Après Arx Fatalis et la saga Dishonored, les développeurs français d’Arkane poursuivent leur exploration d’univers à part avec Prey, une aventure au confluent des grands thèmes de la science-fiction cinématographique. Une visite du studio texan d’Arkane, à Austin, aura même permis d’en savoir un peu plus sur ce jeu qui s’annonce pour le moins fascinant…
PIXELS ET PELLICULE
« L’approche cinématographique du jeu a été décidée très tôt, livre d’emblée Susan Kath, Lead Producer sur Prey. Raphaël Colantonio (réalisateur), Emmanuel Petit (Level Architect) et Sébastien Mitton (directeur artistique) avaient d’ailleurs un avis assez tranché sur la manière d’aborder l’aventure, en particulier le tout début de l’histoire. Je me rappelle en particulier de la première chose sur laquelle tout le monde était tombé d’accord, à savoir que la scène d’ouverture devait être surprenante. Le premier jour de travail de Morgan dans le jeu devait révéler finalement au joueur que le monde, dans lequel il allait évoluer, n’était pas forcément celui qu’il attendait. » A l’instar d’un véritable long-métrage, Prey use donc d’un procédé très cinématographique pour débuter l’aventure, à savoir une longue scène d’exposition du personnage principal Morgan Yu. Le joueur peut ainsi le contrôler librement à la première personne afin de tester ses capacités basiques.
Cette mise en bouche, sous forme de tutoriel, témoigne déjà du gros travail fourni par l’équipe d’Arkane pour rendre crédible l’univers dans les moindres détails. Un travail sur le long terme comme en témoigne Susan Kath, qui ne cache d’ailleurs pas son enthousiasme en dépit des efforts que cela impliquait : « J’ai rejoint le studio Arkane d’Austin il y a environ quatre ans pour travailler sur la production du dernier DLC de Dishonored, Les Sorcières de Brigmore. J’étais très excitée d’intégrer cette équipe répartie entre les Etats-Unis et la France, même si j’ai dû apprendre à me lever très tôt en raison du décalage horaire (rires) ». Elle poursuit : « Le développement du jeu a pris environ trois ans. C’est le studio Arkane d’Austin qui s’en est principalement chargé, même si nous avons collaboré avec celui de Lyon pour connaître leur avis et échanger nos opinions et idées. Puisque qu’outre le fait que le studio d‘Austin est petit, c’est tout de même à Lyon que se trouvent les bases du savoir-faire d’Arkane. »
C’est en juillet 2006, soit environ sept ans après la création du studio Arkane à Lyon, que Raphaël Colantonio ouvre une succursale aux Etats-Unis, précisément dans la ville d’Austin. Le choix de la capitale de l’état du Texas n’est pas anodin, puisque c’est là-bas que résidaient à l’époque plusieurs développeurs de la série des Wing Commander, mais aussi Richard Garriott, créateur de la saga Ultima, dont Colantonio était un immense fan. Mais ce n’est pas tout car Austin était aussi le lieu où se trouvait le mythique studio Ion Storm, auteur de Deus Ex. D’ailleurs, Ricardo Bare, aujourd’hui Lead Designer sur Prey, y travaillait à l’époque. Autant de raisons au final d’implanter à Austin un second studio Arkane, comptabilisant aujourd’hui une petite cinquantaine d’employés.
