Depuis maintenant 25 ans, la série The Legend of Zelda s'est fait une place dans le panthéon vidéoludique grâce à son excellence. Une place que personne ne peut contester tant la saga a su perdurer avec une constance extraordinaire. Bien sûr, cette dernière phrase n'est à prendre en compte que si vous arrivez à comprendre qu'aucun épisode n'est jamais sorti sur CD-I. Jamais ! Bref, attelons-nous dès à présent à ce fameux Skyward Sword, qui en a déjà fait crier quelques-uns de par son design, le genre de critiques qui n'avaient pas empêché de briller un certain Wind Waker d'ailleurs. Ce qui importe, c'est que ce nouvel opus nous propose un univers profond et attachant doublé d'une quête qui nous émerveille. Mais est-ce vraiment le cas ?
L'aventure débute sur un terrible cauchemar de Link, mettant en scène une sombre créature démoniaque. Avant de comprendre ce qu'il se passe réellement, le héros se réveille, révélant ainsi sa petite chambrée dans l'Ecole des Chevaliers de Célesbourg. Ce village sera l'un des cadres principaux du voyage visuel qui s'offre à vous. Mais pour le moment, il faut se lever car aujourd'hui est un grand jour : la 25ème édition de la Chevauchée Céleste ! Outre la référence subtile au 25ème anniversaire de la série, on découvre que Link est un des principaux challengers de l'événement, lui et son fameux Célestrier Vermeil, sorte d'oiseau à gros bec. Sans trop rentrer dans les détails des petits périples qui constituent ce début d'aventure, vous allez rapidement rencontrer la fameuse Zelda, belle ingénue qui chauffe le héros allègrement à chaque occasion. Oui oui, vous avez bien lu ! Le début de partie laisse furieusement entendre que la « princesse » a envie de passer aux choses sérieuses avec Link ! Cela dit, il est difficile de parler de réciproque puisque le héros est toujours muet, d'autant plus que la demoiselle va malheureusement disparaître en plein ciel alors qu'elle était peut-être sur le point de dire « je t'aime » ! Nintendo joue vraiment avec nos nerfs... Bref, vous l'avez deviné, vaillant aventurier que vous êtes, vous allez devoir la retrouver, ce qui ne se fera pas sans embûches.
Mais avant de partir braver les dangers, faisons une petite visite admirative de Célesbourg. Il ne fait aucun doute que l'équipe de développement à beaucoup travaillé sur cette cité volante, carrefour de vos futures pérégrinations. Bien que les rues ne soient pas bondées, le lieu déborde de vie et de charme. Les couleurs sont chaudes et donnent une bonne indication de l'orientation visuelle de Skyward Sword. Bref, ne restons pas béatement subjugués par le cadre proposé et quittons l'île pour retrouver Zeldounette. Vous l'avez sans doute compris, la plupart des voyages de Link se feront dans les cieux à dos de Célestrier. Nous voyons déjà l'éclair dans vos yeux à l'idée de retrouver les plaisirs de la navigation connus dans Wind Waker, et en cela, on pourrait croire que Skyward Sword nous propose un équivalent aérien. Pourtant, et malgré son apparente majesté, l'univers céleste qui s'offre à nous n'est pas aussi propice à l'aventure que l'on pourrait le penser. En effet, l'espace est plutôt restreint et il ne se passe pas grand-chose lorsque vous allez d'un point A à un point B. Certes, cela reste joli, mais les phases de vol sont plus proches de trajets que de voyages, aussi subtile puisse être la nuance. Cela dit, le gameplay ne tourne pas vraiment autour, donc rien de bien grave. Descendons de suite sur terre pour découvrir ce qui se passe sous les nuages.
Car nous devons préciser que Skyward Sword est divisé en deux « mondes » : l'un aérien, où sont éparpillées des îles volantes, et l'autre sur la terre ferme, où vous trouverez de vastes zones et quelques fameux temples. L'aventure vous emmènera bien vite dans la Forêt de Firone, petite mise en bouche des aventures qui vous attendent. Le moment où jamais de parler de la maniabilité, qui nécessite l'utilisation du Wii MotionPlus. Maintenant, l'épée de Link suit avec précision les mouvements de votre Wiimote, tenue en main droite. Non, ne criez pas au sacrilège, Link n'est plus gaucher, mais il fallait bien cela pour s'adapter au plus grand nombre. Peu importe, pour donner un coup, il faut faire un mouvement rapide d'un côté vers un autre, l'angle étant bien entendu pris en compte. Ceci implique que le joueur doit prévoir ses attaques à l'avance puisque pour asséner avec efficacité un coup de la droite vers la gauche, il faut d'abord que votre main pointe vers la droite. Bien évidemment, dit comme ça, ça à l'air évident, mais en pleine action, cela peut poser des petits soucis. En effet, il n'est pas rare de donner un coup involontairement en voulant repositionner sa main, ce qui arrive plus fréquemment que vous ne le croyez. Mais nous reparlerons des conséquences un peu plus tard dans ce test. Sachez tout de même que le nunchuk, dans votre main gauche, sert à brandir le bouclier, et qu'il est toujours possible de réaliser des coups d'estoc ou encore des attaques tournoyantes en faisant les mouvements adéquats.
