Retour aux sources tant attendu, Call of Duty : WW2 nous propose de remettre les pieds sur terre l’espace d’un instant afin de revivre les sensations qui ont fait de la franchise un succès planétaire. Sledgehammer, qui avait amorcé avec succès le triptique futuristico-aérien grâce à Advanced Warfare, reprend donc les commandes de la saga cette année pour nous livrer un épisode maîtrisé de bout en bout, à la fois complet et prenant. Allez, on sait tous que le doux son métallique du M1 Garand vous avait terriblement manqué…
Nous avons été invités par Activision afin d’essayer le titre, en solo comme en multijoueur, durant un événement à Londres. Le titre tournait en version anglaise sur des PS4 Pro Debug et des serveurs multijoueurs étaient déployés spécifiquement pour cet événement. Nous basons notre avis sur une vingtaine d’heures de jeu, durant lesquelles nous avons bénéficié de bonus d’XP pour progresser deux fois plus vite et ainsi débloquer du contenu rapidement. Ni les voix françaises, ni les autres versions du jeu, ni les serveurs publics n’ont donc été testés.
Les maitres du solo sont de retour…
Si l’on avait émis quelques réserves sur les deux derniers solos de la licence, il faut bien l’avouer ici, nous n’avions pas vu campagne aussi haletante dans un shooter à tendance multi depuis fort longtemps. Et si l’an dernier, celle de Titanfall 2 nous avait agréablement surpris, celle de ce WW2 va encore plus loin dans le plaisir qu’elle procure et repose sur trois ressors finement réglés : un gameplay plutôt varié et rarement redondant, une mise en scène ultra-efficace et un sentiment de camaraderie et d’interdépendance au sein de notre petite team de héros pas comme les autres…
Le petit détail qui change tout : la jauge de vie
On commence donc avec nos héros d'infortune pour aborder LA grosse différence qui dénote avec les solos « classiques » des Call of Duty : les interactions entre les membres de l’escouade et le nouveau système de vie qui, s’il apparait de prime abord comme un tout petit changement, bouleverse pas mal le feeling du jeu. Exit donc les « deux secondes à couvert » pour regagner sa vie et place désormais à la panique qui s’emparera de vous lorsque vous chercherez où diable se trouve votre toubib. Sur une pression de touche dans sa direction, il vous lancera un medkit, à condition toutefois qu’il en ait à sa disposition et qu’il soit suffisamment proche de vous. Le cas échéant, ce personnage de votre équipe vous donnera la possibilité de vous soigner en quelques secondes et de stocker des packs de soin.
Grâce à ce système, Sledgehammer affranchit son jeu du fameux cycle « couverture, lean-up, tir, couverture » et rend le titre bien plus dynamique en donnant enfin la possibilité au joueur de presque faire comme bon lui semble, d’aller plomber des ennemis en solitaire avec 4 packs de soins sur lui, de battre en retraite face à une poche d’ennemis en allant se réfugier près de son escouade ou encore d’utiliser la demi-douzaine de capacités bonus dont il dispose en sa compagnie pour gérer au mieux les affrontements. Le rythme et les gunfights retrouvent ainsi une certaine fraicheur sans pour autant que cela passe forcément par la mise en scène. En quelque sorte, le gameplay de CoD atteint enfin à l’âge adulte, trouvant sa voie à travers une formule « old-school squad-based FPS » après une phase de puberté marquée par des frasques aériennes impliquant jetpacks et autres wallruns. Plus libres et plus stratégiques, les combats gagnent ici en difficulté et vous donneront souvent du fil à retordre : chaque balle encaissée peut faire la différence, de même que chaque munition peut compter dans certaines séquences.
