Si certaines personnalités du jeu vidéo sont devenues incontournables au fil des générations, on est encore très loin de tout connaître des fondateurs de ce média. De nature très discrète, Mark Cerny est un travailleur de l’ombre qui roule sa bosse dans ce métier depuis plusieurs décennies et qui, dans les mois qui viennent, s’apprête à révéler son nouveau bébé : la PlayStation 5. Transfuge d’Atari, l’homme, également à l’origine de l’architecture de la PlayStation 4, a une carrière bien remplie et a connu l’émergence du jeu vidéo tel qu’on le connaît aujourd’hui. À la fois programmeur, designer, artiste et ingénieur, Mark Cerny prône une philosophie visant à satisfaire aussi bien les créateurs (en mettant les meilleurs outils à leur disposition) que les joueurs. Au détour d’interviews, nous allons revenir sur le parcours hors-normes du natif de Californie. D’Atari à SEGA en passant par Universal et Sony, entrez dans la folle vie de Mark Cerny. Et en plus, ça rime !
Mark Cerny naît le 24 août 1964 à Burbank, une ville du comté de Los Angeles. Éduqué par des parents aimants, il vit une enfance tranquille et découvre, un jour, un drôle d’appareil au musée de sciences de Burbank. Il s’agit du PDP, une gamme de mini-ordinateurs devenue célèbre au début des années 1960. C’est en effet sur la première version du PDP, le PDP-1, que les étudiants du MIT (Massachusetts Institute of Technology) de Boston ont conçu l’un des premiers jeux vidéo de l’histoire, l’emblématique Spacewar. Mark Cerny a environ une dizaine d’années lorsqu’il découvre le PDP-11, une machine imposante reliée à plusieurs terminaux ressemblant à des machines à écrire.
L’intéressé se souvient :
Vous tapiez une commande de direction – par exemple pour faire pivoter votre vaisseau ou activer les moteurs, dans un jeu inspiré de Star Trek -, c’était envoyé au mini-ordinateur partagé et ce dernier calculait et imprimait un schéma de la bataille en cours, avec des astérisques pour représenter les étoiles et des lettres pour les vaisseaux. Les jeux étaient codés en BASIC, alors si ceux qui étaient fournis vous ennuyaient, vous pouviez programmer les vôtres.
Petit à petit, le garçon apprend les rudiments de la programmation et continue d’assouvir sa passion au cours de ses années collège. Il faut dire qu’il est entre de bonnes mains. Son frère, féru d’électronique, passe son temps à construire des circuits électroniques en utilisant du ruban adhésif, des cartes mères ou encore du cuivre. Toutes ces expériences donnent envie à Mark de poursuivre dans cette voie, si bien qu'il garde ce rêve dans un coin de sa tête. En 1977, alors qu’il est âgé de 13 ans, le gamin se prend de passion pour les jeux de rôle papier et envisage d’adapter cette philosophie sur ordinateur.
Avec mon frère, on utilisait des cartes perforées pour nos programmes, mais notre objectif créatif était de faire un truc du niveau de Final Fantasy VII ! En termes de gameplay, ce n’est jamais allé très loin, mais ça m’a permis d’apprendre le Fortran et la programmation infographique.
LE PARI ATARI
Les années passent et Mark Cerny se retrouve à l’université. Sans être un cancre, il n’a guère d’intérêt pour la physique ou les maths et passe le plus clair de son temps dans les salles d’arcade ou sur son ordinateur pour programmer. Et puis un soir…
Quelques mois plus tard, j’étais vraiment lassé de l’université. Je cherchais comment entrer dans le jeu vidéo d’une manière ou d’une autre, mais je ne voyais aucun moyen pour y parvenir. Un soir, ma maman avait la flemme de cuisiner alors nous sommes sortis sur Berkeley pour manger chinois. Dans la rue, il y avait ce journaliste et je lui ai demandé s’il pouvait m’obtenir un entretien dans l’une des places fortes du jeu vidéo car il avait déjà interviewé des créateurs de jeux. Les choses étaient si différentes à l’époque… Il a dit oui. C’était un écrivain affamé et ça allait lui coûter de l’argent pour passer un appel de San Francisco à San Jose. Mais il a dit que s’il pouvait avoir 20 dollars pour passer ce coup de fil, afin d’expliquer toute la situation au Vice-Président d’Atari, il serait heureux de le faire. C’était le coût de cet appel téléphonique. Avec l’inflation, c’est 70 dollars aujourd’hui.
Le journaliste va tenir parole. Quelques temps plus tard, Mark apprend que les pontes d’Atari acceptent de le recevoir. Si le Californien choisit Atari, ce n’est pas un hasard : l’entreprise dispose d’une division arcade dont la réputation n’est plus à faire avec des jeux comme Asteroids , Missile Command , BattleZone ou encore Tempest . Impossible pour lui de laisser passer une telle opportunité ! Mais cette décision n’est pas sans conséquences…
Mes parents n’étaient pas très chauds, et ce n’est rien de le dire ! J’ai négocié un compromis : je mettais mes études entre parenthèses pendant un an, le temps de voir ce que ça donnerait, même si honnêtement, j’aurais sans doute pu suivre mes études en parallèle.
