Silkroad online est un MMORPG coréen free to play (téléchargeable et jouable gratuitement) dont la popularité dans le monde n'a rien à envier à celle d'un Lineage II. La sortie récente de l'extension Legend III est l'occasion pour nous de revenir sur ses indéniables qualités, mais aussi sur ses quelques défauts rédhibitoires.
Comme son nom l'indique, Silkroad Online vous entraîne sur la route de la soie. Très emprunté dès l'Antiquité, cet axe commercial qui reliait l'Asie et l'Europe devait son appellation à la plus précieuse des marchandises qui y transitait : la soie, dont seuls les Chinois connaissaient le secret de fabrication. Les caravaniers entreprenaient donc ce long voyage avec le risque de subir l'attaque de brigands, appâtés par la valeur de leur chargement. Ce fut d'ailleurs une des raisons qui poussèrent les Européens à rechercher une route maritime vers l'Orient. A l'instar de la majorité des MMORPG coréens, Silkroad Online ne s'embarrasse pas d'un scénario mais met à profit ce background pour proposer au joueur une toile de fond séduisante, à la fois marquée historiquement et empreinte d'une mythologie typiquement asiatique.
La première force du jeu est de permettre à l'utilisateur de se créer un personnage originaire d'une des deux extrémités de cette fameuse route de la soie. Si vous incarnez un Européen, vous partez de Constantinople ; si vous optez pour un Asiatique, vous commencez dans la ville de Jangan. Ce qui est intéressant, c'est que cette décision n'a pas que des conséquences géographiques, mais influe sur bien d'autres aspects du gameplay : outre les paysages traversés et les ennemis rencontrés, les types d'armes utilisables et les différents domaines de compétences varient en fonction du côté choisi. Un vrai plus, ne serait-ce que pour la replay value : les rerolls ont ici tout leur intérêt. Pour le reste, à savoir la personnalisation graphique de votre avatar, il faut savoir que les choix initiaux sont, comme il est de coutume dans les MMORPG coréens, assez restreints. On apprécie tout de même la présence de différents types de visages très marqués : humble marchand méditerranéen, geisha asiatique ou démon mythologique, vous avez de quoi vous faire plaisir.
Dès l'entrée dans le jeu, premier constat : en dépit d'un moteur graphique quelque peu vieillissant aujourd'hui (Silkroad Online est sorti fin 2005 en Corée du Sud), le rendu visuel reste tout à fait convaincant, surtout pour un free to play. La topographie du monde (qui alterne plaines, rivières, montagnes et plateaux désertiques) s'inspire de celle de la route de la soie et, côté européen comme asiatique, le style des bâtiments respecte l'architecture de l'époque. Les personnages sont bien modélisés et correctement animés ; ils bénéficient de différents costumes et armures joliment reproduits. Les monstres rencontrés sortent tout droit des mythologies du Moyen-Orient et de l'Asie. L'ensemble possède un cachet indéniable, renforcé par des thèmes musicaux adéquats à défaut d'être inspirés. Quelques petits soucis de jouabilité entachent toutefois la réalisation. D'une part, les déplacements à la souris (typiques des MMORPG coréens) sont rendus pénibles par l'absence de pathfinding. En outre, le jeu accuse régulièrement d'importantes chutes de framerate.
La source principale de ces ralentissements : le peuplement des serveurs. Ce serait un moindre mal si la moitié des personnages croisés dans Silkroad Online n'étaient pas... des bots. Utilisés par les goldsellers pour accumuler rapidement des grandes quantités d'or, ces programmes illégaux pilotent automatiquement plusieurs personnages à la fois, qui campent certaines zones d'xp 24h/24 et 7j/7. Les bots saturent les serveurs, sont source de lag, vous "volent" vos monstres en plein combat et polluent les canaux de discussion en revendant le fruit de leur labeur. Du coup, beaucoup se demandent pourquoi Joymax ne lance pas davantage d'expéditions punitives pour endiguer ce véritable fléau (les bannissements en masse sont trop rares), ou tout au moins ne supprime pas certaines fonctionnalités qui leur rendent la vie plus facile (on pense à l'auto-potion). Quoiqu'il en soit, les bots représentent sans conteste l'aspect le plus rhédibitoire de Silkroad Online, qui nuit terriblement à l'expérience de jeu, et dont la note finale tiendra forcément compte.
C'est d'autant plus dommage que le jeu a beaucoup d'atouts à faire valoir. Certes, le gameplay est une fois de plus très orienté sur le monster bashing : la progression est lente et fastidieuse (à moins d'avoir recours à l'Item Mall) et les quêtes sont peu intéressantes. Mais le système d'évolution des personnages est plutôt gratifiant. Tout d'abord, le jeu a pour particularité, qui rappellera à certains l'illustre Ultima Online, de ne pas proposer de classes de personnages. Vous construisez donc votre avatar en lui achetant (grâce à des points de compétences gagnés parallèlement aux points d'expérience), les talents qui vous plaisent parmi plusieurs domaines (par exemple, du côté asiatique : sabre, armes d'hast, armes à distance, magie du feu, du froid, de foudre et de soin). De manière plus classique, les points d'expérience acquis vous permettent de gagner des niveaux et d'augmenter, à votre convenance, vos statistiques de force et d'intelligence. Privilégier la première vous rendra plus résistant mais moins puissant, et inversement si vous favorisez la seconde.
