Fort de son succès sur PC, Runaway 2 arrive sur les machines Nintendo, commençant cette année par la DS en attendant la Wii l'an prochain. Les Espagnols de Pendulo Studios étant bien trop occupés à travailler sur le troisième volet des aventures de Brian, c'est Cyanide qui s'est chargé du portage. L'adaptation d'un tel jeu sur une console portable était un vrai défi, mais le studio français s'en sort bien, nous livrant un titre très proche de l'original.
On pouvait en effet craindre que les contraintes liées au hardware limité de la DS trahisse le jeu tel que nous le connaissons - et l'adorons - sur PC. Mais inutile de faire durer le suspens plus longtemps : il n'en est rien, Runaway : The Dream of the Turtle a presque été respecté dans son intégralité. Presque ? Oui, car il y a tout de même un manque de taille : le doublage des dialogues qui, faute de place, a tout simplement disparu. Je suis bien conscient que c'était une obligation vu que la taille des cartouches n'est pas infinie, mais c'est tout de même dommage car l'excellent doublage était un des points forts du jeu. Il faudra donc se contenter de lire les dialogues qui n'ont heureusement rien perdu de leur drôlerie malgré l'absence d'interprétation vocale. Hormis ce défaut inévitable, le reste de l'adaptation est très réussi comme nous allons le voir. Mais d'abord, pour ceux qui n'ont pas eu le bonheur de jouer à Runaway 2 sur PC, revenons brièvement sur l'histoire.
L'aventure démarre alors que Brian et Gina profitent de vacances bien méritées sous le soleil d'Hawaï. Les amoureux décident un matin d'aller visiter les chutes de Tiki. Malheureusement pour eux, l'hydravion censé les conduire sur place n'est plus tout jeune, de même que le pilote de l'appareil qui passe carrément l'arme à gauche en plein vol ! Evidemment, il n'y a qu'un seul parachute à bord, bien trop ancien pour tenter de sauter en tandem. Brian n'hésite donc pas une seconde et se sacrifie en confiant le parachute à Gina avant de la pousser dans le vide. Lui restera dans l'avion jusqu'au crash en pleine jungle. Miraculeusement indemne, Brian devra alors retrouver son amie. Mais comme rien n'est jamais simple dans un jeu d'aventure, il découvrira que Gina est tombée au beau milieu d'un lac, que ce lac est sous haute surveillance militaire et que le colonel responsable de l'opération n'est pas du genre commode. Dans la famille "padbol", je demande Brian (oui, ça marcherait mieux s'il s'appelait Jay)... Nous voilà donc dans de beaux draps dans la peau de Brian, perdus en pleine jungle. Dans la soute de l'avion, une cargaison de chiens robotisés. Dans la cabine de pilotage, une bouteille de whisky. Et dans la carlingue, une pince à cheveux. Comment se servir de tout ça pour se tirer d'affaire ? Voilà le genre d'énigmes qu'on va être amené à résoudre, comme dans tout bon point & click.
Enfin là en l'occurrence le clic de la souris est efficacement remplacé par le stylet, qui sert aussi bien à déplacer Brian qu'à observer ou utiliser les éléments du décor. Pour passer de l'icône loupe, qui sert à examiner un objet, à l'icône main qui sert à interagir, il suffit d'appuyer sur un bouton ou d'utiliser la croix, ce qui rend le jeu parfaitement maniable pour un gaucher comme pour un droitier. Le défilement des objets de l'inventaire, situé sur l'écran supérieur, se fait dans un sens ou dans l'autre grâce aux boutons arrière. Et des objets, vous allez en ramasser de toutes sortes au fil des six chapitres qui composent l'aventure. Des choses qui vous paraîtront utiles dès le premier coup d'oeil, d'autres qui le seront moins, mais qui révéleront leur efficacité dans des situations généralement imprévisibles. Runaway 2 s'inscrit dans cette tradition de jeux où les objets ne sont pas nécessairement utilisés pour leur fonction première. Parfois, il faut chercher un peu plus loin et tenter des associations improbables. La méthode ne marche pas à tous les coups, mais s'avère tout de même payante dans bien des situations. Par exemple, qui penserait à mettre une patte d'ours sur une crosse de hockey pour pécher un saumon ? Pour faire ces combinaisons, rien de plus simple : il suffit d'appuyer sur select pour faire basculer l'inventaire en bas, afin de glisser-déposer les objets à l'aide de l'écran tactile de la DS. Bref, la jouabilité a bien été pensée pour s'adapter parfaitement à cette nouvelle plate-forme.
