Adulé sur GameCube puis sur PS2, Resident Evil 4 aura également surpris son monde sur PC mais pour des raisons différentes. La mouture Wii, qui reprend le contenu des deux dernières versions en date, était donc attendue au tournant, ne serait-ce que pour vérifier si elle apporte du sang neuf, nécessaire pour alimenter les veines d'un monstre mythique ayant déjà subjugué des millions de joueurs de par le monde. Si l'autopsie démontre aisément que ce n'est pas vraiment le cas, une question reste en suspens : Resident Evil a-t'il sa place sur la nouvelle console de Nintendo ?
Commençons par la fin voulez-vous en répondant directement à l'interrogation clôturant le préambule de ce test. Ainsi si Resident Evil 4 reste un excellent titre sur Wii, il n'apporte rien de bien neuf à ses homologues si ce n'est au niveau de la jouabilité propre à la console. Sortie de cette évidence, on sera tout de même en droit de positiver d'autant que cette adaptation dispose des ajouts des versions PS2 et PC à commencer par un mode de jeu absent de la mouture GameCube : Separate Ways. Ce dernier, tout comme le mode Ada Assigment, vous permettra de diriger la belle Ada tout au long de cinq missions. De la pure valeur ajoutée, surtout que ledit mode nous propose de visiter un décor inédit et de reluquer de nouvelles cinématiques. Mais avant d'aborder tout ceci en détails, penchons-nous sur le scénario original.
Le synopsis nous conte l'histoire de Leon S. Kennedy (introduit dans Resident Evil 2) qui est mandaté par le président des Etats-Unis pour aller secourir sa fille Ashley, kidnappée par un groupuscule qui a trouvé refuge en Europe. Si le tout fait quelque peu penser au scénario de New-York 1997, il n'en reste pas moins que c'est peu crédible et que ça donne dans le déjà-vu. On pourra alors se dire que la présence d'Ada (personnage qui avait noué contact avec Leon dans Resident Evil 2 également) va faire décoller l'intrigue mais ce n'est pas vraiment le cas. En effet, dépassé le stade relationnel (aussi bien avec Leon qu'avec le joueur), Ada se veut très effacée et n'apporte pas grand chose à l'intrigue, si ce n'est de réjouissantes perspectives pour les opus futurs. Que dire également de Krauser, un personnage secondaire, qui n'est là que pour servir d'exutoire à Leon. Maintenant, ce personnage est tout de même synonyme d'un des combats les plus intéressants du jeu ainsi que d'une cinématique interactive totalement jouissive. Des cinématiques interactives ? Eh oui, à l'instar de MGS 3, vous devrez à certains moments effectuer des mouvements avec la Wiimote et le Nunchuk pour réaliser des actions durant lesdites scènes. Ceci ira du simple mouvement d'esquive jusqu'à des attaques directes, tout ceci induisant la suite de la cinématique. Idée purement géniale, d'autant qu'elle incite le joueur à ne jamais lâcher la manette. Enfin, si le scénario a de fortes lacunes, on ne peut nier que l'ambiance européenne apporte énormément en termes de couleurs, d'environnements ou de sensations.
La construction du jeu, elle, n'évolue pas énormément. Vous serez convié à arpenter de vastes niveaux infestés d'ennemis et devrez aller d'un point A à un point B en ramassant des armes, des munitions ou plusieurs types d'objets. Rien ne change pour ainsi dire, si ce n'est que les niveaux sont désormais beaucoup plus longs et qu'il vous faudra entre 15 et 20 heures pour terminer le jeu. De plus, vous pourrez débloquer deux autres défis, le premier vous permettant de diriger Ada qui devra récupérer des échantillons avant de rejoindre un hélicoptère. Ce défi renvoie au mini-jeu de Hunk dans RE 2 mais se veut bien plus prenant et riche en possibilités. L'autre mode à débloquer se présente sous la forme de quatre environnements cloisonnés (dont un inédit qui doit beaucoup au film Waterworld) dans lesquels vous devrez tuer un maximum d'ennemis afin d'atteindre un certain score. Une fois atteint un rang bien précis, vous aurez la possibilité de débloquer un des quatre autres personnages disponibles, à savoir Ada, Krauser, Hunk ou Wesker. A ce sujet, je précise que chaque personnage débloquable est rattaché à un décor que vous devrez choisir en début de partie. Notez également qu'en plus des ennemis à éliminer, vous pourrez récupérer des sabliers qui vous rajouteront de précieuses secondes.