BEAUCOUP PLUS QU’UN REBOOT
Sorti en juillet 2006 sur PC, le jeu Prey original était l’œuvre du studio Human Head. Onze ans plus tard, c’est au tour d’Arkane de se pencher sur ce titre qui dépasse nettement le cadre du remake, comme l’explique Ricardo Bare. « Prey n’a aucun lien avec le jeu original, nous utilisons seulement le titre, précise le Lead Designer. C’est simple en réalité : il s’agit juste d’une opportunité. Arkane travaillait déjà à l’époque sur un nouveau projet, dont la structure devait ressembler à Arx Fatalis, c’est-à-dire un jeu en monde ouvert au lieu d’un jeu basé sur des missions. Nous voulions aussi que l’aventure se déroule dans un univers de science-fiction et inclue des pouvoirs, du piratage, des extra-terrestres et une station spatiale. La direction de ZeniMax nous a alors dit qu’elle possédait les droits de la franchise « Prey ». Nous avons donc accepté d’en reprendre le titre pour en faire un reboot car cela collait parfaitement à nos ambitions. »
Pourvu d’une nouvelle histoire signée notamment Chris Avellone, scénariste de comics (Star Wars) et Game Designer (Fallout New Vegas…), Prey semble s’orienter désormais davantage vers le thriller psychologique et fantastique, mâtiné d’action. Ainsi, le joueur se glisse dans la peau de Morgan Yu - ou de son pendant féminin Morgane Yu - et commence sa journée en tant que cobaye d’une série d’expérimentations scientifiques avec, à la clé, un nouveau job dont il ne connait pas les détails. Malheureusement, dès le début, cela ne se déroule pas du tout comme prévu puisque d’étranges créatures attaquent les lieux. Reprenant un peu plus tard ses esprits, Morgan tombe de Charybde en Scylla en découvrant petit à petit que la réalité n’est pas du tout celle qu’il pensait être...
« Notre directeur créatif, Raphaël Colantonio, voulait absolument que le début du jeu donne le sentiment au joueur de devoir perdre ses certitudes en allant de surprises en surprises, explique Ricardo Bare. Vous avez ainsi l’impression de commencer l’aventure sur Terre en débutant votre nouveau job mais, en réalité, vous vous retrouvez enfermé au sein d’un laboratoire. Il s’agit de la première surprise. Car, bien vite, vous découvrez que vous êtes dans un laboratoire situé dans l’espace et non pas sur Terre. Cette seconde surprise va déboucher rapidement sur une troisième encore plus choquante : lorsque vous regardez la première vidéo, vous réalisez que c’est vous à l’écran et qu’en plus vous vous adressez à vous-même. Mieux : de votre côté, vous ne vous souvenez de rien mais ce double, qui possède votre voix et vos traits, vous demande de faire sauter la station spatiale !
Cet enchainement d’évènements qui aboutit à prendre des décisions et, dans le gameplay, à faire des choix parfois radicaux semble apparaître comme une des marques de fabrique du studio. « Nous essayons de faire des jeux dans lesquels le joueur a beaucoup de liberté, révèle Ricardo Bare qui ajoute Dans le cas de Prey, nous fonctionnons comme certains films de science-fiction qui offrent un suspense particulièrement efficace et qui parviennent à semer le trouble chez le spectateur/joueur ne comprenant pas vraiment ce qui lui arrive.» Et même lorsque celui-ci découvre la vérité sur quelque chose, cela ne fait que poser une nouvelle interrogation. Le Lead Designer de Prey précise enfin qu’« Il y a une poignée de longs-métrages qui savent parfaitement agencer cette série de surprises, mais je pense toutefois que Moon est l’exemple le plus probant. » Si Moon semble effectivement concentrer un grand nombre de thèmes propres au cinéma de science-fiction (lire encadré), en revanche ce n’est pas le seul, loin de là.
Il y a un panaché entre Total Recall, Matrix, Sunshine de Danny Boyle ou encore Aliens de James Cameron. On trouve même des allusions dans le jeu à Un Jour sans fin mais aussi à The Truman Show. Ricardo Bare, Lead Designer.