Parmi les innovations, on découvre la présence d'une jauge d'endurance, qui se vide lorsque Link pique un sprint ou escalade quelque chose. Ce petit système n'apporte pas de véritable révolution en termes de gameplay mais permet de mettre en scène quelques situations où il faudra récupérer des fruits pour remplir notre jauge pendant une longue ascension. Il s'agit juste d'une petite évolution de la série, une sensation qui revient dans de nombreux éléments de jeu. C'est le cas par exemple de Fay, une demoiselle robotique qui vous suivra pendant toute la quête et dont nous avons volontairement omis de décrire la rencontre. Tout ce que vous avez à savoir, c'est que cette entité reste cachée dans votre épée et sort de temps en temps pour vous aider, un peu comme Navi mais sans le côté invasif (Hey ! Listen !). Même si on peut lui reprocher un certain manque de charisme, Fay vous offre tout de même le pouvoir de Détection, une sorte de menu qui vous permet de choisir quel élément rechercher en priorité. Justement, la Forêt de Firone vous impose de faire un petit cache-cache avec les mignons Tikwi. Pour les retrouver, vous devrez donc choisir les Tikwis dans votre menu rapide de détection et passer à la première personne en pointant la Wiimote vers l'écran. Lorsque votre cible est dans la direction pointée, le cercle clignotera vous indiquant ainsi où aller. Par la suite, cette fonction évolue et peut servir à trouver des coeurs pour remonter votre vie et tout plein d'autres choses.
Mais continuons donc notre évolution dans la Forêt de Firone pour comprendre un peu mieux le concept de Skyward Sword. Car après ce petit cache-cache avec les Tikwi, vous allez devoir évoluer jusqu'au temple de la zone, ce qui ne se fera pas sans difficultés. En effet, on est un peu surpris par le level design quelque peu chaotique qui nous est imposé, une chose à laquelle la saga des Zelda ne nous a pas réellement habitués. L'avancée n'est pas des plus agréables et on s'inquiète d'autant plus quand on arrive au premier « donjon ». Car le Temple de la Forêt ne restera définitivement pas dans la mémoire des joueurs. Entre classicisme et allers-retours inutiles, quelques erreurs de design font étonnamment tache. Pourtant, on ne peut pas dire que le principe des interrupteurs soit un concept nouveau, mais les énigmes manquent clairement du génie habituel de la série. D'ailleurs, cet arrière-goût amer traîne aussi dans la Montagne d'Ordinn, seconde aire de jeu qui s'achève par un donjon manquant une fois de plus d'idées, sauf si le principe de marcher sur une boule pour la faire tourner et ainsi avancer vous semble être du jamais vu. Pire encore, la troisième zone, le désert, est carrément pénible à jouer, à cause d'un level design franchement bordélique. On ne sait jamais vraiment où l'on doit aller, et même si on s'y retrouve en fouillant un peu, on ne peut s'empêcher de se dire qu'on attendait mieux d'un Zelda. Car comprenez bien que nous parlons ici de légère déception. Non, les premières heures de jeu ne sont pas horribles, mais juste en deçà de l'excellence habituelle de la saga, celle qui est universellement considérée comme une des plus abouties du jeu vidéo... Alors, Skyward Sword serait-il un jeu lambda ?
Après dix heures de jeu, on est forcément interloqué par ce que l'on a pu voir jusque-là... Malgré l'obtention de nouveaux objets comme le scarabée, une sorte de remplaçant du boomerang que l'on dirigerait soi-même, on reste un peu sur notre faim. Puis soudainement, la trame évolue... Pour poursuivre votre quête à la recherche de Zelda, il va falloir passer plusieurs épreuves afin de prouver votre courage. Ainsi, vous devez retourner dans ses zones déjà visitées pour « montrer vos vertus ». Alors oui, en général, le coup de revenir dans des endroits déjà vus ressemble à une grosse fainéantise de programmeurs, et pourtant, c'est à ce moment là que Skyward Sword prend son envol et nous subjugue comme jamais ! En effet, c'est lors de cette « resucée » que l'on se rend compte (même si quelques indices le laissaient penser) que tout le level design a été conçu pratiquement exclusivement pour la deuxième partie de jeu, ce qui explique aussi pourquoi il était aussi bancal pendant les dix premières heures. On découvre ainsi les Psysalis, sans doute les épreuves les plus stressantes jamais créées dans un Zelda. Sorte de version parallèle du monde tel qu'on le connaît, on doit y trouver quinze orbes en un minimum de temps, disséminés dans le niveau. La contrainte, c'est que des Gardiens effrayants gardent la zone. Si l'un d'entre eux vous touche, vous recommencez l'épreuve depuis le début. Ce qui est d'autant plus drôle quand vous savez que vous n'avez accès à aucune arme ni aucun objet dans la Psysalis. En fait, le seul avantage que vous avez, c'est que les Gardiens deviennent inopérants pendant une trentaine de secondes quand vous trouvez un orbe. Mais même dans ce cas, si vous êtes repéré par un fantôme-lanterne ou si vous touchez l'eau, les Gardiens reviennent à la vie immédiatement, vous pourchassant sans cesse !
