Quelques heures pour se faire une idée sur un jeu, c'est souvent trop court. Dans le cas d'Assassin's Creed, devoir reposer la manette confine pratiquement au supplice de Tantale. Si au terme de ce second contact avec le titre on n'en apprendra pas beaucoup plus qu'en juillet, on peut en tout cas confirmer qu'Assassin's Creed se prépare à faire un gros carton.
Jusqu'à présent, je ne connaissais d'Assassin's Creed que ses vidéos bluffantes et le charmant sourire de Jade Raymond, n'étant pas celui qui avait pu poser ses mains sur le pad à l'E3 dernier. Il était grandement temps de passer aux choses sérieuses et de revenir à l'essentiel : le jeu. Rendez-vous était donc pris dans les locaux parisiens d'Ubisoft pour, pad en mains, se faire une idée plus concrète, bien que pas encore définitive, sur les aventures d'Altair, le tueur à gages du Moyen Âge. Ce second contact avec le jeu prend la forme d'une rapide démonstration menée par le directeur de la création, Patrice Désilets en personne. D'emblée, on constate qu'on ne va pas être embarrassé par l'interface qui sait parfaitement se faire discrète. Sans doute pour laisser à la qualité graphique la place pour s'exprimer. Pour ceux qui l'ignorent, Assassin's Creed est un titre dans lequel vous êtes chargé d'éliminer des personnages importants au Moyen-Orient à l'époque des Croisades. Avant d'atteindre sa cible principale systématiquement réfugiée au milieu d'une grande ville de la région reconstituée à l'identique d'après des archives historiques, le héros devra mener des enquêtes mais aussi reconnaître le terrain. Pour la première phase, il s'agira le plus souvent d'approcher suffisamment quelques quidams afin d'entendre ce qu'il a à dire qui pourrait vous être utile : position exacte de la cible, éventuel chemin dérobé pour pénétrer dans une forteresse, etc. Les phases de reconnaissance sont infiniment plus spectaculaires puisqu'il s'agit de grimper au sommet d'édifices vertigineux autour desquels vole un rapace pour profiter du talent "Oeil d'aigle" d'Altair. De là-haut, le personnage décèle et indique sur la carte tous les ennemis, les endroits où se cacher, etc. Et, une fois que c'est fait, rien n'empêche cet acrobate de retrouver le plancher des vaches en exécutant l'un de ses fameux "Leap of Faith", un saut de l'ange qui se terminera dans une meule de foin salvatrice. Pour être montés tout en haut du point le plus élevé du jeu, la flèche d'une cathédrale, croyez-nous quand on vous dit que le résultat est vraiment bluffant comme l'a été notre petit coup d'oeil alentour qui nous a permis d'admirer en même temps la profondeur de champ et la qualité du rendu graphique.
L'une des difficultés principales et l'un des traits les plus intéressants d'Assassin's Creed est le fait de pouvoir placer le personnage dans certaines "postures". En fait, en appuyant sur les touches de la manette et en les gardant appuyées, on met Altair sur ses gardes et on le prépare à accomplir lui-même les mouvements nécessaires pour continuer dans la direction qu'on lui indique. C'est une difficulté dans la mesure où les joueurs endurcis devront peut-être apprendre à conserver les touches enfoncées durant de longues périodes, alors que leurs habitudes les pousseraient plutôt à presser la touche nécessaire au moment d'accomplir une action. Un peu déroutant au début, ce parti pris est bien entendu parfaitement géré car le jeu permet d'avaler rapidement les difficultés comme grimper aux murs ou sauter par-dessus les vides. Mais, pour autant, le joueur n'est pas vraiment sollicité ce qui lui laisse tout loisir de profiter du spectacle. Il n'y a bien qu'en cas d'espace trop important pour être sauté en un bond, qu'on vous demandera d'appuyer sur une nouvelle touche afin qu'Altair tende les bras et se cramponne à une balustrade ou une pierre dépassant d'un mur.