Quelques jours plus tard, c’est totalement terrifié que le jeune homme débarque dans les locaux du géant Atari. Pour jauger ses capacités, l’un des chefs ingénieurs de la firme lui fait passer des tests de programmation. Mark Cerny ne se démonte pas et convainc son interlocuteur.
Durant cet entretien, on a parlé de mon expérience en matière de programmation. J’ai parlé du programme le plus important que j’avais créé en assembleur (Ndlr : un langage informatique). J’ai oublié de mentionner qu’il s’agissait du seul programme en assembleur que j’avais créé.
On lui fait comprendre qu’il va endosser trois casquettes : programmeur, designer et graphiste. C’est alors que le chef de développement produit entre dans la pièce pour finaliser l’entretien. Celui-ci se déroule sans accroc jusqu’à une dernière question qui va marquer l’intéressé à vie :
Pourquoi veux-tu gâcher les meilleures années de ta vie à faire des jeux vidéo ?
D’abord interloqué, Cerny se reprend mais les chefs d’Atari le mettent en garde. Il est très jeune, le développement est une activité intense, difficile et la pression est énorme.
Je leur ai répondu que ça ne serait pas du gâchis – autant par bravade que par désespoir. J’ai eu le boulot. Et avec le recul, leurs réticences étaient justifiées… Chez Atari, c’était magnifique. Et chez Atari, c’était terrifiant. Et pour les mêmes raisons : en tant que programmeur-concepteur-graphiste, comme tout le monde, je devais trouver des idées originales, les proposer, et les accomplir. Et on n’avait droit qu’au meilleur. On avait donc beaucoup de liberté, mais aussi beaucoup de pression. C’est une chance d’avoir commencé ma carrière là.
Si la pression est là, c’est parce qu’Atari impose une règle stricte : chaque jeu, jusque dans ses commandes, doit être unique ! Le concept, le gameplay, l’interface… chaque production doit être originale et ne ressembler à aucune autre, y compris celles de l’entreprise. La carrière de Mark Cerny débute ainsi par un certain Qwak , un puzzle-game inspiré du titre Guttang Gottong (connu en occident sous le nom Loco-Motion) signé Konami. Le jeu, bien que terminé, ne verra jamais le jour (mais il est disponible sur MAME pour les curieux).
À EN PERDRE LA BOULE
Alors que beaucoup auraient flanché, Mark Cerny, malgré son jeune âge, préfère regarder le bon côté de ce premier échec. Il faut dire que ses dirigeants ont la bonne intelligence de lui accorder un peu de temps. Pendant quelques mois, le créateur réfléchit à un concept et l’amène au stade de prototype. Toujours en respectant la règle d’Atari, Cerny met au point un jeu de réflexion/plateforme qui va devenir culte : Marble Madness . Dans ce titre inspiré du mini-golf (mais aussi des jeux de course et des illustrations de l’artiste Néerlandais M.C Escher), le joueur doit guider une bille à travers un parcours en 3D isométrique. Outre le rendu très coloré, le jeu multiplie les performances : il s’agit du premier soft à être conçu sur le Atari System 1, le premier à exploiter un son stéréo et enfin il est pionnier dans l’utilisation du langage de programmation C. Il suffit de le relancer aujourd’hui pour s’apercevoir de la qualité du rendu visuel et sonore. Pour mener à bien ce projet, il a fallu que Mark Cerny, alors âgé de 19 ans à cette époque, travaille de concert avec l’équipe technique d’Atari. Il a été ainsi question d’utiliser un trackball motorisé (Ndlr : une boule de commande) mais l’essai, ne s’étant pas assez avéré concluant, s’est traduit par l’utilisation de deux trackballs conventionnels.
Si Mark Cerny a choisi d’exploiter un visuel en 3D, c’est pour une raison finalement assez simple :
Le gameplay est important, bien sûr, mais en tant que joueur, je suis du genre à être attiré par les graphismes. J’ai préféré contacter Atari plutôt qu’Activision parce qu’on pouvait faire plus de choses visuellement sur les jeux d’arcade qu’avec l’Atari 2600, le support sur lequel se concentrait Activision à cette époque. En outre, la 3D apportait plus que de beaux visuels : en 3D, il y a une liberté d’exploration qu’on n’a pas en 2D. Comme joueur d’arcade, j’adorais les combats de tanks dans Battlezone, mais ce que je voulais faire, surtout, c’était de rouler tout droit jusqu’à atteindre le volcan à l’horizon. Hélas, j’ai dû attendre 15 ans et le développement de Spyro the Dragon avant de pouvoir offrir un tel degré de liberté dans un de mes jeux.
Marble Madness, qui est le premier grand succès de Mark Cerny, voit le jour en 1984. À l’époque, cela ne fait que deux ans qu’il a rejoint Atari. Et pourtant, il ne tarde pas à envisager un départ… car l’ambiance au sein de l’entreprise n’est pas au beau fixe. Et c’est peu dire… Au-delà de l’organisation hiérarchique un peu chaotique, les ventes ne suivent pas car les revenus reposent, en grande partie, sur les bornes déjà en place. Comme le marché de l’arcade a explosé, on en trouve un peu partout (y compris dans de simples commerces, comme des épiceries) et le parc n’a pas besoin d’être renouvelé.