Les américains n’étaient pas seuls…
Innovation majeure de cet épisode, l’escouade déboule donc aux côtés d’améliorations plus discrètes : QTE dynamiques à la Telltale, ton global de la mise en scène beaucoup plus noir et plus cru, séquences en véhicule vraiment trippantes : l’enrobage de cette campagne est du plus bel effet et sert une structure de 11 longues missions qui vous tiendront en haleine 7 à 8 heures, en normal, en laissant un peu de marge pour vos nombreuses tentatives sur certains passages épineux. La variété sera au rendez-vous, comme dit plus haut, et c’est avec un plaisir non dissimulé que nous entrons dans la peau de divers corps armés ayant servi durant la Seconde Guerre Mondiale : du tankiste à l’aviateur en passant par la Résistance. Ces apartés laissent place à de l’infiltration ou encore à de la conduite et donnent ainsi à la campagne de WW2 un aspect moins américano-centré même si l’on reste sur le front de l’ouest.
Une campagne plus « mature »
Cté histoire, on est ici sur du scénario classique de film de guerre, sans trop de fioritures. On incarne Red Daniels, un petit gars texan qui n’a rien d’incroyable et se retrouve plongé dans l’enfer du débarquement allié. On le suivra, lui et son équipe, jusqu’aux bords du Rhin dans plusieurs missions improvisées et autres opérations de grande envergure qui nous mèneront de la Normandie à Paris, des Ardennes jusqu’aux fleuves allemands sans pour autant que l’on puisse en prendre la capitale, malheureusement. La camaraderie, la rudesse des routines sur le front, l’obstination de certains supérieurs, le fragile équilibre entre pertes humaines et objectifs militaires, le courage des soldats, l’amitié et la cruauté inhumaine de la guerre seront donc les thèmes abordés par cette campagne qui, à travers une quinzaine de cinématiques du plus bel effet, nous immerge en apnée prolongée. On regrettera toutefois certaines inégalités graphiques entre les cinématiques, les cut-scenes qui tournent avec énormément d’effets rajoutés et les séquences de jeu dans lesquelles les passages « narratifs » sont bien moins crédibles. En cause ? Un moteur et des outils vieillissants qui tiennent difficilement la comparaison avec des paquebots comme le Frostbite. Et si les systèmes, notamment le brouillard volumétrique et les fumées, ont été plutôt soignés, d’autres, comme les destructions de batiments, effectifs dans certaines séquences, apparaissent bien moins concluants. Mais cette campagne est une belle réussite que nous n’avons aucunement envie de vous spoiler d’avantage…
Du multi classique
En dehors d'un solo très réussi, CoD WW2 propose évidemment un multijoueur « classique », composé des habituels modes TDM, Domination, Search and Destroy, Kill Confirmed, Hardpoint ou encore FFA. Point de jauge de vie ici : nous sommes sur un gameplay des plus lambda, sans possibilité de se pencher pour ajuster un tir ou d’effectuer des mouvements « nouveaux » pour la série. Les affrontements restent donc dynamiques et vifs mais il s’agit encore et toujours de la même base que l’on nous ressert dans une autre ambiance, dans une autre époque. Les maps sont réussies, comptent une dizaine de zones de combat et sont relativement similaires sur leur level design : on ne sentira le besoin de changer d'équipement qu'à de trop rares occasions. D'ailleurs, les SMG sont toujours autant optimisées pour la plupart des combats, les fusils sont ici plus puissants mais moins maniables, quant aux fusils à pompe, ces derniers sont malheureusement trop peu puissants, à l’image des snipers qui ne servent qu’à de trop rares occasions. Enfin, les LMG bien qu’étant redoutables, vous rendront plutôt lent et s'avèrent donc moins polyvalentes…
Chacun trouvera donc son bonheur mais les écarts se creusaient déjà sur notre session de test où les SMG étaient reines, Sledgehammer devra donc sans doute rééquilibrer ses 25 armes pour les rendre plus efficaces sur les 10 maps figurant dans le mode multi. Toutes sont donc de qualité égale et deux ou trois se distinguent par leurs longues allées qui dénotent avec les couloirs étriqués et ruelles avec fenetres de tir en hauteur qui représentent 70% du level design. Nous sommes toujours ici sur une expérience favorisant les loups solitaires, calibrée pour être appréciée sur de courtes et longues sessions, sans trop devoir interagir avec l’équipe pour réussir, sauf peut-être sur le mode Gridirion, un classique revisité qui propose aux équipes d’aller mettre un but dans le camp adverse grâce à un ballon qu’il est possible de prendre dans les mains avant de le lancer sur les alliés ou ennemis.
