Parmi la foultitude de concept-games absurdes et délirants qui fleurissent sur DS, Fan Attack déboule et s'accapare une place de choix. Incarner une rock-star pourchassée par ses groupies est une idée originale et amusante qui aurait pu intégrer n'importe quel party-game. Mais qu'elle soit à la base d'un jeu complet laisse plutôt songeur...
Fan Attack est le premier jeu du jeune studio français Le Caillou, édité par Mindscape en partenariat avec MTV. Les développeurs ont décidé d'exploiter la thématique des nouvelles stars de la chanson, placées sur un piédestal du jour au lendemain, et donc précocement assaillies par des hordes de fans. Vous endossez donc le rôle d'une star du rock, dont le récent concert à Paris est un bide, ce que ne manque pas de vous faire remarquer une journaliste irrespectueuse qui semble tout ignorer de votre talent. Mais on ne se moque pas impunément d'une star telle que vous ! De rage, vous décidez de saccager votre chambre d'hôtel : armé de votre stylet, vous réduisez le mobilier en miettes et déchirez les rideaux avant de vous enfuir comme un prince. Mais le directeur de l'hôtel ne l'entend pas de cette oreille : il a bien l'intention de vous faire payer les dégâts et se lance à votre poursuite. Dans votre fuite, vous croisez quelques-uns de vos fans qui, vous reconnaissant, ne manquent pas de se jeter sur vous. Ou encore des paparazzis, prêts à tout pour obtenir leur scoop. Il vous arrive aussi de bousculer de simples passants, qui se lancent alors à vos trousses en exigeant des excuses. Au bout d'un moment, c'est un cortège impressionnant que vous finissez par traîner derrière vous.
Heureusement, vous disposez de quelques moyens pour parvenir à semer tout ce petit monde. Les canettes trouvées sur le sol vous permettent d'accélérer pour prendre de l'avance sur vos poursuivants. Lorsqu'ils sont en nombre réduit, foncez-leur dedans pour les assommer provisoirement. Vous pouvez aussi vous cacher sous les parasols et échapper un moment à leur attention, ou encore les faire danser grâce à votre "star power" pour gagner quelques secondes de répit. Pour le reste, votre fuite éperdue (et éternelle) ne vous empêche pas de remplir les objectifs qui vous sont assignés, et qui ne sont pas des plus louables il faut bien l'avouer : bousculez le plus possible de voyageurs dans le métro, volez la fiancée d'une star italienne qui vous snobe, animez une marche funèbre de votre rock le plus puissant. De temps en temps, un mini-jeu impliquant le stylet vous permettra de souffler un peu, telle cette inénarrable épreuve de lancer de culotte à la foule en délire. Mais la plupart du temps, le gameplay consiste à fuir invariablement à travers des zones faussement ouvertes, truffées de passages à sens unique et autres réjouissances qui vous agaceront plus qu'elles ne vous amuseront. Malgré l'effort des développeurs pour préserver un certain challenge au fil des niveaux, l'intérêt s'estompe inévitablement.
Reste la possibilité de récupérer les bonus disséminés çà et là dans les niveaux pour avoir accès à des vêtements supplémentaires dans le mode "top model", qui consiste à habiller votre rock-star selon votre convenance. Cette idée aurait pu s'avérer intéressante si seulement elle avait eu un effet sur sa visualisation en jeu – ce qui n'est pas le cas. De toute façon, les personnages du jeu sont victimes d'un style graphique minimaliste qui les rend (volontairement ?) laids et mal animés. La visualisation aérienne à la GTA premier du nom remplit bien son rôle, et vous prendriez même plaisir à parcourir les endroits les plus branchés de la planète (Paris, Venise, Londres, Tokyo, Rio de Janeiro, Hollywood) si le gameplay rébarbatif ne vous en ôtait rapidement toute envie. Seule la musique, tout simplement jouissive, pourrait vous inciter à aller plus loin. Les différents morceaux sont tous très réussis, et toujours en adéquation avec les lieux visités : notes d'accordéon à Paris, arpèges de mandoline à Venise, ambiance électrorock à Londres... Mais la qualité de la bande-son ne suffit pas à relever le niveau de ce jeu bien trop inconsistant. Il vous permettra en tout cas de comprendre une vérité hautement philosophique : c'est parce qu'elles passent leur temps à courir devant leurs fans que les stars parviennent à garder la ligne. Il fallait y penser !
- Graphismes7/20
Les décors ont été reconstitués avec un souci du détail rendu vain par la médiocrité du moteur 3D. Quant aux personnages, ils ressemblent à des poupées vaudoues à l'animation minimaliste : effet de style ou bien artifice pour optimiser la fluidité lorsqu'il y a beaucoup de personnages à l'écran ? En tout cas, c'est laid.
- Jouabilité13/20
Aussi simple que le gameplay l'exige, elle devient toutefois confuse lorsque vos poursuivants se font plus nombreux et finissent par gêner la visibilité de l'action. Le stylet est quant à lui intelligemment utilisé dans les quelques mini-jeux proposés.
- Durée de vie7/20
Le jeu propose 28 niveaux auxquels il faut ajouter les quelques mini-jeux qui ponctuent votre progression. Mais l'intérêt relatif et la répétitivité du concept vous conduiront probablement à vous en désintéresser rapidement.
- Bande son16/20
Là par contre, pas grand-chose à reprocher : les thèmes musicaux sont variés, entraînants, et collent à chaque zone visitée. De la bonne musique comme on l'aime, qui conduirait presque à regretter que Fan Attack n'en ait pas fait son principe de base, comme dans Oendan.
- Scénario8/20
L'histoire qui vous est contée au fil de scènes animées à la Oendan n'a d'autre intérêt que son ton fun et décalé, dans le plus pur style des programmes MTV.
On aurait bien aimé le défendre un peu plus, ce premier jeu d'un jeune studio français. Mais en l'absence d'intérêt intrinsèque, Fan Attack déçoit. L'indigence du gameplay n'est sauvée ni par l'humour transgressif des situations, ni par l'excellente bande-son. Devant un tel gâchis, ne réfléchissez même pas : fuyez !