Car l‘influence du cinéma de genre est prégnante à plusieurs niveaux dans cette œuvre de pixels. « Si le film de Duncan Jones est notre plus grosse influence, nous sommes passés néanmoins par énormément de couches ! , s’exclame Raphaël Colantonio. Je dirais ainsi qu'il y a aussi un panaché entre Total Recall, Matrix, Sunshine de Danny Boyle ou encore Aliens de James Cameron. On trouve même des allusions dans le jeu à Un Jour sans fin, lorsque le personnage est perdu dans une boucle temporelle, mais aussi à The Truman Show. » Il faut dire que, tout comme Jim Carey dans ce dernier long-métrage, le héros est observé secrètement et en permanence – tout du moins au début - par des scientifiques désireux d’analyser ses réactions et de tester sur lui de multiples choses…
Si plusieurs longs-métrages de science-fiction ont droit de cité dans Prey, il y en a toutefois un qui constitue une source d’inspiration principale : Moon. Sorti en 2009, ce premier long-métrage de Duncan Jones, fils du regretté David Bowie et réalisateur de Warcraft, prend place dans une station lunaire où travaille Sam Bell (Sam Rockwell). Cela fait plus de trois ans que ce technicien gère l’extraction de l’hélium 3, palliatif à la crise de l’énergie sur Terre. Il assume sa tâche quotidienne uniquement accompagné d’un robot gérant les détails (doté de la voix de Kevin Spacey). Coupé de la civilisation, il ne communique qu’avec sa femme et sa fille par l’intermédiaire de messages vidéo enregistrés. Alors que son contrat arrive à terme, Sam commence à être victime d’hallucinations et décide donc de mener l’enquête pour savoir d’où viennent ses visions...
Voyage spatial, isolation extrême, mémoire trafiquée ou encore utilisation de clones : Moon apparaît sans conteste comme un excellent huis-clos qui compile à lui-seul de nombreux thèmes de la science-fiction en vigueur dans Prey. A tel point d’ailleurs que l’éditeur Bethesda a profité courant mars 2017 du Alamo Film Festival – festival de cinéma indépendant – pour organiser à Austin une projection spéciale du film en salles. Celle-ci était même accompagnée d’une présentation du jeu par les développeurs ainsi qu’une séance de hands on. Petite cerise sur le gâteau pour les cinéphiles : le cinéma disposait d’un distributeur automatique de DVD/Blu-Ray à 10 $ !
UNE UCHRONIE AUDACIEUSE
Les uchronies au cinéma produisent souvent d’excellents résultats, comme en témoignent par exemple Watchmen (une Amérique alternative où les héros costumés ont modifié l’Histoire) ou encore 2009 Lost Memories (la Corée est devenu un territoire japonais). Si celles-ci demeurent toutefois peu nombreuses, c’est encore plus rare dans le domaine des jeux vidéo. Les développeurs de Prey n’ont pas hésité pourtant à franchir le pas. « Il me semble que cette idée d’uchronie provient du directeur artistique Sébastien Mitton, raconte Ricardo Bare. Et si Kennedy avait survécu à son attentat ? Et s’il avait décidé ensuite de pousser encore plus loin l’industrie spatiale en incitant à développer la station spatiale abandonnée par les russes ? L’équipe a trouvé cette idée d’autant plus brillante qu’elle s’insérait à merveille dans la chronologie des évènements et qu’elle aboutissait à opérer plusieurs changements esthétiques très intéressants. Il y avait alors aussi la possibilité d’exploiter un tas d’idées cools, comme le fait d’accrocher aux murs des portraits de Kennedy avec les cheveux blancs car il était finalement vivant.»
