Si on a longtemps entendu dire qu'il était plus simple de jouer sur consoles que sur PC, il faut avouer que la limite entre les plates-formes paraît aujourd'hui assez floue. Diverses raisons expliquent ces changements, que ce soit l'arrivée des disques durs ou la démocratisation du jeu en ligne, mais quoi qu'il en soit, le joueur console est aujourd'hui bien souvent contraint d'installer son jeu avant de pouvoir le lancer, de télécharger des patchs, de souscrire à un abonnement payant pour jouer en ligne, etc. Et c'est sans compter sur les nombreuses erreurs, les bugs, les problèmes serveurs ou autres corruptions de sauvegardes qui peuvent ruiner l'expérience de jeu par la suite. Attardons-nous donc un instant sur ces nouveautés. Sont-elles réellement indispensables ? Vont-elles dans le sens du joueur ?
Notons que cette news n'entend pas être exhaustive sur les différents problèmes qui peuvent intervenir, mais reflète simplement le sentiment général d'un rédacteur soumis à des contraintes plus importantes au jour le jour. Aussi, utiliserai-je la première forme du singulier pour décrire mon expérience personnelle et les différents problèmes auxquels j'ai pu être confronté.
Pour commencer, je vous propose un petit retour dans le temps. Nous sommes en 1993, la Super Nintendo et la Megadrive se mènent une guerre sans merci pour la domination du marché. C'est le moment que choisit Electronic Arts pour sortir un titre qui deviendra le premier d'une très longue série : FIFA International Soccer. Il s'agit là d'un cas très intéressant puisqu'il est facile de le comparer aux épisodes sortant aujourd'hui sur les consoles de dernière génération. Nous vous avons alors préparé une petite expérience prenant la forme d'une petite vidéo comparative entre les versions SNES de FIFA 94 et Xbox One de FIFA 15, le but étant très simple : comparer le temps nécessaire au lancement d'une partie en 1994 et en 2015.
Vous en conviendrez probablement, le résultat est sans appel. Il faut 40 secondes pour lancer une partie sur la versions SNES contre 2 minutes 30 sur la version Xbox One, soit 1 minute et 50 secondes de plus. Outre le fait de démontrer mon niveau de jeu pitoyable sur FIFA, cette vidéo met clairement en évidence la lourdeur des étapes à franchir pour lancer un jeu de nos jours. Différents paramètres entrent en compte ici, et je vais tâcher de vous les détailler un par un.
Des systèmes d'exploitation de plus en plus lourds
Déjà, le premier élément faisant perdre du temps à la Xbox One est le chargement et l'affichage d'un système d'exploitation complexe. En 1994, cela était réservé aux seuls PC qui devaient combiner en une seule interface plusieurs fonctions distinctes. Les consoles de leur côté n'avaient pas à présenter ce genre de fonctionnalités puisque leur tâche se limitait à lancer des jeux. La langue était prédéfinie, la résolution n'avait pas à être modifiée, bref, on mettait le jeu dans la console et on y jouait directement, sans avoir à se poser la moindre question. C'était d'ailleurs un élément fréquent à une époque où chaque objet avait une utilité bien définie, que ce soit la console ou bien le téléphone, le lecteur CD, etc. Cela ne signifie pas pour autant que la console marchait sans système d'exploitation, mais tout était fait pour que les choses soient transparentes pour le joueur.
Seulement avec l'évolution de la technologie, les constructeurs ont jugé nécessaire d'apporter quelques fonctionnalités supplémentaires aux machines. Sortie en 1994, la Saturn pouvait par exemple lire des CD audio, ce qui justifia l'apparition d'un menu basique permettant non seulement de changer de piste facilement, mais aussi de modifier quelques paramètres de la console. Toujours chez Sega, en 1998, la Dreamcast alla jusqu'à offrir une compatibilité avec Windows CE qui permettait aux studios d'adapter plus facilement des jeux PC, mais aussi de simplifier le travail de développement. Alors entendons-nous bien, Windows n'était pas présent directement sur la machine puisqu'il devait être chargé depuis les jeux compatibles, mais il s'agissait là d'une première tentative d'ouverture assez significative aux systèmes d'exploitation plus complexes.