Mark Cerny se souvient :
Pendant les trois années et demie où j’y ai travaillé, il y a dû y avoir cinq vagues de licenciement. En plus, l’organisation d’Atari était très lourde, même avec une quinzaine de programmeurs-designers-graphistes. Il y avait trois strates hiérarchiques entre moi et le vice-président du développement produit. Tout le monde était très compétent, mais ça dégradait forcément l’expérience, à un certain degré.
Le jeune homme estime qu’il a les compétences nécessaires pour se lancer comme indépendant. Il décide alors de quitter Atari. Accompagné d'un associé, il parvient à obtenir un rendez-vous avec les deux hommes forts de SEGA : David Rosen et Hayao Nakayama. Le contrat entre les deux parties porte sur la création d’un jeu d’arcade. Mark Cerny et son compère ont pour mission de réaliser le programme mais également toute la carte-mère embarquant le logiciel. Un tel deal, c’est évidemment une aubaine pour Mark Cerny et son acolyte. Et pourtant, encore une fois, tout ne va pas se passer comme prévu.
Peu après, mon associé a préféré suivre d’autres opportunités, et au lieu de chercher quelqu’un pour le remplacer, je me suis lancé tout seul sur le hardware. Ça m’avait toujours fasciné et j’ai passé les neuf mois suivants à concevoir un prototype de borne. Malheureusement, ça prenait énormément de temps et SEGA perdait patience vis-à-vis de mon jeu d’arcade.
Bien qu’il soit passionné par ce qu’il fait, le garçon se retrouve au pied d’une montagne et le projet prend un temps interminable. SEGA, par la voix de Hayao Nakayama, commence à s’agacer. Mais le dirigeant n’est pas né de la dernière pluie et compte bien profiter du potentiel de l’Américain.
Après environ un an de progrès médiocres, Nakayama m’a suggéré de laisser tomber le projet d’arcade, de venir à Tokyo et de créer des jeux pour ce qui allait bientôt être vendu sous le nom de Master System. J’ai dit oui et j’ai sauté dans le prochain avion pour Tokyo.
LE CHOC DES CULTURES
La décision de Mark Cerny est vécue par ses proches comme un sacré pari. Non seulement l’homme quitte sa région natale mais il s’envole carrément pour un autre pays ! Pour comprendre l’appel du pied de SEGA, il faut se remettre dans le contexte de l’époque. Alors que la fin des années 1980 se rapproche, l’entreprise japonaise est devenue incontournable dans le secteur de l’arcade et n’hésite pas à réinjecter (ce qui vaudra quelques moqueries à la section concernée) ses recettes dans son département console. À l’image de Nintendo, SEGA croit en ce marché malgré le succès très relatif de la SG-1000 (et sa mise à jour la SG-1000 II), une machine restée exclusive au Japon. Pour relever la tête et faire face à son concurrent, SEGA se lance dans la conception d’une nouvelle console, la Mark III, qui sera renommée Master System – sous une autre forme – en occident. Il faut alors s’imaginer un jeune américain approchant la vingtaine et débarquant dans une véritable fourmilière où plusieurs dizaines d’employés œuvrent à la conception de jeux.
Au-delà du choc culturel, ils avaient une salle avec une quarantaine de personnes, et ils essayaient de créer, dans cette seule pièce essentiellement, tous les jeux qui seraient nécessaires pour le lancement de la Master System. Le schéma typique pour un projet, c’était un ou deux programmeurs qui travaillaient pendant trois mois. La pression était très, très élevée.
Lorsque Hayao Nakayama lui a demandé de venir à Tokyo pour travailler sur un ou deux jeux, Mark Cerny était bien loin de s’attendre à une telle situation. Se retrouver dans un tel environnement, presque les uns sur les autres, en imaginant des dizaines et des dizaines de concepts, c’était quelque chose dont il n’avait absolument pas idée.
Le hardware de SEGA était aussi bon que celui de Nintendo, sinon meilleur, mais ils ne comprenaient pas que c’était la qualité des jeux qui faisait vendre. Au CES de l’été 1986, on a présenté une douzaine de titres sur notre stand, mais seulement deux avaient un bon gameplay et aucun n’avait le niveau d’un Super Mario Bros. . Bizarrement, les dirigeants de SEGA pensaient qu’il fallait développer des jeux comme des dingues pour réussir, pour dire que la Master System avait 80 jeux, alors que la NES n’en avait que 40. Vu que les jeux devaient être créés en interne – on n’avait qu’un seul studio externe qui développait pour nous -, autant vous dire que c’était une vraie usine à gaz, à Tokyo, entre 1986 et 1987. Et la plupart des titres étaient du shovelware (Ndlr : concrètement des jeux bas-de-gamme). C’est plus tard que SEGA a mieux appréhendé la création des jeux, mais à cette époque, c’était la quantité qui importait, plus que la qualité.
Oui, ça paraît complètement fou quand on y pense mais les Alex Kidd in Miracle World , Transbot , Ghost House , Teddy Boy , Kung Fu Kid , Phantasy Star , Castle of Illusion ou encore Black Belt ont tous été créés dans la même pièce ! Et tout le monde était logé à la même enseigne !
Mais en même temps, nous avons fait un excellent travail. Et il y avait des gens très talentueux, Reiko Kodama et Yuji Naka étaient dans cette pièce, et Yu Suzuki n'était qu'à deux étages, dans le même bâtiment, réinventant les jeux d'arcade.