En filigrane, le fond historique de l’aventure évoque donc, outre l’assassinat - manqué - de Kennedy en 1963, le programme Kletka. Il s’agit d‘une installation spatiale, fruit d’une collaboration américano-soviétique, destinée à contenir la présence d’extra-terrestres mystérieux. Au fil des années, et sous l’impulsion de Kennedy, cette dernière prend petit à petit la forme d’une station spatiale opérationnelle dans laquelle des équipes de scientifiques étudient les extra-terrestres. Problème : en 1998, un accident survient causant la mort des chercheurs et l’abandon de la station. Quelques années plus tard, la corporation high-tech Transtar la reprend en main pour une bouchée de pain et la transforme en un centre d’innovation appelé Talos I. Le but est d’attirer les plus grands scientifiques du monde, afin de mener de nouvelles recherches sur les créatures et d’en tirer un substantiel profit. En 2032 - année où se déroule l’action de Prey - les résultats dépassent finalement l’entendement. « Nous avons vraiment adoré tout ce qu’impliquait cette uchronie qui offre au final une vision alternative de l’histoire de notre planète telle que nous la connaissons. » précise Ricardo Bare. Résultat : ce parti pris uchronique permet aux développeurs de laisser libre cours à leur imagination, y compris au niveau du style visuel…
UN UNIVERS RETROFUTURISTE
« L’univers de Prey est historiquement inspiré des années 60, dans la mesure où notre équipe a fait beaucoup de recherches au niveau de l’esthétique et du design en vigueur à l’époque de Kennedy, avoue le Lead Designer Ricardo Bare. Voilà pourquoi la station spatiale Talos I de Transtar affiche ce look à la fois surrané et high-tech. » Qualifié d’art Néo Déco, ce style visuel s’avère en quelque sorte une représentation du futur comme on la concevait dans les années 60/70. Certains environnements de la station spatiale offrent donc une sorte de confort high-tech démodé. Le directeur artistique Raphaël Colantonio n’hésite d’ailleurs pas à divulguer une des sources visuelles principales de l’équipe : « Pour les décors, nous sommes allés à New York prendre des photos de l’hôtel Viceroy. »
En effet, ce dernier, situé sur la 57ème rue, est un des hôtels de luxe datant de cette époque et dont la décoration fait sensation. Ce choix esthétique n’est évidemment pas un hasard car il évoque le style d’un réalisateur de cinéma dont Colantonio est fan : « Visuellement, il y a un peu de Terry Gilliam dans Prey, dit le directeur artistique, dans le sens où nous voulions une technologie qui soit un peu crue et réaliste, mais en même temps il fallait éviter de verser dans le « dark » parce que nos extra-terrestres sont déjà comme ça. Donc il fallait contraster en partant sur du très coloré. »
Pas étonnant donc de retrouver esthétiquement des traces de l’univers de l’ex-Monty Python et metteur en scène de Brazil, au détour de décors encombrés de gros tuyaux ou d’accessoires tels que d’imposantes sculptures dorées et ailées (au-dessus à gauche le jeu Prey et à droite le film Brazil). « L’identité visuelle du jeu s’est débloquée à partir du moment où nous avons écrit l'histoire en remontant jusque dans les années 1960 et en développant l'aspect uchronique de l’aventure, explique Colantonio. Cela nous a permis de dégager trois ou quatre filtres très importants qui ont donné à cet univers une vraie cohérence. »
DANS L’ESPACE, PERSONNE NE VOUS ENTEND CRIER
Impossible de ne pas parler ici de la saga Alien car, bien évidemment, le personnage de Morgan Yu renvoie à Ripley, d’abord dans son isolement absolu au sein d’un environnement étranger et hostile où il faut survivre coûte que coûte. Les deux œuvres apparaissent ainsi clairement comme des huis-clos spatiaux. De même, les personnages principaux sont cernés par des monstres extra-terrestres extrêmement belliqueux qui non seulement veulent sa mort mais, en plus, peuvent se fondre dans le décor (voir par exemple la scène d’Aliens où les créatures se détachent des parois pour tomber sur les Marines). Par ailleurs, les petites créatures, Mimic, qui se déplacent rapidement sur le sol et peuvent bondir sur le joueur évoquent directement les Facehuggers d’Alien. A la différence toutefois que les Mimics sont capables de se métamorphoser en petits objets afin de tromper l’adversaire. Autre point de convergence entre la saga Alien et Prey : dans les deux cas, une puissante corporation veut « dompter » les créatures, ou tout du moins connaître leurs secrets pour mieux en tirer profit (Weyland Corp dans le film et Transtar dans le jeu)…
