A cette époque, toute la Gaule est occupée par l'armée de César. Toute ? Non, un petit village résiste encore et toujours à l'envahisseur. C'est dans celui-ci que vivent Astérix et Obélix, deux fiers gaulois adeptes de banquets pantagruéliques et de combats titanesques. Mais aujourd'hui, une menace plane sur le village gaulois. Non que la potion magique ait disparu ou que Panoramix se soit fait teindre en blond, il s'agirait plutôt du spectre vidéoludique s'étendant sur les plaines d'Armorique. C'est en effet la seule et cruelle ombre au tableau de nos moustachus. Ils ont bien changé les heureux barbares, se reconvertissant en icônes faisant vendre des gâteaux secs et des chaussettes. Néanmoins, on sait bien que le petit malin à la chevelure fauve arrive toujours à se tirer d'un mauvais pas. Est-ce le cas aujourd'hui ?
Faisant suite au très moyen Asterix XXL, cette suite pleine de promesses exhale des effluves de contentement aromatisées à la fraise. Il est en effet agréable de se faire surprendre par un titre que l'on n'attendait vraiment pas au tournant, malgré des annonces plus probantes que celles en demi-teinte du premier opus. Laissant de côté la froide narration, à des lieux de l'esprit de la bande-dessinée, que n'avait pas honte de proposer le titre d'Atari à l'époque, sa séquelle fait "tabula rasa" de ce passé, en se servant dorénavant profondément de schémas parodiques actuels et fort bien sentis. Ne cherchant pas à sortir de son univers, ce qui est plutôt une bonne nouvelle à la vue du résultat, Asterix et Obelix XXL 2 se sert pleinement de celui-ci pour plonger le joueur dans un tourbillon de références vidéoludiques, allant de la plus évidente à la plus discrète. Insérées autant au sein du gameplay que dans la construction des décors, elles soutiennent le jeu tout en lui apportant un caractère bien défini. Effectivement, il demeure très amusant de rencontrer une statue géante de Pikmin au détour d'un jardin verdoyant, le logo de Quake habilement fondu dans un emblème romaine, ou encore une sculpture détournée du héros de Sly Racoon. Un monde passionnément décalé, offrant une crédibilité, non par une cohérence, mais paradoxalement par ce morcellement de références totalement barré. Dans ce délire généralisé, où un légionnaire déguisé en Sonic se bat aux côtés d'un Rayman en armure romaine, on retrouve ses marques étonnamment rapidement, chaque clin d'oeil immergeant plus intensément dans des pans entiers de culture visuelle ayant trait aux jeux vidéo. Une approche que certains qualifieront de facile, mais qui brasse tellement de références, incrustées de façon si intéressante, que l'on ne peut s'empêcher de louer Etrange Libellules pour leur hallucinant mix de 20 ans de pixels colorés.
Surtout que ce choix implique, comme indiqué précédemment, de s'accorder sur le fond des softs cités et ainsi apporter une extension à de la plate-forme somme toute très classique. Car, héritant son gameplay de son grand-frère peu recommandable, Mission Las Vegum effraie un tantinet lors des premières minutes de jeu. Reposant sur des bases soporifiques incluant des sauts, de la collecte de casques et de la baston sans âme, le titre semble suivre les pas d'un passé trouble. Pourtant, et passé l'enchantement de la découverte du ton ouvertement parodique de la trame et de la thématique globale, on modifie rapidement son avis sur des bases plus solides. En effet, au bout de longues minutes d'apprentissage fastidieux des mouvements basiques à réaliser, on déniche ce pourquoi l'on va être capturé pour les prochaines heures à venir. Tout le sel du fonctionnement du jeu d'Atari prend la forme d'une variété d'approches du gameplay assez imposante, ouvrant la voie à une vision plus élargie de l'aventure. De nombreuses énigmes viendront obstruer votre parcours, et il vous incombera de les écarter de divers moyens. Vous aurez la possibilité, par exemple, de pousser une tête en forme de Bomberman vers un mur à l'apparence de blocs de Tetris, et d'allumer des lampes en cherchant attentivement les mécanismes de chaque niveau tout en mettant à profit votre sens de la logique et de l'orientation. Ces phases très présentes, tout comme celles requérant purement et simplement de la recherche d'objets tranchent agréablement avec le rythme guerrier, et amènent un aspect aventure absent du premier opus. De même, l'art du combat gaulois, à base de baffes, se voit maintenant enrichi d'un système de combos digne d'intérêt et d'une représentation bien plus spectaculaire. En clair, au coeur de la bataille, vous allez parfois apercevoir des romains disposant d'une icône représentant un cadeau au-dessus de leur casque, qui ne vous offriront ce présent que si vous parvenez à exécuter l'attaque nécessaire. Celle-ci est en fait indiquée juste en bas de l'écran, très sobrement et de manière plus que pratique, afin de vous laisser tout le loisir de la faire subir aux adversaires en question. Souvent composés d'un enchaînement de touches suffisamment accessible pour limiter la frustration, mais demandant dans le même temps une connaissance précise du gameplay, ces assauts vous serviront dans la majeure partie des cas à récupérer des bonus de santé, des multiplicateurs de points, ou des fioles de potion-magique vous rendant surpuissant durant un court laps de temps. Il est sincèrement agréable de rencontrer ces sortes de mini-challenges, pavant la route maussade de l'action brutale par des éclats de nouveauté et de vie.
