Voilà déjà un peu plus d'un an que Sega nous fait baver devant les courbes de la belle Bayonetta. Cette sorcière aux formes généreuses ne manque certainement pas d'atouts pour faire vibrer de plaisir tout bon otaku qui se respecte. Il fallait tout de même attendre d'avoir le pad entre les mains pour savoir enfin ce qui se cache sous cette belle carrosserie. Notre patience est désormais récompensée : Platinum Games signe là l'un des beat'em all les plus intenses jamais conçus.
Le studio Platinum Games a beau être relativement récent, les équipes à qui l'on doit ce fameux Bayonetta ne sont pas vraiment des nouvelles venues dans le monde du jeu vidéo. On retrouve en effet Hideki Kamiya aux manettes, un ancien du studio Clover qui a déjà signé des titres aussi prestigieux qu'Okami, Viewtiful Joe ou le premier Devil May Cry. On se souvient que celui-ci a eu quelques déboires avec Capcom et qu'il a ainsi fini par fonder sa propre enseigne. C'est ainsi qu'est né Platinum Games et le jeune studio n'a pas tardé à faire parler de lui avec un titre sanglant, drôle et stylisé répondant au doux nom de MadWorld. Il nous revient aujourd'hui avec un beat'em all qui pourrait paraître plus classique mais qui finalement surclasse largement ses petits camarades.
Avant même de se lancer dans l'aventure, les mauvaises langues critiquent déjà le design si particulier de la belle sorcière. Son air de maîtresse sado-maso et ses pauses outrageusement suggestives ont en effet de quoi décontenancer les joueurs qui sont habitués à des héros lisses et propres sur eux. Il faut bien avouer que le background de ce personnage est assez étoffé pour tenir sur un demi-grain de riz mais les amateurs de beat'em all ne lui en tiendront pas rigueur pour autant : les représentants du genre n'ont jamais vraiment brillé par leur scénario et Bayonetta ne fait pas exception à la règle. On y incarne ainsi une sorcière amnésique qui est récemment sortie d'un sommeil qui a duré 500 ans et qui cherche désormais à retrouver ses souvenirs en massacrant des hordes d'anges peu sympathiques. Si les nombreuses cinématiques qui ponctuent le jeu allient un certain sens du spectacle à un humour rarement très raffiné, il faut reconnaître qu'elles ne vous aideront pas forcément à donner un sens à ce massacre. Par exemple, lorsque les boss se lancent dans de longues tirades pour dévoiler finalement leurs motivations, Bayonetta les interrompt généralement assez sèchement en les insultant, en leur montrant ses fesses ou en leur lançant ce qui lui passe à portée de main. Vous l'aurez compris, la dérision et le second degré sont donc de mise : le titre de Platinum Games se fait un plaisir de détourner les codes instaurés par ses prédécesseurs et ne se prive pas de nous offrir quelques jolis clins d'œil. C'est ainsi que lorsque la sorcière se transforme en panthère noire, elle fait pousser des fleurs sur son passage à la manière d'Amaterasu, la louve d'Okami, ou que le marchand d'armes se refuse de lui fixer une tronçonneuse sur le bras ce qui ne serait pourtant pas sans rappeler un certain MadWorld...
Bayonetta fait donc feu de tout bois en ce qui concerne les références diverses et variées. Les petits gars de Platinum Games sont même allés jusqu'à proposer une étrange phase de shoot'em up en nous donnant le contrôle d'un énorme missile et chaque niveau se conclut par un mini-jeu de tir aux anges qui semble tout droit sorti d'une fête foraine. Mais rassurez-vous, le titre dans son ensemble n'en reste pas moins un superbe exemple de beat'em all. La prise en main de la belle sorcière peut d'ailleurs paraître relativement banale au premier abord : une touche est dédiée aux attaques utilisant se petites mimines, une autre vous permet de lancer des coups de pieds et une troisième de sortir vos pistolets pour attaquer à distance. Les choses ne s'arrêtent pas là puisque vous pouvez paramétrer les armes que la demoiselle porte dans les mains ou qu'elle accroche à ses pieds. Elle peut ainsi fixer de petits fusils à pompe à ses talons aiguilles tout en maniant un katana. Il est ainsi possible de définir deux combinaisons et de passer rapidement de l'une à l'autre grâce à la gâchette gauche. Cette description très sommaire du gameplay ne serait pas complète sans évoquer la possibilité d'esquiver à tout instant les attaques de ses adversaires en pressant tout simplement la gâchette droite. Non seulement Bayonetta va alors éviter gracieusement le coup en question, mais cela ne brisera pas pour autant son enchaînement et elle pourra continuer de botter tranquillement les fesses de ses ennemis. Vous aurez même droit à un bonus fort appréciable si vous parvenez à esquiver au dernier moment en passant immédiatement en mode "Witch Time" : le temps se fige alors un instant pour vous permettre de riposter violemment ou de renvoyer les projectiles qui vous étaient destinés.