Si le joueur ne parvient guère à deviner à quel genre de monstruosités il a affaire dans l’aventure, c’est délibéré de la part des développeurs. « Nous voulions que le design des créatures apparaisse mystérieux et fasse écho au fait qu’en tant que joueur, vous ne compreniez rien à ce qui se passe, explique le Lead Designer Ricardo Bare. Ce ne sont donc pas de gros insectes immondes ou toutes autres saletés de cet acabit, mais quelque chose qui possède une forme, une couleur, des mouvements et même des pouvoirs qui reflètent cet état d’incrédulité vécu par le joueur. Voilà pourquoi nous avons choisi d’en faire des ombres noires comme des tâches d’encre, capables de se métamorphoser et de se fondre dans le décor. »
En réalité, les créatures appartiennent à une sorte d’écosystème où chacun possède sa place. Parmi les Typhons connus, il y a d’abord les Mimic - les plus petits – qui servent d’éclaireurs. Puis, il y a les Tisseurs qui récupèrent la matière amassée par les Mimics pour engendrer les Fantômes. Le but de ces derniers, de forme humanoïde impressionnante, est de protéger les autres Typhons. Viennent ensuite les Télépathes qui prennent le contrôle des êtres humains, ainsi que les Technopathes qui manipulent les machines à bord de la station. Last but not least : les puissants Cauchemars ne sont créés que pour traquer et mettre en pièces le joueur. A noter enfin que plus Morgan s’implante des Neuromods de Typhons (accessibles dans la seconde partie de l’aventure), et plus les Cauchemars sentent sa présence.
Si les Typhons existent donc bel et bien et se révèlent même très dangereux, ils restent néanmoins un réel mystère pour Morgan et le joueur, durant une bonne partie de l’aventure. Ce parti pris des développeurs semble prendre sa source dans un classique de la science-fiction des années 70, apprécié particulièrement par Ricardo Bare. « Il y a un film russe dont j’aimerais aussi parler, c’est Solaris, lance le Lead Designer. Je n’ai pas vu la version américaine avec George Clooney, mais j’ai vu le film original et, en plus, j’ai lu le livre. S’il est plutôt lent, Solaris contient toutefois quelques idées vraiment cools, comme le fait que l’extra-terrestre n’est pas un monstre mais quelque chose que les personnages ne comprennent littéralement pas. »
Plusieurs posters et affiches de cinéma sont disséminés un peu partout dans la station spatiale Talos I. Il s’agit clairement de clins d’œil mais aussi d‘indices concernant la trame scénaristique ainsi que l’évolution du personnage principal (voir le poster « A Killer Inside »). Parmi les affiches à retenir, il y a par exemple « The Owl » avec en vedette James Bradley. Ce dernier est en réalité le nom d’un astronome anglais du 18ème siècle à qui on doit entre autres la confirmation expérimentale – à travers l’observation des étoiles - de la révolution de la Terre autour du Soleil. Mais le plus drôle reste cependant le poster de « Transgressions » qui offre un casting bien connu des amateurs de jeux vidéo. Ainsi, sous forme d’anagrammes approximatives, il est d’abord possible de reconnaître immédiatement le réalisateur du jeu et directeur d’Arkane Raphaël Colantonio (« Antonio Frolca ») qui prête d’ailleurs ses traits de manière stylisée au personnage de l’affiche. Ensuite, il est aisé de discerner Arkane Studios derrière « Enarka Studios presents… » ou encore le Lead Designer Ricardo Bare alias « Brandon Ricare ». Enfin, les deux derniers acteurs factices, Will Richson et Marty Montinez, cachent respectivement le Lead Level Designer Rich Wilson et le Level Designer sur Dishonored Monty Martinez.
