Les possesseurs de PS2 qui aiment les jeux Sonic sont particulièrement gâtés cette année, puisqu'après la sortie de de Sonic Riders Zero Gravity en février dernier, voilà que déboule un nouveau titre dédié au hérisson bleu. Pour leur éviter toute lassitude, Sonic Unleashed tente même d'apporter de nouveaux mécanismes de jeu en leur permettant d'incarner Werehog, le côté sombre et bestial de Sonic. Oui mais voilà : la dualité lunatique du personnage donne lieu à un gameplay tout aussi inconstant, qui apporte au final des sensations très contrastées.
Sonic est un personnage attachant qui aura eu beaucoup de mal à évoluer depuis qu'il a posé ses pattes de hérisson dans l'univers de la 3D. On a l'impression qu'au fil des épisodes, la licence se cherche, explorant de multiples voies dans l'espoir de retrouver un peu de son aura. Mais c'est au risque de perdre son identité à travers un gameplay qui part parfois dans tous les sens. On avait fini par se faire à l'idée que Sonic soit devenu un jeu de course et un jeu d'aventure tout autant qu'un jeu de plates-formes, mais Unleashed rajoute encore à la confusion en saupoudrant le tout d'une bonne dose de beat'em all. Eh oui, Sonic est désormais capable de rendre les coups pris autrement qu'en se roulant en boule : il tape, et tape même très fort.
L'explication de cette évolution - qui ne manquera pas de choquer les puristes - se trouve dans la dernière exaction en date du Dr. Robotnik. En utilisant la puissance des Chaos Emeralds pour alimenter un énorme canon spatial, la malotru a fracassé la Terre en plusieurs morceaux et réveillé Dark Gaïa, le monstre qui se terre au centre de la planète depuis des millénaires. Il y a même plus grave : lorsque le soleil se couche, des monstres sortis des profondeurs menacent les habitants. Sonic lui-même semble affecté par ces phénomènes étranges : désormais, dès la tombée de la nuit, il se transforme en Werehog, une espèce de hérisson-garou au physique impressionnant. Sous cette apparence, il est moins agile mais beaucoup plus puissant : taillé pour le combat, il peut frapper lourdement ses ennemis ou les déchirer de ses griffes. Heureusement, même dans sa forme monstrueuse de Mr. Hyde, Sonic conserve son esprit de Dr. Jekyll. Il va donc essayer de contrecarrer les plans du Dr. Robotnik et de sauver la planète. Il bénéficiera pour cela de l'aide de Chip, un petit animal volant amnésique rencontré par hasard, mais aussi de celle de tous ses amis (Tails, Amy...), dont il ne manquera pas de croiser la route au cours de son périple.
Sonic Unleashed reprend un système de progression déjà vu dans les épisodes précédents : on n'a pas affaire à une succession linéaire de niveaux, mais à une aventure découpée en différentes étapes. Sonic devra visiter plusieurs continents à la recherche des temples de Gaïa qui s'y trouvent, et placer dans chacun une des sept Chaos Emeralds. Chaque étape est matérialisée par une ville, non visitable dans cette version PS2, mais peuplée d'habitants avec lesquels il faut parfois interagir via quelques écrans de dialogue, ne serait-ce que pour déverrouiller le temple à partir duquel on accède aux différents niveaux de la zone. Centré autour de la capacité de métamorphose de Sonic, le jeu vous propose de contrôler alternativement le hérisson bleu et sa version bestiale. Concrètement, il faut au minimum s'acquitter des niveaux de jour et de nuit imposés afin d'y récupérer les clés qui y sont cachées et de pouvoir atteindre le stage du boss. Des missions optionnelles, prenant la forme de défis divers et variés, vous sont également proposées. Vous pouvez enfin, si vous le souhaitez, collectionner les médailles du jour et de la nuit disséminées dans les niveaux afin d'ouvrir des portes secrètes situées dans le temple ; elles donnent accès à du contenu supplémentaire.