Aussi bête que cela puisse paraître, attendez-vous à de bonnes suées en perspective. En fait, dès votre première Psysalis, une partie de vos doutes disparaîtront et vous vous remettrez à crier au génie. Mais ces épreuves ne sont pas les seules indices du talent « retrouvé » des développeurs de Skyward Sword. En effet, cette deuxième partie de jeu est l'enveloppe de multiples scènes d'anthologie que l'on ose à peine vous dévoiler, et qui estompent joyeusement la ligne qui séparait autrefois les zones d'exploration et les donjons. On pense par exemple à la mer de sable lors de notre retour dans le désert, sur laquelle on navigue grâce à un artefact qui rend aux environs leur aspect d'antan. Ce système est utilisé dans le « donjon » qui suit, nous faisant ainsi découvrir toutes les parties d'un vieux navire échoué redevenu majestueux vaisseau, ceci avant une fin épique donnant sur un combat qui restera dans l'histoire de la série (surtout si vous aimez Bob Marley... Comprenne qui pourra). On découvre aussi avec joie un temple aux influences indiennes dont le système tourne autour d'une statue centrale qui recèle de nombreuses surprises. Là encore avant un affrontement final épique à s'en déboîter la mâchoire ! Quelles violentes gifles ! Et encore, nous vous cachons volontairement certains éléments pour vous laisser quelques surprises, en espérant que vous n'avez pas regardé les extraits offerts par Nintendo ces dernières semaines, bourrés de spoilers.
Toutefois, nous pouvons vous parler sans trop de mal des combats, qui prennent forcément une autre tournure grâce au Wii MotionPlus. Car si vous pensiez que tout serait plus facile parce que vous êtes théoriquement plus précis, vous vous fourrez le doigt dans l'oeil jusqu'au coude. Visiblement, les monstres sont au courant de vos nouvelles capacités et présentent souvent une défense qui nécessite de les toucher dans un angle bien précis. L'un des premiers exemples nous vient de plantes qui ouvrent la bouche soit horizontalement, soit verticalement. Si vous ne les attaquez pas dans l'angle d'ouverture, vous serez pratiquement toujours puni par une perte de coeurs. Voilà pourquoi les errements dont nous parlions plus tôt posent parfois problème et risquent de faire grincer quelques dents. D'ailleurs, l'utilité du Wii MotionPlus est aussi mis en exergue dans de nombreuses énigmes, comme par exemple la clef de la porte du boss de chaque temple, à placer dans le bon sens. Pour revenir aux ennemis, vous pouvez aussi vous en défaire grâce aux habituels objets à ramasser, comme un lance-pierre, un fouet (qui sert aussi à se balancer), un grappin et autres surprises. Ces derniers sont accessibles sans faire pause grâce à un menu en forme d'anneau et un petit mouvement de Wiimote. Mais le must, c'est qu'ils sont maintenant upgradables.
Certes, booster les objets et armes de Link, c'est pas vraiment nouveau (surtout pour ceux qui se rappellent avoir jeté leur épée dans l'Etang des Fées), mais ici, vous pouvez vraiment obtenir des choses étonnantes grâce à un artisan de Célesbourg. Pour cela, il faut lui amener des objets spéciaux récupérés sur des monstres ou dans des coffres, et payer quelques rubis. Cela fait partie des nombreux éléments secondaires de Skyward Sword qui font le charme du jeu, en ne se contentant pas de nous offrir une seule quête principale, aussi divine soit-elle. On peut ainsi trouver les Cubes de la Déesse dans le partie terrestre du monde, qui une fois touchés activent des coffres dans le partie céleste. On peut aussi récupérer des Cristaux de Gratitude en subvenant aux besoins des gens afin d'aider le mal-aimé Morcégo. Bref, tant de choses à découvrir qui prolongent avec bonheur une durée de vie déjà bien fournie. Tout cela débouche sur de nombreuses récompenses, à tel point que votre inventaire ne suffira pas à les contenir, vous obligeant à passer par une banque pour déposer vos objets en surplus. Rien que le nombre de potions différentes à de quoi donner le tournis aux habitués de la série.
