Faut croire que c'est simple de développer un shoot'em up. Il en existe tellement ! C'est l'un des domaines de prédilection des codeurs amateurs. Ils s'amassent ainsi, gratuitement, sur le net ou sur la feu Dreamcast, en 2D ou en 3D, défiant la loi du temps ayant sonné depuis belle lurette le glas de leur popularité auprès du grand public. En cette époque, quelques pelés graphistes te carabistouillaient des vaisseaux ennemis, mon ami programmeur te codait un scrolling vertical et t'implémentait des commandes rudimentaires, et puis le cousin de mon frère pouvait bien composer vite fait quelques pistes sonores fiévreuses à défaut d'être mélodiques. Search & Destroy, disons-le d'emblée, a le seul mérite de prouver que toutes ces idées ne sont que présomption et archaïsme.
Search And Destroy est un bien piètre produit. On dit produit parce qu'il ne s'agit vraiment pas d'autre chose, et ce n'est pas sa parenté avec la plus célèbre chanson des Stooges qui le rendra plus sympathique pour autant. L'éditeur Phoenix s'est lancé dans le shoot'em up comme une hirondelle déciderait subitement de devenir casanière, ou comme on balancerait un nourrisson dans un colloque sur les pensions de retraite, bref, à vau-l'eau, en roue libre, n'importe comment, tout ce que vous voulez et qui peut représenter l'incompétence assumée.
D'abord, votre machine volante n'a rien de ravageur. Forcément, on ne s'attend pas à recevoir la foudre de la part d'un Canadair bleu fluo qui déplace péniblement sa carcasse remplie de 30 mètres cubes d'eau à l'aide d'un assemblage laborieux de quatre moteurs à Solex. Sa direction est molle, vous ne pouvez pas imaginer à quel point. Il est tout simplement impensable d'attribuer à ce coucou un semblant de vivacité. Heureusement, pour sa défense, l'ensemble du jeu est finalement sous léthargie complète. Le scrolling, l'apparition des ennemis, les tirs, tout semble vain devant un tel manque impérial de rythme. Un phénomène que l'on aura déjà le temps (c'est le cas de le dire) de mesurer avant de jouer, grâce à des chargements qui ne descendent jamais en dessous d'une minute et des écrans d'informations, inévitables je précise, qui restent fixés sur l'écran pendant 30 bonnes secondes. C'est encore pire que le lent passage des nuages vous masquant les dernières belles nuits étoilées de l'été. Les nuages de Search & Destroy, eux, vous cachent l'action tout simplement. A l'instar des explosions, ils sont gros, pas beaux, disposés au premier plan, et ils ont vraiment la haine contre la notion de lisibilité. La bande son, que l'on coupera soigneusement au bout de 6 secondes très précisément, est l'une des pires abominations qu'il vous sera donné d'entendre. Elle vous secoue c'est certain, mais pas avec l'intention de vous réveiller, non, avec celle de vous violenter l'âme et l'estomac.
Ne pas proposer de boss à la fin des niveaux, c'est déplacé. Bloquer le joueur au bas de l'écran puisque votre avion est comme constamment aimanté à cette bordure inférieure, ça l'est tout autant. Définir une zone de collision qui englobe davantage que la dimension réelle de votre Canadair, c'est dramatique. Les choix de design sont tous incohérents, le plaisir nul et le joueur de se questionner sur la raison d'être du titre. L'équilibre est précaire : pour peu que vous parveniez à récupérer l'ensemble des tirs améliorés et le bonus bouclier, vous devenez "Canadair 3000, l'arroseur qui ne se fait jamais arroser". C'est rigolo deux minutes... Non, une seule en fait. Le spectre de bonus est d'ailleurs très limité puisque 4 améliorations seulement sont à comptabiliser. Enfin, au regard des seuls 3 niveaux proposés, cette petitesse est finalement relative. Pas question par contre d'amoindrir l'indigence graphique qui renvoit tous les jeux PSX sortis après 1996 aux statuts de sublimes peintures. Search & Destroy est le prototype de la maquette d'une version alpha, des dizaines de shoots gratuits sur Internet sont infiniment plus beaux que ça. D'ailleurs, ces mêmes softs sont finalement cent fois plus amusants et soignés que ne l'est le produit édité par Phoenix. La messe est dite.
- Graphismes2/20
Quelques triangles pour les arbres, deux ou trois cylindres pour les cactus, du vert et du brun pour une texture de prairie champêtre, une superposition de triangles pour les avions et les missiles. A défaut d'être doté d'un moteur graphique du 21ème siècle, Search & Destroy revisite la 3D depuis ses origines.
- Jouabilité2/20
Le titre ne possède aucune dynamique. Votre appareil est sous endorphine et ne peut se déplacer à sa guise puisque le scrolling impose de rester dans la partie inférieure de l'écran. Les ennemis ne surprennent jamais, et leurs vagues de tirs sont honteusement prévisibles. A partir de là, Search & Destroy aura beau tout faire pour nous prouver qu'il est encore bien pire que ce que l'on pense, finalement on s'en moque totalement. Quel intérêt peut bien avoir un shoot'em up dénué de rythme ?
- Durée de vie2/20
Trois niveaux que l'on nettoie chacun en 15 petites minutes, donc au mieux une heure en solo. Je vous rajoute le mode deux joueurs, ça fait deux heures et demi au total si vous êtes courageux. Vous pouvez garder votre monnaie.
- Bande son1/20
Par pitié, ne m'obligez pas à la réécouter !
- Scénario/
Réaliser un bon shoot'em up, ce n'est pas essayer de faire son pain soi-même à défaut d'être boulanger. Ce n'est pas réutiliser des successions d'arpèges à défaut d'être musicien. Un shoot'em up est un exercice d'équilibriste, où chaque composant doit avoir sa place dans le gameplay. Il y a des notions de rythme, de difficulté progressive, de lisibilité et d'épate visuelle. Search & Destroy les réfute les unes après les autres pour un résultat qui est consternant.