Le développement de votre avatar vous laisse donc une latitude très appréciable : les builds possibles sont variés et vous pouvez même "rater" votre personnage. Côté équipement, ce que vous trouvez sur les monstres et sur les étals des marchands est un peu maigre. Par chance, vous disposez d'un système d'alchimie grâce auquel vous pouvez augmenter la puissance de vos items. Il se révèle agréable dans la mesure où vous n'avez pas besoin de passer de longues heures sur des spots de ressources : vous récoltez vos matières premières directement sur les corps encore fumants des monstres occis. L'alchimie vous permet de décomposer ces matériaux et de récupérer les quatre éléments (eau/terre/air/feu) qui les composent. Ces éléments peuvent alors être utilisés pour transformer les tablettes que vous trouvez en upgrades d'équipement. Hélas, les effets sont variables (ils dépendent de la couleur et du type de la tablette) et le résultat est trop aléatoire : il vous faudra compter une fois de plus sur l'Item Mall pour pouvoir bénéficier d'un équipement digne de ce nom.
Sachez enfin que dès le niveau 20, votre personnage a la possibilité de choisir un métier (job), qui détermine sa situation dans le PvP triangulaire du jeu : marchand (trader), chasseur (hunter) ou voleur (thief). L'objectif du commerçant est de convoyer des marchandises d'une cité à l'autre, celui du chasseur de les protéger pendant le trajet et celui du voleur de s'en emparer pour les revendre. A l'usage, ce système est vraiment sympathique : on se prend facilement au jeu. Sachez que vous pouvez également vous adonner plus ou moins librement au PvP grâce à un système de capes et que des événements de type capture the flag sont régulièrement organisés. Le plus amusant reste sans doute la pratique du PvP dans le cadre d'une guerre de guildes : on aurait aimé vous en parler, tout comme on aurait aimé ne pas se limiter à évoquer le système d'académie (incitation au tutorat particulièrement bien pensée), les mercenaires, les familiers et les monstres uniques. On se limitera à vous laisser découvrir toutes ces fonctionnalités, pour peu que vous parveniez à composer avec la prolifération de bots qui caractérise hélas ce MMORPG sympathique.
- Graphismes14/20
Le moteur 3D affiche des graphismes de bonne facture dans un style typiquement asiatique (le rendu est finalement assez proche de celui d'un Guild Wars). On déplore toutefois de nets ralentissements dans les zones particulièrement peuplées (spots d'xp, villes...).
- Jouabilité14/20
Les menus sont clairs et la prise en main assez facile pour qui a déjà touché à un Lineage II : clic sur le sol pour se déplacer (c'est l'occasion de constater l'absence fâcheuse de pathfinding) et barre de raccourcis pour accéder très simplement aux différentes fonctions utiles durant les combats (actions de base, compétences, items et potions...).
- Durée de vie14/20
Atteindre le niveau maximum représente un défi que seuls les joueurs les plus persévérants peuvent relever. Les autres ont le droit de se lasser devant le bashing de monstres à outrance et la prolifération de bots sur les serveurs. C'est d'autant plus dommage que Silkroad Online propose un contenu assez étoffé.
- Bande son11/20
Comparés à d'autres productions du genre, les thèmes musicaux du jeu paraissent peu inspirés, mais ils ont le mérite de bien coller à l'univers. Les effets sonores sont réussis mais un peu trop discrets.
- Scénario12/20
Le background mêle avec bonheur réalité historique et extrapolation mythologique. La possibilité de démarrer d'un côté ou de l'autre de la route de la soie est un plus indéniable. Dommage que les quêtes inintéressantes et l'absence de scénario nous amènent à tempérer notre jugement.
Silkroad Online est un MMORPG complet et prenant qui, outre sa gratuité, peut compter sur son background séduisant et son ingénieux système de PvP pour attirer les adeptes du genre. Hélas, son intérêt intrinsèque se voit littéralement plombé par un véritable fléau qui n'a cessé de sévir depuis son lancement : les bots. Source de multiples désagréments, ces programmes automatiques tirent partie de la mécanique répétitive et centrée sur le monster bashing pour engraisser des vendeurs d'or indélicats. L'expérience de jeu en pâtit forcément et ne pousse pas à l'indulgence : tant qu'il ne se sera pas libéré de ses démons, Silkroad Online ne pourra hélas prétendre à une note supérieure.