Après avoir fait briller les yeux des amoureux de RPG au Japon et mérité une seconde sortie dans une édition améliorée, le très convoité Bravely Default daigne enfin s'offrir à nous dans sa version ultime. Juste avant les fêtes de Noël, voilà bien le cadeau idéal à offrir aux joueurs en quête d'un J-RPG à la fois long, enchanteur et ambitieux !
Dans un monde de fantasy où les forces du mal gagnent de plus en plus de terrain, Agnès Oblige, la vestale du vent, tente désespérément d'échapper aux chevaliers célestes d'Eternia qui projettent de l'assassiner. Epaulée par la petite fée Airy, notre héroïne va tenter d'éveiller les quatre cristaux élémentaires pour restaurer la paix sur le monde et endiguer l'invasion des ténèbres. Elle sera rejointe dans sa quête par Tiz Arrior, baptisé "le miraculé de Norende" après avoir survécu à une catastrophe ayant décimé tout son village. Puis par Ringabel, un don Juan amnésique au passé mystérieux, et enfin par Edéa Lee, une enfant gâtée issue du camp ennemi qui décidera rapidement de se rallier à la cause de nos héros. Tous les quatre devront traverser une multitude d'épreuves avant d'atteindre le bord du Gouffre où doit se produire un miracle, selon la prophétie d'Airy... Notez bien que derrière ce scénario relativement classique qui couvre les trois quarts de l'aventure se cache un dénouement véritablement surprenant qui ne se laissera toutefois découvrir qu'après une bonne cinquantaine d'heures de jeu au minimum.
Un choc visuel et auditif !
Une fois passée la superbe cinématique d'introduction et après avoir pris soin de switcher les voix en japonais pour profiter du doublage original d'exception dont bénéficie Bravely Default, il convient dans un premier temps de se remettre du choc visuel offert par ce titre à la direction graphique étonnante. Il y a d'abord le character design qui surprend de par le fait que la naïveté qu'il confère aux personnages tranche radicalement avec leur caractère très mature. Il vous suffira en effet d'entendre résonner la voix grave de Ringabel pour voir se dissiper immédiatement vos doutes quant au risque d'avoir affaire à un énième RPG un peu gamin destiné à un jeune public. On reconnaît bien sûr le style de l'artiste Akihiko Yoshida (Final Fantasy Tactics, Vagrant Story, Final Fantasy XII) qui nous sert ici un travail proche de celui qu'il nous avait livré pour le charmant Final Fantasy : The 4 Heroes of Light sur DS.
Plus surprenant encore, les discussions font intervenir des bulles de dialogue proches de celles vues dans le mythique Vagrant Story, ce qui confère tout de suite un cachet attractif au jeu. Mais la meilleure surprise concernant la réalisation graphique réside clairement dans la beauté des environnements non hostiles que l'on est amené à visiter dans le jeu. Chaque village, chaque cité, nous apparaît toujours d'abord d'un point de vue très éloigné, ce qui permet de les apprécier dans leur ensemble avant que le zoom ne vienne nous sidérer par la magnificence des décors vus de près. Impossible de restituer en mots le rendu de ces environnements qui bénéficient d'un effet crayonné très réussi qui n'est pas sans rappeler le somptueux Saga Frontier 2 qui nous avait tous charmés à l'époque sur PlayStation. On a vu pire comme comparaison ! Et encore, ceci n'est rien à côté de l'impression laissée par la bande-son fantastique de Bravely Default.
Si le titre se doit d'être parcouru avec le doublage original japonais, c'est parce que celui-ci est d'un niveau qui frise l'excellence. Le timbre choisi pour chaque protagoniste par les comédiens, leur jeu et leur vitesse d'élocution, rendent les dialogues vraiment délectables. On s'amuse autant des conversations pimentées entre nos héros que du décalage produit par le contraste entre le design naïf des personnages et leur personnalité réelle. Qui plus est, celles-ci ont le bon goût de ne pas s'éterniser et certaines discussions sont même facultatives. Quant aux musiques signées Revo (du groupe Sound Horizon), elles sont d'une qualité assez époustouflante pour nous donner envie de foncer commander l'OST dans la foulée ! C'est bien simple, on n'en avait pas entendu d'aussi belles depuis celles de Nier et Xenoblade, avec une mention spéciale aux thèmes de combats et d'affrontements contre les boss, même si les mélodies rythmant l'exploration des villages ne sont pas en reste non plus. Qu'elle soit auditive ou visuelle, l'immersion dans l'univers fantaisiste de Bravely Default est donc immédiate et contribue très fortement à l'envie d'arpenter ce monde des heures durant à la découverte de tous les secrets qu'il renferme.
Bravely Default ou le F-Zero du RPG...
