1 2018 possède enfin un écrin à la mesure du joyau qu’il protège. Bien évidemment, c’est sur PC que le résultat est le plus impressionnant : on peut voir le grain de l’asphalte, les imperfections des gants du pilote… Seul bémol finalement, les rétroviseurs, qui diffusent une image en faible résolution. Pour peu qu’on ait l’œil, on ne finit par ne voir plus que ça. Durant notre test, nous avons également remarqué quelques légères saccades et un peu de tearing, mais cela devrait être corrigé très rapidement grâce à un petit patch des familles. Espérons que la version Xbox One bénéficiera de la même attention puisque curieusement, et même sur Xbox One X, les différentes cinématiques du jeu souffrent d’un framerate assez faiblard. Impossible de ne pas le remarquer quand l’œil s’est habité aux douces 60 images par seconde que délivre F1 2018 le reste du temps.
Une carrière toujours plus riche
Le cœur du jeu de F1 2018, comme l’année précédente, c’est son mode Carrière, qui devrait à nouveau régaler les fans du genre. Il est en fait très similaire à celui de l’année passée, mais compte sur quelques petites nouveautés supposées enrichir l’expérience. Dès les premières secondes, on est en terrain connu : après avoir créé son pilote, il faut choisir une écurie, ce qui signifie que cette année encore, vous pouvez débarquer chez Mercedes et faire découvrir les joies du chômage à Lewis Hamilton. Bon certes avant que vous ne choisissiez votre écurie, F1 2018 joue cartes sur table : chacune a un niveau d’exigence qui lui est spécifique, alors évaluez judicieusement votre niveau avant d’aller jouer les Schumacher du dimanche chez Ferrari. Certaines équipes ne sont pas venues pour équeuter des haricots et n’auront que faire de vos problèmes d’adaptation : à la fin de la saison, c’est la victoire sinon la mort. Enfin peut-être pas la mort, car cette année, le système de contrat a bien évolué ; vous signez pour un certain temps et en fonction de vos performances, vous êtes en droit de demander plus à votre employeur. À l’inverse, si vous ne répondez pas aux exigences, vous pourrez bien être obligés d’aller voir ailleurs, par exemple dans une écurie moins cotée. À chaque signature, votre employeur vous proposera une série d’objectifs (telle place en qualification, telle place sur le podium final…) et éventuellement quelques bonus qui affectent le département R&D. Vous pouvez obtenir jusqu’à quatre bonus, mais autant dire que vous avez intérêt à faire vos preuves au préalable. Le système est donc plutôt amusant et l’on est souvent tenté de promettre beaucoup, au risque de sous-performer ensuite. C’est une sorte de paris plutôt amusant, qui force à se dépasser constamment.
La R&D revient en 2018, avec un arbre de compétences légèrement plus dense. Pour les amateurs de réglages, c’est le paradis : chaque nouveauté produite par les ingénieurs de l’écurie devra être dûment testée sur le circuit. Ce qui aura probablement un impact sur vos réglages, qu’il faudra là encore parfaire à coups d’essais sur le terrain. Les débutants pourront opter pour les conseils de l’ingénieur-en-chef : il suffit d’appuyer sur un bouton pour que celui-ci propose une amélioration qui pourrait aider la voiture. Sur les quelques tests que nous avons pu mener, ses conseils ont toujours été pertinents. Comme nous le disions précédemment, le contrat joue ici un rôle puisqu’au moment de le négocier, vous pouvez obtenir certains avantages non-négligeables : développer plusieurs pièces en même temps, accélérer le temps de conception… De quoi, là encore, pousser le joueur à faire toujours mieux, pour pouvoir négocier des contrats plus intéressants.
En revanche, petite déception sur le retour des interviews et le système de réputation qui lui est associé : après chaque course, vous serez interviewée par une journaliste, avec la possibilité de choisir entre plusieurs réponses. Ces dernières permettent de déterminer votre profil, entre fair-play et mise en avant. En somme, soit vous êtes l’employé modèle qui vante les mérites de son patron et des ingénieurs de l’écurie, soit vous êtes une rockstar et ne tarderez pas à parler de vous à la troisième personne du singulier. Le système est donc un peu binaire, et c’est dommage : dans la mesure où certaines écuries acceptent plus facilement certains types de profil, on aurait apprécié que le profilage puisse être affiné, afin d’enrichir le système de négociation, lors de la signature d’un nouveau contrat. Les questions de la journaliste sont d’ailleurs parfois un peu à côté de la plaque. Difficile de ne pas pouffer de rire lorsqu’elle remarque que la course « n’a pas été facile » et que l’on a rencontré « de nombreux problèmes »… alors qu’on l’a remporté avec presque 8 secondes d’avance et sans rencontrer le moindre souci technique. C’est dommage car cette fonctionnalité est présentée comme l’une des grosses nouveautés de F1 2018 par Codemasters et l’éditeur du jeu, Koch Media, mais dans les faits elle est un peu creuse.
Toutefois, ne vous y trompez pas : malgré ces quelques défauts, la Carrière de F1 2018 est toujours aussi efficace et prenante. Les accros de F1 auront du mal à lâcher leurs manettes et volants.
