Depuis ses débuts en 2001, la franchise Stronghold a soufflé le chaud et le froid. Si le premier épisode avait su lancer la série de manière convaincante, sa suite, criblée de maladresses, s'était avérée franchement décevante. Idem pour les volets stand alone qui se sont montrés tantôt intéressants (Crusader), tantôt dispensables (Legends). Conscient des erreurs commises par le passé, le studio britannique Firefly revient pour le dixième anniversaire de ce RTS médiéval avec la ferme intention de proposer une expérience à nouveau digne de ce nom.
Firefly Studios l'admet sans honte, Stronghold 2 n'a pas franchement été à la hauteur de son aîné. Un aveu sincère et réaliste qui permet en quelque sorte aux développeurs d'exorciser le passé. En voulant éviter le syndrome de la suite creuse, ces derniers avaient choisi à l'époque d'intégrer une multitude de nouveautés qui ont fini par rendre l'expérience inutilement complexe. Avec la gestion en parallèle du développement de leur propre moteur, le studio s'était retrouvé dépassé par ses propres ambitions. Lucide après avoir tiré les enseignements du passé, Firefly a pris des décisions radicales à propos de Stronghold 3. En premier lieu, le jeu utilise cette fois un moteur tiers : le Vision Engine. Celui de Settlers 7 notamment. Si d'un point de vue strictement visuel, le rendu demeure agréable, c'est surtout via tous les petits ajouts au niveau du gameplay que l'on constate l'apport de cet outil venu de l'extérieur. Il a notamment permis aux développeurs de retravailler tout ce qui à trait à la gestion de la physique. Lors des assauts, vous verrez dorénavant distinctement les soldats chuter un à un des murailles entourant votre château. Ils viendront ainsi s'écraser en contrebas en heurtant au passage les éléments du décor. Voilà qui permet au titre de gagner en dramaturgie. Dans le même registre, les débris provenant de la destruction de bâtiment pourront pour leur part tomber sur les personnes situées à proximité, ce qui occasionnera leur mort. Une dose de réalisme en plus qu'il faudra prendre en compte dans sa stratégie en mettant en place des pièges ou en positionnant intelligemment ses constructions.
Firefly a également fourni un énorme boulot autour des variations de luminosité. L'alternance du jour et de la nuit possède un vrai impact sur le gameplay. Défendre son château lors des sièges nocturnes s'avère relativement complexe. Une sorte de brouillard de guerre entoure en effet ses constructions, empêchant de voir d'où viennent les agresseurs. Cependant, en allumant différentes sources lumineuses, il est possible d'agrandir son champ de vision afin d'anticiper l'attaque adverse. Stronghold 3 permet aussi une gestion plus précise de l'espace à aménager autour de son château. Les constructions peuvent être placées à peu près où l'on veut. Ce qui permet au final d'éviter le côté « Medieval Manhattan » des épisodes précédents qui affichaient des villages extrêmement ordonnés. Il faudra tout de même veiller à quelques détails comme placer les maisons à proximité de votre château. Celles-ci contiendront ainsi plus de personnes, vos habitants se sentant protégés et galvanisés par la présence d'un édifice fortifié à côté de chez eux. Beaucoup moins crucial car purement esthétique, les développeurs ont souhaité insuffler plus de vie à leur jeu via la présence d'animations variées propres aux différents personnages composant une population dorénavant plus massive. En zoomant au maximum, on peut ainsi assister à tout un tas de petites saynètes tantôt drôles, tantôt dramatiques, du villageois alcoolisé qui peine à rentrer chez lui au bourreau qui aiguise ses outils, en passant par le seigneur qui fait un détour par les toilettes du château.
L'ambition étant grossièrement de revenir à ce qui avait fait le succès du premier volet, on retrouve dans Stronghold 3 ce mélange entre jeu de stratégie en temps réel et simulation. Le jeu propose un gameplay d'une richesse assez impressionnante. Il vous faudra gérer l'aménagement du territoire sous votre autorité, l'agrandissement du château, le bien-être de la population, la collecte et le commerce de ressources, la densification progressive de votre armée ou encore le déroulement des sièges. Tout un programme. Pendant la présentation, les développeurs ont tenu à insister sur un point précis, sur lequel ils ont visiblement passé pas mal de temps. Il s'agit du système de réputation. Selon vos actions, la popularité dont vous jouissez au départ pourra augmenter ou diminuer. Un indice chiffré (vert ou rouge selon que vous soyez apprécié ou non) situé en haut de l'écran vous indique immédiatement la conséquence de votre politique du moment. En construisant des machines de torture, vous pouvez être certain que la population n'aura que peu de plaisir à vivre sous vos ordres. Votre popularité en prendra donc un coup. Au contraire, si vous multipliez les jardins et les statues, il y a fort à parier que vous attirerez du monde venu des quatre coins du pays. Des évènements aléatoires viendront également pimenter les parties. Si le roi décide par exemple de vous rendre visite, votre réputation deviendra très positive car la population se trouvera enchantée de l'évènement. Le bon moment pour augmenter les taxes de manière conséquente. A l'inverse, des intempéries peuvent ruiner le moral des habitants et faire chuter votre cote auprès d'eux. En produisant un stock de bières plus important, il se peut que vos villageois retrouvent de la motivation dans leur travail. C'est bien connu (ou pas), le houblon remonte le moral..