Un peu plus tard, la PS2 ira encore plus loin dans son positionnement en tant qu'appareil multimédia grâce à une fonctionnalité révolutionnaire : la lecture des DVD vidéo. Après tout, la machine était capable de les lire, donc pourquoi ne pas faire en sorte de proposer l'option à ceux qui souhaitaient en profiter ? C'est ainsi qu'est apparu un système à la navigation plus riche offrant des options audio, vidéo, de gestion de la mémoire, etc.
Mais à cette époque, les systèmes sont figés, n'évoluent pas, ce qui pose quelques soucis de sécurité qui seront adressés dès la septième génération avec la Xbox 360, la PS3 et la Wii qui s'offrent régulièrement des mises à jour de firmware. Assez lourdes et longues à télécharger, elles montrent surtout le virage très net des consoles qui s'orientent désormais plus vers un fonctionnement évolutif comme seul le PC le faisait auparavant. D'ailleurs, ces nouveaux systèmes proposent de plus en plus de fonctionnalités comme la navigation sur Internet, ce qui multiplie les menus et sous-menus avec ce que cela implique de contre-intuitivité et de recherches infructueuses. Il faut paramétrer sa connexion Internet, gérer ses profils, ses sauvegardes, son périphérique de sortie, etc.
Avec la PS4 et la Xbox One, on va ajouter toujours plus de fonctionnalités aux menus en place pour atteindre des sommets de lourdeur. Les constructeurs nous ont promis des préchargements de jeux, de nouveaux périphériques, le partage de vidéos en ligne, etc. Evidemment, le temps nécessaire pour allumer la console augmente énormément, ce qui est clairement visible dans notre comparatif.
Ce qui l'est moins en revanche c'est la lourdeur des tâches courantes. N'importe quel joueur confronté à la PS4 et à la Xbox One sait que tout ne marche pas toujours comme prévu. Télécharger un simple jeu peut en effet être un chemin de croix tant les outils sont mal pensés. Sur PS4 par exemple, une fois un téléchargement lancé, rien ne se passe. Il faut aller sur le menu Notifications puis Téléchargements pour pouvoir consulter l'état d'avancement de l'opération ou simplement la mettre en pause. Et il s'agit là du meilleur des cas puisqu'il m'est arrivé que le téléchargement ne s'affiche tout simplement pas dans la liste sans redémarrer la console.
Prendre un screenshot sur Xbox One peut aussi s'avérer extrêmement difficile alors que la Xbox 360 s'en sortait très bien à ce niveau. Il faut ici enregistrer un extrait vidéo, télécharger une application pour l'uploader, puis la retrouver sur un PC pour capturer une image. Bref, c'est déjà compliqué, mais ce n'est que le début.
Les connexions permanentes bel et bien obligatoires
Attardons-nous maintenant sur un second point faisant perdre beaucoup de temps à la version Xbox One, à savoir la connexion régulière au Net, la synchronisation des données et la recherche de mises à jour intégrées au jeu. Il s'agit d'un point prenant de plus en plus d'ampleur depuis l'arrivée du Xbox Live sur la première Xbox. C'est pourtant à nouveau Sega qui a lancé les hostilités avec la Dreamcast qui comprenait dans sa version de base un modem 56k. Le bas débit est toutefois un frein et peu de gens disposent d'un accès au Net à cette époque. La sortie d'un adaptateur haut débit proposé à environ 100 € ne changera rien et il faudra donc attendre la Xbox pour assister à la démocratisation des consoles connectées.
Disposant d'un port Ethernet permettant de se connecter facilement à n'importe quel routeur, mais aussi d'un périphérique wi-fi vendu en supplément, la Xbox constitue la première vraie console PCisée. Cela n'a rien d'étonnant dans la mesure où Microsoft a fait ses armes sur le PC, mais pour les joueurs consoles, c'est le début d'une nouvelle ère. Couplé à un disque dur interne faisant lui aussi son apparition en 2002, le Xbox Live permet non seulement de jouer en ligne, mais aussi de télécharger des démos, du contenu supplémentaire, des jeux complets, puis plus récemment de regarder la télé, d'utiliser Skype en jeu, etc. C'est certes un service devenu payant, mais qui n'en reste pas moins un plus indéniable que peu de joueurs seraient enclins à perdre aujourd'hui.