LE FUTUR
Tout en participant à la création de certains jeux Master System, Mark Cerny joue son va-tout en faisant une proposition complètement surréaliste à SEGA. Il détaille cette histoire auprès du site SEGA-16 :
Tokyo Disneyland n’avait ouvert que quelques années auparavant et il était très populaire auprès des jeunes de SEGA. Lors d’un de mes nombreux voyages là-bas, j’ai vu un film en 3D appelé Captain EO avec Michael Jackson. À la sortie de la projection, je me suis dit : « hey mais pourrait-on faire de la 3D dans les jeux ? » J’ai donc décidé de convaincre SEGA de fabriquer un périphérique à cristaux liquides pour la Master System. En fait, c’était assez simple car SEGA cherchait toutes les munitions à utiliser contre Nintendo. Et peu de temps après, un prototype a atterri sur mon bureau. Les lunettes 3D étaient un périphérique correct. Nous avons créé six jeux pour cet accessoire mais l’histoire la plus intéressante concerne un titre qui n’a pas été conçu. Le prototype est arrivé dans nos bureaux avant une semaine de vacances. J’ai réalisé une démo rapide de jeu de casse-briques et j’ai pris l'avion. Pendant mon absence, Yuji Naka a conçu un moteur graphique en 3D – pour la Master System ! – et une démo de course-poursuite dans un tunnel. C’est un programmeur incroyable, il n’y aucun doute là-dessus. Cependant, la Master System était si faible techniquement que la fenêtre 3D était minuscule et la démo n’est jamais devenue un jeu.
Si l’expérience japonaise n’est pas simple, elle est riche d’enseignements et Mark Cerny, qui apprend le japonais (il le parle couramment aujourd’hui), s’acclimate de plus en plus à cette nouvelle vie. À la fin des années 1980, le natif de Burbank assiste à la naissance d’un système révolutionnaire : la Mega Drive.
Comme tout matériel, elle était somptueuse au début, et quelques mois plus tard, on avait l’impression de bosser sur une machine poussive. Mais le processeur m’était familier vu que c’était un 68000, comme celui de la borne Marble Madness.
Ce témoignage, donné au magazine Retrogamer, peut surprendre mais il matérialise une réalité. Le progrès technologique à cette époque est tel, qu’une machine, pourtant supérieure à la concurrence, peut rapidement être dépassée. Et c’est encore plus vrai quand on sait que les prototypes sont généralement bien supérieurs aux modèles qui sortent dans les commerces. Si l’on en croit Mark Cerny, l’arrivée de la Super Nintendo a créé une certaine confusion au sein de SEGA. Si la confrontation contre la PC-Engine s’est globalement bien passée, la confrontation face à la 16-bits de Nintendo fut bien plus mouvementée.
Nintendo a sorti sa Super Nintendo qui avait un « Mode 7 » qui pouvait être utilisé pour créer toutes sortes d’effets : arrière-plans rotatifs, des plans au sol et bien d’autres. Ce fut une période difficile car nous avions une énorme longueur d’avance sur Nintendo mais nos jeux ne pouvaient tout simplement pas créer les types d’effets dont les jeux Nintendo disposaient. Nous avons vraiment dû nous efforcer pour trouver des idées pour rivaliser…
En clair, si vous vous demandez d’où viennent les niveaux bonus rotatifs de Sonic the Hedgehog sur Mega Drive, vous savez maintenant pourquoi. À la fin des années 1980, SEGA vise l’occident et souhaite profiter de sa branche américaine, SEGA of America, fondée en 1986 pour gagner des parts de marché. Mais l’entreprise fait face à un véritable mastodonte et la réalité japonaise (grâce notamment au secteur de l’arcade en pleine expansion) est loin d’être celle du Pays de l’Oncle Sam.
À SEGA of America, les choses se passaient très mal. À un moment donné, je crois que la NES de Nintendo détenait 94% de part de marché alors que la Master System n’en détenait que 4%... ce qui signifie que le business de Nintendo était vingt-quatre fois plus important que celui de SEGA !
En 1990, après quelques années de bons et loyaux services, Mark Cerny retourne aux États-Unis avec une idée en tête bien précise : créer un studio relié à SEGA. Il obtient le soutien de Michael Katz, le Président de SEGA of America (qui sera remplacé par Tom Kalinske), et de Shinobu Toyoda, Vice-Président exécutif et relais permanent entre les États-Unis et le Japon. La Mega Drive manque de jeux occidentaux et ce studio va avoir pour mission de créer des expériences ciblant les joueurs américains. Un an plus tard, en 1991, SEGA Technical Institute (STI) voit le jour à San José, une ville située à une soixantaine de kilomètres au sud-est de San Francisco.