DES POUVOIRS FANTASTIQUES
S’il y a une idée géniale dans Prey, c’est bien celle des Neuromods. Enthousiaste, le directeur artistique Raphaël Colantonio l’explique : « Les Neuromods proviennent de théories réelles. Ricardo Bare, Game Designer sur le jeu et qui a participé aussi à son écriture, a lu de nombreux articles scientifiques de théories où les savants imaginent de telles applications. Il s’agit d’une modification de modèles neurologiques basés sur des éléments extérieurs, comme la lumière. » De son côté, Ricardo confirme : « Parmi toutes les choses qu’elle expérimente à bord de la station spatiale, la compagnie Transtar met au point la technologie des Neuromods. C’est à la base un dispositif qui prend des photos de votre cerveau. Il y a une science réelle derrière ça qui s’appelle la connectomique, la science qui étudie la connectivité fonctionnelle et structurelle du cerveau et qui en établit un plan. » Le Lead Designer poursuit alors en prenant un exemple concret : « La question est de savoir de quoi aurait l’air un cerveau si, par exemple, un individu était capable de parler français. Eh bien, nous partons du postulat que les Neuromods permettent de reconfigurer, à l’aide de lasers, l’architecture du cerveau de cet individu lorsqu’il se plante l’appareil dans l’œil. Dans ce cas précis, le résultat final serait donc votre cerveau d’origine mais augmenté de la capacité de parler français : « Bon, je parle français maintenant ! » (rires) (prononciation en français, nda).
Les applications imaginées par les développeurs dans l’aventure se révèlent aussi variées qu’étonnantes. Puisque les Neuromods, débloqués petit à petit en échange de points Neuromods, relèvent de trois catégories - scientifique, ingénieur et sécurité - et permettent de débloquer au total une quarantaine d’améliorations pour Morgan (boost de santé ou de puissance de feu, possibilité de soulever des objets très lourds…). Sans compter plus tard dans l’aventure une vingtaine de pouvoirs aliens de trois styles différents : Energie, Transformation et Télépathie. Tous ces pouvoirs s’avèrent évidemment une véritable source de plaisir pour le joueur qui peut alors s’amuser comme bon lui semble avec les ennemis. Mais c’est aussi, dans le jeu, une source de profit pour la compagnie Transtar.
« Elle invite sur la station spatiale des personnalités - joueur de piano, athlète, scientifique – dans le but d’extraire à l’aide de cette technologie leurs facultés spécifiques et de les donner ensuite à quelqu’un d’autre, dévoile Ricardo Bare. Il se trouve que la compagnie a découvert cette technologie en étudiant les extra-terrestres. Le problème est qu’elle a réussi à transvaser les facultés d’un individu à un autre, mais elle n’a pas encore trouvé le moyen d’extraire une faculté extra-terrestre pour la transplanter ensuite dans un humain. Morgan s’avère donc en être le premier bénéficiaire et hérite, à un moment du jeu, de pouvoirs extra-terrestres très puissants. »
Attention toutefois, l’utilisation intensive de Neuromods peut provoquer certains troubles chez Morgan. « Le fait d’installer ces améliorations ou de les désinstaller détruit progressivement la mémoire du personnage, précise Ricardo Bare. Voilà pourquoi ce dernier est amnésique et a l’impression de revivre encore et toujours la même journée, lorsque les scientifiques expérimentent sur lui à chaque fois de nouveaux Neuromods. » Le résultat final devrait réserver quelque surprises supplémentaires, d’autant que l’aventure semble se situer dans la lignée qualitative de Dishonored. « Prey lui est comparable dans la mesure où cet univers de SF offre une histoire profonde et un gameplay aussi expressif que dans Dishonored, même si cadre et mécaniques sont différents, conclue le Lead Designer. Car ici l’aspect RPG est un peu plus prononcé et l’infiltration reste une option sans être au cœur du gameplay. Mais cela reste un jeu qu’il est possible de jouer de multiples manières. » Vérifications complètes lors du test le 5 mai prochain !