On ne sait trop que penser de ce système de progression et de cet enrobage scénaristique, si ce n'est qu'ils sont aussi sympathiques qu'inutiles. Le découpage prononcé de l'aventure, couplé à des cut-scenes fréquentes et bien trop longues, nuisent pas mal au rythme du jeu. A côté de ça, on constate rapidement, avec grand plaisir, que cette version PS2 s'appuie sur une réalisation solide et une jouabilité agréable, qui nous épargne même les sempiternels problèmes de caméra. Sur le plan visuel, Sonic Unleashed se montre convaincant. En dépit d'un aliasing sans doute un peu trop prononcé et d'une modélisation 3D un tantinet cubique, les différents environnements parcourus (Pôle Nord, Afrique, Chine...) se révèlent très jolis et si la vitesse d'animation n'atteint pas les sommets vertigineux des versions HD, elle assure en contrepartie un meilleur contrôle sur le hérisson. On regrette simplement que la sensibilité de Sonic soit toujours aussi prononcée, conduisant parfois à d'irritants ratés lors des déplacements. C'est donc un quasi sans-faute sur le plan de la réalisation, d'autant que l'ambiance sonore est pour sa part toujours aussi convaincante.
En ce qui concerne le gameplay, tout n'est pas aussi rose. L'alternance de phases de courses (le jour) et de phases de beat'em all (la nuit) ne convainc pas vraiment. Ce sont les premières qui se montrent les plus amusantes, mais ce sont aussi les plus courtes. Les niveaux ont beau être étendus, Sonic les parcourt plus que jamais à cent à l'heure, balisés qu'ils sont de bumpers, de loopings et de robots du Dr. Robotnik sur lesquels il est possible de s'appuyer pour aller encore plus vite. Le boost manuel de Sonic ainsi que ses nouveaux mouvements (dérapage, glisse, pas de côté) destinés à éviter les obstacles, lui permettent même de conserver en toute situation sa vitesse fulgurante. Le problème, c'est que tout aussi grisantes que soient ces phases de course, elles manquent parfois de possibilités d'interactions. Le level design de cette version PS2, qui verse moins dans le spectaculaire, a tendance à assurer au joueur un plus grand contrôle que celui qui prévaut dans les versions HD. Mais on reste trop souvent confronté à des courses à pleine allure qui laissent peu de place à la prise d'initiatives. Ce qui a toujours été plus ou moins le fondement du gameplay de la série est ici poussé à son apogée.
En outre, comme il a été dit plus haut, ces phases de course sont bien trop brèves. Bien trop brèves en regard des longs préliminaires cinématiques qui les précèdent ; bien trop brèves en comparaison des phases en hérisson-garou. Ces dernières se résument à une succession de combats contre les créatures sorties de l'ombre. En martelant le carré et le rond (ce qui n'est d'ailleurs pas des plus pratiques vu la position de ces deux boutons sur le pad), Werehog peut propulser ses deux bras "élastiques" sur elles, en alternance ou selon certains combinaisons précises (à débloquer au cours du jeu) qui lui permettent d'effectuer des attaques spéciales ou des coups de grâce. Il est également possible de saisir des ennemis affaiblis et de les lancer les uns sur les autres. A noter également la présence d'un mode furie, qui permet de libérer toute la puissance du Werehog une fois sa jauge de rage remplie. En dépit de cette palette de mouvements assez étoffé, les combats s'avèrent rapidement lassants et sans grand intérêt. On passe son temps à débarrasser les salles des hordes d'adversaires peu variés qui les peuplent pouvoir passer à la suivante. Seule satisfaction : les développeurs nous ont au moins épargné les incessantes séquences de quick time events qui parasitent les versions HD.
