Des copies de Monster Hunter sur PSP, on en a vu défiler ces dernières années sur consoles portables mais aucune n'a réussi à détrôner l'excellente série de Capcom. Avec un éditeur tel que Square Enix, on s'imaginait que Lord of Arcana pourrait faire concurrence à son illustre modèle. Las, il n'en est rien comme nous vous l'expliquons dans ce test.
La recette gagnante du jeu de chasse Monster Hunter est un savant dosage d'action, de rôleplay, de gestion et de stratégie. Seul ou jusqu'à 4 en multijoueur, on évolue dans des environnements exotiques truffés de créatures hostiles et de redoutables boss nécessitant généralement autant de dextérité que d'observation pour être vaincus. Outre leur réalisation impressionnante et leur durée de vie absolument phénoménale pour des jeux nomades, les épisodes PSP auxquels nous avons eu droit ces dernières années s'approchent désormais de la perfection en termes de gameplay. Assez anecdotique en Occident, le succès de la série a été colossal au Japon. A tel point que Monster Hunter est aujourd'hui largement capable de rivaliser avec d'énormes franchises telles que Pokémon ou Mario sur l'Archipel. On comprend dès lors pourquoi de nombreux éditeurs nippons tentent régulièrement de reproduire la formule magique qui leur permettra de surfer sur la vague de la chasse virtuelle.
D'habitude, lorsqu'on aperçoit le nom Square Enix sur la pochette d'un jeu, on se sent immédiatement en confiance. Propriétaire de séries cultissimes comme Dragon Quest, Final Fantasy, Kingdom Hearts ou encore Star Ocean, cet éditeur/développeur a une excellente réputation en France et à l'étranger. Hélas, en dépit de tous les a priori favorables que l'on pouvait avoir, le clone de Monster Hunter dont il est question aujourd'hui est une véritable catastrophe. Aussi surprenant que cela puisse paraître, Lord of Arcana semble en effet avoir été conçu sans la moindre passion par une équipe n'appréciant manifestement guère le genre dont leur soft se réclame. Propulsé dans la peau d'un guerrier amnésique à peine customisable, le joueur constatera avec tristesse que les décors qu'il devra parcourir des dizaines de fois sont d'une laideur invraisemblable et que les monstres rencontrés à tout bout de champ manquent autant d'énergie que de charisme. Dès le tutoriel, il comprendra également que Lord of Arcana se contente de reproduire tant bien que mal les mécanismes de Monster Hunter sans leur apporter de réelle valeur ajoutée. Ainsi, on retrouve les environnements sauvages divisés en petites zones, les combos qui changent en fonction des armes utilisées, les matières premières à récupérer dans les décors, les monstres errants, la traque des boss gigantesques, etc. L'interface visible à l'écran est pratiquement identique elle aussi avec la jauge de fatigue sous la barre de vie, la carte en haut à droite, et ainsi de suite. Enfin, comme par hasard, on se reposera entre deux missions dans un petit village côtier abritant des artisans, des PNJ et évidemment une guilde.
A bien y réfléchir, il aurait été difficile d'imaginer plagiat plus zélé. Le problème, c'est que tout a été recopié avec une paresse et un manque de talent notoires. Au niveau de sa réalisation, tout d'abord, Lord of Arcana se situe incontestablement très loin derrière le dernier Monster Hunter PSP. La modélisation des créatures est sommaire, les textures sont moches et le village dans lequel on retourne après chaque mission est aussi vilain que déprimant. Comme si ça ne suffisait pas, on nous inflige régulièrement des thèmes de rock japonais aussi horripilants que la bande-son d'un Dynasty Warriors. Les combats, ensuite, manquent singulièrement de relief alors qu'ils auraient justement pu donner un nouveau souffle au genre. En effet, bien que les contrôles soient accessibles et que l'on dispose à la fois de diverses attaques de base, de techniques spéciales, de magie et d'une puissante invocation, les nombreuses escarmouches qui émaillent nos phases d'exploration sont particulièrement longues et fades. Le manque de variété des monstres, leur endurance surréaliste, leur intelligence artificielle médiocre ou la banalité de leurs attaques y sont sûrement pour beaucoup mais pas seulement. Dans Monster Hunter, les combats se déroulent directement dans les décors alors qu'ici le joueur est aspiré dans un espace distinct et limité dès qu'il touche une créature. On ne se fait plus courser à travers la jungle par des Rathalos enragés et aucun Vespoïd ne vient nous planter le dard dans le bras au moment d'achever un Plesioth à distance. Le sentiment d'immersion et la poussée d'adrénaline en sont clairement affectés.
