Dans un monde ravagé par la guerre sans fin que se livrent trois royaumes rivaux, un agent spécial de la cité d'Alistel nommé Stocke voit deux de ses compagnons d'armes périr lors d'une mission, suite à une erreur de stratégie. Ayant la responsabilité de ses troupes, le jeune homme ne se pardonne pas cet écueil aux conséquences tragiques, mais il ne sait pas encore qu'il aura bientôt l'occasion de se rattraper. Pour des raisons que l'on ignore en début de partie, Stocke a été élu pour entrer en possession du White Chronicle, un mystérieux grimoire qui va lui permettre de voyager dans le temps pour modifier le cours de l'Histoire. Muni de ce précieux artefact, notre héros va progressivement prendre conscience des enjeux et des conspirations qui gravitent au sein des différents royaumes, et surtout des conséquences funestes du phénomène de désertification qui menace l'ensemble des populations de la planète.

Derrière cette entrée en matière pour le moins alléchante repose en fait tout l'ensemble du jeu, car c'est à partir de ces va-et-vient incessants à travers la chronologie de l'histoire que va s'architecturer notre progression. Concrètement, Stocke est régulièrement amené à prendre des décisions dont il faut essayer d'anticiper l'issue pour éviter de se retrouver dans une impasse, ou pire, dans un cas de figure dramatique où tout est définitivement perdu. Car même si plus rien n'est possible dans une chronologie donnée, il suffit bien souvent d'explorer un autre cheminement temporel pour débloquer la situation. Bien sûr, à mesure que l'on avance dans le scénario, les moyens de résoudre ces problèmes deviennent d'autant plus compliqués qu'on dispose de plus en plus de « noeuds » correspondant à des moments clés où il est possible de voyager dans le temps. Quoi qu'il en soit, Radiant Historia vous fera vite prendre conscience des conséquences souvent insoupçonnées que peuvent entraîner les choix les plus anodins, les bonnes décisions à prendre n'étant jamais évidentes compte tenu de la complexité de l'intrigue. Les différentes chronologies possibles apparaissent ainsi comme un immense canevas truffé de ramifications qui enrichissent considérablement la trame narrative mais dans lesquelles il est facile de s'égarer. Rien que par cet aspect-là, Radiant Historia mérite déjà largement d'être découvert, mais c'est loin d'être son seul atout !

Le soft brille en effet également par l'originalité de son système de combat qui repose principalement sur la gestion des tours d'action et le déplacement des unités ennemies. Vos adversaires sont disposés sur un terrain qui s'apparente à un damier de trois cases sur trois, certains monstres un peu volumineux pouvant occuper plusieurs places à la fois. Lorsque vos personnages agissent les uns à la suite des autres, ils peuvent réaliser des combos divers et variés sur une ou plusieurs cibles. Toute la subtilité du gameplay réside dans le fait qu'il est possible et même fortement recommandé de pousser les adversaires les uns sur les autres pour les regrouper afin que vos attaques les plus puissantes touchent l'ensemble du groupe ennemi. Pour cela, il suffit d'observer la manière dont ils sont répartis pour les déplacer intelligemment à l'aide d'attaques permettant de les repousser soit vers l'arrière du terrain, soit vers l'avant, soit vers la gauche, soit vers la droite. Mais pour qu'un combo soit efficace, il faut qu'il soit long et donc que vos unités puissent agir le plus longtemps possible sans être interrompues. C'est ici que les tours d'action prennent toute leur importance. A l'aide de la fonction « change », un personnage peut échanger son tour avec un allié et même avec un ennemi moyennant une légère pénalité, ce qui permet d'exécuter jusqu'à dix attaques successives. Prenant dès le début de l'aventure, ce système voit son intérêt relancé tout au long du jeu à mesure que les personnages développent leur panoplie d'actions, les combats devenant ainsi de plus en plus tactiques.

Etant donné l'importance de l'intrigue dans un titre comme celui-ci, on ne s'étonnera pas de constater que Radiant Historia renferme un nombre considérable de cut-scenes. Mais leur longueur n'a d'égal que leur intérêt puisqu'il est littéralement impossible d'avancer dans le jeu si l'on ne suit pas attentivement le développement du scénario. Naviguer à travers les différentes chronologies n'est pas aisé, surtout lorsqu'il s'agit de mener à bien l'une des innombrables quêtes annexes que renferme le soft, ce qui implique de nombreux allers-retours entre les différents « noeuds ». Le joueur doit donc s'y investir totalement et passer outre la réalisation limitée du titre pour profiter de la qualité de l'ambiance sonore. Yôko Shimomura, la compositrice de Kingdom Hearts et autres chefs-d'oeuvre du RPG, réalise ici un sans-faute en signant des morceaux tous plus enivrants les uns que les autres. L'immersion se fait donc sans effort et le propos du soft s'avère suffisamment mature pour nous happer dans l'intrigue durant plusieurs dizaines d'heures. Car même sans prendre en compte les quêtes optionnelles, le fait de devoir régulièrement faire avancer les deux principales chronologies pousse la durée de vie au-delà de la quarantaine d'heures de jeu. Quant à la difficulté, elle n'impose jamais de level-up excessif du moment que l'on parvient à exploiter toutes les subtilités du système de combat, la moindre erreur pouvant en revanche coûter très cher. Radiant Historia est un jeu qui a clairement été réalisé avec passion et il constitue sans doute l'une des dernières bonnes surprises que la DS peut encore nous offrir en matière de RPG.