Pour ceux qui se poseraient la question, précisons enfin que les séquences de plates-formes n'ont pas totalement déserté Sonic Unleashed. Elles ont simplement été retirées des phases de course pour venir agrémenter les phases de combat. Ainsi, les bras étirables de Werehog lui permettent de s'accrocher à des éléments du décor et d'évoluer le long d'un rebord ou de liane en liane. Mais attention : uniquement là où c'est prévu. Même si la corniche qui vous fait face vous paraît pouvoir être atteinte en étirant les bras, si les développeurs ont décidé qu'il fallait y accéder en poussant une caisse, c'est comme ça et pas autrement ! Du coup, nul besoin de vous dire qu'entre les combats répétitifs et les séquences de plates-formes convenues, les niveaux en hérisson-garou deviennent vite soporifiques. Ils constituent pourtant plus de 2/3 du temps de jeu effectif, ce qui n'est pas rien ! En somme, la variété des situations de Sonic Unleashed (aventure, course, beat'em all, affrontements contre des boss...) desservent le titre plus qu'elle ne le servent. On y vit le meilleur comme le pire et on en sort diablement frustré par l'inconstance du plaisir de jeu. Dommage.
- Graphismes15/20
Sur le plan artistique, Sonic Unleashed flatte constamment la rétine. Les environnements sont magnifiques ; les styles grec et italien des premiers décors sont particulièrement réussis et les suivants ne sont pas en reste. Les personnages qui peuplent les villes paraissent tout droit sortis des productions Pixar (on reste par contre plus réservé sur le design très particuliers des créatures de l'ombre). Dommage que ce très bel ensemble soit entaché, sur le plan technique, d'un aliasing omniprésent et d'une vitesse d'animation moins ébouriffante que sur consoles HD.
- Jouabilité11/20
Entre la sensation récurrente de subir plus que d'agir durant les phases de course et l'ennui profond véhiculé par les phases de beat'em all,on ne peut pas dire que le gameplay de Sonic Unleashed soit convaincant. Il s'appuie toutefois sur une maniabilité bien pensée (en dépit d'un choix curieux en matière de boutons dans les phases de beat'em all) et il parvient à éviter bon nombre d'écueils de jouabilité, parmi lesquels les sempiternels problèmes de caméra.
- Durée de vie13/20
Malgré la difficulté réelle de certains passages, un joueur régulier viendra vite à bout de Sonic Unleashed, du moins en ce qui concerne la trame principale. Vous avez en effet la possibilité de débloquer du contenu supplémentaire (objets de toutes sortes, missions secrètes) en accumulant des médailles de deux types. C'est une façon comme une autre d'augmenter la durée de vie.
- Bande son15/20
Les thèmes musicaux de Sonic Unleashed (qu'il est possible de réécouter après les avoir débloqués) se révèlent diablement séduisants, avec leurs accents parfaitement adaptés à la zone qu'ils illustrent. L'ambiance sonore est quant à elle réussie, que ce soit en termes de bruitages ou de voix des différents personnages.
- Scénario10/20
L'histoire de Sonic Unleashed est ce qu'elle est : à savoir fortement dispensable tout en ayant le mérite d'exister. Le problème est surtout que les nombreuses cuts-cenes hachent le rythme de la progression dans le jeu. A la limite, on en viendrait presque à espérer un retour à une bonne vieille succession linéaire de niveaux. Mention spéciale, toutefois, à la superbe cinématique d'introduction.
A trop vouloir manger à tous les râteliers, Sonic s'embourbe dans une diversité de genres qui ne lui sied guère. Efficace sur le plan visuel et doté d'une maniabilité satisfaisante, Sonic Unleashed se montre beaucoup moins convaincant sur le plan du gameplay. Phases de jour amusantes mais bien trop courtes, phases de nuit hors de propos et très vite redondantes : le constat est on ne peut plus mitigé. Pourtant, force est de constater qu'on s'y amuse, et que si Unleashed est un Sonic plus que moyen, cela reste un titre sympathique et bien plus recommandable que ne l'étaient certains autres opus de la série. Celle-ci est donc sur la bonne voie, mais beaucoup de travail reste à accomplir pour lui permettre de retrouver ses lettres de noblesse.