Cette fois-ci c’est la bonne pour The Crew 2, qui après plusieurs previews et une phase de bêta, débarque aujourd’hui dans le commerce. Après un premier essai intéressant mais non pas sans défaut, les Lyonnais d’Ivory Tower remettent le couvert avec un jeu plus complet, et surtout beaucoup plus fun. La formule idéale pour passer tranquillement l’été, en attendant les gros titres de la rentrée ?
Il y a de la suite dans les idées chez Ivory Tower. Après la sortie assez oubliable de The Crew en décembre 2014, le studio a redoublé d’effort afin de donner un nouveau visage à son jeu, ce qui passa notamment par la réalisation de deux extensions. C’est sans doute la première, Wild Run, qui a redéfini en profondeur ce qu’était alors The Crew, pavant la voie pour une suite de bon aloi. On oublie donc les histoires de vengeance façon série B américaine, pour se concentrer sur la force principale de The Crew : son monde ouvert gigantesque, le meilleur des prétextes pour créer un bac à sable XXXXXL propice aux compétitions motorisées en tout genre.
L’Amérique, si c’est un rêve, je le saurai
On ne le répétera jamais assez : la force de ce The Crew 2, c’est son monde ouvert gigantesque et d’une richesse jamais égalée. Des États-Unis reproduits dans leur entièreté, pas à l’échelle 1:1 bien entendu, mais qui offrent toute la diversité de paysages que l’on peut attendre de ce pays-continent. Villes, déserts, montagnes, forêts, rocheuses, plages… Il y a tout, c’est vite vu. Jusqu’à la reproduction de certains sites bien connus du pays, comme Cap Canaveral, Meteor Crater, le Pier de Santa Monica… On s’amuse à chercher les coins touristiques les plus iconiques et, bonne nouvelle, ils sont bien là, en tout cas pour une bonne partie d’entre eux. L’introduction de nouveaux véhicules, à savoir les avions et les bateaux, ont demandé aux designers de revoir leur map, notamment tout le réseau fluvial du pays, qui était bien moins important dans The Crew premier du nom. Désormais, il est tout à fait possible de traverser le pays uniquement en powerboat, par exemple en remontant le Mississippi depuis la Nouvelle-Orléans jusque Chicago, ou de quitter les grands lacs du nord en direction du Pacifique. La conséquence sur tout cela, c’est que la carte paraît légèrement plus petite que dans le premier épisode, ou tout du moins, plus compacte. Tout est relatif puisqu’il nous a quand même fallu une bonne demi-heure pour faire Las Vegas-New York en Ford Mustang de 2015, alors que celle-ci n’avait pratiquement pas été modifiée ; en avion, comptez une bonne vingtaine de minutes pour rallier la côte est, en partant du Pacifique. Ce qui, vous en conviendrez, est assez impressionnant. D’autant que ces États-Unis là ne sont pas vides, au contraire. Trafic, passants dans les rues, faune variée (renards, lapins, chats, chiens, crocodiles, oiseaux en tout genre), il se passe presque toujours quelque chose à l’écran, de telle sorte que le monde de The Crew 2 ne paraît pas trop artificiel, ce qui est souvent le « défaut » de nombreux jeux de courses en monde ouvert. À commencer par la série Forza Horizon, pourtant mètre-étalon du genre.
Cette richesse géographique s’accompagne bien évidemment d’une richesse de gameplay absolument jamais vue dans un titre de ce genre. The Crew 2 introduit certes deux nouveaux types de véhicules, mais c’est surtout le nombre de disciplines représentées qui surprend. Regroupés dans quatre catégories différentes (Street Racing, Freestyle, Offroad, et Pro Racing), les quatorze types d’épreuves se débloquent petit à petit, au fur et à mesure que l’on engrange des « followers » ; drift, courses d’hypercars, motocross, aerobatic, jetsprint, touring car, street race, rally raid, powerboat, monster trucks… La quantité d’épreuves que propose The Crew 2 force le respect et surtout permet de renouveler très régulièrement l’expérience de jeu. C’est simple, on ne s’ennuie jamais, sauf peut-être dans les quelques disciplines qui ne sont pas les plus réussies, et dont on parlera plus tard. Ce côté pot pourri très sympa ne doit malheureusement pas cacher la principale faiblesse du jeu : ce que fait The Crew 2, pris indépendamment (courses GT, motocross, session en bateau, etc), d’autres le font, en mieux. En revanche, aucun de ces titres ne réunit sur une seule et même galette toutes ces possibilités. Le titre d’Ivory Tower ne cherche pas à proposer une expérience de sport mécanique hyper complexe, mais surtout de la variété et du fun, et il y parvient. Cela passe, comme on le verra ensuite, par les sensations, mais aussi par la richesse des épreuves : forcément, avec un terrain de jeu aussi grand, aucune épreuve ne ressemble à une autre.
