Julian Gerighty, responsable au studio de développement Ubisoft Shanghai et habitué des jeux de la licence Tom Clancy, a très aimablement accepté de nous parler de leur dernier projet, le jeu de stratégie console EndWar. Un titre dont l'ambition est de "réussir là où d'autres ont échoué".
jeuxvideo.com > Pourquoi avoir choisi de concevoir un système de commandes vocales. Qu'est-ce que cela apporte en termes de gameplay ?
Julian Gerighty : Je ne crois pas que concevoir un tel système constituait une véritable intention dès le début du projet. L'objectif était de simplifier ce qu'on pouvait trouver dans les jeux de stratégie PC sans pour autant en perdre la profondeur. Le vrai défi était de mettre l'accent sur l'accessibilité. Et une fois que vous commencez à simplifier les contrôles au pad, vous vous rendez compte que vous pouvez leur greffer des commandes vocales afin de ne rien perdre de cette profondeur. Du coup, actuellement, on a peut-être 40 mots qui sont reconnus par le jeu et qui, s'ils sont combinés nous permettent de tout faire sur le terrain. Il y a également un autre aspect que Mike (Michael de Plater) aime bien mettre en avant, et c'est le fait qu'on est en train de construire un jeu où le joueur incarne un commandant. Or le commandant utilise sa voix pour émettre des ordres. Faire la même chose en tant que joueur permet une immersion complète, un peu à la manière du volant pour un jeu de courses ou de la guitare pour Guitar Hero. Parler est vraiment devenu indissociable du gameplay d'EndWar. Nos testeurs professionnels qui se sont essayé au jeu ont tout d'abord eu tendance à s'en tenir au pad (cela vient aussi du fait qu'ils sont chinois et que notre version était en anglais) mais après une ou deux parties, ils se sont mis à utiliser la voix et ont beaucoup gagné en efficacité et en plaisir de jeu.
jeuxvideo.com > En parlant de testeurs, prévoyez-vous de faire une bêta ouverte avant de commercialiser le jeu ?
Julian Gerighty : Le passage à la bêta est absolument nécessaire. Ubisoft n'a jamais fait un jeu online aussi ambitieux qu'EndWar et une phase de bêta est indispensable pour tester les réseaux. Donc en mai, nous faisons une bêta fermée, qui ne sera évidemment pas accompagnée de pub ni d'effets marketing quelconques. Nous y testons le réseau et corrigeons les bugs. Cette phase va nous aider à équilibrer le jeu et à être sûrs que le système marche parfaitement. Après ça, on va faire une bêta de plus grande ampleur, un peu comme ça a été le cas avec Halo 3 et Call Of Duty 4. Celle-ci va donc être plus ouverte et accueillir beaucoup plus de gens. Une fois cette étape franchie, on lancera une démo normale, sur le Marketplace 360 notamment, avant la sortie du jeu. A chacune de ces étapes, on fera des tests et des équilibrages. On vérifiera que le réseau marche et que le jeu tourne à fond. Ca n'a jamais été fait chez Ubisoft, c'est une première mais comme je le disais, dans le cas d'EndWar, ces différentes étapes sont totalement indispensables.
jeuxvideo.com > Une date de sortie peut-être ?
Julian Gerighty : Le 14 octobre 2008. Si ça ne sort pas à ce moment-là, je me tue. Il y a trop de travail. Là c'est la dernière ligne droite, on a 5 mois pour polir le truc, équilibrer le gameplay et pour être sûr que tout marche. C'est un luxe qu'aucun jeu Ubisoft n'a jamais eu ces 5 mois de polish. Assassin's Creed n'a eu peut-être que 3 semaines.
jeuxvideo.com > Et à cette date, le mode massivement multijoueur devrait donc être tout de suite opérationnel ?
Julian Gerighty : Tout à fait. L'objectif de la bêta est justement que tout soit au point pour la sortie. D'ailleurs, ça sera véritablement la première Troisième Guerre mondiale le jour de la sortie. EndWar a été développé comme un jeu multi, quasiment comme un jeu de sport. En gros, le mode Théâtre de Guerre ressemble à un gros plateau de Risk. C'est un Metagame avec des objectifs stratégiques précis comme des raffineries, des capitales, des champs de pétrole et qui s'ils sont conquis par une des trois factions, vont donner des bonus à tous les joueurs de cette faction. Au début de chaque guerre (un cycle de 20 tours environ, soit une vingtaine de jours), il y aura donc les trois camps, les USA, l'Europe et la Russie qui vont s'affronter sur cette gigantesque map. Chaque joueur peut choisir son camp librement puisque nous avons conçu un algorithme qui équilibre le nombre de batailles. Aucun problème donc si on se retrouve avec 12 Américains, 6 millions d'Européens et 12 millions de Russes. Tous les jours, un joueur va pouvoir faire toutes les batailles qu'il souhaite sur le front de son choix, comme la défense de Paris ou une invasion de New York. A la fin de la journée, on va cumuler tous les résultats de ces batailles sur nos serveurs à Montréal, et le camp qui aura le plus fort ratio de victoires sur un front l'emportera. Le jour d'après, la map générale du mode Théâtre de Guerre sera mise à jour, non seulement dans le jeu mais également sur le site web qui va accompagner la sortie. Le site sera un peu à la Bungie.net avec des stats et des replays que vous pourrez voir et partager avec vos potes. Comme dans Halo 3, vous pourrez effectivement revoir les parties et vous balader en caméra libre pour analyser en détail ce qui s'est passé. Vous pourrez même vous livrer à une analyse des meilleures parties et voir les stratégies employées.
