Un des auteurs ayant participé à l'écriture de Forspoken est revenu sur le fait que le jeu a beaucoup, beaucoup évolué au cours de sa création.
Forspoken est un jeu assez mal reçu par le public depuis sa sortie. Quoi qu'on pense effectivement du jeu, on vient d'apprenre qu'il aurait pu être très, très différent ...
La narration, le point qui cristallise les critiques sur Forspoken
Depuis sa sortie Forspoken reçoit plusieurs types de critiques. Certains formulent clairement des reproches assez gratuits, mais beaucoup d'autres pointent du doigt de vrais problèmes dans le jeu, ou en tout cas des éléments qui les dérangent sincèrement. En particulier, l'intrigue du titre a été sujette à beaucoup de débats. On a souvent entendu des critiques sur la mise en scène, sur un scénario bourré de cliché, sur un personnage principal particulièrement irritant aux réactions presque dignes d'une parodie ... Si le gameplay semble plutôt avoir convaincu, la narration du titre est vraiment le point qui rassemble tous les reproches. Eh bien, il y a peut-être une raison à trouver dans la manière dont il a été développé ...
Un scénario bien avancé ... et complètement redémarré de zéro par Square Enix
Dans une interview sur la chaîne Youtube Charalanahzard (tenue par Alanah Pearce, scénariste connue pour son travail chez Santa Monica Studio), l'auteur Gary Whitta, a répondu à diverses questions. Si vous le connaissez sûrement pour son travail sur le film Rogue One : A Star Wars Story, il a parlé de son passage au sein du projet Forspoken. Et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il a vu le projet beaucoup, beaucoup changer. En fait, à part le nom du monde, Athia, il semble que Forspoken n'ait rien gardé des idées de base qui portaient le projet.
Gary Whitta : Plus récemment, j'ai travaillé sur du world-building très très précoce, des trucs de lore, sur Forspoken, qui vient de sortir.
Question d'Alanah Pearce : Oui, j'ai vu des gens vous créditer comme l'un des auteurs de Forspoken, sur Twitter. Mais j'ai aussi cru comprendre que vous n'aviez pas écrit de dialogue pour ce projet, n'est-ce pas ?
Gary Whitta : A vrai dire ... je ne pense pas. Je me souviens que je n'ai jamais écrit de véritable ligne de dialogue, mais en même temps je n'ai pas vu le jeu fini. Je ne sais pas honnêtement, je n'y ai pas joué. Je crois que je suis crédité comme "Concepts originaux", ou quelque chose comme ça.
Juste pour être clair, donc ce qui s'est passé c'est ... Square est venu me voir il y a cinq ou six ans et m'a dit "Nous avons cette idée, mais ce n'est qu'un germe d'idée, seriez-vous prêt à nous aider, du genre construire le monde et la mythologie de l'histoire." J'y suis allé et je leur ai proposé des idées, je les ai présentées, ils les ont aimées. Et ils ont dit "Vous dirigeriez une salle d'auteurs ?", pour vraiment construire ce monde. Et j'adore les salles d'auteurs, c'est l'un de mes endroits préférés. Rien ne me plaît plus, je ne ressens pas plus de joie qu'en étant dans une pièce avec d'autres auteurs vraiment talentueux et parler d'histoire. C'est évidemment un procédé très, très courant à la télévision. Cela devient de plus en plus courant au cinéma.
Par exemple, je l'ai fait récemment pour un projet où le studio avait une idée pour un film qu'un acteur avait apporté, "Je veux jouer ce genre de personnage. Développons cette histoire." Alors ils vont rassembler un groupe d'auteurs qui sont très bien payés pour s'asseoir dans une pièce pendant une semaine, et juste parler d'histoire. Et une personne dirige la salle et met les idées sur un tableau blanc. J'ai fait ça sur plusieurs projets, comme sur Sherlock Holmes 3, pour Robert Downey Jr.
Jusqu'il y a peu, ils avaient l'habitude de faire ce genre de chose en fin de projet. Donc, si un film est "cassé" et qu'ils ne savent pas comment le "réparer", ils feront venir un groupe d'auteurs pour réfléchir à des idées sur la façon de le faire. C'est très, très courant dans la comédie, où ils n'auront que des auteurs de comédie qui viennent juste pour donner du punch et simplement faire des blagues. "Et si tu disais ça ? Et si ça arrivait ?".
Mais cela se produit de plus en plus maintenant dès le début du projet, où, par exemple sur Sherlock Holmes 3, ils savaient qu'ils voulaient en faire un troisième, ils savaient en quelque sorte ce qu'ils voulaient faire comme où ils voulaient situer le récit, mais ils n'avaient pas d'histoire. Et donc, moi-même et un groupe d'écrivains nous sommes assis dans une pièce dans les locaux de Warner Bros. pendant une semaine. "Et si Serlock faisait ça ? Et si Moriarty avait fait ça ? Et si Watson ... et si ceci arrivait ?" Et vous proposez des idées d'histoires, puis la personne qui dirige la salle les emmène au studio et peut-être finit-elle par écrire le scénario. J'en ai fait un tas, comme ça, et c'est vraiment amusant.
