Empruntant le même chemin qu'un Bunjingai, Blood Will Tell se pare d'un scénario encore plus précieux puisque né de la plume du grand maître Tezuka Osamu. Développé par les studios de Red Entairtainment, entre autres responsable de Gungrave, le tout semblait donc être à même de parler aux amateurs du mangaka ou de beat'em all aux allures de conte fantastique. Malheureusement, il ne suffit pas d'un matériau convaincant pour faire d'un jeu une réussite, il lui faut aussi un gameplay plus que solide, et à ce stade, disons que Blood Will Tell est très loin d'être un modèle de convivialité.
Si en regardant le titre du jeu, certains d'entre-vous se demandent d'où lui vient le préfixe "Dororo", sachez qu'à l'origine, Blood Will Tell est l'adaptation du manga Dororo de Tezuka Osamu. Ce nom est également celui d'une petite voleuse que vous, Hyakkimaru, allez rencontrer au tout début de votre aventure se déroulant dans un japon féodal peuplé de démons et de légendes chères à l'auteur. Désirant retrouver les 48 parties de son corps dérobé par 48 démons , notre homme va très vite se rendre compte que Dororo lui sera d'une aide précieuse, la fillette n'ayant pas son pareil pour passer dans des trous de souris ou dérober des renseignements.
Partant de ce postulat scénaristique, Blood Will Tell se présente comme un beat'em all tout ce qu'il y a de plus classique, les séquences "action" de Hyakkimaru alternant avec celles de Dororo plus orientées "plates-formes". Si je précisais dans ma preview que deux autres modes étaient accessibles une fois terminé le mode principal, soyons aujourd'hui un peu plus clair. En effet, seul un véritable mode fera son apparition, le deuxième n'étant rien d'autre qu'une Galerie où vous pourrez reluquer trois vidéos inédites ainsi que de superbes artworks,que vous débloquerez dans le mode Dororo. Par contre, ce dernier montre très vite ses limites. Ainsi, vous devrez simplement diriger la petite voleuse dans plusieurs niveaux afin d'y découvrir un nombre bien précis de pièces d'or et ce avant que le temps ne soit totalement écoulé. Chacun des huit chapitres de ce défi sera rattaché à un endroit du jeu et il faut bien dire que si chaque niveau terminé nous permet d'avoir accès aux bonus décrits plus haut, le tout est tellement anecdotique qu'on n'y passera guère de temps. Mais avant d'en arriver là, il vous faudra déjà terminer le mode Histoire dont la construction est également des plus linéaires, bien qu'intéressante.
Découpé en sept chapitres, sans compter le prologue ainsi qu'un huitième segment qui se débloquera lorsque vous aurez vaincu 47 Monstres, le jeu vous fera évoluer dans différents lieux qui seront autant d'endroits où vous rencontrerez plusieurs personnages qui ont chacun leur histoire. Le plus souvent, Hyakki et Dororo leur viendront en aide, ce qui aura pour conséquence de faire avancer l'histoire principale. Ainsi, vous aurez à vaincre un monstre terrorisant une région, à lever le voile sur les agissements étranges de la bienfaitrice d'un village, à terrasser le frère d'une paysanne envoûtée par une épée démoniaque, etc. Vos déplacements étant conditionnés par le seul chemin accessible, vous n'aurez que très peu de chances de rester bloqués. Quelques énigmes à base de caisses à déplacer viendront bien se greffer à la progression mais ces phases "Tomb Raideresques" sont tellement simples qu'elles n'ont aucun intérêt. Le plus gros du travail sera alors de venir à bout des hordes d'ennemis qui vous assailliront et de récupérer les parties de vos corps en combattant les grands Monstres. Ceci étant du ressort de Hyakki, Dororo aura alors un rôle d'éclaireur, voire d'investigateur. Cependant, Hyakki pourra donner quatre ordres à Dororo afin que ce dernier combatte à son tour, aille cherche des objets laissés ou non par vos ennemis ou vous donne des conseils, si vous vous retrouvez coincé.