Dans cette partie dédiée au système de combat de Bravely Default, vous allez voir qu'il existe un point commun assez étonnant entre ce RPG et la série des F-Zero... Mais avant cela, il nous faut déjà commencer par rappeler les bases du gameplay de ce titre. S'inspirant en grande partie de celui de Final Fantasy : The 4 Heroes of Light sur DS, le système de jeu fait intervenir une multitude de jobs (24 au total, la plupart étant cachés) permettant aux héros de jongler à loisir d'une classe à une autre. Selon vos besoins, vous pourrez ainsi passer par n'importe lequel d'entre eux de moine à templier, en passant par mage noir, rôdeur, ninja ou encore chevalier noir. Concrètement, le fait de développer chacun de ces jobs permet non seulement de personnaliser son équipe selon ses désirs pour s'adapter à n'importe quelle situation, mais aussi de les rendre très polyvalents en combinant les aptitudes apprises dans plusieurs jobs différents. Ainsi, un personnage ayant pour classe principale celle de chevalier peut tout à fait recourir à la magie blanche ou aux talents de pirate si vous avez pris soin de les affecter dans le menu dédié. Bien sûr, on ne peut pas piocher à volonté dans les talents déjà appris, mais les points distribués dans les compétences de soutien permettent néanmoins d'élargir les capacités de chacun en se servant des aptitudes passives déjà obtenues.
Jusque-là, rien de très original, mais force est de reconnaître que ce système de jobs ouvre déjà bon nombre de perspectives en termes d'évolution, surtout que la plupart des classes sont bien camouflées et impliquent de mener à bien diverses quêtes annexes plus ou moins difficiles en marge de l'aventure principale. Le job d'invocateur, par exemple, ne vous laissera profiter des somptueuses cinématiques qui accompagnent chaque invocation qu'après avoir prouvé votre valeur en allant passer un test auprès d'un anachorète redoutable, mais le jeu en vaut la chandelle. Chaque minute passée dans Bravely Default est d'ailleurs une occasion d'accomplir quelque chose sans que cela ne nous soit jamais imposé. La preuve avec le tutorial qui est présenté sous forme de quêtes d'initiation permettant de se familiariser de manière ludique avec les subtilités du système de jeu tout en obtenant diverses récompenses.
Mais revenons-en à notre comparaison osée entre Bravely Default et le fameux F-Zero. Pour cela, il nous faut vous parler du système de Brave & Default qui donne justement son nom au jeu. Afin de pimenter les combats au tour par tour en apparence très classiques et leur ajouter une bonne dose de tactique, les concepteurs ont eu la brillante idée de faire intervenir les options Brave et Default. La première, Brave, permet de faire jouer un personnage plusieurs fois de suite durant un même tour, et ce jusqu'à quatre fois, dans le but de lui permettre d'enchaîner plusieurs actions rapidement. A l'inverse, la commande Default ne consomme pas de BP mais en stocke, ce qui veut dire que l'on peut en accumuler jusqu'à trois avant de les enchaîner au moment opportun avec des Brave. Concrètement, avec un seul Brave, on peut déjà jouer deux fois de suite dans un même tour, ce qui permet par exemple de lancer deux attaques successives, de ressusciter quelqu'un avant de le soigner, ou encore de restaurer nos MP pour lancer une magie derrière. Des choses impossibles à réaliser habituellement dans un RPG.
Imaginez alors toutes les possibilités qui s'offrent à nous sachant que l'on peut utiliser jusqu'à 3 Brave (donc 4 actions) dans un seul tour ! S'il vaut mieux ne pas en abuser et prendre le temps de stocker des BP via la commande Default lors des combats difficiles, on peut quasiment se débarrasser de tous les groupes d'ennemis lambda en un éclair en lançant directement un maximum de Brave dès le premier tour pour tous nos personnages ! Le bonheur à l'état pur pour tous les rôlistes qui en ont assez de perdre du temps lors des rencontres aléatoires. Face aux boss, il conviendra plutôt de se montrer prudent en jonglant intelligemment entre les commandes Brave et Default selon les aptitudes des personnages pour ne pas se retrouver complètement vulnérable. Au final, on ressent carrément la même tension que lorsqu'on est confronté au dilemme de consommer ou non notre énergie pour gagner du boost au risque de voir exploser notre vaisseau dans un F-Zero...
