Depuis maintenant 26 ans, la série des Final Fantasy fait incontestablement partie du panthéon du jeu vidéo. La saga est tellement ancrée dans le paysage vidéoludique que les noms "Chocobo" ou encore "Sephiroth" parlent à n'importe quel gamer aux quatre coins du globe, qu'il ait touché un FF ou qu'il l'évite comme la peste. Toutefois, on ne peut pas vraiment dire que la série vive actuellement ses plus belles heures de gloire.
En mettant à part les MMO, la trilogie Final Fantasy XIII, dont la dernière partie Lightning Returns sort la semaine prochaine, est loin de faire l'unanimité. Certes, peu de gens nient que Final Fantasy XIII reste un bon jeu, mais dans l'esprit des joueurs, on est loin des critères d'excellence d'autrefois, de ces épisodes que l'on cite régulièrement comme faisant partie des meilleurs J-RPG de tous les temps (FFIV, FFVI, FFVII et FFIX sont les titres de la série qui reviennent le plus souvent).
Final Fantasy XIII : Un virage inattendu
Mais outre la qualité intrinsèque de cette trilogie FF XIII, les fans lui reprochent souvent ses choix. En effet, le "premier" FF XIII s'éloignait beaucoup de ses prédécesseurs en imposant pendant une grande partie du jeu une linéarité plutôt mal perçue par les joueurs (déjà citée comme un défaut de Final Fantasy X, mais sans trop de conséquences), mais aussi un gameplay très différent pour un apport en dynamisme. Mais plus que ça, c'est l'univers très opposé aux canons de la saga qui aura perturbé les joueurs. Conséquence de ces revirements : il n'est pas rare d'entendre les plus férus proclamer que Final Fantasy est mort. Que cette évolution sonne la fin d'une saga vieille d'un quart de siècle, du moins comme on la connaissait, et que les prochains opus s'éloigneront encore plus de ce que les fans inconditionnels attendent. Mais cette pseudo-mort n'aboutirait-elle pas à une réincarnation ? "L'esprit" Final Fantasy ne pourrait-il pas se retrouver ailleurs ?
Bravely Default : Le "vrai" Final Fantasy ?
Vous m'avez sans doute vu venir gros comme un camion, je veux bien évidemment parler de Bravely Default. Sorti sur 3DS en octobre 2012 au Japon et en décembre 2013 en Europe dans une version modifiée, ce titre aurait tout aussi bien pu porter le nom Final Fantasy que ça n'aurait choqué personne. Pour commencer, il s'agit tout simplement d'une suite spirituelle à Final Fantasy : The 4 Heroes of Light, un épisode sorti en 2009 sur Nintendo DS, conçu comme un hommage aux prémices de la série par les studios Matrix Software, les créateurs d'Alundra. En tant que tel, Bravely Default ne pouvait qu'être un digne représentant de ce que véhiculait autrefois la série Final Fantasy, et quiconque ayant touché au jeu ne peut qu'acquiescer vivement.
Avec quatre personnages aux passés différents, un système au tour par tour à l'ancienne, les règles des premiers opus de la série (inspirées de Dungeons et Dragons) et surtout un système de job qui semble tout droit réadapté de Final Fantasy V, Bravely Default respire FF par tous les pores. Pour vous en convaincre, vous pouvez toujours lire le (magnifique) test de Bravely Default réalisé par ma consoeur Romendil.
Un choix de Square Enix
La question que l'on peut se poser alors est la suivante : est-ce volontaire de la part de Square Enix de déplacer l'aura Final Fantasy sur une nouvelle licence ? Pour ma part, cela ne fait pas de doute. L'évolution de la série initiale, particulièrement marquée avec Final Fantasy XIII, contient une certaine logique. Le jeu vidéo se développe et les joueurs ne jouent pas nécessairement sur consoles de salon comme ils le faisaient auparavant. Est-ce que les personnages aux apparences niaises, le pitch relativement classique et les trames non-dynamiques sont encore adaptés aux blockbusters d'aujourd'hui ? On ne peut pas reprocher à l'éditeur nippon d'essayer d'autres choses, et différent ne veut pas dire mauvais.