Au final, que dire de Skyward Sword ? Sans vouloir virer dans le cliché, il nous renvoie directement à l'image de la chenille qui se transforme en papillon. Jamais un épisode de la série n'a été aussi long à démarrer. Pourtant, il finit par dévoiler toute sa grâce dans sa deuxième partie, nous offrant des moments inédits et des scènes qui marqueront les mémoires pendant plusieurs années. Il faut être sincère, nous n'avions pas été aussi subjugué depuis Ocarina of Time et certains passages font tout bonnement partie des meilleurs de la série. Malheureusement, et même si l'impression finale est excellente, on ne peut pas oublier que les dix premières heures de jeu reste en deçà du reste et que mine de rien, cela fait un sacré pan de la trame principale. Oui, le level design était bâti pour notre second passage, mais cela n'empêche pas de se dire que le titre aurait pu être un véritable chef d'oeuvre s'il avait su nous charmer de bout en bout, et pas seulement dans les deux derniers tiers. Quoi qu'il en soit, les possesseurs de Wii ne devraient pas hésiter une seule seconde à se procurer ce petit bijou orné de diamants, une petite perle comme on en voit rarement et qui gardera une place bien au chaud dans votre coeur.
- Graphismes18/20
Quand un éditeur n'hésite pas à prendre de risque en changeant le design d'une série à chaque épisode, cela force le respect. Encore une fois, si tous les goûts sont dans la nature, Skyward Sword possède un charme absolument indéniable qui pousse à l'émerveillement. Les couleurs éclatantes forment une oeuvre comme on aimerait en voir plus souvent. Les inspirations sont nombreuses, mais on devine sans mal une tendance à l'impressionnisme, dont les tons pastel seraient plus prononcés. Malgré les bâtiments qui nous entourent, la verdoyance de l'île céleste nous illumine et nous ensorcèle, notamment grâce à un effet donnant un aspect "peinture à l'eau" aux décors lointains (ce qui permet aussi d'économiser de la mémoire, autant faire d'une pierre deux coups). Toutefois, on ressent parfois que la Wii est dans ses derniers retranchements et qu'il ne faut pas lui en demander plus d'un point de vue technique.
- Jouabilité17/20
La multiplicité des objets offrent à Link d'innombrables possibilités débouchant parfois sur d'étonnantes phases de jeux, comme de longues glissades le long d'une montagne ou encore quelques énigmes souterraines. Les combats à l'épée sont agréables et restent certainement ce qui se fait de mieux avec un le Wii MotionPlus. Néanmoins, vous ne pourrez pas empêcher quelques coups de partir dans une direction non-souhaitée ce qui peut avoir des conséquences pénibles. Heureusement, l'ingéniosité du level design nous fait oublier tout cela et l'exploration des zones de jeu se fait avec plaisir, surtout après les dix premières heures.
- Durée de vie18/20
Comptez entre une trentaine d'heures maximum pour la quête principale, si vous ne touchez pas aux quêtes annexes. C'est déjà pas mal quand on sait qu'il est vendu à un peu moins de 40 euros. Fatalement, quand on sait que l'on peut facilement doubler ce temps si on veut tout découvrir, c'est une autre histoire...
- Bande son18/20
Comme pour Star Fox 64, Koji Kondo fait équipe avec Hajime Wakai (Pikmin, Nintendogs) pour nous livrer une pièce fabuleuse. Les musiques suivent avec brio les thématiques variées rencontrées dans Skyward Sword sans jamais virer dans la caricature. Les passages plus sombres sont parfois soulignés d'une brutalité nécessaire et l'ensemble nous rappelle que la série des Zelda mérite ses lettres de noblesse.
- Scénario14/20
Le scénario suit son court avec quelques surprises ici et là, mais rien de bien extravagant pendant la majeure partie du jeu. On aurait aimé que Fay ne livre pas une prestation aussi monolithique malgré ses origines, mais on ne peut pas tout avoir. L'important, c'est que la mise en scène soit assez accrocheuse pour ne pas lasser le joueur. Heureusement, c'est le cas.
Skyward Sword passe très près du véritable chef d'oeuvre absolu. En effet, alors que les premières heures de jeu nous laissent dubitatifs, le titre prend son envol dans une deuxième partie absolument magistrale, notamment grâce à des donjons magnifiques et inspirés, témoins de scènes d'anthologie. Malgré quelques petites imprécisions de temps en temps, le maniement au Wii MotionPlus est certainement le meilleur jamais vu. Quoiqu'il en soit, Link nous livre une prestation d'adieu à la Wii fort touchante, qui plaira aux gamers grâce à des énigmes soignées et des combats épiques. Si vous avez oublié ce que pouvait être le génie créatif au service du jeu vidéo, ce n'est pas la peine de chercher plus loin.