Il faut toutefois avouer qu'on paye ces quelques fonctionnalités très cher. Rappelez-vous, lors de l'annonce des consoles nouvelle génération, on nous parlait de connexion permanente au Net. Le but clairement affiché était de lutter contre le piratage, le marché de l'occasion, etc., mais aussi d'offrir une expérience connectée avec des jeux se mettant à jour seuls en arrière-plan par exemple. Depuis, les constructeurs ont fait machine arrière de manière plus ou moins officielle, mais dans les faits, certains jeux profitent encore des reminiscences de ce système.
Personnellement (et mon cher collègue Epyon vous le confirmera), je peux citer l'exemple de NBA 2K15 et de son mode MyPlayer qui nécessite une connexion permanente pour fonctionner. En effet, la monnaie du jeu est associée à un compte en ligne alimenté à chaque action. Le problème est que si la connexion est perdue, la partie est automatiquement interrompue, même en plein match, ce qui est à la fois brutal, mal pensé et très frustrant.
Les connexions ouvrent également la porte aux éditeurs qui souhaitent sortir des jeux plus ou moins finis puis colmater les brèches par la suite. Les exemples de ce genre sont légion, et pas uniquement sur la dernière génération de consoles, puisque lors de sa sortie, Gran Turismo 5 s'était déjà offert un patch assez massif. Si vous n'avez pas été confronté au problème, imaginez : vous précommandez un jeu pour être sûr d'y jouer le plus rapidement possible puis après de nombreux reports, il finit par sortir. Mais lorsque vous croyez enfin pouvoir vous y mettre, une grosse mise à jour vous contraint à atteindre plusieurs heures supplémentaires. Rageant non ?
Et encore, GT5 était jouable, mais dans le cas d'Assassin's Creed Unity, il aura fallu 4 gros patchs pour que le jeu tourne correctement et sans trop de bugs. Le quatrième à lui seul pesait 6,7 Go, ce qui chez certaines personnes peut nécessiter une grosse nuit de téléchargement. Et il s'agit là du meilleur des cas puisque des joueurs Xbox One ont dû retélécharger l'intégralité du jeu, soit 40 Go. Bref, il faut être trèèèès patient, d'autant que les services de téléchargement de Sony et Microsoft sont en règle générale plutôt mous du genou, mais dans certains cas la patience n'est même pas suffisante. Cela a été le cas pour Alien Isolation sur PS4 qui s'est offert un patch générant plus de problèmes qu'il en résolvait. Corruptions de sauvegardes, crashs, messages d'erreur, tout y est passé, ce qui montre clairement les limites du système et surtout des méthodes de validation de constructeurs qui laissent passer tout et n'importe quoi.
Afin de contrer ce genre de problèmes, on a vu poindre des nouveautés des plus originales : un patch pour Halo : The Master Chief Collection d'abord proposé en version bêta ou une preview de patch mettant à jour les pads de la Xbox One. Avouez que ça va quand même loin... Et c'est sans parler des problèmes de serveurs qui interviennent de plus en plus fréquemment au lancement des gros jeux et qui bloquent le jeu en ligne comme ça a notamment été le cas pour DRIVECLUB ou Halo : The Master Chief Collection (encore lui). On peut également citer les différents problèmes de piratage qui peuvent intervenir et qui sont aussi la source de nombreux ennuis.
Des disques durs trop petits et capricieux ?
Si on a volontairement choisi de ne pas montrer l'installation de FIFA 15 sur notre vidéo comparative, il ne faut pas oublier que c'est désormais un passage obligé au premier lancement et qu'il peut s'avérer très long. A la base, les disques durs n'avaient pourtant pas forcément été prévus pour cela et se destinaient plus à stocker des sauvegardes toujours plus nombreuses. On ne pouvait certes plus amener aussi facilement qu'avant ses données chez un ami, mais le système était bien plus durable qu'une pile dans une cartouche de jeu. Bref, à ce niveau, on était largement gagnants. Mais rapidement, les développeurs ont cherché à installer des données sur le disque dur afin de limiter les chargements, exactement comme on le fait sur PC.
