Jeu d’aventure/réflexion sorti en France en septembre 1995, Shivers est sans doute l’un des meilleurs jeux de sa génération. Puzzle-game aux allures de survival-horror, il met en scène un adolescent aventureux qui, à la suite d’un pari avec ses amis, a décidé de passer la nuit dans un vieux musée. Seul problème : ce qui devait être une simple promenade de santé se transforme vite en chasse aux fantômes !
Comme dans tout jeu d'horreur qui se respecte, le musée dans lequel se déroule cette aventure fantastique a vu son fondateur disparaître sans laisser de traces il y a de cela plusieurs années. De plus, d'après les rumeurs locales, deux jeunes y auraient jadis trouvé la mort. D'où sa fermeture et son abandon. Le scénario, plutôt simple à la base, semble donc jouer la carte de la facilité. Là où ça se complique, c'est qu'une fois à l'intérieur du Musée Windlenot de l'Étrange et de l'Inhabituel, voilà que vous vous faites attaquer par un monstre manifestement très intéressé par votre force vitale. On apprend rapidement que le monstre en question est un Ixupi, un esprit mauvais venu tout droit d'une civilisation d'Amérique du Sud. Et, malheureusement pour vous, le professeur Windlenot semble avoir rapporté de ses voyages dix de ces affreux revenants ! La tâche qui vous incombe alors consiste à retrouver les Ixupis et à les enfermer dans des urnes prévues à cet effet. Urnes qui (est-il bien utile de le préciser ?), sont évidemment éparpillées à travers tout le musée...
On ne va pas chipoter, du côté technique, Shivers reste un excellent titre malgré son ancienneté. Tout d'abord, l'interface est sobre et accessible, ce qui colle parfaitement à l'univers du jeu. Du point de vue graphique, rien à redire : les décors donnent l'impression de déambuler dans un véritable musée, et les quelques cut-scenes, présentées sous forme de courtes vidéos qui viennent s'insérer à intervalles réguliers pendant l'aventure ne gâchent en rien la beauté visuelle du jeu. Au contraire, elles ne font que renforcer l'aspect angoissant du musée et rendent l'immersion beaucoup plus prenante. De plus, la décoration des pièces du musée reposant à chaque fois sur une thématique précise en rapport avec la mythologie (allant des rites funéraires Vikings au mythe de l'Atlantide, tout en passant par l'Égypte ancienne), les environnements qui en résultent sont riches en couleurs et extrêmement variés. Seuls les couloirs demeurent sans doute trop nombreux.
Au niveau du gameplay, sachez que la résolution des énigmes occupera la majorité de votre temps. Aucun de ces véritables casse-tête ne se ressemble et vous devrez souvent aller glaner des informations à travers tout le musée. En parlant d'informations, vous aurez d'ailleurs à votre disposition une bibliothèque que vous pourrez consulter à tout moment : tous les documents, livres et autres indices que vous aurez dénichés au fil de votre progression seront recensés dans le sous-menu "Flashback", et, bien que certains paragraphes, voire des pages entières soient complètement inutiles à la résolution des énigmes, cela constitue néanmoins un background solide pour l'histoire principale.
Tout cela est bien beau mais ne saurait en aucun cas résumer avec exactitude la merveille vidéoludique qu'est Shivers. Car Shivers, c'est avant tout un monde magique dont la beauté coupe le souffle à chaque instant. De plus, l'ambiance musicale qui règne dans le musée est exceptionnelle. Non seulement les doublage sont de très bonne facture et les thèmes musicaux sont parfaitement assortis au côté sombre et étrange du jeu, mais la musique occupe une place d'autant plus importante qu'elle vous avertit lorsque vous vous approchez d'un Ixupi. Ces derniers étant des esprits du feu, de la terre, du bois etc., vous les rencontrerez près des éléments qu'ils représentent : autant dire que si vous vous trouvez près d'une fontaine alors que vos enceintes sont coupées, vous avez de grandes chances de vous faire voler une partie de votre force vitale par l'Ixupi de l'eau.
Mais alors, Shivers est-il exempt de défauts ? Eh bien, malheureusement, non. Rien de très grave au final, mais quelques points pourront finir par venir à bout de la patience du joueur. Certaines énigmes, pour commencer, sont horriblement difficiles à résoudre. Shivers reprend par exemple des classiques tels que le solitaire ou le Mastermind, et sans une bonne dose de réflexion et de persévérance, il faudra vous résoudre à aller chercher une solution sur internet. Autre souci, les déplacements auront tôt fait d'en agacer plus d'un. Il n'est pas rare, en effet, d'avoir à parcourir le musée depuis la cave au grenier afin de retrouver une salle précise. Une carte est bien mise à votre disposition mais son utilisation reste limitée, dans la mesure où, à part quelques noms, aucune notation n'y figure. Enfin, on pourra également reprocher à Shivers que la capture des Ixupis est trop aisée ou que la récompense offerte suite à la résolution de certaines énigmes particulièrement éprouvantes n'est pas à la hauteur des espérances de certains.
- Graphismes16/20
C’est beau, c’est soigné et ça plaît à l’œil. Pas de fioritures inutiles ou de foisonnement de couleurs partant dans tous les sens, Shivers, c’est avant tout un jeu d’ambiance, et les effets de lumières ainsi que l’atmosphère sombre ne se détournent pas de ce mot d’ordre. La qualité des courtes vidéos est acceptable, l’animation des Ixupis aussi.
- Jouabilité16/20
Simple et rapide à prendre en main, le soft mise avant tout sur la sobriété. Les déplacements se font rapidement malgré quelques erreurs dans le pointage des directions. Les énigmes sont variées et la chasse aux Ixupis est passionnante.
- Durée de vie14/20
Avec une petite trentaine d’énigmes d'une difficulté variable (certaines demanderont au joueur de sérieusement s’accrocher), Shivers offre en moyenne une quinzaine d’heures de pur plaisir. En outre, recommencer une partie reste possible car les emplacements des urnes à Ixupis changent d’une partie sur l’autre, et chacun d'eux peut se trouver à différents endroits dans le musée.
- Bande son18/20
De ce côté-là, à moins de vraiment vouloir chercher la petite bête, le soft est inattaquable. La musique retranscrit parfaitement l'ambiance du soft et il est impossible de ne pas les apprécier. Les doublages sont corrects et les quelques bruitages, plus rares, sont néanmoins très réussis. Chapeau bas !
- Scénario15/20
Là aussi, difficile de pouvoir reprocher quoi que ce soit au titre. Si l’histoire en elle-même ne casse pas des briques, tout est fait pour vous plonger véritablement dans l’univers si particulier du musée. L’édifice fait quatre étages, sans compter les sous-sols, et fourmille de documents en tous genres. Les livres d’histoire, les films, les brochures et les objets laissés par les adolescents apportent à Shivers un background impressionnant et surtout intéressant à découvrir.
Beau et immersif, Shivers est une incontestable réussite sur PC. A tel point que l'on rêverait que Sierra en fasse un jour un remake pour que le public contemporain puisse lui aussi profiter de son ambiance unique et de ses énigmes aux petits oignons.