Rêvons un peu ensemble. Imaginez un FPS multi basé sur un système d'objectifs dynamiques et progressifs dans lequel vous pourriez vous déplacer à toute allure et avec agilité. Imaginez la rencontre du teamplay d'un Enemy Territory et de la maniabilité d'un Mirror's Edge. Vous avez déjà l'eau à la bouche à l'idée de découvrir un tel jeu ? Vous pouvez ravaler votre salive, BRINK n'est malheureusement pas l'heureux élu.
Les petits gars de Splash Damage se sont fait connaître des amateurs de FPS multijoueurs en pondant deux petits bijoux qui mettaient à l'honneur le sens de la camaraderie et du jeu en équipe. Leur premier coup d'essai, un certain Wolfenstein : Enemy Territory, proposait en effet déjà un système de classes de personnages et d'objectifs progressifs réellement bien pensé. On y incarnait les forces de l'Axe ou les Alliés, les deux camps se retrouvaient sur de vastes maps littéralement truffées d'objectifs plus ou moins importants, une équipe était dédiée à l'attaque tandis que la seconde tentait de défendre ses positions coûte que coûte. Cette recette était tellement bien rodée que les équipes de Splash Damage l'ont transposée dans un univers futuriste, plus précisément dans celui de Quake. Leur second titre, Enemy Territory : Quake Wars, s'avéra être une réelle réussite et il permit à ses développeurs de s'imposer comme de véritables orfèvres du multijoueur. Le moins que l'on puisse dire c'est que la communauté des amateurs de FPS en ligne attendait fébrilement leur dernier bébé, le fameux BRINK. Ce dernier se présentait en effet comme l'héritier des Enemy Territory par son approche et comme le petit frère de Mirror's Edge par son gameplay tout en agilité... Le résultat n'est malheureusement pas à la hauteur des attentes qu'il suscitait.
Tout semblait pourtant commencer plutôt bien pour ce cher BRINK. Le titre se paye ainsi le luxe d'explorer un background original et plutôt alléchant. Il nous entraîne dans un futur post-apocalyptique après une montée soudaine du niveau des eaux. L'Ark est un archipel artificiel flottant qui a été pris d'assaut par une foule de réfugiés climatiques. Les tensions entre les autorités faisant régner la loi dans ce refuge et les révolutionnaires qui réclament un peu plus de justice sociale ne cessent de s'accroître. Vous incarnez justement tour à tour des combattants issus de l'une de ces deux forces. Concrètement le jeu propose bien deux campagnes distinctes mais il ne s'agit toujours que d'une succession de missions indépendantes que vous vivrez d'un côté ou de l'autre de la barrière. On avait retenu des présentations qui nous avaient été faites que l'une des forces de BRINK était son univers graphique tout à la fois coloré, caricatural et légèrement extravagant. Vous commencez en effet par personnaliser votre soldat de manière particulièrement poussée en choisissant sa tenue mais en l'affublant aussi d'une véritable « gueule » plus ou moins patibulaire. Il faut reconnaître que le design de ces personnages et de leur univers a fait l'objet d'un soin particulièrement méticuleux, malheureusement les choses se gâtent dès que l'on se lance la tête la première dans une partie.
La première chose qui vous saute alors aux yeux est incontestablement la laideur des décors. Première mesure : vous devez obligatoirement installer le jeu sur le disque dur de votre Xbox 360 sans quoi vous aurez droit à un affichage incroyablement tardif de toutes les textures. Le fait de passer par la case installation ne vous épargnera cependant pas un effet de flou, un aliasing omniprésent et l'impression que les textures bavent les unes sur les autres... Cette mauvaise impression n'est pas près de s'effacer avec le premier gunfight. Vous vous rendrez alors compte que les armes n'offrent strictement aucune sensation : le recul des armes est géré de manière tout à fait étrange, on n'a pas vraiment l'impression de toucher son adversaire même si on l'allume à bout portant, les grenades ressemblent à de vulgaires pétards claque doigt qui mettent votre ennemi à terre sans même le tuer... Certes, on a la possibilité de personnaliser son armement en ajoutant par exemple un silencieux, un chargeur amélioré ou une visée, mais même en passant des heures dans cet éditeur, vous ne parviendrez jamais à vous confectionner une arme qui ressemble davantage à un engin de guerre qu'à un pistolet à eau. Plus grave, vous ne tarderez pas à vous rendre compte que c'est aussi en profondeur que le gameplay ne remplit pas toutes ses promesses.
On savait ainsi depuis longue date que l'on n'aurait droit qu'à quatre classes de personnages : le soldat qui peut lancer cocktails Molotov, le médecin qui soigne ses alliés, l'ingénieur qui place des mines et des tourelles et l'opérateur qui peut prendre l'apparence d'un ennemi. Malheureusement les différents talents de ces classes n'ont que très peu d'incidence sur le gameplay, les capacités du soldat et de l'opérateur par exemple ne trouvent réellement d'intérêt que lorsque l'objectif principal nécessite que l'une de ces deux classes intervienne... De manière générale le level design étriqué et alambiqué laissera certainement les amateurs des Enemy Territory sur leur faim. Les objectifs secondaires sont rarement d'un intérêt crucial, le fait de capturer un poste de commandement par exemple ne vous apporte pas un nouveau point de respawn mais donne des bonus de vie ou de capacité spéciale à votre équipe. De la même manière vous n'aurez jamais droit à une carte des lieux pour visualiser clairement les différentes approches possibles. Vous ne risquez pas de vous perdre pour autant puisque l'objectif en cours s'affiche toujours de manière insistante à l'écran. Au final, les 16 combattants de la partie affluent donc vers le point en question pour s'étriper joyeusement sans aucune forme de politesse dans un couloir exigu. Tout l'aspect tactique cher aux Enemy Territory passe ici complètement à la trappe.