En fait, à bien des égards, The Crew 2 nous rappelle Steep, avec sa roue permettant de changer de véhicule à la volée, ses différentes disciplines et ses followers (l'XP, dans Steep) en guise de progression. Il y a forcément un petit côté redite, mais ici le système fonctionne mieux puisque tout n'est pas disponible dès le départ et il y a toujours la petite carotte qui pousse à jouer plus longtemps. Débloquer de nouvelles épreuves, de nouvelles disciplines, de nouveaux véhicules... Classique, pour un jeu de course, en fait.
Sur la route de Memphis
Les sensations de pilotage, voilà qui risque de faire débat avec ce The Crew 2 qui ressemble ici beaucoup à son grand frère. Le premier épisode avait eu besoin de plusieurs mises à jour et correctifs avant de proposer une conduite intéressante ; ce ne sera pas nécessaire avec cette suite qui bénéficie bien évidemment de l’expérience acquise depuis 2014 par Ivory Tower. Il faut également garder en tête que le studio est composé, tout du moins dans les hautes sphères, d’anciens d’Eden Games, à qui l’on doit la série des Test Drive Unlimited. Sans surprise, on découvre donc un titre à la conduite très, très arcade, qui manque peut-être un peu de relief, par moments : on est rarement chahuté par le moteur physique du jeu qui est très, très généreux. On espérait forcément mieux de la part d'Ivory sur ce point, puisque ce point leur avait déjà été reproché un certain nombre de fois. En revanche, côté vitesse, les sensations sont bel et bien là, notamment en hypercar, en jetsprint, ou en rally cross, pour ne citer qu’eux. Mais certains pourront pester contre la légèreté des transferts de masse ou l’impression qu’à aucun moment, une perte d’adhérence pourrait causer une catastrophe. On se sent rarement "marchant sur une corde", cette agréable sensation recherchée par les fans de course, où la moindre erreur de pilotage peut conduire à une sortie de route. Dommage.
C'est donc surtout grâce au design de ses circuits que The Crew 2 construit son intensité. On peut trouver des tremplins et des raccourcis un peu partout ; louper un saut, ou un passage dérobé peut parfois coûter cher, notamment si l’on opte pour le niveau « Difficile » au moment de lancer sa course. Chaque discipline, ou presque, parvient à trouver le petit truc qui rend les courses plus excitantes : en jetsprint, il est possible de couper par les petites bandes de terre ferme en se laissant glisser sur la terre humide ; les courses d’hypercar sont des courses d’endurance au rythme trompeur ; en rally raid, il faut constamment parier sur l’itinéraire à suivre… et ainsi de suite. Finalement, il n’y a vraiment que deux types d’épreuves qui nous paraissent bien en dessous : les courses de motocross, et les courses de powerboats. Les premières parce que très clairement, la physique du jeu n’est pas adapté au pilotage de deux roues, encore moins dans des courses MX. Les powerboats car la plupart des tracés est trop sage et les sensations trop plates, sauf rares exceptions.
Il faut également signaler quelques soucis de lisibilité, dans presque tous les types de course. Trop souvent il nous est arrivé de prendre le mauvais virage, la mauvaise direction. Et les raisons ne manquent pas. Absence d’indications claires à l’écran, changement soudain impossible à voir venir en raison du tracé (après un gros saut ou au sommet d’une côte), système d’éclairage du jeu qui s’oublie par moments… Sans être omniprésent, loin de là, ce problème a trop souvent pointé le bout de son nez et forcément, cela finit par agacer.
L’amérimécano
La progression dans The Crew 2 est assez simple : dès le début de la partie, vous avez à accès toute la carte, et à toutes les épreuves, toutes familles confondues. Ou tout du moins, aux premières disciplines qu’accueillent les familles. Néanmoins, au fur et à mesure que vous empilez victoires et followers, vous aurez accès à toujours plus d’épreuves, débloquerez de nouvelles disciplines et pourrez mettre la main sur de nouveaux véhicules. Le renouveau est quasi constant, à vrai dire, et comme il y a toujours plus de choses à faire, il est appréciable que le système de progression comme celui d’améliorations de nos bolides soient ainsi simplifiés. Pour upgrader vos joujous, The Crew 2 utilise un système qui rappelle un peu Need for Speed Payback, sans le système économique un peu vicieux planqué dans l’ombre : à chaque course, vous looterez des pièces d’équipement qui permettront d’améliorer votre véhicule ou n’importe quel autre bolide appartenant à la même catégorie. En plus de trente heures de jeu, jamais nous n’avons eu l’impression d’être ralenti ou de devoir repasser sur certaines courses, pour engranger des followers ou du loot ; il y a tellement d’épreuves et de variété que tout s’enchaîne très naturellement, à chaque fois avec cette agréable sensation de découvrir quelque chose de nouveau. Ou tout du moins de nouveau dans The Crew 2, puisque les choses, aussi amusantes soient-elles, demeurent assez classiques.
