A toutes les unités, une poursuite en code 3 est en cours... Le suspect a une Audi rouge... Centrale, envoyez-nous toutes les unités disponibles... L'individu s'échappe, on va tenter de le suivre... Aux unités de renfort, le suspect a été vu pour la dernière fois en direction de l'ouest... Passage sur le canal 3... A toutes les unités, on l'a perdu, abandonnez la poursuite...
C'est dans les vieux pots qu'on fait les meilleures recettes, les meilleures soupes, les meilleurs confitures, ou que sais-je encore. Voilà ce que se sont dit les développeurs d'EA Black Box, le studio en charge de répondre à votre besoin de vitesse annuel. Conscients que ProStreet ne restera pas dans les annales, ils ont opté, de manière très prévisible, pour la solution backup, en l'occurrence le combo ville ouverte / courses-poursuites avec la police. On oublie donc sans regret les courses sur piste et ce sentiment d'être cloisonné et de devoir enchaîner les épreuves les unes après les autres, comme dans n'importe quel jeu du genre. En résumé, ce qui ne plaît pas au profil du joueur moyen de Need For Speed. Son profil est plutôt celui d'un frustré de la conduite réelle, bridée par ces maudits radars et dont la conduite n'a rien de celle d'un papy qui pose les deux mains sur le volant et qui refuse de dépasser 2500 tours pour changer de vitesse. Prise de risque minimum donc, quitte à resservir du réchauffé, EA est revenu aux fondamentaux, douze petits mois après avoir tenté quelque chose de différent, en vain. Mais dans le cas présent, c'est plutôt la soupe à la grimace. Explications.
Avant d'entrer dans le vif de sujet et d'aborder ce qui est réussi, ce qui l'est moins et ce qui ne l'est pas du tout, posons les bases de ce nouvel opus baptisé Undercover. Être sous couverture, ce n'est pas la qualité première des héros des précédents NFS. Celui-ci n'est pas un chauffeur classique. De leurs propres mots, les petits gars à l'origine du projet ont souhaité donner de la profondeur à l'histoire d'Undercover, afin de se rapprocher au mieux d'un "film d'action hollywodien". Pour ce faire, ils ont décidé de placer le joueur dans la peau d'un agent infiltré chargé de faire tomber une organisation criminelle internationale. S'il est un peu cucul de tenter de bâtir un scénario autour de courses clandestines, il n'est pas idiot de vouloir définitivement enterrer l'image du jeune premier qui débarque dans une grande cité américaine avant de devenir une légende vivante. Le tout est quelque peu maladroit, joué par dessus la jambe et bourré de stéréotypes siliconés (suivez mon regard que vous ne voyez pas mais que vous devinerez), mais après tout, on n'investit par dans un Need For Speed pour se gaver de pop-corn devant les cut-scenes qui font progresser l'intrigue. On recherche plutôt des sensations grisantes au volant de bolides que l'on n'aura peut-être jamais l'occasion de dompter dans la réalité. Le souci c'est qu'à ce niveau-là, on ne peut pas franchement dire qu'on est gâté...
Visuellement, cette version PS2 s'en sort, toute proportion gardée, mieux que ses consœurs PS3 et Xbox 360, sujette à une liste impressionnante de soucis techniques. Ici, l'animation est réussie, que l'écran soit surchargé ou non. Du coup, tout est forcément plus fluide et l'on ne craint pas de voir le framerate chuter à l'abord de chaque virage ou lorsque plusieurs véhicules s'amassent à l'écran. Cependant, Undercover n'a rien d'impressionnant et rappelle de près la performance esthétique de Carbon. Evidemment, parmi ce qui saute aux yeux, le joueur doit composer avec un aliasing prononcé, que ce soit sur les contours des voitures ou un peu partout dans le décor, mais profite parallèlement d'effets de lumières assez jolis. Globalement, on bénéficie donc d'une réalisation tout à fait correcte qui, malgré tout, ne cache pas la banalité de Tri-City. Le manque de personnalité de la terre d'accueil d'Undercover se fait cruellement ressentir, plus encore que sur PS3 et Xbox 360, dans la mesure où l'on ne bénéficie pas d'autant de petits effets pour jouer le rôle de cache-misère.