N'allez pas non plus croire que Runaway 2 soit une chasse au trésor permanente car une grande partie des situations devra être débloquée en taillant le bout de gras avec l'incroyable galerie de personnages que Brian croisera. Une serveuse collectionneuse d'hommes, un surfeur unijambiste et accessoirement sorcier, un scientifique qui n'hésite pas à se glisser dans la peau d'un ours pour mieux les approcher... Les rencontres loufoques sont nombreuses, et chaque personnage se révélera plus ou moins directement utile à un moment de l'aventure. Mais The dream of the Turtle est surtout l'occasion de recroiser plein de têtes connues du premier volet de la série comme Joshua ou encore Sushi Douglas, toujours accompagnée de Saturne et Robby (qu'il va d'ailleurs falloir rabibocher). Toutefois, si vous n'avez pas fait le premier épisode, pas de panique, car il y a peu de rapport entre les deux histoires qui peuvent tout à fait se jouer indépendamment. Mais vous risquez quand même de passer à côté de quelques références qui émaillent les répliques, ce qui nous fait regretter que A Road Adventure n'ait pas aussi bénéficié d'une version DS. Pleins d'humour, les dialogues représentent sans conteste l'une des grandes forces du jeu, bourrés de vannes, de jeux de mots et de références (télé, ciné...). Ca n'empêche pas de les trouver parfois un peu grossiers, mais en fait ils sont juste très bien écrits, avec un souci constant de coller le plus possible à la réalité. De cette volonté découle forcément des gros mots par-ci par-là, mais on reste dans le registre du familier, jamais du vulgaire.
Venons-en maintenant à un autre point fort de Runaway 2 : ses graphismes. Sur PC, les environnements variés regorgeaient de petits détails, rivalisant de finesse qu'on se trouve à Mala Island, en Alaska ou à bord d'un luxueux yacht. Eh bien c'est toujours le cas sur DS, le jeu n'a rien perdu de sa superbe. Les parfois longues cinématiques sont toutes présentes et restent de bonne qualité malgré la compression. Les décors étant condensés dans les quelques centimètres de diagonale de l'écran, on pourrait craindre qu'il devienne difficile de discerner les objets, mais il n'en est rien grâce à un zoom qui fait retrouver à une zone sa résolution d'origine. Très pratique. De toutes façons, en cas de réel blocage, un système d'aide a été ajouté, affichant en surbrillance les lieux présentant une possibilité d'interaction. Une fonctionnalité qui rend le jeu un peu plus accessible que son illustre modèle, parfois assez corsé. Bref, Runaway 2 se révèle très bien retranscrit. A l'exception du manque des voix, il n'y a rien à lui reprocher, il reste presque aussi bon qu'il l'était sur nos ordinateurs. Il se place en bonne position dans le top des jeux d'aventure sur DS, sans grande concurrence il est vrai. C'est d'ailleurs étrange que ce genre soit aussi peu représenté sur une machine qui est pourtant bien adaptée, la démonstration venant d'en être faite de belle manière. Espérons donc que The Dream of the Turtle montre la voie.
- Graphismes17/20
Retranscrire l'excellence visuelle de Runaway 2 sur un si petit écran n'était pas une mince affaire, mais Cyanide s'en tire avec brio. Les cinématiques n'ont pas souffert de la conversion, les écrans de jeu et les personnages non plus, qui restent très détaillés quand on zoome. On retrouve donc les graphismes originaux presque à l'identique, pour de la DS, c'est du grand art.
- Jouabilité16/20
Avec ses deux écrans dont un tactile, la DS se prête forcément à merveille à cette catégorie de jeux. La prise en main est immédiate et la maniabilité presque parfaite, à l'exception de la sélection des répliques qui fait parfois des siennes en choisissant une autre réponse que celle qu'on pensait avoir touchée.
- Durée de vie15/20
Pour le genre, on peut dire que Runaway 2 est plutôt long. Le jeu se compose ainsi de six chapitres, de tailles inégales c'est vrai, mais tous capables de vous faire tourner un moment avant de trouver comment se débloquer.
- Bande son12/20
Je comprends bien que c'était mission impossible, mais l'absence de l'excellent doublage de la version PC est évidemment une grosse déception tant ça donnait une âme au jeu. On conserve en revanche les très bonnes musiques de l'original.
- Scénario16/20
Dans Runaway 1, l'aventure de Brian et Gina tendait vers le mystique. Cette fois-ci, elle dévie plutôt vers la science-fiction. Joshua, le scientifique fou du premier, revient et occupe l'un des rôles-clés. Ce dernier vous entraînera dans une folle histoire qui vous conduira d'Hawaï à l'Alaska puis en pleine mer à la recherche d'un galion coulé. L'humour est encore au rendez-vous, et les références fusent que ce soit par rapport à des films, des livres, ou même d'autres jeux vidéo.
Runaway 2 était un bon jeu, Runaway 2 reste un bon jeu. Il a été adapté tellement fidèlement sur presque tous les plans que le résultat est forcément à la hauteur du jeu original. Quel dommage que les personnages soient muets, mais ça ne suffit pas pour gâcher le plaisir qu'on éprouve à vivre les nouvelles aventures de Brian Basco.