Mark Cerny, en tant que fondateur de SEGA Technical Institute, s’est rendu à plusieurs reprises au Japon pour découvrir l’avancée des projets en cours. Parmi ceux-là, l’un a particulièrement retenu son attention : Sonic the Hedgehog. Et à propos de ce jeu, il a une anecdote qui en dit long sur la vision des concepteurs et les gens du marketing de cette époque : « L’artiste Naoto Oshima m’a montré quelques croquis de personnages susceptibles de devenir des héros de jeux. En tant qu’américain, il m’a demandé ce que j’en pensais. Il y en avait un certain nombre, y compris un des premiers Sonic, Robotnik et un personnage avec une forte influence des Simpson. Je pense qu’il essayait vraiment d’avoir mon opinion sur Sonic et que les autres protagonistes étaient des leurres. Mon sentiment était le suivant : « Eh bien, je suis juste un Américain parmi tant d’autres, demandons aux responsables marketing de SEGA of America. J’ai donc fait quelques copies en couleur, joint une note en expliquant qu’il s’agissait du travail de la meilleure équipe du siège de Tokyo et leur ai demandé leur avis. Un mois ou deux se sont écoulés et il n’y avait pas de réponse. Je les ai donc relancés et j’ai entendu, si mes souvenirs sont bons, que les personnages étaient « invendables », que c’était un « désastre » et que des « procédures seraient mises en place pour s’assurer que ce genre de choses ne se reproduisent plus jamais. » Ces procédures étaient répertoriées sur une liste de dix choses à faire et ne pas faire. » Dans cette interview accordée au site SEGA-16, Mark Cerny va même plus loin et révèle que la branche américaine a même envisagé de faire appel à un créateur de personnages célèbre (il ne révèle pas le nom mais on peut imaginer un artiste de comics) ce qui l’a passablement agacé. Au final, Sonic sera le succès que l’on connaît. Les « voix » du marketing sont parfois impénétrables… Et pour la petite histoire, le hérisson a changé de couleur (il est passé d’un bleu ciel à un bleu plus percutant) au dernier moment car on le devinait mal quand il passait devant les étendues d’eau du premier niveau.
SEGA TECHNICAL INSTITUTE
Dès sa création, SEGA Technical Institute réunit la crème de la crème des développeurs américains. Mark Cerny, en bon chef d’orchestre, cible des concepts plus universels mais reste pragmatique. Le premier titre, basé sur le film éponyme, n’est autre que Dick Tracy . Il s’agit d’un jeu d’action Mega Drive (qui existe aussi sur Master System) mettant en scène un détective au long manteau jaune. Puis ce fut au tour de Greendog et de l’incontournable Kid Chameleon . Votre serviteur a pu s’entretenir il y a quelques années avec Steve Woita, le concepteur de Kid Chameleon, et l’intéressé a donné une image très positive du studio mais aussi de Mark Cerny.
Scott, le cousin de ma femme, travaillait à SEGA Technical Institute et il a fait en sorte que je puisse rencontrer Mark Cerny. À cette période, je travaillais pour Tengen, une filiale d’Atari, et je venais juste de terminer une partie de tennis avec des collègues quand mon téléphone a sonné. À l’autre bout du fil, c’était Mark qui me proposait de passer chez STI afin de discuter d’un possible contrat. Je lui ai demandé quand il voulait que je passe et il a répondu « tout de suite ». Je lui ai alors expliqué que je venais de terminer une partie de tennis mais il m’a quand même dit de venir. À l’époque, comme les bureaux de SEGA Technical n’étaient pas loin de ceux de Tengen, je me suis pointé là-bas avec mes pompes de tennis et mon tee-shirt de Bart Simpson portant la mention « under archiever » (fainéant, nul, sous-performant) ! Mark m’attendait et il était très cool. Je pense qu’il a dû se marrer en voyant mon tee-shirt. Il m’a montré les bureaux et sa manière de fonctionner et j’étais franchement impressionné. Tout le monde semblait concentré sur son travail. L’entretien s’est très bien passé. A l’époque, j’étais designer et programmeur de Police Academy sur NES. Du coup, j’ai dit à Mark que je pouvais difficilement partir en milieu de projet, mais que je reviendrais vers lui dès la fin du développement. Quelques mois plus tard, Tengen a testé Police Academy et ils trouvaient ça très bien. J’étais très heureux, jusqu’à ce que je découvre que la direction de Tengen décide d’annuler ma version pour filer le jeu à une autre équipe. Activision, devenue entre-temps Mediagenic (Ndlr : après une banqueroute, la société reprendra son nom d’origine), m’a embauché pour diriger le développement de la marque vis-à-vis de la nouvelle console Super Nintendo. Mais ils ont décidé de s’installer dans la Silicon Valley à Los Angeles. J’ai alors contacté Mark pour voir s’il était toujours partant pour m’embaucher et il m’a présenté les nouveaux locaux de SEGA Technical Institute à Palo Alto (situé au sud de San Francisco). Il m’a montré un jeu que le studio venait juste de commencer et qui s’appelait Kid Chameleon. Il m’a fait une offre et je n’ai pas hésité.
En quelques mois, Mark Cerny a fait de SEGA Technical Institute une place forte du jeu vidéo. En visitant les bureaux flambant neuf de Palo Alto (le studio a déménagé), il a dû se remémorer ce moment gênant à Tokyo. Les gaijin (Ndlr : étrangers) comme lui étaient rarement pris au sérieux et il a pu le constater lorsqu’on lui a présenté le hardware de la Mega Drive.
J’ai dit un truc du genre ‘On devrait vraiment opter pour des couleurs 8-bits (c’est-à-dire que le rouge, le bleu et le vert ont 8 bits chacun, soit une palette globale de 16 millions de couleurs, comme aujourd’hui) et ils m’ont juste ri au nez.
