Avalanche Studios ne chôme pas depuis plusieurs mois et s'apprête une nouvelle fois à prendre d'assaut le marché vidéoludique. Suite aux naissances consécutives de l'excentrique Just Cause 4 et de l'uchronique Generation Zero, le studio suédois se parachute en plein apocalypse dans RAGE 2, un FPS post-apo en monde ouvert. Cette collaboration avec id Software, les pères du jeu de tir à la première personne, est-elle capable de réduire au silence la concurrence ? Réponse le Big F*cking Gun à la main.
A history of apocalypse
Le réveil de Nicholas Raine en 2135 sonnait le glas de l’Autorité et de sa main mise sur une Terre détruite par la chute de l’astéroïde Apophis 106 ans auparavant. Deux décennies sont passées depuis les événements de Rage. Des bribes de civilisation émergent ici et là tandis que la nature reprend enfin ses droits sur des territoires autrefois désolés. Malheureusement cette euphorie des jours heureux est de courte durée. Le général Martin Cross revient d’entre les morts à la tête d’une armée de mutants mécanisés et frappe Vineland… la dernière enclave archéennes. Suite à la mort de sa tutrice de la lame du généralissime Cross, le fraîchement promu Ranger Walker pénètre dans le Wasteland avec la ferme intention de se venger et de relancer un certain projet Dague.
Cette série B survitaminée allaitée à la pop-culture 1980-90’s est un pot-pourri nostalgique de références aux différents arts et à la science-fiction en général. Jeu vidéo, bande-dessinée, comics, littérature, cinéma… tout y passe. Les clins d’oeil s’enchaînent à un rythme effréné sans jamais perdre de vue son propre univers et sa propre histoire. Cette aventure post-apocalyptique intégralement doublé en français déroule un récit ultra-codifié fait de gueules cassées, de personnages haut en couleurs et de rebondissements S-F… mais parvient toujours à attiser la curiosité de l’archéen qui sommeille en chacun de nous. Toutefois, Rage 2 est court… trop court certains diront. En effet, ce dernier plie son histoire principale en 12 à 15h. Il faut compter le double de temp pour le terminer à 100%.
Le FPS d’Avalanche Studios affiche une mise en scène minimaliste qui se contente d’une poignée de cinématiques réalisées en 3D et de dialogues à l'irrévérence assumée pour conter son histoire. Les personnages eux-mêmes souffrent d’un manque de développement et récitent leur script sans réellement être mis en avant une fois leur entrée “badass” effectuée. Ces derniers distribuent leurs objectifs dans le but de détruire l’Autorité… voilà tout. Le Ranger Walker doit alors gagner la confiance de trois anciens résistants en réalisant une série de missions, une confiance symbolisée par un niveau. L’aventure aurait gagné à éviter l’artificialité constatée du récit ainsi que la gamification de la progression.
Les missions, bien que systémiques dans la majorité des cas, sont suffisamment variées pour divertir les survivants de l’apocalypse. Si sur le papier, “Rechercher et détruire” résume à merveille le concept qui se cache derrière chacune d’entre elles. Dans les faits, rien ne se passe jamais de la même façon (et surtout comme prévu) grâce à un level design renouvelé de lieux en lieux évitant le copier-coller paresseux. Destruction de stations services et de barrages routiers, chasse aux primes, dératisation de nids infestés de mutants, attaques de convois sur les routes du Wasteland, éradication des sentinelles de l’Autorité, participation à une téléréalité ou des courses de voiture… Rage 2 renouvelle les plaisirs si bien que l’ennui n’est jamais de mise.
Le retour du généralissime Martin Cross
Wasteland Fury Road
Le monde ouvert de Rage premier du nom se démarquait par un sens prononcé du vide et un amour inconditionnel pour le grisâtre. En collaborant avec Avalanche Studios et son moteur de jeu APEX (Avalanche Open World Engine), id Software s’offre les services de baroudeurs de l’Open World et cela se ressent dès les premières minutes. Le Wasteland n’est plus cette terre calcinée, mais renaît de ses cendres et affiche une palette de couleurs vives qui surprend avant de convaincre définitivement. Le sable et la roche laissent place à plusieurs biomes (forêts, jungles, marécages, plaines arides, canyons…) aux ambiances distinctes respectant tout de même l’univers post-apocalyptique de la saga.
Les citées abandonnées et les complexes industriels en ruines jonchent une carte sur laquelle la vie sous toutes ses formes reprend doucement ses droits. Malgré son contexte post-apo justifiant des étendues mornes, Rage 2 réussit à animer partiellement ses environnements par la présence de chutes de météorites, de courses sauvages, d’affrontements entre bandes rivales, d’animaux, de convois routiers et de marchands ambulants sans pour autant atteindre la maestria des cadors du genre. Cependant, ce FPS invite les joueurs à l’exploration avec ses villes “modernes” (Wellspring, Gunbarrel, Oasis, Dreadwood…) et autres lieux marquants (QG de l’Autorité…) disséminés aux quatres coins de la carte.
Le Wasteland s’étend sur plusieurs kilomètres et recèle bien des mystères incitant à la découverte. Pour se déplacer, le Ranger Walker peut compter sur plusieurs véhicules terrestres et aériens dont un en particulier qui pour le coup est véritablement un personnage à part entière. En effet, Phénix de son petit nom est une voiture surprenante dotée d’un intelligence artificielle capable de s’exprimer et pas toujours de la meilleure des manières. Et la conduite orientée arcade s’avère plaisante et facile à prendre en main afin d’autoriser les embardées déjantées et les scènes d’actions explosives à 200 km/heure sur les autoroutes sablonneuses du fun. Il se dégage des combats motorisés une puissance et une vitesse tout simplement jubilatoire.