On pourrait encore en rajouter en notant que certaines missions tournent vite au ridicule : votre équipe pourra par exemple être amenée à escorter un blessé proprement immortel qui aura beau prendre une avalanche de balles à bout portant mais qui sera toujours prêt à être remis sur pied par le premier toubib venu... Vous comptiez sur le fameux système SMART pour ajouter un peu de vigueur à ces affrontements. En effet, lorsque vous personnalisez votre combattant vous pouvez aussi choisir son type de morphologie : un personnage moyen se déplacera normalement, un lourdaud aura du mal à courir mais disposera d'un bonus de santé et un léger sera plus fragile mais aussi plus rapide que ses collègues et capable de passer par des chemins plus acrobatiques. En fonction de sa morphologie, votre personnage n'aura pas accès à toutes les armes, mais il sera surtout plus ou moins capable de se déplacer de façon agile à travers les maps.
Un peu à la manière de Faith, l'héroïne de Mirror's Edge, les combattants les plus sveltes sont ainsi capables de s'appuyer sur un mur pour sauter plus loin ou de monter sur les parois pour prendre des raccourcis. L'idée est excellente mais malheureusement le terrain de jeu est bien plus balisé qu'on ne l'espérait : n'espérez pas grimper là où vous n'êtes pas censé le faire. De la même manière, ce gameplay dynamique devait nous permettre de tacler rapidement un adversaire en réalisant une glissade, mais la vitesse n'est finalement pas vraiment au rendez-vous et vous ne tenterez pas souvent ce genre de manœuvre à moins d'être suicidaire. Vous l'aurez compris, BRINK n'est finalement pas un jeu aussi dynamique qu'on le pensait, et vous n'aurez aucun mal à trouver toute une cohorte de FPS multijoueurs bien plus nerveux. Histoire d'enfoncer le clou de notre déception, il faut aussi aborder un dernier aspect : le niveau des IA est tout simplement catastrophique. Certes il s'agit d'un jeu avant tout calibré pour le multijoueur et il ne faut donc pas espérer en tirer le moindre plaisir en solo, mais vous aurez peut-être parfois du mal à trouver 15 autres joueurs disponibles et ce seront alors ces fameux bots incompétents qui viendront prendre la relève... Bref, pas la peine de vous faire un dessin, BRINK est bien loin de correspondre aux fantasmes qu'il suscitait et s'apparente finalement davantage à un FPS multi tristement banal qu'au titre révolutionnaire que l'on attendait.
- Graphismes9/20
Le design ne plaira pas à tout le monde mais on apprécie d'évoluer dans un univers coloré et d'incarner des personnages qui ont vraiment des « gueules » clairement marquées. Par contre, il faut bien reconnaître que le jeu est techniquement vraiment laid : si vous n'installez pas le jeu sur le disque dur de votre Xbox 360, vous aurez droit à un affichage des textures incroyablement tardif, et même si vous passez par la case installation, vous aurez droit à un rendu flou et à un aliasing omniprésent. Ne parlons même pas des animations absolument ridicules des personnages...
- Jouabilité12/20
Ceux qui s'attendaient à un gameplay aussi tactique qu'un Enemy Territory mâtiné d'un dynamisme digne d'un Mirror's Edge ne seront pas déçus du détour. Au final on se retrouve avec un titre bourrin à souhait qui fait la part belle aux affrontements désordonnés en milieux confinés. Dans ces conditions, on ne s'étonne même pas du fait que le friendly fire soit désactivé d'office et on imagine que les quelques baroudeurs suicidaires qui voudront l'activer auront bien du mal à trouver des partenaires sur le Live... Le système SMART censé donner un peu de piment peine finalement à rendre les gunfights nerveux.
- Durée de vie11/20
Vous aurez beau chercher, BRINK ne compte que 8 maps et quelques défis sans grand intérêt. C'est un peu léger si on le compare à la douzaine de maps de Quake Wars, d'autant que les environnements paraissent vite relativement étriqués et que l'on en fait rapidement le tour. D'ailleurs l'impossibilité de choisir son spawn point en dit long sur la taille de ces maps...
- Bande son12/20
Les musiques sont sympathique mais les doublages français sont tout simplement hideux. Le bon côté des choses tient au fait que les cinématiques qui précèdent chacune des missions vous réservent peut-être quelques fous rires.
- Scénario14/20
Le background de BRINK est vraiment intéressant mais il donne finalement lieu à des cinématiques trop convenues. On y retrouve généralement un combattant qui fait part de ses états d'âme à ses collègues avant que ces derniers ne lui rappellent à quel point leur mission est cruciale.
Il faut bien reconnaître que cette version de BRINK sur Xbox 360 constitue une véritable déception. On s'attendait à voir débarquer la Rolls des FPS multijoueurs et on se retrouve finalement à faire la route au volant d'une vieille Lada Sport. En toute honnêteté, on pourra prendre un peu de plaisir au fil des heures de jeu, à condition bien entendu de mettre de côté l'aspect graphique et en acceptant de le prendre comme un titre dénué de dimension tactique.