Mais pourquoi diable vous échineriez-vous à prêter attention à cette réputation de malheur ? Après tout, quoi qu'il arrive, tout le monde se doit de vous obéir. Et bien, tout cela aura une conséquence sur la productivité des villageois, moins enclins à fournir des efforts pour vous en cas de maltraitance caractérisée. En revanche, plus votre politique est dure, plus les membres de votre armée auront confiance en vous. Evidemment, être bon et juste conduira à un résultat diamétralement opposé. La population produira beaucoup et vite alors qu'il vous sera difficile de lever une armée en raison du coût élevé du recrutement. Les soldats seront en effet méfiants à l'égard de votre capacité à réussir sur le plan militaire. Il faudra donc veiller à trouver un équilibre pour ne pas inutilement froisser les gens tout en affirmant votre autorité. A moins que vous ne souhaitiez consciemment tendre vers l'un des extrêmes. Bien entendu, les combats font toujours partie intégrante du gameplay de Stronghold 3. Les sièges s'annoncent d'ailleurs encore plus spectaculaires qu'auparavant. Pour autant, Firefly a plutôt choisi de s'attarder lors de la présentation sur de petits affrontements en environnement ouvert. Nous avons pu constater à cette occasion le côté exigeant de ces oppositions. Il sera impératif de ne pas cliquer à toute vitesse mais de bien calculer chaque mouvement pour éviter de se faire anéantir. Si des unités ont engagé le combat avec des adversaires, il sera par exemple extrêmement préjudiciable de leur faire brutalement changer de cible. Dans ce cas précis, vos ennemis se feront un plaisir de planter vos protégés dans le dos. Stronghold 3 proposera aussi pas mal d'unités dont certaines auront un rôle un peu spécial. On pense au chien. Une fois libéré de sa cage, celui-ci attaquera sans discernement les troupes de son maître ou celles de l'ennemi. Vous pourrez aussi utiliser nombre de pièges de nature différente pour surprendre le camp opposé. On a notamment vu une sorte de cage en bois de laquelle des sortes d'énormes piques meurtrières pouvaient sortir pour éliminer des unités impudentes.
Côté contenu, le jeu devrait s'avérer complet avec en premier lieu deux campagnes solo prenant la forme de tutoriels géants. La campagne militaire comptera 17 chapitres alors que la campagne économique en proposera 8. On s'est d'ailleurs brièvement essayé à cette dernière. La mission qui nous a été confiée n'était pas spécialement compliquée en apparence. Éradiquer les loups de la map en détruisant leurs tanières, voilà qui apparaissait en effet plutôt simple. Seulement, ce que l'on ne nous avait pas dit, c'est que ces mammifères de la famille des canidés allaient débarquer en masse et par vague, décimant violemment la population dont nous devions pourtant assurer la protection. Stranghold 3 disposera aussi d'un mode Historical Sieges. Celui-ci vous placera dans la peau de l'assaillant ou du défenseur d'un château donné pour des parties n'excédant pas 15 minutes. Un mode free build ainsi qu'un éditeur de map seront aussi inclus dans le jeu, tout comme quatre modes multi pouvant accueillir jusqu'à 8 joueurs.
Au regard de cette présentation, Firefly nous a semblé être sur la bonne voie. Le studio a réussi à cerner les erreurs à ne pas reproduire et s'échine désormais à proposer une expérience proche de celle du premier épisode. Toutes les nouveautés exposées sont a priori intéressantes et apportent un vrai plus au jeu. Maintenant, il reste encore quelques problèmes qui, s'ils subsistent, pourraient venir ternir le résultat final. A commencer par un pathfinding pas vraiment au point. Plus globalement, l'IA a également connu quelques errements au cours des différentes parties que nous avons pu jouer. Voilà d'ailleurs la raison pour laquelle la sortie de Stranghold 3 vient d'être repoussée à l'automne prochain, sans plus de précision. Une décision plutôt sage qui nous permet d'espérer un produit parfaitement fini.