Maintenant que nous avons fait le tour du propriétaire, attardons-nous sur le contenu de cette version Wii. Tout d'abord, après avoir terminé le jeu une première fois, vous découvrirez plusieurs choses dont une galerie où vous pourrez visionner toutes les cinématiques débloquées. Cependant le plus important reste le mode Separate Ways qui est constitué de cinq missions où vous dirigerez Ada. Si les trois premiers niveaux se déroulent dans des décors connus, les deux derniers auront droit à des environnements inédits. Ainsi, la quatrième mission se passera en grande partie dans un port sous-terrain où vous aurez notamment le plaisir de contrôler des pièces d'artillerie lourde pour détruire plusieurs canons d'un cuirassé. La dernière mission vous mettra, entre autres, aux prises avec Krauser et Saddler qui, ironie du sort, se veut bien plus puissant que lors de son combat contre Leon ! Outre le fait de pouvoir diriger la belle espionne drapée dans une magnifique robe rouge échancrée, vous pourrez aussi utiliser un grappin pour atteindre des endroits inaccessibles. Malheureusement, ces interactions sont liées à des actions contextuelles, ce qui fait qu'on ne peut user de cette "arme" quand bon nous semble. L'autre attrait de ce défi provient des discussions entre vous et Wesker, ou des différents passages de l'aventure de Leon vus sous l'angle d'Ada. Dommage que nous n'apprenions pas grand chose de nouveau, scénaristiquement parlant. Ensuite, quand vous serez venu à bout de ce mode, vous aurez droit à une nouvelle arme (le Chicago Typewriter) ainsi qu'à un nouveau costume pour Ashley et Leon.
Comme je le disais, les niveaux sont cette fois beaucoup plus vastes et il est d'autant plus intéressant de constater qu'il n'y a quasiment pas d'allers-retours, à l'inverse des autres épisodes. Bien que le cheminement soit linéaire, il est malgré tout parfaitement réglé. On peut ainsi scinder le soft en trois parties distinctes : le village, le château et enfin la base militaire. Si la dernière partie dénote un peu en termes d'influences graphiques, il est tout bonnement impossible de ne pas rester ébahi devant la qualité esthétique du jeu. Titre aux influences variées (Le Seigneur des anneaux, Massacre A La Tronçonneuse, Assaut...), RE 4 bénéficie pourtant d'une cohérence surprenante. Tout contribue à vous exploser la rétine. Les décors sont d'une beauté sans nom, le summum de la qualité intervenant lors de votre visite dans le château médiéval profitant d'une myriade de détails. Le village et la base militaire ne sont pas en reste et le bestiaire amorce un changement dans la continuité. Vos ennuis se matérialiseront sous la forme de villageois amorphes (mais pourtant très véloces dans leurs déplacements), de loups un tantinet féroces, d'insectes mutants, d'"ogres" géants, de monstres marins, j'en passe et des meilleurs. On retrouve donc l'influence des zombies ou des Hunters mais rendons grâce à Mikami qui a tout de même su renouveler le stock d'adversaires.
Le gameplay a lui aussi subi une refonte. On retrouve toujours le système de sprays ou d'herbes qu'on peut combiner pour se soigner. Les objets ou clés sont encore là, de même que les petits mémos qui vous en apprendront un peu plus sur le fin mot de l'histoire. En parallèle de ça, le personnage que l'on dirige est maintenant situé à gauche de l'écran et représenté à la mi-taille. Ceci permet d'avoir une meilleure visibilité pour viser les ennemis, ce qui est particulièrement important compte tenu de la gestion localisée des dégâts. Vous devrez alors privilégier les head-shots qui sont bien plus faciles à réaliser sur Wii compte tenu que vous pouvez diriger plus rapidement la cible sur l'écran grâce à la Wiimote. Plusieurs actions contextuelles vous permettront aussi de décocher un coup de pied pour faire valdinguer vos ennemis, de briser une vitre pour sortir d'une maison, de monter à une échelle, etc. De plus, des combinaisons de touches ou des mouvements de Wiimote seront là pour éviter des attaques ennemies (idée mise en exergue lors des affrontements contre les boss), mais il faudra vous montrer très rapide pour les effectuer. Ensuite, quelques passages vous demanderont d'agiter frénétiquement une fois encore la Wiimote pour courir rapidement afin d'échapper à un danger. Dommage que ces scènes ne soient pas plus nombreuses tout comme le fait qu'on ne puisse pas strafer ou tirer en courant.