Mais l’homme n’était pas encore au bout de ses surprises…
ADAPTATION SUPERSONIQUE
En 1991, personne n’échappe à la tornade bleue. Le hérisson Sonic est absolument partout et son image racée est une bouffée d’air frais pour SEGA. Porté par le trio Yuji Naka/Naoto Oshima/Hirokazu Yasuhara, le premier épisode devient un phénomène… mais crée quelques tensions au sein de la maison-mère japonaise. Yuji Naka, notamment, est peu satisfait des émoluments proposés par ses dirigeants et il n’a pas oublié ces moments où on le houspillait en lui hurlant :
Ce jeu ne se vendra jamais ! » ou encore « T’es en retard, les délais ne seront jamais respectés !
Le programmeur talentueux menace de quitter SEGA mais il est retenu par Mark Cerny qui lui propose de rejoindre SEGA Technical Institute aux États-Unis avec, on l’imagine, un salaire à la hauteur de ses compétences. Et il ne vient pas seul…
En septembre 1991, quatre mois après la sortie de Sonic the Hedgehog en Amérique du Nord, j’ai réussi à réunir deux des trois membres-clés de la Sonic Team (Yuji Naka, le programmeur et chef d’équipe ainsi que Hirokazu Yasuhara, le concepteur et level designer).
L’arrivée des Japonais est vécue comme un évènement en interne et tout le monde s’attend à ce que le second épisode des aventures de Sonic soit mis en chantier dès septembre 1991. Pourtant, le département du marketing prend une décision ahurissante qui aurait pu avoir de grosses conséquences.
Je leur ai demandé « Aimeriez-vous un autre Sonic ? » Bizarrement, la réponse a été, et encore une fois je ne plaisante pas, « non, c’est beaucoup trop tôt. » Nous avons donc trouvé un autre concept et en novembre, alors que nous commencions à travailler sur ce nouveau jeu, le marketing est revenu à la charge en nous disant « Oups, nous avons besoin de ce jeu, et nous en avons besoin maintenant. ». L’équipe a donc perdu deux mois sur un calendrier de onze mois !
Sonic the Hedgehog 2 , considéré comme le meilleur épisode de la série par de nombreux fans du hérisson, a pourtant été conçu dans la douleur. Mark Cerny a tout fait pour maintenir un certain équilibre mais reconnaît avoir mal jaugé certaines choses, à commencer par la philosophie du studio.
Une partie du concept initial consistait à réunir deux groupes : des Américains débutants dans la création de jeux vidéo et des développeurs expérimentés issus du siège japonais. Les Japonais devaient servir de mentors pendant que les Américains apprendraient le métier. Cela s’est avéré être une énorme erreur. Les Japonais ne sont arrivés que lorsque les Américains étaient déjà en place car nous avions d’énormes problèmes de visa. Et une fois installés, il y avait aussi des problèmes dû à la barrière de la langue et de multiples problèmes liés à la culture de chaque pays – je ne veux pas entrer dans les détails mais c’était désagréable.
Depuis, des langues se sont déliées et voilà, grosso modo, ce qu’il s’est passé. Les soucis de visa ont créé des tensions entre les développeurs japonais – expérimentés donc – et ce fut un calvaire pour régler toutes ces formalités administratives. Il y avait également des problèmes de communication entre les deux « clans » et les différences culturelles ont fait naître une certaine scission. Les nippons estimaient que les Américains passaient leur temps à manger et à se plaindre. À l'inverse, les occidentaux en avaient marre du côté docile et trop pointilleux de leur collègues japonais. Peter Moriawec, à qui l’on doit Comix Zone , Sonic Spinball , ou encore True Crime , détaille :
Il y avait la barrière de langue, et certains avaient du mal à se mélanger, mais la plupart de mes collègues japonais étaient très sympathiques. D’après ce que j’ai pu comprendre, Yuji Naka ‘s’accaparait’ Sonic et il était perfectionniste. Les programmeurs occidentaux avaient des difficultés pour utiliser la charte artistique des japonais et leur manière de coder. De plus, les développeurs nippons avaient une éthique différente du travail (nombre d’entre eux avaient déjà passé des nuits au boulot, en dormant sur des matelas installés près de leurs bureaux). Après Sonic 2, Yuji Naka a pris la décision de séparer les équipes et l’expérience aurait été plus gratifiante si nous avions eu davantage de temps. Mais les délais étaient si serrés qu’on ne peut lui en vouloir.
Mark Cerny, sans doute échaudé par cette situation, a quitté SEGA à la toute fin du développement de Sonic the Hedgehog 2. Il a profité qu’une collègue, Madeline Canepa, partait pour lancer une nouvelle société : Crystal Dynamics. Et il l’a suivi en devenant le premier membre de l’équipe de développement produit afin de superviser les projets 3DO, une nouvelle console exploitant le support CD. Il sera notamment programmeur et designer sur les titres Crash 'N' Burn et Total Eclipse mais ce passage sera rapide (bien qu’extrêmement intensif). En 1994, on lui propose un job impossible à refuser…
À LA CONQUÊTE D’HOLLYWOOD
Cette année-là, s’il devient président de Universal Interactive Studios, c’est parce qu’on lui propose une grosse enveloppe de 5 millions de dollars pour lancer l’entreprise sur le marché des jeux vidéo. Grâce à cet argent, Mark Cerny se rapproche de deux futurs mastodontes : Naughty Dog et Insomniac Games.