Mais l'annihilation de milliers de romains nécessite tout de même la présence d'une violente bonne humeur, associée à la puissance émotionnelle de combats dantesques. Ne se limitant pas à la seule claque de la main imposante d'Obelix, le principe des combats contourne la facilité d'un beat'em all sans âme pour proposer au joueur de multiples façons de décontenancer un romain. Panoramix soit loué, vous avez la possibilité de saisir un légionnaire et de vous en servir comme d'un fouet un certain nombre de fois, de lancer des opposants au loin avec détachement, de mettre en place des attaques simultanées entre les deux velus aux braies colorées, ou encore de faire appel aux pouvoirs de la potion seul ou à deux. Une éventail de configuration de combats assez étoffé, qui bien que reprenant nombre d'éléments de l'opus précédent, les traite avec une finesse bien plus convaincante. Malheureusement, on ressent la lassitude poindre au bout de seulement deux petites heures de jeu, malgré ce départ convaincant et étonnant. Effectivement, et alors que l'on aurait pu espérer des schémas de progression variés et inventifs, on se retrouve fatalement devant le célèbre "petit mécanisme qui actionne une porte où se trouve une énigme qui permet de résoudre le grand mécanisme". Après avoir passé deux heures entières à allumer des flambeaux destinés à l'ouverture de salles auparavant scellées, sans la moindre variation au niveau de la façon de procéder, on prend de plein fouet des relents d'une répétition indiscutable. Seule la découverte inaltérable et incessante de nouveaux environnements et de clins d'oeil, associée à un level-design chaotique et éminemment réussi donnent un certain courage pour terminer quelques épreuves particulièrement redondantes.
Le dernier point qui remet aisément Mission Las Vegum sur les rampes de la qualité, reste la réalisation graphique, conférant à nos gaulois mal bâti pour l'un et enveloppé pour l'autre une place réelle dans la jungle sans pitié du jeu vidéo. Exposant des environnements superbement détaillés, d'une part dans un souci évident de respect des planches fournies de la BD, et d'autre part afin d'axer le point de vue du joueur sur les clins d'oeil dissimulés, le titre d'Etranges Libellules n'a pas à rougir de productions plus ambitieuses sur le papier. De plus, la férocité des affrontements remplis d'effets impressionnants, allant des flammes étincelantes aux déformations de l'écran surprenantes, ne nuit en rien à la fluidité générale, glorifiant l'animation convaincante des personnages. Ces derniers, quant à eux, possèdent une modélisation peut-être un tantinet simpliste, mais très respectueuse des traits de Goscinny, déambulant dans des décors chamarrés en parfaite adéquation avec la tonalité de l'aventure. Quel dommage donc que la caméra vienne encore une fois tout gâcher. Bien que repositionnable à volonté, l'objectif ne cesse de se placer n'importe comment, se collant aux murs, restant de manière têtue devant le héros, masquant l'action, ou voyageant au gré de sa volonté. A croire qu'elle vient d'acquérir une conscience propre. Un écueil très dommageable qui empêche sincèrement Asterix et Obelix XXL 2 de trouver la rédemption après les péchés de son prédécesseur, malgré sa bonne humeur communicative et ses nombreuses idées. Je me ferais bien un sanglier moi.
- Graphismes15/20
Offrant un niveau de détail véritablement élevé dans un souci évident de coller avec l'univers dense de la bande-dessinée de Goscinny et d'Uderzo, le titre d'Atari propose en parallèle une réalisation graphique léchée, nettement dans la moyenne des productions très honnêtes que l'on peut trouver sur PS2. Proposant un univers coloré et enchanteur, celui-ci expose des animations bien décomposées, des attaques spectaculaires, sans pour autant nuire à la fluidité. Néanmoins, la présence d'une caméra complètement folle nuit énormément au plaisir que l'on peut ressentir à parcourir le soft.
- Jouabilité14/20
Handicapée elle aussi par la caméra alcoolique, la jouabilité reste malgré tout très intuitive et proposant de nombreuses alternatives, autant dans la fureur du combat que dans la progression au sein des divers niveaux du soft. De même, le gameplay apparaît relativement accrocheur, apportant son lot de bonnes idées bien exploitées, et surtout d'un petit côté aventure approfondissant le tout. Pourtant, on ne peut faire l'impasse sur l'aspect répétitif qui vient nous hanter au bout de quelques heures de jeu. Dommage.
- Durée de vie10/20
Le gros point noir du jeu. Parvenir à 30 pour cent de l'aventure totale en à peu près trois heures, laisse peu optimiste quant à la durée générale de la quête. De plus, l'absence d'un mode deux joueurs ou de mini-jeux à débloquer nuit concrètement à l'envie de se replonger dans le soft une fois celui-ci terminé. Reste que l'on se prend très vite dans cette histoire de trahison druidique.
- Bande son14/20
Les thèmes distillés tout au long du jeu s'avèrent véritablement en adéquation avec le ton globale de ce dernier. Décalés, déroutant, parfois très bien orchestrés, parfois totalement cheap, ils desservent étonnamment bien le soft, créant une ambiance accrocheuse. Le doublage est quant à lui de bonne qualité, permettant de donner du corps de manière convaincante aux divers personnages. De plus, les clins d'oeil vocaux sont nombreux et hilarants.
- Scénario/
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Malgré sa tombe déjà creusée après le premier épisode, la série Astérix et Obélix XXL renaît de ses cendres avec panache, s'axant sur un ton parodique très convaincant et intelligent. Les clichés sont croqués avec plaisir, et chaque héros mis en relief expose ses tics de façon jubilatoire. On se trouve donc au sein d'une ambiance délirante, accrocheuse, qui aurait pu donner naissance à une référence. Néanmoins, la durée de vie ridicule et de gros soucis de caméra coupent net les aspirations du titre. L'envahisseur n'a pas gagné, mais ses troupes guettent encore de loin.