Au final on se retrouve donc avec des combats incroyablement dynamiques durant lesquels il faut toujours rester attentif au moindre mouvement de ses ennemis pour esquiver les attaques. Mieux vaut en effet éviter les coups qui font baisser votre jauge de vie à une allure folle. Si vous optez pour un mode de difficulté normal, les premières échauffourées de Bayonetta vous paraîtront certainement assez ardues au premier abord. Mais rassurez-vous, on s'habitue à ce rythme effréné et vous arriverez très rapidement à sortir des enchaînements qui vous semblaient tout simplement infaisables auparavant. Non seulement chaque combinaison d'armes est associée à sa propre palette de combos, mais au fil de votre progression dans le jeu vous débloquez aussi petit à petit de nouvelles attaques spéciales très tape-à-l'oeil. La sorcière est ainsi capable de se lancer dans une chorégraphie de breakdance particulièrement mortelle ou d'envoyer bouler ses ennemis à grands coups de talons. Le tableau ne serait pas complet sans évoquer les fameuses invocations : Bayonetta peut ainsi terminer un combo en utilisant sa chevelure et perdre quelques éléments de sa tenue au passage pour matérialiser une énorme botte ou un gigantesque coup de poing ravageur. Il est enfin possible de faire appel à la magie pour réaliser des attaques encore plus impressionnantes : en fonction de l'ennemi et de la façon dont vous l'abordez, le pauvre bougre pourra par exemple passer à l'échafaud, faire un séjour dans une dame de fer, se frotter à un cheval d'arceau hérissé de lames, ou être littéralement tronçonné en deux. Toutes ces joyeusetés vous promettent non seulement des affrontements variés, mais vous ressentirez aussi une réelle satisfaction en apprenant à maîtriser les différents coups spéciaux.
Les vidéos de gameplay de Bayonetta pouvaient laisser craindre que cette frénésie puisse finalement nuire à la lisibilité de l'action. Si les développeurs de Platinum Games n'y sont pas allés avec le dos de la cuillère en ce qui concerne les effets spéciaux, ceux-ci ne rendent finalement l'ensemble que plus clair. En effet les attaques des ennemis sont par exemple souvent précédées d'une petite lueur qui vous permet de synchroniser plus facilement votre esquive. Le curieux qui regarde donc tranquillement une partie de Bayonetta aura peut-être du mal à s'y retrouver, mais le joueur ne sera par contre jamais perdu... à condition qu'il choisisse d'incarner la belle sorcière sur Xbox 360. En effet les deux versions du jeu ne sont pas similaires en tout point et les possesseurs de PS3 doivent se contenter d'un portage peu flatteur. Alors que la version sortie sur la console de Microsoft n'accuse aucun ralentissement et qu'elle propose des graphismes incroyablement détaillés, la version sortie sur la machine de Sony propose des textures moins fines et souffre d'incroyables chutes de framerate. Si l'on peut passer outre l'aspect purement graphique dans une cinématique, les choses se compliquent lorsque ces défauts viennent gâcher certaines scènes d'action en les rendant totalement confuses. Même sur PS3, Bayonetta reste un excellent beat'em all qu'on prendra plaisir à faire et à refaire afin de débloquer tous les bonus et toutes les tenues alternatives, mais on regrette tout de même que Platinum Games ne se soit pas chargé directement de ce portage et nous fournisse finalement deux versions aussi déséquilibrées du même jeu.
- Graphismes18/20
L'action a beau être effrénée, elle ne souffre d'aucun ralentissement sur cette version Xbox 360 (ce qui n'est pas le cas sur PS3). Les effets visuels, les coups spéciaux dantesques, les boss gargantuesques et les cinématiques drôles et stylisées vous en mettront plein les mirettes.
- Jouabilité19/20
Réactif et nerveux à souhait, le gameplay de Bayonetta est un véritable petit bijou. Non seulement vous pourrez prendre le temps de maîtriser une belle brochette d'armes, de combos et de coups spéciaux, mais le système d'esquive donne aussi une incroyable souplesse au jeu.
- Durée de vie16/20
Comptez à peut près 13 ou 14 heures pour boucler le jeu en mode normal une première fois, il s'agit d'une moyenne très honnête pour un beat'em all. Vous pouvez d'ailleurs ensuite poursuivre l'aventure en vous essayant à des niveaux de difficulté plus élevés, en cherchant à débloquer tous les accessoires, ou encore en retournant les différents chapitres dans tous les sens pour améliorer votre score.
- Bande son15/20
Les doublages anglais sont d'assez bonne qualité mais certaines oreilles sensibles risquent d'être heurtées par les musiques acidulées et entraînantes de la bande-son. Vous aurez en effet droit à une reprise du célèbre Fly Me to the Moon qui risque de défriser les puristes de Frank Sinatra.
- Scénario16/20
Le scénario en lui-même est quasiment inexistant mais cet aspect n'a jamais été le fort des beat'em all. On retiendra donc plutôt les nombreuses références et l'humour omniprésent qui font de Bayonetta une sucrerie à prendre entièrement au second degré.
Nerveux, drôle et visuellement impressionnant, Bayonetta s'impose décidément comme l'un des meilleurs beat'em all de sa génération. Si l'on pouvait craindre que Platinum Games nous serve là un jeu uniquement axé sur les courbes de son héroïne, il faut bien finalement reconnaître que c'est avant tout pour son gameplay parfaitement maîtrisé que le titre restera dans les mémoires.