Plus subjectivement cette fois, nous notons quelques détails étonnants, comme le fait que le ciel reflète par moments dans le bitume, pourtant censé être sec. Autre bizarrerie, malgré la taille assez imposante de la baie de Tri-City et des axes routiers qui lient les différents quartiers de la ville, le trafic est des plus fluides. Alors qu'un titre comme Midnight Club : Los Angeles joue habillement avec la densité de la circulation pour forcer le joueur à conserver une concentration maximale, Undercover lui préfère ne pas trop compliquer sa tâche en vidant les routes de son trafic. Certes, la chaussée n'a rien d'une route fantôme mais force est de constater que l'on s'attendait à switcher plus régulièrement de voie pour éviter les collisions. Au final, on ne compte qu'une poignée de véhicules en phase d'exploration et encore moins pendant les courses. De quoi, certes, éviter la frustration d'une épreuve perdue bêtement suite à une bifurcation civile mal anticipée... Une frustration que l'on retrouve de toute façon durant les courses-poursuites avec la police ou certains des citoyens de Tri-City essaient de jouer aux héros en vous forçant à changer de direction au dernier moment. Un comportement très américain remarquez. Passe encore les petits écarts vicieux pour vous effrayer mais lorsqu'une voiture folle décide carrément de faire obstacle en vous barrant la route, quitte à finir coupée en deux, on se demande bien comment l'IA a été pensée... Rassurez-vous, ce genre de comportement kamikaze est isolé et rarissime. Ouf. Pour en terminer avec le trafic, vous rirez jaune en constatant, lors d'une course par tours, que vous croisez systématiquement les mêmes voitures aux mêmes endroits à chacun de vos passages...
Le gameplay de Need For Speed Undercover n'a rien de surprenant. Il reprend purement et simplement les mécanismes chers à la série. Concrètement, vous pouvez quasiment oublier la pédale de gauche tant son utilisation est peu fréquente. Dans 95% des cas, relâcher l'accélérateur suffira à vous permettre de prendre un virage correctement. D'ailleurs, on constate très vite que freiner revient à couper trop violemment votre élan et contribue à voir fondre votre avance sur les autres pilotes. Quasiment toujours à fond donc, le doigt écrasant la touche d'accélération. Le verbe écraser est volontairement choisi car pour peu que vous relâchiez la pression, votre bolide ralentira. Une gestion analogique des touches de base qui nécessitera un certain temps d'adaptation aux joueurs peu habitués à cette jouabilité, mais qu'on adopte finalement sans souci. Quid de la nitro ? Eh bien contrairement aux précédents opus, elle n'a qu'une incidence futile sur le gameplay dans la mesure où chaque utilisation d'une bonbonne est aussi brève qu'inutile. A peine gagne-t-on quelques dixièmes de seconde à chaque emploi. Par souci de réalisme peut-être ? Ce qui, avouons-le, ne collerait franchement pas au gameplay largement orienté arcade du jeu, ne serait-ce que par sa gestion des collisions et des dégâts, d'une grande tolérance. Nitro, aspiration, même combat. Si l'on vous signale bien que vous prenez correctement l'aspiration d'un adversaire, les conséquences en termes de gain de temps sont bien maigres.
Comment tester Undercover sans faire un petit zoom sur les courses-poursuites avec la police ? Celles-ci sont assez intenses et peuvent parfois durer dans le temps, sans jamais devenir trop répétitives. C'est d'ailleurs l'un des points forts du jeu. En plus d'un doublage vraiment excellent des voix de la radio des hommes en bleu, on peut miser sur un calibrage réussi du niveau de l'IA. Pas trop laxiste, pas trop agressive, elle sait prendre des risques quand il le faut, sans tricher sur le poids ou la puissance de ses bolides. Au contraire, la balance penche plutôt en la faveur du joueur. En effet, lorsque le joueur utilise des éléments du décor pour dresser des barrages, comme en effondrant une passerelle, il neutralisera les flics systématiquement, même si ceux-ci contournent le barrage... Du grand n'importe quoi. Mais en plus des courses-poursuites avec les forces de l'ordre, Need For Speed possède d'autres qualités comme celles d'offrir de très bonnes sensations de vitesse ou des duels sur autoroutes extrêmement fun. Dans ces derniers, la caméra se fixe sur le pare-choc avant, ras le sol et l'objectif est de distancer un concurrent en zigzaguant dans le trafic qui, pour l'occasion, est largement boosté. Autre point fort, la recherche des courses. Inutile de vous taper des kilomètres d'exploration pour passer à l'épreuve suivante. Une simple pression sur la flèche du bas de la croix directionnelle suffira ! Un bon point qui remet cependant en question le concept de ville ouverte, pour le coup peu exploité.
