Après un premier contact peu enthousiasmant, Shadow of the Tomb Raider s’était fait beaucoup plus séduisant avec un nouvel aperçu lors de l’E3 2018. Peut-être conscient que la presse était encore un peu tiède à son sujet, Square Enix a décidé d’organiser une nouvelle session de prise en mains fin juillet, nous permettant de découvrir les cinq premières heures de son Shadow of the Tomb Raider. Cette fois, c’est bon, nous sommes rassurés : le titre s’annonce des plus palpitants.
Gaming Live : une jungle remplie de dangers
Nous avons pu jouer environ cinq heures à Shadow of the Tomb Raider, au cours d'un événement organisé par Square Enix à Paris. Le jeu tournait sur un kit de développement Xbox One X, elle-même connectée à un téléviseur 4K HDR.
Certains l’auront remarqué, notre avis sur Shadow of the Tomb Raider a passablement évolué ces derniers mois. Comme nous l’avions d’ailleurs signalé dans notre tout premier aperçu du jeu, Square Enix et Eidos Montreal avaient curieusement choisi de nous montrer l’introduction, qui, on en était sûr, n’était pas franchement représentative du reste de l’aventure. C’est comme si, dans le cas de Rise of the Tomb Raider, il avait fallu juger de l’intérêt du soft tout entier en se basant sur le premier niveau se déroulant en Syrie. Une séquence splendide mais linéaire et pas vraiment enthousiasmante, donc. On avait senti le coup venir et après avoir retrouvé le titre à l’E3, on en était certain : Shadow of the Tomb Raider en avait encore sous le pied et il y avait encore bien des choses à découvrir à son sujet. Et on avait raison.
Pas de grosses surprises
Avant d’aller plus loin, il nous paraît essentiel de commenter ce qui est régulièrement reproché à cette nouvelle série de jeux Tomb Raider, depuis le second épisode : le manque de véritables nouveautés. Ceux qui attendent une révolution à chaque suite auront donc du grain à moudre avec ce nouvel épisode qui, désolé de le dire, se « contente » de marcher dans les pas définis par ses prédécesseurs et ne propose, dans le fond, rien qui n’altère son gameplay de manière significative. Eidos Montreal a repris telle quelle la formule créée par Crystal Dynamics et l’a enrichie, de la même sorte que Rise of the Tomb Raider creusait les bases posées par le reboot de 2013. On retrouve le même système de crafting, les mêmes séquences de gunfight, des tombeaux à explorer, la progression façon Metroidvania qui permet d’accéder à de nouvelles zones lorsque l’on obtient enfin les armes adéquates, etc. Mais à la manière de la série Uncharted, qui ne s’est pas réinventée à chaque épisode mais qui a amélioré, épisode après épisode, la même formule, Shadow of the Tomb Raider améliore de manière tangible chacun des éléments de gameplay qui sont l’ADN de cette trilogie.
Les niveaux sont plus complexes et l’exploration est donc plus intéressante, sans que l’on se retrouve dans des puzzles en trois dimensions, comme pouvaient l’être les niveaux des Tomb Raider originaux. Le système de crafting est plus riche grâce à l’ajout de nouveaux consommables et de « recettes », qui permettent de fabriquer des drogues pour Lara, modifiant le gameplay de manière sensible par moments ; elle peut ainsi obtenir une meilleure vision, ou une plus grande vitesse, voire une meilleure perception, ce qui dans certains cas peut s'avérer salutaire. Même la dimension "infiltration" du jeu semble plus riche qu'autrefois. On est bien loin de Splinter Cell ou Metal Gear Solid, bien entendu, mais quand même ! C'est probablement sur cette section du jeu que l'on a remarqué le plus grand nombre de petites nouveautés de bon aloi. Lara est désormais plus expérimentée et on le constate très rapidement, puisque désormais il n'est plus question de fuir, mais plutôt de terroriser l'ennemi en pratiquant une forme particulièrement violente de guerilla ninja, en se servant de la végétation et des spécificités de la jungle sud-américaine pour se dissimuler et fondre sur ses ennemis au pire moment. Il est particulièrement amusant d’éliminer les uns après les autres les membres d’une patrouille, et de voir les derniers survivants s’inquiéter… et prendre la fuite dans certains cas. Cela offre une certaine lattitude et d'essayer, en cas d'échecs, d'autres approches, ce qui est forcément un plus appréciable.
12 minutes de gameplay axés sur les combats
Mais le Tomb Raider attendu par tous ?