L’habituel système de classe, incontournable des CoD, laisse cette année place aux Divisions, sensées marquer votre appartenance à un style de jeu mais qui finalement se résument à 4 bonus passifs et actifs que l’on débloquera progressivement, tout en proposant un bonus appliqué à une classe d'arme spécifique : le silencieux sur les SMG, la charge à la baillonette pour l'infanterie... A ce niveau-là, BO3 et Infinite Warfare faisait bien mieux et procuraient un peu plus le sentiment d’appartenir à une classe. Toutefois, ce multi, en apparence très classique même s’il dispose de son lot de carottes pour avancer, guidé par la quête de loot et de performance, se distingue surtout des autres CoD en piochant des bonnes idées à deux licences : Battlefield et Destiny.
Notre GL dédié au multi (classique et War)
Le mode War : l’imitation qui s'en sort mieux que l’original…
Si la saga Battlefield a toujours su insuffler dans ses parties une notion stratégique de grande envergure, Call of Duty mise quant à lui sur l’intimité de ses affrontements et sur leur nervosité. Pour ce WW2, il fallait obligatoirement des cartes plus vastes afin de retranscrire l’avancée des troupes, point après point, comme dans un mode Ruée de Battlefield 1. Le mode War a donc été designé pour retranscrire l’intensité de grandes batailles, sur lesquelles deux fronts avancent d’objectifs en objectifs. Trois sont disponibles dans le titre, dont une qui était à l’essai lors des bétas : Opération Breakout, Opération Neptune et Operation Griffin. On retiendra surtout Neptune et Breakout qui retranscrivent superbement l’intensité du débarquement et des percées alliées dans la campagne française. Comme vous pouvez vous y attendre si vous avez déjà essayé le mode, on enchainera ici des objectifs variés (destruction d’éléments multiples, prise de point, escorte ou encore construction) tout en étant pressé par le temps. Les scénarii sont constitués d’étapes et la partie s’arrète si les défenseurs parviennent à stopper les assaillants. En somme, Call of Duty réussi là où le mode Opération de Battlefield 1 peine à retranscrire une action lisible : ici, la victoire est palpable, toujours très disputée et, paradoxalement, on s’implique bien plus sur les objectifs dans ces combat en 6 contre 6 que lorsqu’il y a bien plus de joueurs dans les équipes. Et si de prime abord ce côté intimiste pouvait géner l’immersion, Sledgehammer a pensé à tout et permet aux joueurs de bénéficier d’IA suivant les situations, notamment pour « meubler » et tromper l’ennemi durant le débarquement.
Laissez-moi, j'suis dans ma zone...
L’autre inspiration-clé pour le multijoueur nous vient d’une autre licence Activision : Destiny. Le semi-MMOFPS de Bungie lègue ici son concept de Hub multi à Call of Duty. Sur une plage de Normandie, le Headquarter incarne votre espace social, idéal pour se regrouper avec ses amis, naviguer de mode en mode et tester quelques bonnes idées, directement intégrées au niveau, à l'image de l'arène 1V1, que l'on a beaucoup apprécié. Ce petit terrain en contrebas, auquel on accède grâce à une file d’attente dynamique, vous permet de vous battre en duel contre un inconnu ou un ami, via 3 sélections aléatoires de loadout. Le match se déroule en 60 secondes, ce qui permet donc d’enchainer rapidement des petits matchs, que les spectateurs peuvent suivre en direct. Amusant, rapide et efficace, cette arène fait office d’excellent point d’attente en espérant qu’un matchmaking War ou Mosh Pit vous soit proposé. On retrouvera également, au rang des intéractions possibles, le stand de tir, qui permet de s’entrainer et de scorer face à un ami que vous venez de défier.
