Six ans après sa sortie, l’actualité de Skyrim n’en fini pas d’alimenter nos colonnes. Après une très bonne adaptation sur Switch empactant tout Borderciel dans une version portable techniquement très réussie, Bethesda entame sa série de portages de son catalogue en réalité virtuelle avec la sortie de The Elder Scrolls V : Skyrim VR sur la casque PlayStation VR. Si le titre embarque avec lui la totalité de ses DLC ainsi qu’une promesse d’immersion à nulle autre pareille au sein de ses vastes contrées gelées, force est de constater qu’adapter en VR un titre qui n’a pas été pensé à la base pour ce support n’est pas toujours une tâche aisée.
Une technique qui commence à dater
Skyrim VR peut se vanter de bénéficier d’un contenu plutôt riche dès sa sortie. Ce portage n’est pas une adaptation amputée de fonctionnalités du jeu de 2011, il s’agit bel et bien du jeu complet, secondé qui plus est de ses trois extensions : Dawnguard, Hearthfire et Dragonborn. Une proposition plus que coquette au sein d'un catalogue VR qui souffre encore trop du syndrome « jeu/démo » au contenu souvent très limité.
Le titre phare de Bethesda arrive avec une jolie promesse dans sa besace, celle de nous laisser explorer l’intégralité du monde de l’un des RPG les plus populaires de ces dix dernières années en immersion totale dans la peau de notre fidèle Dovahkiin. Pousser de puissants Fus Ro Dah, planter quelques flèches dans des genoux, affronter une cohorte de dragons, si ces activités peuvent paraître aujourd’hui vues et revues pour tout joueur ayant largement eu le temps de poncer jusqu’à l’os le titre de Bethesda, l’idée de replonger dans cet univers connu pour une nouvelle fournée de donjons et de quêtes ravive notre soif d’aventure.
Mais l’immersion conférée par la réalité virtuelle se montre ici à double tranchant. Certes, elle offre une toute nouvelle perspective sur Bordeciel et permet de redécouvrir certaines séquences sous un angle nouveau, mais elle met aussi en évidence l’âge avancé du titre. Si de loin la magie opère, la proximité offerte par le casque de Sony accentue notre perception des lacunes techniques d’un RPG désormais âgé de six ans. Entre ses modèles de personnages et ses animations peu détaillés, ses multiples petits bugs de collision toujours d’actualité en 2017 et l’aspect brut de décoffrage de certaines modélisations « vanilla », Skyrim VR ne brille pas vraiment par son apparence graphique.
D’autant plus que le hardware embarqué par le casque de Sony ajoute une surcouche de limitations techniques à l’ensemble. La distance d’affichage et la qualité des textures sont les premières à souffrir de ce portage qui, sans non plus se montrer foncièrement plus pauvre que dans l'expérience Skyrim originelle de 2011, affiche un aliasing très prononcé combiné à une sensation de flou artistique dès lors que l’on regarde à plus de 15 mètres. Ces concessions techniques lui permettent en contrepartie de tourner à 60 fps afin de limiter les effets du motion sickness. Sur PlayStation 4 Pro, la qualité graphique s'améliore légèrement, mais les phénomènes de pop-up et de flou ne disparaissent pas.
Des déplacements à la carte
Comme beaucoup de jeux VR, Skyrim propose plusieurs modes déplacement adaptés aux différents profils de joueurs. Le premier prend la forme d’une téléportation cadrée en mode « pointer et cliquer » grâce aux deux PlayStation Move ; on sélectionne un endroit au sol puis on presse la gâchette droite de l'accessoire pour s’y rendre instantanément. Si cette méthode évite la plupart des symptômes liés aux mouvements en réalité virtuelle, elle peut induire en contrepartie un sentiment de frustration chez le joueur en plus de trivialiser certaines mécaniques de jeu. Se déplacer par téléportation change le rythme de la progression et fait perdre tout sens du danger lorsqu’il s’agit de traverser un couloir rempli de pièges ou plus simplement de passer d'une simple pression de touche dans le dos d’un adversaire sans éveiller sa suspicion.
L’autre méthode de déplacement via les PS Move permet de « surfer » plus librement dans les environnements tandis qu’une pression sur les boutons de la manette droite opère un changement d’angle pour votre personnage. L’amplitude de cette rotation est configurable dans les options du jeu afin de s’ajuster à vos préférences. Passée la curiosité de la découverte de ces contrôles alternatifs dédiés à la réalité virtuelle, on préfère en revenir à une méthode de déplacement plus basique et surtout bien plus précise via un bon vieux pad DualShock 4 avec deux joysticks.
