Ceux qui l'ont vécu à l'époque vous le diront : rarement bouleversement aura été aussi marquant et sujet à controverse pour les joueurs que le délicat passage de la 2D à la 3D dans les jeux vidéo. Aussi brutal sur le plan esthétique que du point de vue du gameplay, ce virage a constitué pour beaucoup, n'ayons pas peur des mots, un réel traumatisme dont on peut trouver des traces vibrantes encore aujourd'hui. J'en veux pour preuve la profusion de titres récents adoptant délibérément un cachet rétro censé éveiller la fibre nostalgique des plus vieux d'entre nous, certains misant tout sur l'attrait du pixel art tandis que d'autres s'attachent plutôt à démontrer les avantages des mécanismes du gameplay sur un seul plan. Braid, Limbo ou encore Dust : An Elysian Tail sont la preuve vivante que l'approche 2D a encore de l'avenir dans les jeux vidéo, et ils ne sont pas les seuls exemples à évoquer. Les premiers visuels de Ori and the Blind Forest sont ainsi suffisamment oniriques et enchanteurs pour augurer d'un titre prometteur, capable de se faire attendre au moins autant qu'un jeu AAA.
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L'héritage 2D en péril
Aussi nécessaire et salvatrice fut-elle dans les meilleurs des cas, cette transition vers la 3D ne s'est jamais faite sans concessions, voire sans sacrifices. Des éléments dont on déplore aujourd'hui suffisamment l'absence pour assister à l'émergence régulière de titres censés combler ces manques.
Car s'il y a encore des passionnés pour créer des jeux sur cartouche MegaDrive (tel Pier Solar) des années après l'arrêt de la production de la console, et s'il y a encore un public pour y jouer, c'est bien le signe qu'il manque peut-être un élément clef aux jeux d'aujourd'hui.
Ce chaînon manquant, il serait illusoire de croire qu'il réside uniquement dans l'esthétique des jeux en 2D, mais ces graphismes pixelisés n'en restent pas moins le symbole le plus parlant d'une époque dont on se refuse à admettre qu'elle puisse être aujourd'hui révolue.
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S'il est impossible d'estimer ce que l'on a réellement gagné et perdu en passant d'un Final Fantasy VI à un Final Fantasy VII, ou d'un Zelda : A Link to the Past à un Ocarina of Time, il est évident qu'aucun jeu en 3D ne pourra jamais compenser la perte d'une jolie 2D réalisée avec la minutie d'un tableau peint à la main. Il y a dans ces pixels old-school un charme « artisanal », « poétique » et « artistique » qui ne s'explique pas. Un simple coup d'oeil sur quelques-uns des titres bénis de l'âge d'or des J-RPG suffit à s'en convaincre, car quoi de plus visuellement émouvant qu'un « vulgaire » screen de SaGa Frontier 2, Valkyrie Profile ou Legend of Mana ?
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Mais s'ils sont plus que jamais en voie de disparition, les softs dotés de graphismes en 2D continuent de faire de la résistance, notamment au sein de la communauté des jeux indépendants. Alors cette bataille a-t-elle un sens ou bien est-elle perdue d'avance ? Le studio japonais Vanillaware a depuis longtemps choisi son camp !
Vanillaware, envers et contre tous
Pour rien au monde l'équipe de Vanillaware ne semblerait prête à délaisser la 2D au profit de la 3D. Cela fait d'ailleurs des années que le studio s'attache à nous démontrer sa maîtrise du sujet en mettant un point d'honneur à faire de chacun de ses titres une véritable œuvre d'art, et tout cela sans jamais négliger le gameplay. De Princess Crown à Dragon's Crown, en passant par Grim Grimoire, Odin Sphere, Grand Knights History ou Muramasa, le développeur sait accrocher le regard du joueur en le captivant à travers des thématiques aussi variées qu'inspirées. Des contes de fées aux mythes scandinaves, en passant par les croyances japonaises et l'heroïc fantasy pure, les artistes de Vanillaware ont l'assurance que ce qu'ils expriment à travers leurs œuvres transparaîtra tel quel dans le jeu. Et que l'on aime ou pas leur style, force est de reconnaître que les scènes issues de ces univers dépaysants invitent à la rêverie.
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La résistance s'organise
Il n'y a heureusement pas que Vanillaware pour défendre chèrement la cause des graphismes en 2D, et même si les autres développeurs en font rarement une exclusivité, certains d'entre eux se donnent régulièrement l'occasion de moderniser d'anciens titres sans commettre l'erreur de les déposséder de leur charme initial.
Le studio WayForward Technologies, connu notamment pour ses jeux Shantae et Adventure Time, a su offrir aux fans de A Boy and his Blob et DuckTales deux très beaux remakes. Bien que modernisé, le cachet visuel n'est pas dénaturé et suffit à dépoussiérer avec justesse des licences vieilles de plus de vingt ans !
Le travail opéré par WayForward Technologies pour rendre hommage aux premiers Contra dans le sympathique Contra 4 sur DS mérite aussi d'être souligné.
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La plupart des jeux de plates-formes récents comme Rayman Legends et Rayman Origins, Donkey Kong Country Returns ou New Super Mario Bros. U se chargent également de défendre chèrement la cause de la 2D en la modernisant de manière efficace.