Enfin, entre autres choses, vous pourrez aussi donner des ordres à Ashley (cache-toi, ne bouge pas, suis-moi) ou vous rendre chez un marchand ambulant pour acheter des objets, des cartes au trésor, des armes ou faire évoluer ces dernières. Tout ce marchandage se fera avec l'argent que vous pourrez récolter dans les niveaux ou en vendant ce dont vous n'avez plus besoin. A ce sujet, sachez vous séparer des items encombrants pour faire de la place dans votre mallette qui ne peut contenir qu'un nombre bien précis d'objets qui prendront plus ou moins de cases. Le gameplay est donc à l'image du reste et s'il comporte quelques oublis, il apporte un dynamisme et un confort certain, ceci étant encore plus vrai sur Wii pour peu qu'on se fasse à la sensibilité de cette dernière. Plus que jamais, Resident Evil 4 est un chef-d'oeuvre, un jeu qui vous retournera dans tous les sens et une étape décisive dans le domaine du survival-horror et du jeu d'action. Cette adaptation Wii se laissera donc apprécier car si on pourra regretter la réelle absence de contenu inédit, le petit prix de vente et la grande qualité intrinsèque du jeu de Mikami devraient vous suffire à franchir le pas.
- Graphismes17/20
Cette version Wii est du niveau de la mouture GameCube, avec une belle gestion des lumières et de superbes effets spéciaux. Le résultat laisse pantois d'autant que les environnements sont éclectiques (village, château, égouts, île, base, temple...) et permettent de ne pas lasser le joueur. De plus, le bestiaire a été entièrement revu et les boss sont impressionnants à plus d'un titre.
- Jouabilité18/20
On regrettera tout de même l'impossibilité de strafer, de tirer en courant ou la lourdeur avec laquelle Leon tourne sur lui-même. Cependant, la jouabilité Wii est très bonne, qui plus est synonyme de head-shots plus faciles à placer grâce à un déplacement du viseur plus rapide et d'actions contextuelles légèrement plus interactives à l'aide de la maniabilité spécifique à la console de Nintendo.
- Durée de vie17/20
Si on peut terminer l'aventure principale en une dizaine d'heures en zappant toutes les cinématiques, en évitant les ennemis et en connaissant le jeu par coeur, il vous faudra environ le double lors de votre toute première excursion. De plus, rajoutez environ 5 heures pour boucler le mode inédit Separate Ways. Bien entendu, les challenges Mercenaries et Ada Assigment augmentent ostensiblement la longévité du titre. Au final, on se retrouve avec une durée de vie frisant les 30-35 heures.
- Bande son17/20
Les bruitages sont réalistes au possible, le doublage anglais est dans le ton et les thèmes musicaux sont parfaitement adaptés aux situations. D'ailleurs, l'ambiance musicale est très élaborée dans le sens où les musiques laissent souvent la place à de longues plages de silence, quand le besoin s'en fait sentir. En découle une atmosphère sonore limpide qui doit autant à des partitions nerveuses qu'à des morceaux plus ténébreux.
- Scénario12/20
On ne peut nier que les cinématiques sont superbement mises en scène mais l'histoire en elle-même laisse un goût amer dans la bouche. Krauser est uniquement là pour apporter un surplus d'action et si le jeu profite d'une ambiance européenne, l'architecture scénaristique est quasiment identique à tous les autres Resident Evil, compte à rebours final compris. De plus, le mode Separate Ways n'apporte pas vraiment d'eau au moulin. Malgré tout, je vois davantage le scénario de RE 4 comme une amorce pour un futur épisode qui devra être à la hauteur de ce que laisse suggérer la fin du jeu.
Difficile d'apposer une note à cette version Wii dans le sens où le jeu en lui-même n'apporte rien de bien nouveau par rapport aux autres versions tout en se voulant toujours aussi bon. Si les principales différences se situent au niveau du gameplay, qui propose ici une plus grande précision si tant est qu'on réussisse à dompter la Wiimote et le Nunchuk, on peut également être déçu que le tout sonne comme une obligation de Capcom de proposer ce type de jouabilité pour légitimer cette adaptation. Toutefois, à 40 euros, on se demande bien ce qui pourrait empêcher quelqu'un qui n'a pas touché à ce chef-d'oeuvre sur GameCube, PS2 ou PC d'acquérir cette merveille.