Il y a précisément un an apparaissait à l’E3 un véritable OVNI vidéoludique : My Friend Pedro. Et si certains aficionados de jeux flash connaissaient déjà le titre éponyme dont il est la suite spirituelle, la majorité des joueurs découvrait alors ce twin stick shooter, ultra-dynamique et présenté en trailer sur fond de musique classique. Un an et quelques jours plus tard, l’oeuvre sort enfin : place donc au verdict…
Max Payne indé’ sauce Yamakasi
Le gameplay de My Friend Pedro n’est pas bien complexe. On y évolue en 3D, sur un plan 2D, de gauche à droite, dans la plus pure tradition des run and gun. Sauts, walljumps, roulades, ralentis et autres pirouettes accompagnent généreusement la pratique du tir pour notre héros, ce qui donne notamment au jeu des saveurs de plateformer-action toutes particulières, mais pas toujours très réussies. My Friend Pedro base donc tout son intérêt sur “l'exécution”, au sens propre comme figuré. Le but du jeu est évidemment d’avancer face aux ennemis pour les tuer afin de compléter le niveau le plus rapidement possible, mais c’est aussi (et surtout ?) de le faire avec style, faisant monter un multiplicateur de score, histoire de briller au tableau final et dans les leaderboards mondiaux. Le style dans l'exécution génère d’ailleurs un petit GIF final, souvent très classieux, que vous pourrez sauvegarder et exporter vers vos réseaux sociaux rapidement.
Pour l’apprécier, montez la difficulté !
Et si le design global du jeu semble être avant tout tourné vers les speedrunners et les amateurs de scoring, My Friend Pedro n’oublie pas d’être accessible à tous puisque le jeu comporte trois modes de difficulté, dont un mode “normal” que nous avons essayé pour le test. Une décision toutefois regrettable puisque le jeu perd alors furieusement de son intérêt et devient bien trop simple, se contentant de vous offrir des pelletés d’ennemis à flinguer, sans qu’ils ne puissent représenter une véritable menace. Très vite, après avoir découvert le panel de mouvement à notre disposition, on en vient donc à débouler et défourailler sans trop se creuser la tête et en oubliant au passage toute notion de style, essentielle à l’oeuvre et largement mise en avant. C’est donc en difficulté plus élevée que nous vous conseillons de commencer, d’autant plus que le titre hérite alors parfois d’un aspect die and retry bien amené, notamment grâce au placements de checkpoints avant la totalité des affrontements.
Une évolution timide mais progressive
Viser juste, esquiver, glisser, cumuler les cascades et faire bon usage du ralenti seront donc vos armes dans ce My Friend Pedro, qui ne cherche pas à justifier son aventure par un scénario étoffé, puisque ce dernier tient sur quelques lignes : vous suivez tout simplement les indications de Pédro, votre ami imaginaire et banane de service. Il vous guidera dans une vendetta contre plusieurs chefs mafieux que vous devrez affronter. Ces derniers ont évidemment disposé des hordes d’ennemis dans la quarantaine de petits niveaux, courts et trop peu variés, dont seule une poignée se distingue pour son originalité. Notons toutefois que chaque stage apporte sa petite modification, aussi minime soit-elle. Cela peut concerner le level design (nouveau puzzle, nouvelle mécanique) ou le gunplay (nouveaux ennemis, nouvelles armes). Evidemment, ces ajouts s’accumulent et forment à la fin du titre des niveaux assez complexes où il est vitale de gérer correctement les déplacements, le timing, et le tir, ce qui est une bonne chose et viendra renforcer le challenge.
Le tour de force d’un seul et unique développeur...
Le souci, c’est que malgré ces ajouts constants et les petites punchline savoureuses de Pédro, on tourne assez vite en rond dans un gameplay qui n’évolue jamais significativement. On aurait donc apprécié un arbre de talents ou une plus grande variété dans l’approche des combats : quelque chose de moins dirigiste et redondant. On ne pourra toutefois pas jeter la pierre à Victor Agren, unique développeur, d’une débrouillardise extrême, qui s’est occupé du code, de l’animation, du game design et du level design de My Friend Pedro en faisant évoluer le jeu flash qu’il avait sorti en 2014. “Chapeau l’artiste”, comme on dit, car beaucoup de studio aimeraient arriver à un tel niveau de maitrise côté spectacle. Les ricochets sur les poêles à frire, les phases en skateboard, les niveaux en moto : My Friend Pedro apporte son audace et sa fraîcheur à de nombreuses reprises. Le souci, c’est qu’entre deux dose d’endorphines, on en arrive à trouver le temps long…
Un album photo de moments badass
La stagnation globale du gameplay n’est malheureusement pas la seule tare de My Friend Pedro. On fait ici face à un véritable souci de pauvreté artistique et musicale en parcourant les 3 à 5 heures de jeu nécessaires à une première run. Les décors sont ternes, tristes, deviennent de moins en moins recherchés au fil de l’aventure, et demeurent ultra dirigistes jusqu’au bout. Pour la bande son, Victor Agren a fait appel à une demi-douzaine d’artistes, mais le résultat est souvent peu inspiré, vaguement apprécié sur le moment et jamais mémorable. Il est donc assez difficile de noter My Friend Pedro qui semble faire du yoyo avec nos émotions, nous gratifiant par moments de somptueuses scènes d’action au ralenti, avant de nous engouffrer dans des tunnels redondants et un brin ennuyeux.
Points forts
- Des gunfights bluffants à découvrir et assez grisants à maîtriser
- Taillé pour le speedrun et le scoring
- De petites évolutions qui s’accumulent à chaque nouveau stage
- Un côté die and retry très agréable, qui vous forcera à être efficace
Points faibles
- Direction artistique et musiques assez pauvres et très vite répétitives...
- Au pad ou sur Switch : visée assistée et bloquée sur le corps des ennemis
- Trop redondant bien qu’étant assez court (3 à 5 heures)
Etonnamment, la feature permettant de générer des GIFS des meilleures actions dans chaque niveau résume parfaitement ce que l’on pourrait dire de My Friend Pedro à quelqu’un qui s’y intéresse. My Friend Pedro est une véritable collection de moments cools et ultra-dynamiques. Autant de séquences, souvent originales d’ailleurs, qui donnent furieusement envie de rejouer, mais qui nous rappellent aussi combien les moments passés entre chaque cliché furent trop souvent dispensables ou redondants…