Skyrim n’a pas été développé avec l’idée d’un futur portage VR en tête et cela se ressent dans la manière dont les combats sont retranscrits avec les deux PS Move en main. Les manettes à reconnaissance de mouvement sont assignées à deux compétences distinctes. Notre enfant du Dragon plein d’avenir manie par exemple une épée en main droite et une série de sortilèges dans l’autre. Un menu de favoris sert à alterner entre plusieurs sorts ou armes afin de limiter au plus possible les temps morts durant les affrontements. Il s’agit ici de mimer la plupart des actions du personnage : imiter la position d’un archer pour bander son arc, lever le PS Move de gauche pour brandir son bouclier et bloquer et agiter sa main droite pour faire valser une pluie de coups avec votre épée.
Le problème, c’est que la notion de poids des armes disparaît totalement avec cette méthode de contrôles. Manier une lourde masse à deux mains procure les mêmes sensations et offre surtout la même rapidité d’exécution que le port d’une simple petite dague. On comprend alors bien vite qu’il va être possible d’user et d’abuser de cette mécanique de jeu en agitant à toute vitesse le PS Move afin de déclencher des attaques en série sans que l’adversaire ne puisse vraiment répondre. Bref, si le feeling Skyrim est plus ou moins retranscrit par cette version, ses combats ne se montrent pas vraiment très techniques et la difficulté globale du titre est rabaissée pour coller à une expérience plus casual en VR. D’autant que la reconnaissance spatiale des PS Move décroche de temps à autre, ce qui occasionne son lot de bizarreries à l’écran (arme qui reste clouée au sol, mouvements fantômes, etc.).
Rédécouvrir Skyrim, une fois de plus...
L’ergonomie des menus n’évolue pas dans cette version qui aurait sans doute mérité une légère refonte de son interface. Le titre se contente d’afficher des menus flottants au sein desquels il est nécessaire de composer avec l’absence de croix directionnelle sur les PS Move. On navigue ainsi dans ses sous-sections à tiroirs à sélectionner en faisant glisser votre main vers la droite ou la gauche. Un temps d’adaptation est donc nécessaire pour prendre en main une navigation pas forcément des plus intuitive et surtout trop envahissante à l’écran. Le HUD en jeu se limite à l’affichage de la boussole et des barres de vie et de mana à faire apparaître en penchant la tête vers le bas, un mouvement pas toujours très pratique à réaliser, surtout au cœur de la mêlée.
Ces problèmes mis de côté, c’est tout Bordeciel et ses DLC qui s’offrent au joueur dans cette re-re-sortie de Skyrim, en immersion totale pour l'occasion. Même après avoir passé des centaines d’heures à explorer les moindres recoins de Bordeciel, la sensation de redécouvrir ces terres sous une perspective différente fait son petit effet dès les premières minutes. Reste maintenant à savoir jusqu’où sera capable de vous porter cette première impression de surprise et si les concessions graphiques ou encore le manque d’impact des combats ne finiront pas par vous lasser au bout de quelques heures de balade en Bordeciel. Comme souvent dans le petit monde de la réalité virtuelle, le plaisir sur la durée sera avant tout lié à votre capacité à maintenir un état d’émerveillement lié à l’immersion.
Points forts
- Tout Skyrim (avec ses DLC) en immersion
- Trois manières de contrôler votre personnage
- Une expérience de jeu complète avec une excellente durée de vie, ce qui est rare du côté de la VR
Points faibles
- Pas vraiment très beau en VR (pop-up, aliasing, modèles datés, flou à distance)
- Manque de consistance dans les contrôles au PS Move
- Le déplacement par téléportation ruine certaines mécaniques de jeu
- Toujours aussi buggé depuis 2011
- Navigation dans les menus peu ergonomique
Porter Skyrim en VR était un pari audacieux pour Bethesda et c'est c'est un exercice technique que le studio parvient à surmonter malgré les limitations techniques liées au PlayStation VR. Pas vraiment à son avantage du côté de la technique, pas toujours très viscéral dans la retranscription de ses combats, encore trop dépendant de sa navigation peu intuitive dans ses menus, Skyrim VR peut se reposer sur sa capacité à nous plonger en immersion dans un vaste monde plein d’interactions et de quêtes épiques, une proposition plus que rare au sein d'un catalogue actuel de jeux VR composé majoritairement de courtes expériences à épuiser en une poignée d'heures à peine.