Notre Gaming Live sur le QG du jeu
L’ouverture de lootcrates est également une des activité phare du Headquarter : les fameuses caisses au contenu aléatoire vous seront délivrées par voie aérienne et tout le monde peut voir ce que vous y obtenez. Ca n’a l’air de rien, mais ce nouveau hub est vraiment bien pensé et s’avère parfait pour explorer le contenu du jeu, modeler vos équipements, souscrire à des challenges quotidiens, acheter des contrats et se défier entre amis. Un espace dédié aux scorestreak permet aussi de tester la grosse vingtaine de talents uniques à utiliser après avoir engrangé de grosses quantités de points. Ces scorestreaks sont souvent aussi destructeurs que spectaculaires et permettent parfois d’incarner un pilote d’avion en plein piqué ou de guider une bombe larguée au dessus du terrain. Enfin, on retrouvera sur le côté de la plage deux accès, le premier nommé R&R, permet de passer du temps sur des petits jeux d’arcade Activision en attendant une vraie partie et le second vous offrira la possibilité de lire des vidéos diffusées en ligne. Le focus sur l’eSport dans le catalogue media donne pas mal d’idées et il est donc probable que les compétitions soient streamées dans cet espace qui actuellement est modélisé sous forme de cinéma d'infortune.
Quand les nazis zombies débarquent
Dernière pierre angulaire de l’expérience Call of Duty, le mode Zombie nous revient cette année avec le « Nazi Zombie », une aventure bien plus glauque et stressante que les précédentes. On y incarne 4 compères parmi une vaste sélection. Ces derniers devront explorer la campagne The Final Reich, seule carte pour l’instant disponible en attendant les DLC. Pas forcément révolutionnaire, cette campagne parlera forcément aux amateurs en les mettant face à une nuée de secrets et à des vagues de monstres toujours plus vifs et coriaces. Après 5 ou 6 parties complètes, l’ambiance du village enneigé, les dédales du vieux bunker nazi et les cryptes mystiques nous ont comblés. Difficile de dire en revanche si le contenu sera à la hauteur des attentes des fans puisqu’il faudra quelques semaines aux joueurs experts afin de découvrir la totalité du contenu et être ainsi en mesure d’évaluer la qualité du mode sur le long terme. La formule inclut cette année des upgrades de capacité et d’armes, des mods attribués au personnage que l’on pourra combiner selon nos désirs et des lootcrates dédiées qui viendront attiser la quête du loot. Ce Nazi Zombie semble donc taillé pour prendre la relève des meilleures versions que la saga ait connu tant il mêle efficacement frissons, tensions, énigmes, secrets et shooting stratégiquement executé.
Points forts
- Un solo de qualité avec son lot de séquences mémorables
- Des changements vraiment efficaces sur le gameplay en campagne
- Un mode War très plaisant et vraiment stratégique
- Le QG, un hub en ligne très bien pensé et super plaisant
- Un sound design de grande qualité : tirs, musiques, voix américaines
- Un mode Zombie très prenant, idéal pour les vétérans comme pour les novices
- Une vraie dimension challenge et récompenses pour garder les joueurs
Points faibles
- Un gameplay très classique en multijoueur
- Un équilibrage des armes pas toujours pertinent
Ce Call of Duty : WW2 est une vraie réussite. Il parvient à nous servir un solo de grande qualité, ni manichéen, ni fade, auréolé d'améliorations significatives en matière de gameplay et de mise en scène. Fidèles au postes, la nuée de modes de jeu "classiques" fait le travail sans trop chercher à changer l'expérience "boots on the ground" que procurait jadis le multi de CoD. Deux nouveaux entrants, le QG et le mode War, permettent toutefois d'oublier que l'on est ici sur un gameplay vu et revu et apportent un peu de sang neuf à l'expérience, piochant pas mal de bonnes idées du côté des autres licences de FPS multi. Enfin, le mode Zombie nous revient en grande forme et promet pas mal d'heures de fun en ligne comme en coop. Complet, riche, varié, dôté d'une excellente durée de vie et d'un contenu plaisant, Sledgehammer signe ici un WW2 de grande qualité.