jeuxvideo.com > En termes plus précis, pouvez-vous me dire ce que l'obtention ou la capture d'ojectifs dans le Théâtre de Guerre va apporter aux joueurs ?
Julian Gerighty : Disons qu'il y a une base aérienne, si vous la capturez, cela va vous donner des upgrades sur vos hélicos et sur vos raids aériens. Des trucs comme ça. Ces bonus serviront à tous les joueurs d'une même faction. Du coup, ça donne une vraie motivation, une envie, en tant que faction, de se battre pour ces objectifs, d'en obtenir de nouveaux et de défendre ses acquis.
jeuxvideo.com > Avec un nombre d'unités relativement limité, même si l'on sait que le jeu en comportera de nouvelles par rapport à ce que nous avons vu jusque-là, ne craignez-vous pas de lasser les joueurs les plus hardcore, qui au bout de 10 jours, auront peut-être fait le tour du jeu ?
Julian Gerighty : Michael de Plater n'est pas forcément très satisfait du marketing d'Ubi. Lui il aime bien montrer des assauts avec des interactions relativement complexes, avec des unités en couverture, des hélicos améliorés, avec des unités de soutien appellés en upgradant les points de contrôle. Et on lui dit, "simplifie le truc, reste accessible" et ça le froisse parce qu'il dit que les joueurs auxquels on s'adresse ne sont pas débiles. Ils veulent de la profondeur. Pour lui, être accessible ne signifie pas qu'il faut rester dans des trucs ultra basiques. Donc ce qu'on vous a présenté aujourd'hui ne représente que la base, après, tu peux rajouter des couches de profondeur en plaçant de l'infanterie dans des bâtiments, en ayant les 7 unités différentes entretenir des relations spéciales les unes avec les autres. Ca reste aussi complexe qu'un Advance Wars, et personne ne dira qu'Advance Wars n'est pas profond. C'est vraiment ça qu'on vise. Nos modèles sont vraiment des jeux comme Advance Wars qui ont cette accessibilité mais qui ont malgré tout une grande richesse. Les upgrades que je mentionnais juste avant par exemple, ils viennent avec l'expérience et je crois que ça rajoute en plus un attachement aux unités que le joueur aligne sur le terrain. Vous n'aurez pas envie de perdre les gunships qui auront gagné de l'Exp et sur lesquels vous aurez dépensé du fric. Si vous voyez de la DCA approcher, vous allez évidemment les faire battre en retraite. C'est ce côté-là que nous voulions vraiment pousser dans le jeu. Et rassurez-vous, un général avec des troupes expérimentées ne va pas jouer contre un débutant, grâce à notre système de Matchmaking.
jeuxvideo.com > Sans parler du mode Théâtre de Guerre, combien de joueurs pourront s'affronter au sein d'une même partie ?
Julian Gerighty : Pour le moment, c'est du 4 contre 4. Mais on va peut-être essayer d'aller au-delà. Ce n'est pas un problème technique, c'est tout à fait faisable, mais c'est une question de clarté. Le jeu devient trop compact sinon. Quoi qu'il en soit, il n'y aura jamais plus de douze unités par camp dans une partie, donc les joueurs se partagent les unités, 3 chacun. Le système est super jouable et nécessite beaucoup de coopération. Et une seule unité chacun, il faut reconnaître que ça n'aurait aucun intérêt.
jeuxvideo.com > Un petit mot pour la fin ?
Julian Gerighty : Aujourd'hui, les shooters comme Ghost Recon Advanced Warfighter ou Rainbow Six Vegas rajoutent tous quelques éléments de stratégie pour étoffer leur gameplay. Nous, ce qu'on fait avec EndWar, c'est rajouter de l'action dans un jeu fondamentalement stratégique. Je pense, et j'ai malheureusement le défaut d'avoir un ego surdimensionné, qu'on va avoir un avant et un après EndWar. Je suis très fier de ce jeu et je crois que les concurrents qui essaient de faire de la stratégie sur console devront s'inspirer d'EndWar.
jeuxvideo.com > Merci M. Gerithy.