Et c'est un peu ce que nous avons fait avec ce qui est finalement devenu Forspoken. J'ai dit que j'aimerais réunir une salle d'auteurs, j'ai dû choisir un groupe d'auteurs que j'admire, du cinéma et de la télévision, des jeux vidéo et de la littérature ... Nous nous sommes assis dans une pièce à Los Angeles pendant une semaine. Avec les exécutifs, les gars de Square. Et nous avons lancé un tas d'idées et les avons proposées, "Et voici comment la magie fonctionnerait ... Voici l'histoire du monde ..." ce genre de choses. Par exemple, une chose par laquelle je sais que j'ai contribué au jeu est le nom du monde. Athia, c'était juste un truc que j'avais trouvé et aujourd'hui encore, le monde dans le jeu s'appelle Athia. Mais c'est littéralement la seule chose qui vienne de moi, que je sache avec certitude qui soit dans le jeu.
Et puis, ce qui s'est passé, c'est que quelques mois plus tard, ils sont revenus vers moi et l'un des autres scénaristes et ont dit "Nous allons reprendre du début et en quelque sorte rebooter complètement l'histoire, nous voulons que ce soit comme ça maintenant". Et ce qu'ils nous ont présenté était quelque chose de très proche de ce qu'ils ont réellement sorti finalement. Qui parle d'une fille du monde réel qui est aspirée dans ce monde fantastique. La version que nous avons faite n'avait rien à voir avec ça. Le problème était qu'à ce moment-là, ni moi ni l'autre auteur n'étions plus disponibles. Parce que nous étions trop occupés et qu'ils voulaient que nous écrivions tout. Nous savions tous les deux à quel point c'était une entreprise énorme d'écrire un jeu vidéo entier. Nous avons donc dit "Écoutez, bonne chance avec ça, servez-vous évidemment de tout ce que pouvez dans ce nous vous avons donné, si c'est compatible avec cette nouvelle version mais ... nous ne pouvons pas aller plus loin".
Et puis il me semble qu'Amy (Hennig) et Todd (Stashwick) sont arrivés après nous et ont travaillé dessus quelques temps. Et puis ils sont partis, et je crois que c'est un groupe d'autres auteurs qui ont en finalement écrit le jeu.
Mais vous savez comment ça marche ! Tous les génies de Twitter dans leurs caves, voient mon nom et ils voient le nom d'Amy Hennig, et nous sommes les deux noms les plus reconnaissables parmi les auteurs attachés à ce projet. Et ils disent "Oh, tu dois avoir écrit le jeu !". Et je ne vais pas aller sur Twitter et dire "Je n'ai rien écrit de ce jeu", parce que honnêtement, je ne sais même pas à quel point le jeu a été bien reçu. Je ne sais pas quel est son Metacritic, ou s'il est bon ou mauvais ...
Mais je fais les choses à ma façon. Et vous pouvez aller sur Twitter, rechercher mon flux Twitter et vous rendre compte de ceci. Pour tout ce sur quoi j'ai travaillé, que ce soit bon ou mauvais ou quoi que ce soit entre les deux, je ne réclamerai jamais plus ou moins de crédit que ce que j'estime avoir mérité. Comme, par exemple, cela m'arrive tout le temps avec Rogue One. Parce que Rogue One est évidemment le projet le plus populaire sur lequel j'ai jamais travaillé. Je reçois tout le temps des commentaires de gens disant "Oh, Rogue One est tellement génial ! J'adore Chirrut et Baze, ces personnages sont tellement cools !". Et je répond immédiatement "Eh bien, vous devriez remercier Chris Weitz, parce que ce sont ses personnages, ils n'étaient pas dans mon scénario ! Il les a apportés après que j'ai eu fini."
Si c'est quelque chose que j'ai fait, comme la forteresse de Vador ... ou toute l'histoire de "mon père a construit l'Etoile de la Mort", je vais m'attribuer le mérite des choses que j'ai faites. Mais pas celui des choses que je n'ai pas faites. Et c'est vrai que ce soit pour quelque chose de bon, ou de mauvais. Donc si je vous dis que j'ai eu très peu à voir avec Forspoken, ce n'est pas parce que le jeu est perçu comme bon, mauvais ou autre. C'est juste parce que j'ai eu très peu à voir avec ça ! C'est comme ça.
Mais c'est énervant, et je pense que beaucoup de gens agissent souvent délibérément comme des crétins quand ils disent "Oh, Gary, tu as fait ceci ou cela", alors qu'ils n'ont aucune put*** d'idée de ce dont ils parlent. Ils ne savent pas comment les jeux sont faits ! Ou les films ...
Un jeu qui peut être amélioré par des mises à jour ?
Gary Whitta se garde bien de dire si son scénario était moins bon ou meilleur que celui qui est finalement resté dans le jeu Forspoken. Notamment parce, visiblement, il n'a pas touché au jeu. En tout cas, il est clair qu'il n'avait rien à voir avec ce qu'on a pu découvrir dans le titre de Square Enix et Luminous Productions.
Il y a une semaines, les développeurs ont annoncé que plusieurs mises à jour viendraient au fur et à mesure améliorer ce qui peut l'être dans le jeu. Les patchs ont commencé à tomber, et nul doute qu'il y en aura d'autres. Si on imagine que les performances ou le gameplay peuvent être modifiés, on a du mal à imaginer que la narration, elle, puisse réellement être améliorée. Et malheuresement, c'est bien à ce niveau que le plus de critiques sont formulées ...
Forspoken est disponible dès maintenant sur PC et PlayStation 5.