J’ai travaillé avec Naughty Dog, alors composé de trois personnes, et Insomniac, qui se résumait à deux personnes. Voilà comment les projets de Crash Bandicoot et Disruptor ont démarré.
Si vous souhaitez connaître les coulisses de la rencontre entre l’intéressé et le duo de Naughty Dog ainsi que la naissance de Crash Bandicoot, nous vous invitons à lire ce dossier .
Sous l’impulsion de Mark Cerny et Universal, Naughty Dog et Insomniac (dont les bureaux sont à côté les uns des autres) grandissent, embauchent et donnent naissance à de véritables classiques. Jason Rubin, co-fondateur de Naughty Dog, relate :
Universal Studios nous a fait une offre qu’il était impossible à refuser : un bureau gratuit près des studios Universal avec un accès aux départements sonores, la possibilité de rencontrer les scénaristes, les designers et tout ce que Hollywood pouvait nous offrir. Nous étions convaincus que ces avantages pouvaient être bénéfiques pour la suite de notre carrière.
En investissant de l’argent dans des projets porteurs, Mark Cerny parvient à faire de Universal Interactive Studios un éditeur respecté. Les projets ne sont pas les plus simples à mettre en place.
Crash Bandicoot 2 et Ratchet & Clank étaient tous deux des projets stimulants et gratifiants pour moi. Dans Crash Bandicoot 2, nous avons optimisé et organisé ce que nous avions fait par intuition dans Crash premier du nom et avons porté la série à un niveau supérieur. Dans Ratchet and Clank, nous devions créer un cadre qui prendrait en charge un gameplay non linéaire lié à l’histoire ainsi qu’un nombre énorme de gadgets et d’armes. Les deux projets ont connu une naissance, de trois à six mois, très difficile mais ils ont été finalement de grands succès.
Durant cette période, Mark Cerny a dû faire « tampon » à plusieurs reprises entre Naughty Dog et le département marketing de Universal dont les relations se tendaient de plus en plus. Naughty Dog n’a, par exemple, pas apprécié du tout que Tawna, la compagne de Crash inspirée de Jessica Rabbit, soit remplacée par une silhouette plus "enfantine" sur Crash Bandicoot 2. Il en va de même pour le nom du jeu qui aurait pu être Wuzzle, Wez, Wezzly the Wombat ou encore Ozzie the Ottsel si Rubin et son compère Andy Gavin ne s’étaient pas battus pour imposer leurs idées. On peut imaginer que ces évènements ont profondément lassé Mark Cerny qui était, à la fois, l’interlocuteur et le punching-ball.
J’ai quitté Universal le 1er octobre 1998 et je suis devenu consultant indépendant.
En créant Cerny Games, Cerny s’installe dans un petit bureau dont le propriétaire n’est autre qu’Insomniac Games. Il peut ainsi interagir avec les membres du studio et suivent l’évolution des jeux. En tant que consultant, il est directement sur place et apporte toute son expertise aux développeurs. Il a notamment été l’un des premiers à œuvrer pour l’éradication – ou du moins l’atténuation – de ces innombrables documents de conception qui préfigurent un développement. Son principe consiste à laisser une totale liberté aux idées pour ensuite jauger la viabilité du projet. Si le premier niveau du jeu ne convient pas aux joueurs (on imagine que les prototypes sont testés par des joueurs triés sur le volet), le développement ne va pas plus loin. Cette méthode inhabituelle a surpris de nombreux collaborateurs mais le créateur de Marble Madness s’est rarement trompé et a justement reçu quelques prix au cours de sa carrière dont un Life Achievement Award par l’IGDA (International Game Developers Association). Discret, Mark Cerny a poursuivi son rôle de consultant pour Naughty Dog, Insomniac, Guerilla ou encore Santa Monica Studio durant de très nombreuses années. L’homme a toujours eu une relation extrêmement respectueuse et soudée avec Sony et le constructeur n’a jamais oublié cela.
LE NOUVEL ARCHITECTE
Longtemps homme fort de Sony, Ken Kutaragi ne résiste pas aux débuts compliqués de la PlayStation 3. Surpuissante, la machine est vendue à un tarif élevé et peine à convaincre durant ses premières années. En interne, de nombreuses personnes se plaignent du caractère impétueux du Japonais et c’est sans doute pour marquer une certaine rupture que Sony fait appel à Mark Cerny. En changeant de philosophie et en donnant les clés de sa future console à un concepteur occidental, le géant nippon va pourtant viser juste. Cerny a cet avantage de connaître les différents rouages de la création d’un jeu mais il a également cette connaissance du hardware. Par conséquent, son souhait est de mettre au point une machine qui soit accessible et bien pensée, à la fois pour les développeurs et les joueurs. Le désormais cinquantenaire a également une excellente connaissance du marché japonais. En février 2013, lors du PlayStation Meeting, ce dernier monte sur scène et révèle les contours de la PlayStation 4 mais ne présente pas son design. Cela peut paraître fou mais à ce moment précis, Mark Cerny, lui-même, ne sait pas à quoi ressemble la machine. Lorsque la console est enfin présentée quelques mois plus tard, lors de l’E3, voilà ce qu’il révèle :
Je suis intervenu à New York, en février, pour parler de l’architecture du système mais la présentation d’hier était plus centrée sur les jeux. En fait, j’étais dans la salle et c’était vraiment sympa. À vrai dire, c’était la première fois que je voyais la console. On m’a proposé de me la montrer avant mais je voulais la découvrir en même temps que tout le monde et, donc, j’ai refusé de la voir avant la grande présentation. J’avais une idée précise de sa taille vue que je connais sa consommation d’énergie, mais j’étais responsable de ce qu’il y a à l’intérieur. L’extérieur, c’est notre formidable service de design qui s’en est occupé.