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La 2,5D : le juste compromis ?
Le plus souvent, les développeurs préfèrent tout de même opter pour une réalisation en 2,5D, plus dans l'ère du temps. On parle de 2,5D lorsqu'un jeu mélange des éléments de 2D et de 3D, par exemple lorsqu'il met en scène des personnages modélisés en 3D dans des environnements en 2D ou l'inverse. Par extension, le terme est utilisé également pour définir les titres dont le gameplay se déroule sur un seul plan.
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Ce type de réalisation sur un seul plan se prête d'ailleurs autant à des titres de plates-formes, comme le remake de Castle of Illusion starring Mickey Mouse, qu'à des softs davantage axés sur l'action ou la réflexion, à l'instar de Trine, Castlevania : Lords of Shadow - Mirror of Fate ou encore Shadow Complex, et qui s'inscrivent donc dans la veine directe du gameplay des jeux en 2D.
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Avec des jeux tels que Soldats Inconnus, Child of Light, ou même Limbo déjà évoqué plus haut, on peut quasiment dire que la réalisation et le gameplay sont indissociables tellement l'un ne pourrait pas fonctionner sans l'autre.
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Les jeux de baston : l'exception ?
Bien qu'ils aient été pris d'assaut par la 3D en même temps que les autres, les jeux de combat restent un cas à part sur ce sujet puisque la 2D est encore très représentée, aussi bien en matière de gameplay que de réalisation. Ainsi, même si certaines séries continuent d'explorer les possibilité offertes par les déplacements libres dans des environnements en 3D (SoulCalibur : Lost Swords, Naruto Shippuden Ultimate Ninja Storm 4, Dragon Ball Xenoverse), nombreux sont encore les titres à miser sur des affrontements à l'ancienne sur un seul plan. Un choix qu'ont d'ores et déjà fait les futurs Mortal Kombat X et Street Fighter V.
Conservateurs mais en rien dépassés, les jeux de baston de Arc System Works ont eux le mérite d'allier les deux, la réalisation et le gameplay tirant tous les deux dans le même sens pour défendre la cause de la 2D. BlazBlue : Chrono Phantasma, Guilty Gear Xrd SIGN et Persona 4 : Arena Ultimax comptent aujourd'hui parmi les derniers héritiers de ce savoir-faire.
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Ils sont probablement les meilleurs représentants de ce qu'il reste de l'âge d'or des jeux de baston en 2D période NeoGeo, ces King of Fighters et autres Samurai Shodown au nombre de pixels ahurissant pour l'époque.
Ces MMORPG qui sortent de l'ordinaire
Même s'ils se positionnent de façon marginale sur ce sujet, il serait dommage de passer sous silence le cas de ces rares MMORPG qui tentent contre vents et marées de démontrer que la technique de la 2D a aussi sa place dans le domaine du jeu de rôle en ligne. Avec Dofus et Wakfu, l'équipe d'Ankama a prouvé avec un certain panache que 2D et MMORPG n'étaient pas incompatibles, surtout lorsque la réalisation fait le lien avec une série animée appréciée des joueurs. D'autres représentants du genre, bien que moins connus, ont même tenté de leur emboîter le pas, à l'instar de Angels Online, Nostale, Ragnarok Online ou Myth War 2.
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Gare aux abus
Si certains genres de titres, visual novels en tête de liste (Hakuoki, Tsukihime, Fate/stay night), ne pourraient se concevoir sans la conservation de la 2D, le revival du pixel art ne s'est pas fait sans engendrer quelques dérives. Trop nombreux sont les titres indé à se reposer uniquement sur celle-ci pour justifier leur existence sans chercher à se démarquer par autre chose que par leurs seuls pixels rétro. Les rares jeux en 2D qui parviennent véritablement à sortir du lot ne le doivent que parce qu'ils réussissent à émouvoir le joueur au-delà de leur réalisation (To the Moon), ou parce qu'ils allient à cette réalisation old-school un gameplay à l'ancienne impeccable (Shovel Knight, The Banner Saga) ou une approche plus audacieuse (Half-Minute Hero, Evoland, 3D Dot Game Heroes).
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Pour les joueurs, il est devenu de plus en plus délicat de faire le tri entre ces jeux qui servent réellement la cause de la survie de la 2D et ceux qui lui font davantage de mal que de bien. Car trop nombreux sont les développeurs à opter pour ce qui apparaît souvent comme une solution de facilité ou qui s'appuient sur le ressort « nostalgie » comme seul et unique argument de vente. On pense notamment à des jeux comme Monochroma, 8BitBoy ou le si prometteur Murasaki Baby qui en aura déçu plus d'un. Et ne parlons pas de ces séries qui, pourtant excellentes, à l'instar de Disgaea, se refusent à revisiter une esthétique qui finira fatalement par lasser même les fans les plus conservateurs si elle n'est pas dirigée dans le bon sens.
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Et vous, pensez-vous que la 2D doit continuer à faire partie du paysage vidéoludique ou bien êtes-vous convaincu qu'elle n'a plus sa place aujourd'hui ?