Les choses peuvent prendre une autre allure avec les fonctionnalités online du titre ; à l’époque, The Crew cherchait à devenir le pendant « jeu de course » des MMORPG, mais entre temps, les choses ont changé. Les systèmes de classes et de customisation qui l’accompagnait ont laissé leur place à quelque chose de beaucoup plus ouvert, mais il est toujours possible d’inviter des amis pour les défier à travers tous les USA. Cela se fait en quelques pressions de boutons et le regroupement de joueurs est assez efficace. On aurait sans doute voulu quelques fonctionnalités plus poussées, comme la possibilité de créer ses propres défis, puisque ce monde ouvert est une vraie invitation à la créativité ; espérons qu’un outil dédié sera rapidement ajouté à The Crew 2, qui en l’état ne propose pas déjà des choses qu’on connaît depuis plusieurs années, avec les Forza Horizon, les derniers Need For Speed et bien évidemment le premier The Crew.
Un jour, j’irai à New York avec toi
Parlons maintenant de l’un des plus gros soucis de ce The Crew 2, son aspect visuel, qui est assez décevant. En course, lorsque le jeu n’est manifestement pas obligé de charger toute l’intégralité de la carte, le rendu est plutôt satisfaisante, avec de jolis effets de lumière et des couleurs qui flattent la rétine. Mais lorque l’on revient en mode balade libre et que l’on arpente la carte… aie aie aie. On retrouve un peu partout les mêmes textures un peu grossières qui déjà sur The Crew nous avaient griffé la cornée ; les effets de particules sont réduits à leur plus simple expression, et si vous avez le malheur de prendre un peu de hauteur à bord d’un avion, vous verrez petit à petit les textures apparaître et disparaître, parfois assez violemment. Lorsque l’on garde en tête que le jeu propose un monde ouvert absolument gigantesque et que les temps de chargement sont inexistants ou alors extrêmement courts (sur Xbox One X, tout du moins), on peut le comprendre et accepter, d’une certaine manière. En revanche, il faut aussi avoir à l’esprit qu’avec ce jeu, Ivory Tower veut inviter les joueurs à voyager, à apprécier les Etats-Unis pour tout ce qu’il a de plus beau à offrir, en termes de paysages et de richesse géographique. Prendre son pied dans pareilles conditions, ce n’est pas évident ; à ce petit jeu-là, les Forza Horizon font largement mieux et malheureusement, la sortie en octobre prochain du quatrième opus risque de faire du tort à The Crew 2 puisque les joueurs feront obligatoirement la comparaison entre les deux, quant bien même elle n’est pas vraiment juste.
Party in the USA
Malgré son moteur physique un peu léger, sa conduite que certains jugeront trop arcade, ou quelques épreuves franchement pas passionnantes, force est de constater que l’on a eu du mal à lâcher notre manette pour commencer à rédiger cet article. Et pour une bonne raison : The Crew 2 est un immense bac à sable à n’importe quoi et l’on a passé des heures à découvrir de nouvelles épreuves, à rouler pour le plaisir ou à se créer ici et là des challenges. Notamment en avion, donc le pilotage s’avère plus technique qu’il n’y paraît ; pendant notre test, nous avons passé des heures à faire de la voltige au dessus de New York ou Chicago, à zigzaguer entre les immeubles ou à voler sous des ponts, avec l’idée de réaliser les prouesses les plus folles, de les filmer et de les faire découvrir à quelques copains grâce à l’éditeur de photos très bien fichu de The Crew 2. D’autant que les développeurs ont eu la bonne idée d’inclure dans leurs jeux deux warbirds, le Spitfire et le P51 Mustang. Après quelques heures passées dans le créateur de livrées, nous étions ravis de pouvoir faire des cabrioles à bord de ces superbes avions. Si quelqu’un de chez Ivory Tower lit ce test : n’hésitez pas à en ajouter d’autres dans les semaines et mois à venir : F4U Corsair, Messerschmitt Bf 109, MiG-3… Au hasard, bien entendu.
Points forts
- Un monde ouvert gigantesque...
- … et super bien exploité
- Une sacrée variété d’épreuves et de sensations
- Beaucoup de véhicules
- Le système de changement instantané de véhicules
- Une progression simple et efficace
Points faibles
- Malgré quelques effets réussis, le jeu n’est pas très joli : textures un peu grossières, effets de particules limités, clipping...
- Quelques soucis de lisibilité en course
- On aurait aimé plus de fonctionnalité online, comme la création et le partage de défis
- Les courses de powerboats pas passionnantes
- Les motos complètement loupées
- L’interface pas toujours très pratique
The Crew 2 n'invente rien et n’excelle dans rien, et il n’est pas vraiment joli. Pourtant, osons le dire, on l'aime bien ce petit gars. En misant tout sur l’arcade décomplexée, et en remplissant son titre de nouvelles façons de jouer, Ivory Tower a enfin trouvé la meilleure façon d’exploiter cet énorme monde ouvert, et l’a transformé en un bac à sable gigantesque. Pas de quoi révolutionner le genre, bien entendu et tout ceci est somme toute assez classique. Mais la formule fonctionne et pour peu que vous vous laissiez prendre au jeu, vous aurez bien du mal à lâcher votre manette.