Secret of Mana. En trois mots, tant de souvenirs impérissables ressurgissent en nos mémoires. Environnements magnifiques, combats légendaires et musiques inoubliables, ce RPG de Squaresoft sorti en 1993 est sans aucun doute un des plus fiers représentants de l’apogée 16-bits. Bien conscient de la popularité de ce chef-d’oeuvre d’antan, celui qu’on appelle aujourd’hui Square Enix a décidé d’en faire un remake 3D pour 2018, pour les 25 ans du jeu. Bonne nouvelle ? Pas sûr…
Faire un remake est toujours un pari risqué. Si l’annonce du retour d’un jeu de légende remis au goût du jour fait toujours son effet (cf Final Fantasy VII Remake à l’E3 2015), les joueurs restent des êtres particulièrement exigeants quand on touche à leurs souvenirs les plus chers. Et si les bons exemples sont nombreux, le remake de Resident Evil éclipsant sans peine l’original par exemple, on est jamais à l’abri d’une erreur de casting. Autant être direct et concret : après y avoir joué, nous avons bien peur que ce soit le cas de Secret of Mana.
Dans l’esprit, ce remake reprend plan pour plan l’original ce qui en soit n’est pas nécessairement un mal. On commence donc avec la scène où le héros, Randi (vous pouvez changer les noms, n’ayez crainte), essaie de passer une cascade sur un tronc d’arbre avec deux de ses amis. Premier changement d’importance, tous les dialogues sont doublés (anglais et japonais), et premier choc, le doublage anglais est catastrophique. Non seulement la plupart des acteurs sonnent faux à chaque phrase, mais on a vraiment l’impression qu’ils lisent tous leurs textes plus qu’ils ne les jouent. Effet immédiat : cela donne un côté cheap à l’aventure qui ne va pas s’arranger par la suite.
Il faut dire que visuellement, ce remake n’est clairement pas à la hauteur des espérances des joueurs. Comme précisé auparavant, l’original était à la pointe, proposant des décors absolument éblouissants pour l’époque, avec une incroyable diversité. Du pixel oui, mais du beau. Une prouesse aux antipodes de ce remake 3D au style chibi vu et revu. Certes, le chibi n’est pas un défaut en soi, mais la pauvreté de l’inspiration en matière de décors et de design des monstres est affligeante. On a l’impression d’être devant une sous-production sur mobile et le jeu arrive juste au niveau des remakes de Final Fantasy III et Final Fantasy IV, sorti il y a une dizaine d’années sur Nintendo DS. Et encore, il n’a même pas leur charme ! Quand on voit le travail réalisé sur World of Final Fantasy par exemple, on se dit forcément que Square Enix pouvait faire mieux. Un constat qui se confirme définitivement face au travail sur les animations, d’une mollesse insoutenable, le jeu ayant perdu de toute sa vigueur.
Toutefois, peut-être découvrez-vous Secret of Mana et souhaitez savoir de quoi il en retourne. Le ou les joueurs contrôle(nt) un trio de héros constitué d’une jeune Randi, de la princesse au caractère bien trempé Prim et du lutin amnésique Popoï. Leur quête consiste à retrouver toutes les Graines de Mana issu de l’arbre du même nom pour redonner sa force à l’Epée Mana, sur lequel Randi a mis la main semble-t-il par inadvertance. Bien sûr, l’épopée sera longue et semée d’embûches, l’épisode original étant connu pour enchaîner les combats de boss comme rarement vu dans le genre. On retrouve naturellement un gameplay particulier qui s’approche du A-RPG dans les déplacements tout en utilisant un système d’attaque avec cooldown, obligeant le joueur à attendre le rechargement de sa barre entre chaque offensive. Le problème de ce système, c’est qu’il n’a pas nécessairement bien vieilli, surtout transposé dans un monde en 3D. Le manque de pêche des animations n’aidant pas, on a un certain sentiment de lenteur sur tous les affrontements.
La session ayant été plutôt courte, nous n’avons malheureusement pas pu jouer avec plusieurs personnages. Du coup, difficile de dire ce que donnera l’intelligence artificielle des compagnons et surtout le jeu à deux et trois, une des grosses features de Secret of Mana à l’époque. Espérons que l’intelligence artificielle ait été améliorée depuis… Nous n’avons pas pu accéder au système de magie non plus, disponible que plus tard dans le jeu. Si le système d’anneau (et de pause active) était révolutionnaire à l’époque, pas sûr qu’il ait très bien vieilli et on se demande encore ce qu’il pourrait donner dans ce remake.
Bref, s’il reste beaucoup d’inconnues en ce qui concerne ce nouveau Secret of Mana, on ne peut pas dire que ce qu’on en voit jusqu’ici est très rassurant. Même la promesse de « nouvelles scènes » ne ressemblent, sur ce qu’on en a vu, qu’à quelques phrases supplémentaires avec un ou deux plans de caméras. Même si les musiques de Hiroki Kikuta sont toujours aussi enivrantes, on est très inquiets quand à la suite des événements pour un titre qui sort dans quatre mois, le 15 février 2018.
On aurait aimé pouvoir vous dire que le prochain Secret of Mana sera génial. Malheureusement, pour le moment, on ne peut qu'être choqué par ce remake sans âme qui propose une 3D datée, des animations molles, un design peu inspiré et un voice-acting au ras des pâquerettes, en tout cas dans sa version anglaise. Le travail nécessaire semble immense et nous ne voyons pas comment les équipes de Square Enix arriveront à en faire un jeu digne du chef d’oeuvre qu’il était autrefois. A vrai dire, même en le prenant pour un jeu à part, le manque d’action risque de rebuter les nouveaux joueurs. On peut toujours croiser les doigts pour un miracle...