En ce qui concerne le tuning et la liste des véhicules, on est servi. Comptez sur une petite cinquantaine de voitures, réparties selon les trois catégories classiques que sont les américaines, les européennes et les japonaises, de l'Audi R8 à la BMW M6 en passant par la McLaren F1, la Ford GT ou la Nissan 370Z. La customisation est poussée mais pour la première fois, pas exagérée, comme c'était de coutume dans les aînés d'Undercover. Si l'Autosculpt vous permet d'ajouter votre touche personnelle à toute pièce supplémentaire achetée, il sera bien délicat de donner une allure totalement fantaisiste à un modèle de série. Quant aux améliorations mécaniques, elles se font automatiquement d'un côté, en fonction de votre progression, et simplement de l'autre, en installant des packs sur votre monture. Si Need For Speed Undercover ne propose pas de jeu en ligne, il n'omet pour autant pas les amateurs de multi avec la possibilité de jouer à deux en écran splitté. A ce niveau-là, on est servi puisqu'il existe une multitude de possibilités à plusieurs, dont celle de jouer au gendarme et au voleur.
- Graphismes13/20
Assez proche de Carbon, Undercover propose en plus quelques effets de lumières très réussis, ainsi qu'une modélisation des voitures correcte, malgré des roues par moments cubiques. Il n'échappe toutefois pas à l'aliasing, omniprésent, mais a le mérite d'être fluide, ce qui est loin d'être le cas sur tous les supports.
- Jouabilité13/20
En résumé, le gameplay est un réchauffé des précédentes moutures. Globalement, le joueur passe son temps à accélérer en ligne droite et doit faire face à une IA mollassonne qui tire la difficulté vers le bas. De son côté, le Supercontrôle, qui permet d'entrer dans une sorte de bullet-time, n'apporte pas grand-chose. En revanche, les courses-poursuites avec la police sont plutôt réussies, à l'instar des duels sur autoroutes, très intenses. A moins, ça ne rame pas d'un poil !
- Durée de vie13/20
Comptez sur environ 12 heures pour voir le bout de l'aventure, ce qui est assez décevant. On progresse très rapidement pour deux raisons. Tout d'abord, le côté exploration et ville ouverte est court-circuité par la possibilité d'enchaîner les courses sans avoir à naviguer pour les trouver. Ensuite, parce que le niveau de l'IA est très bas, ce qui rend les courses beaucoup trop simples. Reste le multijoueur qui propose des duels par équipes vraiment amusants.
- Bande son15/20
L'ambiance sonore est de qualité, notamment au niveau des doublages des forces de l'ordre qui sont un petit bonheur de réalisme. Les sonorités des moteurs assurent, de même que la tracklist, assez variée pour être appréciée par le plus grand nombre. Dommage que le héros soit muet, en dehors de la première cinématique.
- Scénario6/20
Le scénario est plat, l'intrigue inintéressante, les cut-scenes mal jouées et les personnages sans aucun charisme. Beaucoup de temps perdu à tenter de donner de la profondeur à l'histoire d'un jeu de courses. L'intérêt était ailleurs...
Comme sur Wii, Need For Speed Undercover PS2 échappe aux soucis techniques constatés sur machines nouvelle génération. S'il est loin du top niveau, le jeu possède quelques qualités qui méritent qu'on s'y attarde, ne serait-ce que pour goûter à une poignée de courses-poursuites ou duels sur autoroutes. Les fans invétérés de Most Wanted lui trouveront pourtant suffisamment de charme pour succomber, en attendant que la franchise parvienne à se renouveler.