En ce qui concerne la possibilité de cibler les mobs ou des parties de boss en maintenant la touche L (aïe, le doigt !), chacun pourra penser ce qu'il veut. Hérésie pour les vétérans de Monster Hunter, cette fonctionnalité sera probablement appréciée des débutants. Même remarque pour les coups de grâce, les invocations ou les QTE que l'on peut effectuer de temps à autre pour causer de lourds dégâts supplémentaires. La caméra manuelle en revanche mettra tout le monde d'accord sur son manque évident d'optimisation. Tout comme la difficulté excessive des boss qui peuvent prendre des plombes avant de mordre la poussière. Certes, Lord of Arcana se veut axé multijoueur (en réseau local) mais de là à nous obliger à galérer de la sorte en solo, il y avait une ligne à ne pas franchir. De fait, avant de pouvoir affronter un dragon ou un golem de lave, on aura tout intérêt à leveler comme un dingue et à s'équiper sérieusement. Et si par malheur, on échoue, il faut de toute façon se refaire un stock de potions et autres produits consommables difficiles à obtenir.
Pas de chance, c'est en refaisant des missions parfaitement inintéressantes un nombre incalculable de fois que l'on trouvera les ingrédients nécessaires pour se crafter les potions, armes et armures dont on a besoin. En effet, à la différence de Monster Hunter qui permet de créer des tonnes d'objets dès les premières heures de jeu, le système de craft de Lord of Arcana est on ne peut plus poussif. Certes, on débloque nos attaques spéciales simplement en gagnant de l'expérience mais pour avoir une arme correcte, commencer à terrasser des boss et espérer looter des composants rares, il faut une patience d'ange. Dans Monster Hunter, cela n'est pas très gênant puisqu'il y a des tonnes de missions, de modes de jeu, d'objets et de monstres différents à découvrir. Ici, on tourne en rond dès les premières heures et la frustration n'en est que plus grande. Que reste-t-il alors à ce Lord of Arcana pour briller ? Eh bien pas grand-chose. Les fans de Square Enix seront sans doute contents de pouvoir invoquer des créatures à l'aide de cartes spécifiques. La possibilité de gagner de l'expérience comme dans un vrai RPG et de se spécialiser progressivement dans chacune des quelques catégories d'armes disponibles sont de bonnes idées. Certains apprécieront aussi la trame scénaristique typiquement japonaise qui pimente l'aventure mais à bien y réfléchir, quand on sait que l'excellent Monster Hunter Freedom Unite se négocie actuellement à 20 euros neuf et que Portable Third a d'ores et déjà explosé les records de ventes au Japon, il n'y a aucune raison d'investir dans cet ersatz décidément décevant à tous les niveaux.
- Graphismes12/20
Visuellement, Lord of Arcana se révèle décevant. Les décors sont fades, les monstres sont parfois sommairement modélisés et leurs animations ne sont pas toujours à la hauteur. La mise en scène des combats est très basique et aucune cinématique de qualité ne vient nous émerveiller.
- Jouabilité11/20
La plupart des mécanismes de jeu s'inspirent directement de Monster Hunter. Néanmoins, Lord of Arcana ne parvient jamais à recréer la formule gagnante du hit de Capcom. Malgré quelques bonnes idées telles que les invocations, les coups de grâce ou les techniques apprises en fonction de l'expérience, le gameplay reste archi convenu et mollasson. En outre, la collecte de ressources et le craft prennent beaucoup trop de temps et la difficulté est fort mal équilibrée en solo.
- Durée de vie14/20
Il y a de nombreuses missions à effectuer (en solo ou en multijoueur local) et pas mal de boss à affronter pour espérer aller au bout de l'histoire. Néanmoins, sachant que le principe du soft est extrêmement répétitif et que l'on progresse très lentement, la lassitude pourrait bien mettre un terme à l'expérience prématurément.
- Bande son12/20
Certaines parviennent à créer une atmosphère dépaysante mais le rock japonais qui accompagne la plupart des affrontements est horripilant.
- Scénario8/20
Le héros amnésique et la mission qu'on lui demande d'effectuer dans un monde qu'il ne connaît pas ne sont pas intéressants pour deux sous. A ce compte-là, il valait mieux s'abstenir de proposer une histoire.
Développé sans passion, ce énième clone de Monster Hunter signé Square Enix déçoit dans le fond comme sur la forme. Ni sa réalisation médiocre ni son gameplay fade et mal équilibré ne parviendra à attirer l'attention des amateurs de chasse virtuelle qui regretteront bien vite leur investissement.