Si Arthur Rimbaud avait vécu à notre époque, cette vision lui aurait sans doute inspiré "Le dormeur du val". Le Master Chief est étendu sur le sol herbeux d'une petite clairière entre deux alignements de rochers. Le soleil et les frondaisons qui le surmontent se combinent pour créer des ombres mouvantes sur son armure. On n'entend que le murmure incessant de la jungle ponctué régulièrement par la trille d'une créature profitant de l'anonymat de la végétation pour troubler le recueillement qu'exige la scène. Mais ce calme enchanteur bien qu'un peu angoissant ne va pas tarder à être balayé par l'arrivée d'un peloton de fantassins en armes, dirigé par une caricature de sergent-chef qui, cigare fumant au bord de la bouche ordonne qu'on sécurise l'endroit. Tandis que la quasi-totalité des troufions se positionne en cercle autour de Master Chief, leur chef se tourne vers l'un des soldats qui s'est penché sur son corps. "Alors ? Il est vivant ?". "Fonctions vitales normales. Apparemment, c'est son armure qui a disjoncté.".

Dès qu'il entreprend de sortir la puce placée dans le casque de Master Chief au niveau de la nuque, celle où est censée se trouver Cortana, la séquence d'introduction se termine et le jeu reprend ses droits. Cela se concrétise par le passage en vue subjective et dès lors, adieu Rimbaud, bonjour Rambo. Flingue à la main, Master Chief intègre le peloton venu à sa rescousse et repart avec ce dernier vers le point d'extraction où les attend un Pelican. Ils ne vont pas tarder à tomber nez à nez avec des Covenants. Dès les premières échauffourées, on retrouve ces ennemis plus chamarrés que jamais grâce à l'excellente tenue graphique de ce troisième Halo qui tire parti des capacités de rendu haute définition de la Xbox 360. Toute la petite bande des suspects habituels est là : les brutes efficaces au loin, comme de près les rapaces qui se réfugient derrière leur bouclier, les grognards qui attaquent en nombre. Mais bien vite, on constate que quelque chose a changé. En effet, les ennemis ne se contentent plus de tirer ou de frapper directement le Master Chief et ses compagnons d'armes. De loin en loin, ils plantent dans le sol des dispositifs qui émettent des champs capables de les protéger des tirs ou des lancers de grenades, de recharger instantanément leur armure, etc. Il faut compter avec ces équipements car, comme il l'a toujours fait, Master Chief ne tarde pas à ramasser les armes de ses adversaires, évitant ainsi de tomber en panne de munitions et, une fois qu'il les a récupérées, ces dispositifs changent vraiment le déroulement des combats.

Plus beau, plus sauvage, Halo 3 tire également parti d'une IA améliorée. Cela passe bien entendu par la grande habileté des ennemis à se planquer plutôt que de rester bêtement au milieu du passage en attendant qu'on leur tire dessus. Mais les Marines qui accompagnent Master Chief ne sont pas en reste, tout du moins pendant les combats. Comme les ennemis, ils utilisent le terrain pour se protéger entre deux rafales. A certains autres moments, quand on leur laisse un volant, par exemple, ils ne sont pas toujours aussi efficaces qu'on pourrait le souhaiter. Ce qu'il est intéressant de constater, c'est la différence palpable entre l'intelligence qui régit les Covenants ou les Marines et celle des créatures engendrées par le Fléau, une sorte de parasite qui se greffe sur les cadavres pour en faire des semblants de zombies et les faire déferler en vagues sur Master Chief et ses alliés. Dans la plus pure tradition des morts-vivants, leur force est davantage dans le nombre que dans la jugeote. Le fait que ces créatures aient tendance à filer tout droit mais soient très nombreuses apporte un changement étonnant à la façon de se battre dans Halo. Se mettre à couvert devient pratiquement inutile et, en tout cas, très difficile dès qu'un combat commence.

Signalons qu'avant d'affronter cet ennemi au look très organique, nous avons vécu un grand moment de ce premier essai en mettant en pièces un Scarab. Croyez-nous, ça ne s'est pas fait en deux temps, trois mouvements mais en suivant scrupuleusement différentes phases organisées de manière logique. Tout d'abord mettre ce véhicule géant en panne en tirant dans les articulations de ses pattes avec une tourelle lance-roquettes. Dès qu'il touche le sol, se précipiter puis sauter dessus. Au passage, éliminer les quelques Covenants qui n'ont toujours pas compris à qui ils ont affaire. Ensuite, faire exploser le dispositif qui génère le bouclier protégeant le réacteur qui alimente ce mastodonte en énergie. Enfin, lancer la surchauffe dudit réacteur et, dès que cela est fait, prendre ses jambes à son cou pour éviter de "profiter" de l'explosion finale. Toute cette "bataille dans la bataille" nous a séduits, plus par son intensité que par son originalité intrinsèque car, avouons-le on a déjà vu ça par ailleurs. Difficile en effet, de ne pas penser à "Shadow of the Colossus" quand on se retrouve sur cette immense unité mouvante. Reste que toute comparaison mise à part, nous nous sommes bien amusés.

Outre la campagne principale, nous avons pu jeter un coup d'oeil au mode Forge. Il s'agira d'un éditeur de niveaux dans lequel on achètera, en ponctionnant un budget prédéfini par carte, des éléments pour les déposer absolument n'importe où. Le catalogue proposera des armes, des véhicules, les fameux dispositifs décrits plus haut mais aussi tout un lot d'objets lambda qu'on pourrait croire uniquement décoratifs. Mais une caisse bien placée dans un passage de porte pourra, tour à tour devenir un abri salvateur ou forcera l'ennemi à se découvrir avant d'entrer dans un couloir. Les développeurs espèrent que ce mode créatif allongera la durée de vie d'Halo III dans son ensemble. Pour gagner leur pari, ils ont su simplifier l'utilisation de cet éditeur et le rendre très pratique. Entre la campagne solo, le mode coopératif pouvant accueillir jusqu'à quatre joueurs, les différents modes multijoueurs et l'éditeur, il apparaît clairement que ce n'est pas avec ce nouvel Halo qu'on pourra raccrocher.