La relation entre le jeu vidéo et les mangas ne date pas d'hier. Les adaptations d'oeuvres en provenance du Japon occupent une place de choix dans le calendrier vidéoludique depuis plusieurs décennies avec en première ligne les productions des éditeurs Bandai Namco et Koei Tecmo devenus spécialistes dans ce domaine. Si par le passé ces adaptations ont pu décevoir, ces dernières avaient une carte à jouer en 2020. Genres peu exploités et franchises phares en manque de présence sur le marché du jeu vidéo sans oublier les autres titres très attendus, l’année en cours se présentait aux joueurs avec les meilleures intentions. Malheureusement, ces projets reposent essentiellement voire exclusivement sur le fan service au détriment du reste, gameplay en tête. Cela ne peut suffire bien longtemps.
Cet article entrant dans la rubrique "Débat et opinion", il est par nature subjectif. L'avis de l'auteur est personnel et n'est pas représentatif de celui du reste de la rédaction de Jeuxvideo.com.
Avant toute chose, qu’est-ce que le fan service ? Le fan service est une pratique visant à offrir aux joueurs, mais surtout aux fans de la franchise adaptée, du contenu intégré au jeu dans le seul but d’alimenter leur passion et donc de les contenter. L’expression “fan service” fait également écho à des situations à forte connotation sexuelle ou érotique, mais ce n’est pas le sujet du jour.
Je tiens à préciser avant de monter au front que je n’ai absolument rien contre cette pratique. Je suis ni pour ni contre (bien au contraire). Le fan service n’est pas un diable dissimulé sous les traits de la passion. En effet, cette pratique peut participer à l’élaboration de jeux vidéo de qualité et enrichir une expérience fort plaisante. Un roster riche de dizaines de personnages modélisés à la perfection, des saynètes rappelant les grands heures d’une oeuvre, des clins d’oeil ici et là pour titiller le savoir des fans sur une franchise… le fan service n’est ni bon ni mauvais… il est tout simplement. Mais il ne peut exister seul.
Le fan service est supposé magnifier le gameplay, le mettre sur son 31, et non faire cavalier seul. Dragon Ball FighterZ est le parfait exemple d’un fan service abondant “au service” d’un gameplay de qualité. La presse est unanime avec un Metacritic à 86% toutes machines confondues. Le nombre de personnages est hallucinant. Les animations et les techniques martiales sont fidèles à l’oeuvre d’Akira Toriyama. Pourtant, le jeu de combat d’Arc System Works et de Bandai Namco repose avant tout sur un système de jeu frôlant la perfection ce qui lui a valu d'être à l’EVO (Evolution Championship Series) en 2017 sous la forme d’une démo jouable avant même sa sortie (septembre 2018) et d’être l’un des titres phares depuis.
Mais pour un appelé, un élu, combien sont recalés ? 2020 aurait pu être l’année du renouveau, mieux encore de la rédemption. Le catalogue riche d’une vingtaine de jeux (sur consoles, PC et mobiles) tirés de licences populaires (Dragon Ball, One Piece, Fairy Tail, Captain Tsubasa) était la promesse d’une période faste pour les adaptations de mangas. Mais ce fut la douche tiède à plus d’un titre. De One Punch Man : A Hero Nobody Knows à Fairy Tail en passant par Dragon Ball Z Kakarot et My Hero : One’s Justice 2, seul Captain Tsubasa : Rise of New Champions parvient partiellement à convaincre, mais peine finalement à s’imposer. Encore une fois, tout n’est pas à jeter, ce n’est pas le propos.
Le fan service assure l'intérim pour pallier aux errements de gameplay et enjolive des expériences trop répétitives. Je pourrais citer de mémoire les caméras récalcitrantes, les animations rigides, les contrôles approximatifs ou encore une courbe de la difficulté aux abonnés absents pour un résultat trop souvent générique et privé de fantaisie… exception faite du fan service évidemment qui espère dissimuler sous une belle couche de peinture le manque chronique de finition et de créativité dont souffrent bien souvent les adaptations en jeu vidéo de mangas.
Tel un phare dans la nuit, Persona 5 Royal et sa suite Persona 5 Scramble : The Phantom Strikers ravivent la flamme de la passion. J’en conviens, la franchise d’Atlus n’est pas à proprement parler une adaptation. Persona 5 a été adapté en animé et en manga suite au succès du jeu et non l’inverse. Pourtant, tout dans cette saga... que ce soit la direction artistique saluée à raison par la critique et les joueurs, les thèmes abordés ou encore les mécaniques de jeu...respire le manga. Si pour profiter pleinement d’un jeu vidéo typé “manga”, il faut se libérer du concept d'adaptation qu’il en soit ainsi.
J’ai encore l’espoir de voir les éditeurs prendre en considération les retours des fans afin de s’éloigner du simple projet opportuniste et ainsi rendre hommage à ces oeuvres papiers et/ou animées qui nous ont fait, font, et feront vibrer.