Malgré cet état de fait, disons-le clairement : nous avons passé cinq heures à nous amuser. Pas parce que Shadow of the Tomb Raider nous a époustouflé avec des features de gameplay encore jamais vues, non. Mais parce que la formule semble avoir atteint la maturité, et surtout que le jeu nous fait vivre une aventure séduisante, dans un cadre absolument sublime. Ce que nombre d’entre vous aimaient dans Tomb Raider (votre serviteur le premier), c’est que la série était constamment emballée de mystère et nous permettait de visiter des destinations exotiques. C’est le pouvoir de ce que les développeurs de jeux vidéo appellent la « fantaisie » : on allume sa console ou son ordinateur, et le temps de quelques heures, on incarne une Indiana Jones féminine, et l’on part à la recherche d’une civilisation disparue, on explore un temple maudit, on évite des pièges millénaires… Jusqu’à présent, le Tomb Raider nouveau n’avait pas forcément cherché à restituer ce genre de petits plaisirs. Le premier épisode, en 2013, était d’abord une histoire de survie. Le second prenait place en Russie, au beau milieu d’anciens complexes soviétiques. L’exotisme en prenait un coup, forcément. Dans Shadow of the Tomb Raider, il y a tout ce que l’on attendrait d’un nouveau film Indiana Jones : une jungle luxuriante, des temples remplis de pièges mortels, une histoire d’apocalypse, des méchants qui semblent avoir toujours un coup d'avance… C’est d’abord cela, la première source de plaisir de ce Tomb Raider, qui réutilise à souhait les codes de nos films et romans d’aventure préférés. Difficile de ne pas être séduit par l’univers de Shadow of the Tomb Raider, et surtout de sa direction artistique à couper le souffle. Le jeu est beau parce que techniquement, il est très réussi, mais aussi et surtout parce que les artistes d’Eidos s’en sont donnés à cœur joie. Ils nous ont d’ailleurs confié qu’ils avaient opté pour l’Amérique du Sud pour créer un contraste avec les monochromes de Rise of the Tomb Raider, pour s’amuser avec les couleurs, avec du vert, du bleu, du jaune, du rouge… Le titre est plus chaleureux et parvient régulièrement à surprendre avec des panoramas de toute beauté.
Il faut dire que chez Eidos Montreal, on a le sens de la mise en scène et du timing. L'action est bien menée, les caméras se déplacent toujours au meilleur endroit, pour mettre en valeur une pyramide, l'entrée d'une grotte, où une statue colossale. Lara enchaîne explorations et phases de combat à un rythme agréable, même si l'on pourra regretter que le level-design des "arènes" où se déroulent les combats soient si peu inventifs. Mais ce que l'on retient de ces quelques heures de jeu, c'est qu'elles se sont enchaînées sans temps mort, et l'on ne s'est jamais ennuyé.
Ajoutez à tout ceci une bonne dose de puzzles et d’énigmes et vous obtenez un cocktail qui certes ne brille pas par son originalité mais qui est maîtrisé et extrêmement divertissant. On a constamment envie d’aller de l’avant et d’en découvrir un peu plus. C’est d’autant plus vrai que pour enrichir un peu son jeu, Eidos a truffé ses niveaux de Tombeaux à explorer et de zones plus ou moins cachées. À ce titre, les zones aquatiques gagnent en importance parce que la moindre mare peut cacher un tunnel qui mène à une suite de grottes immergées, où l’on pourra peut-être trouver, qui sait, quelques secrets. L’eau occupe une grande place dans le monde de Shadow of the Tomb Raider, ajoutant régulièrement une bonne dose de stress puisque l’on a toujours la crainte d’aller trop loin et de manquer d’oxygène, même si les développeurs ont placé à intervalles réguliers des poches d’air servant de points d’ étapes. Mais il faudra aussi prendre garde aux différents prédateurs marins, types murènes et piranhas, qui peuvent compliquer la progression et pimenter vos petites virées sous-marines.
Shadow of the Tomb Raider n’invente rien et il est probable que certains joueurs le lui reprochent. Mais il donne l’impression d’avoir réussi à perfectionner les mécaniques instaurées en 2013 par le reboot. Plus riche, plus complet, il est surtout plus amusant grâce à sa jungle et un plaisir d’exploration constamment renouvelé. Pour la première fois dans cette trilogie, on a l’agréable sensation d’incarner une aventurière, une exploratrice, qui cherche à résoudre une énigme qui permettra de sauver l’humanité d’une terrible apocalypse. C’est tout ce que l’on attend d’un jeu de ce genre. Espérons que l’ensemble du jeu soit à la hauteur de ces cinq premières heures.