Mark Cerny reste discret sur les années de conception mais on peut imaginer que ça ne fut pas de tout repos. Outre la recherche et développement, il faut définir les axes de la console, sa puissance, son énergie, établir des contrats avec les fabricants de semi-conducteurs, etc. C’est d’autant plus vrai que l’intéressé ne s’est pas limité à cette tâche. En plus de mettre au point l’architecture de la PlayStation 4, il a pris les rênes d’un certain Knack , un jeu sans fioriture destiné à un cadre familial et qui prend en compte la puissance de la machine pour son moteur physique.
L’idée de départ était d’avoir un personnage qui puisse ramasser des objets dans son environnement pour les incorporer à son corps. Mais, on s’est rendu compte que c’était très compliqué à mettre en œuvre. Il nous a fallu un an et demi pour nous apercevoir que la clé était de concevoir le personnage. Celui-ci est constitué de « reliques » qui sont des vestiges d’un civilisation disparue il y a longtemps et qui se trouvent enfouies très profondément dans la terre. C’est à partir de cette intrigue qu’on a pu développer le jeu… Le plus gros plus pour nous avec la PS4, c’est que tout a été plus rapide. Elle nous a fait gagner une année dans notre cycle de développement. De mon point de vue, il y a un peu de Crash Bandicoot, un peu de Katamari Damacy , un titre que j’adore et que j’ai dû acheter trois ou quatre fois ces dernières années. Et il y a peu de God of War aussi.
Jongler entre la création d’une console et celle d’un jeu doit être délicat mais Mark Cerny assure qu’il s’amuse bien avec ses équipes.
Pour travailler sur la plate-forme, je dois me rendre à Tokyo tous les mois, alors collaborer avec l’équipe de Knack à Tokyo me pose peu de problèmes. C’est dans le bâtiment juste en face.
Épaulé par des artistes talentueux, dont certains ont travaillé sur Shadow of the Colossus , Ape Escape ou encore God of War III , Mark Cerny participe également, durant ce laps de temps, à la conception du spectaculaire Killzone 3 puis se retrouve producteur exécutif de The Last Guardian ou encore Marvel's Spider-Man avant de briguer le poste de producteur technique sur Death Stranding . L’homme a décidément une carrière hors-normes !
ET MAINTENANT LA PS5 !
Infatigable, Mark Cerny, qui continue de participer à différents évènements (dont un Postmortem Shenmue en compagnie de Yu Suzuki à la GDC 2014) et à développer des jeux (Knack II ), devrait très prochainement revenir sur le devant de la scène. Poussé par le succès de la PlayStation 4 et le souhait des pontes de Sony, l’Américain est désormais en charge de l’architecture de la mystérieuse PlayStation 5. Celui qu’on devrait revoir très prochainement a donné quelques indications sur les promesses de la future machine.
Selon lui, la PlayStation 5 répondra à des vœux qui n’ont pu être exaucés avec la PlayStation 4. En pensant à l’architecture de la nouvelle machine, il a voulu répondre à une évolution logique tout en faisant en sorte que la machine soit taillée pour les années à venir.
La question-clé est de savoir si la console ajoute une couche supplémentaire aux types d’expériences auxquelles vous avez déjà accès, ou si elle permet des changements fondamentaux dans ce que peut être un jeu.
Durant l’entretien accordé à Wired, il glisse également une information très intéressante au sujet de la partie sonore de la future console.
Le rêve est de montrer à quel point l’expérience audio peut être radicalement différente lorsque nous utilisons la puissance matérielle nécessaire. Si vous souhaitez exécuter des tests pour voir si le joueur peut entendre certaines sources audio ou si les ennemis peuvent entendre les pas du joueur, le Ray Tracing est utile pour ça. C’est la même chose que de prendre un rayon à travers l’environnement.
La PlayStation 5 représente désormais l’avenir de Sony et on est bien évidemment très impatients d’en savoir plus. Mark Cerny poursuit son rêve de gosse et doit mesurer l’immensité de son parcours.
D’un point de vue personnel, ça a été un vrai plaisir de travailler avec Sony, d’abord de l’extérieur chez Universal, puis plus directement. Chez Sony, il y a un véritable respect du jeu et beaucoup de cœur dans tous les produits, que ce soit les jeux, les consoles ou le reste.
Pas de doute, l’autodidacte n’a pas fini de nous surprendre.
Sources :
- Retrogamer n°200
- Retrogamer FR n°13
- Interview Mark Cerny - Sega-16
- Interview Mark Cerny - Blog PlayStation
- Interview Mark Cerny - Wired
- Interview Steve Woita
- Interview Jason Rubin
- L'Histoire de Sonic
- Interview Mark Cerny - Amy Hennig - Venture Beat
- La création de graphismes en 2D dans l'industrie japonaise - VG Densetsu