Si Rage 2 ne peut rivaliser techniquement face aux prouesses des mondes ouverts modernes, sillonner le Wasteland reste plaisant à bien des égards. Les décors affichent suffisamment de détails et de variétés pour dépayser les joueurs. Quant à la maîtrise des effets de lumière et atmosphériques, celle-ci ajoute au réalisme apocalyptique des environnements. Mention spéciale par ailleurs à la bande originale qui porte parfaitement l’action avec ses riffs rock/métal énervés et ses notes de punk californien toujours aussi entêtantes.
En direct de la Mutant Bash TV
Walker Badass Ranger
Un jeu estampillé id Software se doit de faire parler la poudre. Et autant le dire sans adage… les aficionados de gunfights violents en auront pour leur oseille. Rage 2 est un Fast FPS en monde ouvert et parvient à tenir cet équilibre précaire grâce aux talents combinés d’id Software et d’Avalanche Studios. Le rythme soutenu de bout en bout ne souffre à aucun moment de cette approche Open World. Au contraire, que ce soit dans les zones fermées ou dans le Wasteland, les affrontements dégagent une explosivité et une intensité jamais atteinte dans un FPS du genre. Car notre héros bénéficie d’une auto-régénération lente et partielle obligeant ce dernier à allier vitesse et précision pour rester en vie.
Au milieu de la mêlée, le Ranger Walker déploie un savoir-faire sans commune mesure pour se mouvoir et faire taire son prochain sous une rafale de plombs incisifs. Cet archéen se déplace aisément dans les décors et esquive sans broncher les projectiles avant de fondre sur un bestiaire agressif et fumant composé de mutants, de punks, de mechas, de trolls, etc. Chaque combat hurle son amour pour les Doom-like et sa vision survoltée du FPS. Le ressenti armes en mains et le système de dégâts exacerbent les sens. La précision et l’exagération des impacts sur les corps, les armures volant en éclats… gratifient le joueur de ce sentiment de puissance tant espéré.
id Software s’y connait en pétoires et en pouvoirs. Le parterre d’armes mis à disposition et la flopée de nanotrites ne sont pas étranger à cette douce béatitude post massacre qui plane dans l’air. L’arsenal danse ici à l’unisson avec les capacités surhumaines de Walker. Son armure de Ranger lui permet ainsi de réduire au silence les velléités guerrières de l’ennemi. Sans oublier le fameux Overdrive durant lequel notre héros se mue en boucher et génocide l’écran à grand renfort de bastos. Néanmoins, les combats de boss ne représentent pas la cerise sur le gâteau. Au contraire, ces derniers, loins de marquer l’aventure avec une bonne dose d’épique, demeurent anecdotiques et génériques.
Séance de nettoyage au fusil à pompe
The Warrior's Way
Les archéens et plus particulièrement les Rangers ne sont pas des êtres humains comme les autres. Mais aussi forts soient ces soldats d’exception, le Wasteland regorge de dangers. Pour survivre et enfin mettre un terme aux agissement de l’Autorité, Walker doit gagner en puissance et en compétences en explorant la carte à la recherche des arches émergées. Cette douzaine de lieux symboliques de la chute de l’astéroïde confère au héros de nouveaux pouvoirs ou de nouvelles armes améliorables par la suite via la récolte de ressources (feltrite, bonus de nanotrites, module d’armes...). Et cette chasse aux coffres finit par devenir centrale à la progression, peut-être trop centrale même. Car le Ranger Walker ne peut espérer vaincre son ennemi juré sans cela.
Science-fiction oblige, l’amélioration du héros passe également par plusieurs augmentations nécessitant d’autres ressources ainsi que des “Projets” liés aux trois résistants cités précédemment… à l’origine de bonus passifs ou de boosts fortement utiles. Le craft de son côté permet de fabriquer plusieurs types d’objets de renfort tels que des soins, des grenades… ce qui est essentiel en missions. Enfin, les véhicules profitent de mises à jour afin de renforcer leur blindage ou encore d’augmenter leur puissance de feu. Sans être révolutionnaire, et il ne cherche pas à l’être, ce système et les fonctionnalités qui en découlent traduisent par le gameplay l’emprise du héros sur le monde qui l’entoure.
Points forts
- Un monde ouvert propice à l’exploration…
- Un scénario assumé de série B incarné par des gueules cassées...
- Une aventure intégralement doublée en français
- Les gunfights à l’intensité rarement égalée
- Les références à la pop-culture 1980-90’s
- L’arsenal et les pouvoirs nanotrites
- Les améliorations du héros et des véhicules
- La conduite arcade et les attaques de convois routiers
Points faibles
- … manquant par instant de vie et d’animations
- … trop peu développées
- Une courte durée de vie pour un Open World
- Des combats de boss génériques
- Enormément de bugs sonores et de QTE manquantes sur PS4
Rage 2 débarque fusil à pompe en mains pour tout arracher. Le titre né de la collaboration entre id Software et Avalanche Studios soigne la majorité des carences de son aîné et parvient à fusionner monde ouvert et fast FPS avec un talent certain. Loin d’être exempt de défauts, ce titre possède indubitablement une âme qui transcende l’expérience vécue. Intense, survoltée, irrévérencieuse, brutale… les adjectifs ne manquent pas pour qualifier cette apocalypse fushia pétrie de bonnes intentions.