Mais Square Enix n'a pas survécu toutes ces années par hasard et les têtes pensantes de la boîte sont loin d'être idiotes. Comment garder la fanbase créée par Final Fantasy si les nouveaux épisodes ne leur plaisent pas ? C'est en pensant exclusivement aux vieux de la vieille que Square Enix a confié le développement de Bravely Default à Silicon Studio. Et si vous ne voyez pas pourquoi je dis ça, il suffit de regarder le précédent jeu créé par cette boîte japonaise : 3D Dot Game Heroes, une véritable déclaration d'amour aux jeux vidéo des années 80 et 90 bourrée de références. Quand bien même l'inspiration (voire la parodie) se basait de prime abord sur The Legend of Zelda, les nombreuses références plus ou moins cachées témoignaient de la passion de ces concepteurs. En leur confiant Bravely Default, Square Enix savait pertinemment qu'ils pourraient concevoir un titre à l'ancienne qui allait ravir les nostalgiques. Finement joué.
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Une réussite artistique
Bien évidemment, l'aspect artistique de Bravely Default n'est pas en reste. On retrouve notamment les designs de Akihiko Yoshida, qui avait déjà travaillé sur Final Fantasy Tactics et Final Fantasy XII. Toute l'oeuvre Bravely Default sent le travail soigné et amoureux, avec des décors entièrement dessinés à la main (les villes), capables de donner des frissons à chaque dézoom, à tel point que nombreux sont ceux qui osent comparer le jeu à Final Fantasy IX (sans doute l'épisode le plus réussi d'un point de vue artistique). On note aussi la présence de Naotaka Hayashi à l'écriture du scénario, un habitué des visual novels derrière Steins : Gate.
Quant à la musique, si le compositeur principal, le talentueux Revo, n'est pas un habitué du monde du jeu vidéo (Chaos Wars), on se doute que Square Enix a tenu une nouvelle fois à prendre les meilleurs, comme par exemple l'ultra prolifique Motoi Sakuraba au piano (Valkyrie Profile, Golden Sun, Baten Kaitos). Le résultat ? Une bande originale saluée par la critique et par les joueurs, sans aucun doute digne des meilleures productions FF de l'époque.
Un futur radieux ?
Après le succès incontestable de Bravely Default, on est donc en droit de se demander de quoi le futur sera fait. Si une chose est sûre, c'est qu'il ne faut absolument pas compter sur un "retour aux sources" de la série appelée Final Fantasy. Lightning Returns, avec son univers, sa trame et son gameplay entièrement dédiés à son ambiance apocalyptique, continue de s'éloigner un peu plus des bases de la série. Absence de montée de niveau, jouabilité résolument action, système de tenue atypique... Square Enix (aidé visuellement par tri-Ace, on le rappelle), continue de s'orienter vers de nouvelles pistes, et ce n'est certainement pas Final Fantasy XV qui reviendra en arrière. Ce qui, encore une fois, n'est pas nécessairement un mal.
Surtout que de son côté, Bravely Default est bien parti pour devenir une licence qui surfera sur son gameplay d'antan (ce qui n'est pas péjoratif) et son système de jeu inspiré des années 90. Non seulement une suite intitulée Bravely Second, par la même équipe technique et artistique, est déjà en cours de développement, mais le producteur du jeu Tomoya Asano a déjà dit qu'il espérait proposer des suites de façon régulière. Si la série garde l'esprit du premier opus tout en réussissant à se renouveler, on lui promet déjà un bel avenir.
- Voir le test de Bravely Default / 3DS
- Voir le test de 3D Dot Game Heroes / PS3
- Voir le GL preview de Lightning Returns : Final Fantasy XIII