Le nirvana du J-RPG
Un autre élément que l'on ne s'attendait pas forcément à trouver dans Bravely Default et qui est, semble-t-il, lié au fait qu'il s'agit de la version internationale sortie au Japon, concerne la possibilité de paramétrer entièrement et à tout moment notre expérience de jeu. Sans exagérer, on peut ajuster tellement d'options différentes qu'on a presque le sentiment d'avoir accès à une fonction Debug proche de la triche éhontée. Le but n'est pourtant pas de nous inciter à tricher mais plutôt de nous donner la possibilité d'ajuster librement certains paramètres pour profiter au maximum du jeu sans subir les contraintes inhérentes à tous les autres J-RPG. On peut ainsi modifier à tout moment la difficulté des combats, accélérer leur vitesse ou les passer en mode auto pour rendre les phases de level-up moins fastidieuses... Mieux encore, on peut carrément ajuster la fréquence des rencontres aléatoires sur une échelle de 4, en la mettant au maximum lorsqu'on veut leveler ou à zéro lorsqu'on souhaite fouiller un donjon sans perdre de temps à combattre. Avec cette option, les concepteurs ont vraiment trouvé la meilleure réponse à donner aux joueurs qui n'ont plus envie de subir les contraintes relatives au genre, et on les en remercie. D'autant que cela va de pair avec tous les autres éléments qui ont été intégrés pour assurer un confort de jeu optimal, comme l'aptitude permettant de parcourir les donjons en évitant les pièges ou de connaître le nombre exact de coffres restants à chaque étage. Les passages secrets eux restent invisibles et obligent à fouiller les moindres recoins de chaque zone pour tout découvrir. On apprécie également la mine d'informations dont regorgent les menus ainsi que le fait de se déplacer manuellement ou instantanément avec le vaisseau.
Attention, l'addiction vous guette
Il reste encore bien des choses à évoquer concernant le système de jeu de Bravely Default, les concepteurs n'ayant visiblement pas manqué d'idées pour enrichir leur soft au maximum afin d'en faire la nouvelle référence du genre sur 3DS. Très tôt dans l'aventure, on nous informe que le village natal de Tiz, dévasté au début de l'histoire, doit être reconstruit via l'écran tactile, un peu à la manière d'un jeu web de gestion. A savoir que vous devez affecter un nombre donné de villageois à certaines tâches pour développer progressivement le village afin d'obtenir régulièrement des récompenses. Tout bête sur le papier, ce concept se révèle assez addictif, d'autant qu'il permet de booster les boutiques à des niveaux suffisamment élevés pour recevoir des équipements ou des objets vraiment intéressants. Au fil des heures passées, la reconstruction de Norende se fera donc automatiquement et vous n'aurez qu'à garder un œil attentif dessus pour affecter les tâches à vos villageois, de nouvelles recrues venant régulièrement augmenter votre effectif via StreetPass. Le fait de laisser votre console en veille vous permettra par ailleurs de booster votre jauge de Bravely Second, une sorte de joker utilisable en combat pour figer l'action pendant quelques secondes afin de prendre l'avantage, mais cela reste assez gadget.
A l'inverse, l'importance des coups spéciaux personnalisables se révèle d'autant plus grande qu'elle permet de prolonger les effets de ces super attaques en les enchaînant d'un personnage à un autre. La manière dont le coup spécial peut être activé diffère selon l'arme utilisée et ce sont les bonus et les malus que vous débloquerez via la reconstruction de Norende qui vous permettront de les renforcer en leur ajoutant des effets secondaires non négligeables. Le soft inclut même une option Mentorat pour faire en sorte que nos personnages héritent des techniques apprises par des joueurs amis, avec possibilité de les appeler à la rescousse en déclenchant l'attaque qu'ils ont partagée avec nous en cas de besoin. Au final, on ne voit pas bien ce qu'il pourrait manquer à Bravely Default pour être encore meilleur, si ce n'est un scénario un peu plus étoffé, surtout dans les derniers chapitres où la redondance vient casser le rythme pourtant soutenu qui caractérise la grande majorité de l'aventure.
Tous les textes du jeu sont en français.
Points forts
- Un J-RPG à l'ancienne comme on n'en voit quasiment plus
- Direction artistique étonnante et réalisation au top
- Le système de Brave & Default très tactique
- 24 jobs dont on peut combiner les effets
- L'importance des attaques spéciales et le caractère bluffant des invocations
- Des musiques d'exception signées Revo (du groupe Sound Horizon)
- Le doublage japonais impeccable
- Le "tout personnalisable" pour un confort de jeu optimal (fréquence des combats, etc.)
- La richesse de l'aventure et le challenge paramétrable
- Les bonus liés à la reconstruction de Norende
- L'entraide entre joueurs amis
- Les révélations de fin de partie
- Durée de vie énorme (50 heures minimum) et quêtes annexes en pagaille
- Tous les contenus de la seconde version sortie au Japon sont inclus
Points faibles
- Le scénario un peu trop classique dans l'ensemble
- La redondance des derniers chapitres conduisant à la vraie fin du jeu
- La beauté des cinématiques nous fait regretter qu'il n'y en ait pas plus
- Les donjons visuellement moins soignés que les villages
Bravely Default est certainement le jeu 3DS dont on attendait le plus la confirmation en Europe, et ce depuis de très longs mois. Désormais accessible dans notre langue, cet excellent jeu de rôle se montre largement à la hauteur de nos attentes et réussit à nous transporter pendant des dizaines d'heures dans ce qui pourrait bien être la nouvelle référence du J-RPG. Avec ses idées de gameplay intelligentes et ses options de personnalisation ultra poussées, le soft propose un confort de jeu optimal et s'avère d'ores et déjà incontournable !