Le problème est que ces installations sont très longues et limitent un peu les ardeurs de ceux qui, comme moi, aiment de temps à autre se replonger dans un jeu pour profiter ne serait-ce que quelques minutes de son univers. En effet, les disques durs actuels ont une capacité limitée à 500 Go (soit 400 Go réellement disponibles) dans le meilleur des cas, ce qui implique de désinstaller les titres les plus lourds assez régulièrement. C'est d'autant plus vrai que le poids des jeux augmente crescendo avec par exemple un The Witcher 3 annoncé à 50 Go. En calculant bien, cela signifie donc qu'à terme on ne pourra pas avoir plus de 10 jeux installés simultanément sur un disque dur. Il reste alors la possibilité d'acheter un disque dur externe, mais cela a un coût, d'autant qu'il faut impérativement passer par la norme USB 3. Pourquoi ne pas simplement proposer des espaces de stockage plus importants sur les consoles afin de mieux coller à la réalité actuelle du marché du jeu vidéo ?
Il reste la possibilité de lancer le jeu avant son installation complète, ce qui est vraiment une bonne chose sur le papier pour gagner du temps, mais on dispose dans ce cas d'une petite partie du contenu uniquement. On s'expose aussi à quelques soucis, dont celui qui m'a donné l'envie d'écrire cette petite news. Lors du test de Shape Up, pour ne pas le citer, j'ai lancé le jeu avant la fin de l'installation, pensant gagner un peu de temps, quand la machine m'a indiqué qu'une mise à jour était obligatoire pour continuer. Naïvement, j'ai accepté la proposition pensant que le téléchargement serait lancé et l'installation du patch réalisée après celle du jeu de base. Quelle erreur ! Le patch a été installé avant le jeu lui-même, ce qui a bien évidemment rendu impossible tout lancement du jeu sans crash. L'option de réparation n'existant pas sur console, il m'a fallu tout désinstaller (ce qui a tout de même nécessité de longues minutes de recherche), puis relancer tout depuis le début en attendant patiemment avant d'installer le patch. Résultat : 2 heures perdues !
Et ce n'est pas le seul exemple de disfonctionnement de ces systèmes. Lors du test de Saints Row : Gat out of Hell, et alors que le jeu était censé être complètement installé, Panthaa a été bloqué net par des PNJ indiquant que la suite du jeu n'était pas disponible. Après redémarrage, rien n'a changé puisqu'il s'agissait d'un souci réccurent de PlayGo, le service de la PS4 censé gérer les installations en tâche de fond, les lancements avant la fin du téléchargement, etc. La seule solution viable a donc été de patienter en relançant le jeu régulièrement afin de vérifier si l'installation était enfin terminée. Pratique... Et ce problème a d'ailleurs également été rencontré lors des tests de Wolfenstein : The New Order et Resident Evil HD Remastered, ce qui commence à faire beaucoup.
La préinstallation des jeux avant leur sortie officielle pose d'ailleurs aussi quelques problèmes techniques. Ce fut notamment le cas récemment lors de la sortie de Grim Fandango Remastered sur PS4. Les joueurs ayant précommandé le jeu ont ainsi été contraints de suivre des démarches très lourdes pour enfin le lancer le jour du lancement. Il leur fallait ainsi se rendre sur le PS Store afin d'acheter la version gratuite puis se rendre dans les paramètres de la console pour restaurer les achats avant de désinstaller et réinstaller le jeu. Encore une fois, c'est pour moi un cas assez représentatif de ce qu'est devenu le jeu sur consoles.
Et ce n'est là qu'une partie des nombreux problèmes qui gangrènent les consoles d'aujourd'hui. On peut aussi citer les companion apps bloquant la progression dans Assassin's Creed Unity, les achats intégrés obligatoires pour profiter complètement d'un jeu à 70 €, etc. Finalement, en voulant s'orienter vers le PC et le smartphone en même temps tout en gardant leurs systèmes fermés, les consoles sont devenues de véritables usines à gaz et des sources d'ennuis inépuisables. C'était donc mon petit coup de gueule de la journée, en espérant bien évidemment qu'il soulève des questions, vous incite à partager vos expériences, qu'elles soient concluantes ou non, mais aussi, et surtout, à débattre du sujet dans la joie et la bonne humeur.