Ces postures se retrouvent dans le système de combat. Sur ses gardes, Altair pourra esquiver tout seul comme un grand une bonne partie de ce que ses adversaires tenteront de lui servir comme coups d'épées. Mais, comme pour vaincre il ne suffit pas de se protéger, on pourra envoyer des attaques de différentes natures. Il sera possible de porter des coups d'épées rapides ou puissants, ces derniers exposant davantage le personnage, mais étant capables de faire trébucher un ennemi. Il y a également moyen, si on appuie sur la touche prévue pour cela à l'instant précis où un soldat lance son attaque, de déclencher une séquence dans laquelle on verra Altair se défaire du futur retraité dans une passe très élégante s'achevant systématiquement par sa mise à mort. C'est très efficace mais cela demande un brin de concentration pour être enclenché à la fraction de seconde près. Altair pourra également s'emparer d'un adversaire qui se trouve à portée pour le lancer contre un mur ou au sol et l'achever. Voilà pour le combat à l'épée. Mais Altair pourra également se battre à distance grâce à des lancers de poignards. S'ils sont très pratiques pour se défaire des archers, ces couteaux présentent le défaut de n'être que cinq. Et une fois qu'on a épuisé ses réserves, il faut trouver un autre moyen de vaincre ses ennemis ou refaire ses réserves d'une manière assez inattendue : en jouant les pickpockets sur les habitants du cru.
Et justement, l'un des autres points forts du jeu tient à la gestion de la multitude de personnes qui peuplent (le mot n'est pas trop fort) les rues des villes où vous devez opérer et à votre interaction avec eux. Si, en vous déplaçant, vous passez votre temps à bousculer tout le monde, vous allez vite être repéré. Vous exaspérerez les passants qui se mettront à vous suivre, rendant ainsi vos déplacements très visibles. Solution préventive : se fondre dans la foule et, en adaptant la posture prévue pour cela, glisser entre les hommes et les femmes que vous croisez. Si le mal est fait, mieux vaut alors adopter l'apparence d'un moine. Altair poursuit son chemin plus calmement en baissant la tête et en joignant les mains comme pour une prière. Cette attitude vous permettra également de moins attirer l'attention aux abords d'un poste de garde. Précisons enfin que c'est ce facteur "Attention" qui s'avérera déterminant au cas où l'alerte est donnée. Si vous parvenez à vous soustraire au regard de vos poursuivants, vous serez tiré d'affaire. Et pour briser la curée, il suffira de s'asseoir sur un banc entre deux autres personnes, sauter dans une meule de foin ou, sur les toits où la vue est très dégagée ce qui joue contre vous, en sautant dans des sortes de petites cabanes drapées de tentures. Encore une fois votre liberté d'action n'a d'égale que votre ingéniosité.
Donc, dans l'ensemble, Assassin's Creed nous a paru tenir ses promesses même si, peut-être, on s'avouera à demi-mot qu'on en attendait un peu plus. Un certain sentiment de répétitivité a commencé à poindre et on se demande ce que cela pourra donner sur la longueur. Attention, tout semble parfaitement exécuté mais le véritable étonnement sera-t-il au rendez-vous ? Il est encore trop tôt pour le dire. De plus, plusieurs questions nous taraudent l'esprit depuis cette visite dans le monde d'Altair et elles tournent toutes autour du même sujet. Par exemple, à quoi rime l'interface hyper moderne du jeu. En voyant virevolter les doubles-hélices d'ADN et les chiffres s'affichant comme sur l'écran d'un ordinateur, on se croirait plutôt dans le prochain Ghost Recon. Et, dans le jeu, que signifie "Souvenir encore inaccessible" qui s'affiche à l'écran quand l'assassin approche d'une zone de la ville dans laquelle il ne peut pas entrer puisqu'elle est fermée par ce qui semble être un champ de force ? Toujours dans le même esprit, quel est le sens profond de "Désynchronisation – Sujet décédé" qui s'affiche dès qu'Altair passe de vie à trépas ? De quoi confirmer la théorie qui voudrait que le joueur soit un explorateur du futur fouillant dans les souvenirs de ses lointains ancêtres ? Autant de questions sur lesquelles nous avons d'ores et déjà un embryon de petite idée même si les représentants d'Ubisoft présents à cet événement n'ont pas voulu nous lâcher la moindre indication. On n'oubliera pas cependant que Jade Raymond a récemment déclaré que la réponse sauterait aux yeux du joueur après quelques minutes de jeu seulement.