L'année 2009 vit l'arrivée en Europe de Castlevania Judgment, un épisode tourné vers la baston pure et dont le seul intérêt fut de réaliser le premier véritable cross-over de l'histoire de la série.
Castlevania Judgment ne brille en effet ni par sa richesse, ni par sa longévité. Réalisé à l'arrache pour calmer les joueurs qui attendaient désespérément un nouvel épisode sur consoles de salon depuis Castlevania : Curse of Darkness, ce titre n'a réussi qu'à ternir l'aura de prestige entourant la saga gothique de Konami. Certes, tout n'est pas à jeter, mais nous sommes quand même bien loin du résultat escompté.
Dans l'idée, Castlevania Judgment rejoint d'assez près le postulat de départ d'un jeu comme SoulCalibur Legends en transposant l'univers de la série dans un soft d'un tout autre genre. Dans le cas du titre de Namco, la possibilité inédite d'explorer des niveaux d'action aux côtés des personnages de SoulCalibur compensait un petit peu les nombreuses lacunes du gameplay. Mais ici, ce sont de simples combats classiques en un contre un qui nous sont proposés, ce qui réduit nettement les possibilités d'exploitation du background de la série.
Le principal attrait du soft réside donc dans ses personnages, tous bien connus des fans et relookés par Takeshi Obata, dont on a pu apprécier le coup de crayon sur les mangas Death Note, Hikaru no Go ou encore Bakuman. Les personnages abandonnent ainsi leur design vieillissant au profit d'un autre beaucoup plus moderne, mais pas forcément plus stylé que celui d'Ayami Kojima. Simon Belmont a maintenant des airs de Kira tandis que Maria Renard affiche une étonnante ressemblance avec Misa, deux personnages issus du manga Death Note.
Réduite à seulement 14 combattants, cette grande réunion de famille fait l'impasse sur un certain nombre de protagonistes qui auraient pourtant largement mérité leur place dans ce cross-over. Et quand on voit le faible nombre de coups dont disposent les heureux élus, on peut penser qu'il n'aurait pas été impossible de doubler ce nombre.
On retrouve néanmoins quatre protagonistes issus de Castlevania III : Dracula's Curse. Il s'agit de Trevor Belmont, Grant Danasty, Sypha Belnades et Alucard dans sa version Symphony of the Night. N'ont pas été oubliés non plus Maria Renard, qui s'était illustrée dans Rondo of Blood aux côtés de Richter Belmont, et Cornell, le loup-garou qui avait été rajouté sur la seconde version de l'épisode N64. Enfin, Eric Lecarde, maniant la lance confiée par Alucard, est venu sans John Morris, son acolyte de Castlevania : The New Generation. Légèrement esseulé sur son trône, le comte Dracula est venu en compagnie de la Mort personnifiée sous les traits de Death. Et pour compléter ce sinistre tableau, les concepteurs ont introduit quatre autres personnages assez inattendus : la succube-vampire Carmilla et son Golem qui recherche le sens de la vie, Shanoa, l'héroïne de Castlevania : Order of Ecclesia, et enfin Aeon, personnage inédit autour duquel gravite tout le scénario de cet épisode.
Un scénario qui se résume hélas en quelques lignes, tant il est lacunaire et dénué de crédibilité. Témoin de l'affrontement qui oppose depuis des générations le clan Belmont au comte Dracula, un être nommé Aeon, situé hors du temps, décide de plonger tous les belligérants dans une faille temporelle pour déterminer quel est le plus fort d'entre tous. Bien qu'ils aient vécu à plusieurs siècles d'écart, ces derniers n'ont alors d'autre choix que de s'affronter dans l'espoir de regagner leurs époques respectives, quitte à défier leurs ancêtres ou leur propre descendance.
Il va falloir une sacrée dose d'imagination pour encaisser cette trame narrative sidérante. Et ceux qui espéraient trouver là l'occasion d'assister à des rencontres tourmentées et autres remises en question entre personnages apparentés risquent d'être fort déçus. Les intervenants ne font qu'échanger quelques bribes de dialogues totalement creux avant d'entamer les hostilités, sans s'étonner plus que ça de croiser la route de ceux qu'ils n'auraient jamais dû être amenés à rencontrer. Aeon, lui-même, n'est qu'un passeur derrière lequel se cachent la Mort et le seigneur Dracula, sous oublier une entité beaucoup plus redoutable qu'il faudra affronter en fin de jeu.
Mais avant d'arriver jusque-là, vous n'aurez pas d'autre choix que de recommencer 14 fois de suite le mode Arcade, inlassablement. Une progression d'autant plus répétitive que le gameplay est loin d'être suffisamment étoffé pour nous permettre de renouveler nos schémas de jeu sans sombrer dans l'ennui. Dotés des armes qui les caractérisent, les personnages ne disposent que de trois techniques de combat différentes en plus des enchaînements de base : l'attaque spéciale, l'attaque brise-garde et l'attaque foudroyante. Cette dernière se déclenche une fois la jauge dédiée remplie au maximum et donne lieu à une animation propre à chaque personnage. Quant à l'attaque brise-garde, elle consiste à se mettre en défense pour parer un coup puis à contre-attaquer immédiatement avec un mouvement imparable.
Dommage qu'on note un déséquilibre réellement flagrant entre certains personnages, les sortilèges surpuissants de Maria et Shanoa faussant complètement les rapports de force, sans parler de l'efficacité démesurée des attaques ultimes. On regrette également que les héros n'aient aucune possibilité d'évoluer au fil du jeu ni d'acquérir aucune technique supplémentaire qui permettrait de varier un minimum le déroulement des combats. Il faut donc se contenter des quelques subtilités mises à notre disposition sur l'arène de combat, à savoir la possibilité d'utiliser des armes secondaires et, parfois, d'interagir avec l'environnement.
Et comme le combo Wiimote / Nunchuk ne convainc pas du tout, on opte rapidement pour un gameplay reposant sur l'utilisation d'un pad GameCube ou d'une manette classique. Même là-dessus les développeurs n'ont pas réussi à aller jusqu'au bout de leur idée en proposant une maniabilité qui tienne la route tout en restant originale.
Même constat pour ce qui est des modes de jeu, l'exploration du château se résumant à des défis dénués d'inspiration où les objectifs tournent en boucle. Dommage qu'on ne puisse pas changer de personnage sans être obligé de recommencer la partie depuis la première salle du château. Seule alternative probante aux habituels modes Duel et Survie, les combats en wi-fi sont tout de même là pour inciter les plus motivés à poursuivre l'expérience de jeu en ligne s'ils le souhaitent. Bref, un titre plutôt expérimental et purement fan service que tout le monde a déjà oublié.