Après un Honest Hearts franchement décevant, Obsidian avait à coeur de se racheter auprès des fans de Fallout New Vegas, toujours en attente d'un DLC digne de ce nom. Avec Old World Blues, le studio se risque pourtant une nouvelle fois à proposer une extension essentiellement centrée sur l'exploration. Sauf que cette fois-ci, c'est déjà beaucoup plus solide.
Dead Money et Honest Hearts sont loin d'avoir fait l'unanimité chez les joueurs de Fallout New Vegas. L'un était nerveux, l'autre contemplatif, mais aucun ne permettait vraiment de retrouver ce qu'on a tant aimé dans le jeu de base : les interactions sociales avec des personnages intéressants et fouillés, empêtrés dans des rivalités de clans, des dilemmes critiques ou des histoires sordides. On pensait donc qu'Old World Blues marquerait le retour d'Obsidian sur un versant plus rôlistique, de manière à réconcilier les fans de Fallout avec les DLC. Hélas, ce n'est pas encore pour cette fois, puisque cette troisième extension téléchargeable, disponible contre une dizaine d'euros ou 800 MS points, fait à nouveau la part belle à l'exploration. Au programme : une vaste zone à découvrir, très dense (les points d'intérêt sont innombrables) et particulièrement généreuse en termes de contenu inédit (créatures et équipements).
L'entrée en matière est aussi surprenante que réjouissante : alerté comme de coutume par un étrange signal radio, le coursier est téléporté à plusieurs milliers de kilomètres du Mojave, dans un immense cratère appelé le Grand Rien. Bien avant l'apocalypse nucléaire, les scientifiques les plus réputés s'y étaient établis pour conduire des recherches pas toujours très éthiques. Leurs progrès technologiques leur ont permis de survivre à la mort de leur corps sous la forme d'un cerveau cybernétique flottant. Et s'ils ont fait appel à vous, c'est pour que vous les aidiez à affronter le Dr. Mobius, un autre savant désincarné qui terrorise le Grand Rien avec son armée de robots-scorpions. Le petit détail, c'est que pour vous contraindre à travailler pour eux, ces scientifiques légèrement frappés du bocal n'ont rien trouvé de mieux que d'extraire votre coeur, votre cervelle et votre colonne vertébrale pour les remplacer par des substituts de leur cru, de façon à ce que vous ne manifestiez plus aucune émotion – notamment négative – à leur encontre. Le pitch de Old World Blues est donc sacrément barré, d'autant qu'il s'appuie sur des dialogues absurdes et décalés qui vont relativement loin dans le délire. Vous comprendrez ça en discutant avec un grille-pain psychotique ou encore une broyeuse à papier convaincue d'être entourée d'écrits séditieux rédigés par des activistes communistes.
Le problème, c'est que les missions qui vous attendent sont beaucoup moins drôles. La plupart vous envoient aux quatre coins de la map récupérer des holodisks dans des endroits improbables ou télécharger des données sur des terminaux de laboratoire. On trouve bien quelques phases d'infiltration plutôt bien amenées, mais elles sont vite expédiées. Du coup, autant on se réjouit de l'accumulation de situations ubuesques (jusqu'à un final inénarrable), autant on aurait apprécié qu'elles débouchent sur autre chose que sur ces quêtes Fedex peu motivantes, dans le cadre desquelles on ne croise souvent pas âme qui vive à l'exception d'un bestiaire particulièrement fourni (robots variés, chiens cybernétiques, lobotomates, harnais anti-traumatiques, etc.). Le contraste entre la qualité du background et la pauvreté des missions, déjà en cause dans les extensions précédentes, est à son paroxysme dans Old World Blues. C'est en soi assez regrettable, mais ce n'est pas non plus rédhibitoire dans la mesure où le Grand Rien est un formidable terrain de jeu dont on peut profiter à la manière d'un bac à sable. La zone regorge de lieux propices à l'exploration, dotés de décors soignés et d'ambiances extrêmement variées, même si Obsidian n'a pas toujours échappé à la tentation du recyclage (cf. le village de Higgs, copie conforme de Tranquility Lane).
Cette extension profite d'autres points forts, à commencer par son challenge assez relevé. Le niveau minimum conseillé est de 15, mais cette estimation nous semble sous-évaluer nettement le danger : les ennemis qui arpentent la zone par petits groupes vous donneront tous du fil à retordre, chacun à leur manière. Heureusement, vous bénéficierez vite de nombreux équipements salvateurs : des armes létales contre les robots (comme l'émetteur sonique, que vous aurez l'occasion d'upgrader tout au long de la progression, ou encore les haches protoniques au look sympa), des protections aussi originales qu'efficaces (l'armure furtive assistée est une petite merveille), sans oublier l'accès à tout un tas de services utiles (dont un Auto-Doc bienvenu). Les quelques nouveaux perks sont dignes d'intérêt, à commencer par celui qui vous donne 50% de chances de looter un objet de soin sur toute créature vivante. Et comme de bien entendu, cette extension repousse le level cap de 5, ce qui vous donne la possibilité d'atteindre le niveau 45 si vous avez acheté les deux précédentes. Au final, Old World Blues ne souffre donc que de ses missions peu travaillées. L'ensemble est encourageant et laisse à penser qu'Obsidian est sur la bonne voie, même si le studio devra déployer quelques efforts supplémentaires avant que l'on puisse parler d'extension incontournable.
Les captures qui illustrent cet article proviennent de l'éditeur.
- Graphismes13/20
Old World Blues parvient à varier les ambiances tout en conservant une certaine homogénéité. La zone du Grand Rien est particulièrement bien agencée. Pour le reste, il faut composer avec le moteur graphique du jeu de base, toujours sujet aux bugs en tout genre.
- Jouabilité14/20
Comme la précédente, cette extension fait la part belle à l'exploration en laissant de côté les interactions sociales. Les missions sont peu stimulantes, mais la zone peut être abordée comme un vaste bac à sable, pas forcément simple à arpenter vu le challenge qui vous attend.
- Durée de vie14/20
La trame principale s'appuie sur de trop nombreux allers-retours pour vous assurer une durée de vie de 4 grosses heures. En revanche, la zone est si dense et si riche en contenu que vous pouvez facilement tripler ce temps si vous désirez tout explorer.
- Bande son12/20
C'est un élément de déception, car on attendait des morceaux inédits pour illustrer ce lieu atypique et renforcer l'aspect décalé de l'extension. Du coup, on vous conseille de laisser allumée la radio jazzy pour vous mettre dans l'ambiance. Les doublages en français sont soignés.
- Scénario13/20
Gros contraste entre le pitch jubilatoire (presque incohérent mais délicieusement absurde) et les missions soporifiques qui vous sont proposées. Les assistants robotiques sont irrésistibles, mais on aurait préféré faire autre chose qu'aller leur chercher des objets à l'autre bout de la map.
Fallout New Vegas : Old World Blues est une extension encourageante. Basée sur un pitch délicieusement absurde, dans l'esprit des comics de science-fiction des années 50, elle vous propose de parcourir une vaste zone dotée d'un contenu généreux. Il ne lui manque que l'essentiel : de vraies missions, autrement plus motivantes que "ramène-moi ce truc, je te dirai à quoi ça sert". Le Grand Rien reste malgré tout un formidable terrain de jeu à conseiller à tous ceux qui ne sont pas particulièrement exigeants en matière de quêtes. Mais il faut bien l'avouer : on attend encore mieux de la part d'Obsidian.