La conduite s’affine
C’était le (très) gros point fort de F1 2017, et on se demandait comment Codemasters pourrait faire mieux. Et pourtant, ils y sont parvenus : la conduite de ce nouvel épisode parvient à surclasser celui de son aîné. On le ressent très rapidement lors des premiers virages, lorsqu’un pneu vient mordre sur un vibreur : le travail des suspensions est superbement retranscrit, on les sent se déformer, encaisser le choc avec plus ou moins de douceur… C’est assez hypnotisant en fait, à tel point qu’on finit par aller chercher les vibreurs, juste pour le plaisir de sentir la suspension faire son boulot. Forcément, les améliorations qui touchent la physique des suspensions ont un impact sur l’ensemble du comportement de la voiture, que l’on ressent mieux qu’autrefois. Pour le reste, F1 2018 ressemble énormément à F1 2017, et on ne s’en plaindra pas. Le soft est toujours aussi exigeant sur les freinages, et sur les transferts de masse. Attention à ne pas accélérer trop vite en sortie de virage, au risque de partir en tête à queue ! En toute transparence, avant de retrouver nos marques, on a même préféré jouer avec un peu de contrôle de traction, et ce pendant plusieurs heures. C’est d’ailleurs l’occasion de rappeler aux débutants qui hésiteraient que comme ses prédécesseurs, F1 2018 dispose de nombreuses aides au pilotage que vous pouvez activer et désactiver à la volée ; à vous de trouver la formule qui vous correspond le mieux.
Reste le problème majeur de ce jeu, l’IA. Déjà épinglée lors de notre précédent test, celle-ci n’a pas vraiment progressé et elle continue de jouer des coudes pour s’imposer. C’est d’autant plus frustrant qu’elle n’est jamais pénalisée pour cela. En revanche, l’inverse n’est pas vrai et pour une petite touchette en sortie de virage, la sanction est sévère. Ce sentiment d’injustice est vraiment frustrant, surtout lorsque l’on commence à pousser le niveau de difficulté du jeu. Sur quelques séquences, on a même vu certains pilotes sortir complètement de leur trajectoire afin de couper la nôtre, quitte à se retrouver pneu contre pneu. Évidement, il s’agit d’un cas extrême, plutôt rare, mais tout de même.
Dernier point, le fameux halo. Lors de notre aperçu, nous avions exprimé quelques doutes sur sa présence, dans la mesure où dans un jeu de course, le champ de vue n’est jamais aussi large que dans la réalité. On craignait donc qu’il devienne un handicap, et heureusement, il n’en est rien : au bout de quelques parties, on s’habitue très bien. Pour les plus réfractaires, et il y en aura, il existe une option qui permet de supprimer la colonne centrale, qui soutient le halo à l’avant du cockpit. Cela permet de gagner en visibilité.
Une online qui prend du volume
Enfin pour finir, parlons rapidement du online : s’il reste toujours aussi basique, il a la bonne idée d’intégrer un nouveau système de matchmaking qui prend en compte le niveau de fair-play du joueur. Il s’agit tout simplement d’une note qui vous est accordée, en fonction de votre capacité à conduire proprement, ou non. Autant dire que ceux qui auraient confondu F1 2018 avec Wreckfest seront reçus avec les honneurs qui leur reviennent. La bonne nouvelle pour les autres, c’est que les pilotes appliqués et respectueux des réglementations en vigueur pourront jouer entre eux, ce qui garantit pour tous des conditions de jeu plus qu’agréable. Les quelques parties auxquelles nous avons pu participer se sont déroulées sans encombre, ce qui est à signaler puisque l’année dernière, F1 2017 ne pouvait pas en dire autour. Lag, déconnexion temporaire ou définitive, l’expérience était plutôt pénible. Cette année il n’en est rien, espérons que cela tienne une fois que F1 2018 sera disponible dans le commerce.
Les images utilisées dans ce test proviennent de la version PC du jeu.
Points forts
- Plutôt joli : nos souhaits ont été exaucés
- Conduite toujours aussi impressionnante
- La Carrière, addictive
- Le système de contrats, qui enrichit la Carrière
- La note de fair-play pour les parties en ligne
- 20 monoplaces rétro
Points faibles
- L’IA trop violente, qui n’est jamais pénalisée
- La participation de Julien Fébreau, qui n’apporte pas la petite touche espérée
- Quelques bugs : coupure de son, débris qui restent plantés dans le halo...
Sans surprise, F1 2018 est un petit bijou. Il ne révolutionne pas la série mais apporte son petit lot d’améliorations, même à des endroits où l’on pensait qu’il avait déjà atteint son maximum. Si l’on peut estimer, à juste titre, que les petites nouveautés du mode Carrière manquent de profondeur, l’ensemble reste très plaisant à jouer. C’est surtout la richesse technique de ce F1 2018 qui surprend, même lorsque l’on est habitué : on pourrait passer des journées complètes en phase d’essai, à faire ses tests, à reconfigurer sa voiture. Une véritable drogue.