Alors que le jeu propose deux gameplay plus ou moins différents, les passages avec Dororo sont bien moins convaincants que ceux avec Hyakki. Alors que la petite voleuse pourra également frapper ses ennemis ou user de plusieurs armes de jets (couteaux, pierres, bombes...), il vous faudra le plus souvent zigzaguer entre les ennemis d'afin d'aller à un endroit bien précis et ainsi faire progresser le scénario. Moins puissante que Hyakki, disposant de moins de pouvoirs (même si certains sont communs aux deux personnages comme le dash par exemple), les passages de Dororo seront alors plus axés plates-formes avec tout ce que cela impliquera de sauts et autres pièges à éviter. Jusque là, rien de catastrophique, sauf qu'il convient ici d'aborder le point négatif du soft qui est sa jouabilité. C'est simple, la caméra est épileptique, n'offre pas un angle de vision assez grand et les sauts sont tout sauf précis. En somme, en plus d'être sans consistance, les phases avec Dororo sont peu jouables et ont bénéficié de peu de soins.
Cet aspect est aussi visible avec Hyakkimaru. Non pas que tout ceci soit catastrophique mais on n'évitera pas quelques énervements induits par ce gameplay brinquebalant. Le plus embetant vient surtout du fait que vous devez toujours recentrer la caméra pour voir les ennemis qui vous entourent. A d'autres moments, il arrivera que la caméra soit fixe, placée devant vous et qu'elle vous oblige à longer des couloirs où les ennemis apparaîtront au premier plan, incroyable mais vrai ! Les confrontations avec les boss seront aussi sources d'ennuis. Bien que vous pourrez bénéficier d'un système qui lockera la caméra sur le monstre (évitant ainsi de le perdre de vue), vous ne pourrez alors plus voir où se trouvent les stèles bordant les arènes et renfermant des items. Vous devrez alors changer de mode de vue, aller à côté d'une stèle, la détruire pour obtenir munitions ou objets de soins, puis rechanger à nouveau le système de caméra pour continuer le combat. Un peu lourd, n'est-il pas ?
Mais si vous réussissez à surmonter ces gros soucis, vous devriez malgré tout éprouver du plaisir, surtout si vous aimez les Onimusha et autres Way Of The Samurai. En plus de manier divers sabres, Hyakkimaru pourra également compter sur la puissance de feu qu'il cache en lui. Il faut en effet savoir que vous pourrez utiliser deux lames cachées dans ses bras, un bras droit mitraillette, une jambe-canon et un peu plus tard un véritable bazooka qui vous permettra d'atteindre des endroits auparavant bloqués. Comme je le disais plus haut, vous pourrez aussi ramasser des dizaines et des dizaines de sabres de puissance différente, certains d'entre-eux disposant de capacités spécifiques, le plus souvent rattachées à un élément (eau, vent, poison, tonnerre...). Vous pourrez ainsi choisir n'importe quel sabre à tout moment de l'aventure en passant par l'inventaire. Il faut aussi savoir qu'en fonction du sabre choisi, vous pourrez effectuer des combos plus ou moins grandes par le biais d'un système de touches à rentrer rapidement lorsque vous toucherez un ennemi après avoir canalisé une attaque plus puissante. De plus, une fois que votre ennemi n'aura plus beaucoup de vie, vous devrez très rapidement appuyer sur la touche Triangle afin de terminer votre attaque de façon très stylisée. Très intéressantes, simples d'accès, ces techniques ont par contre le désavantage de ne pouvoir profiter des prouesses visuelles de Hyakki puisque vous devrez constamment avoir les yeux rivés sur les touches à rentrer, la combo s'arrêtant si vous appuyez sur le mauvais bouton. L'autre chose à savoir est que vos armes internes augmenteront de niveau à mesure que vous les utiliserez. Sachez donc utiliser vos sabres et vos propres armes à intervalle régulier, en fonction des ennemis. Ensuite, à mesure que vous récupérerez vos membres, vos statistiques (de HP, de force, de vitesse, de précision, de récupération...) augmenteront. De plus certaines parties vous octroieront des pouvoirs supplémentaires. Enfin, une fois que vous aurez trouvé un des huit parchemins magiques cachés dans le jeu, vous pourrez à loisir utiliser différentes attaques surpuissantes. Par contre, il vous faudra pour ce faire attendre que votre jauge d'esprit soit pleine, cette dernière se remplissant en éliminant des ennemis ou en récupérant des points d'esprits représentés sous forme de bougies bleues.
L'autre chose qui est un peu regrettable tient au fait que les environnements visités sont peu détaillés et finalement moyennement disparates. D'une montagne enneigée à plusieurs villages abandonnés en passant par un désert, une forêt ou encore un château fort, les décors de Blood Will Tell sonnent un peu creux, même s'il s'en dégage une atmosphère mystérieuse. On ne peut aussi qu'être un peu agacé en voyant que les 60 ennemis du jeu sont très souvent déclinés en de nombreuses versions, ce qui est aussi le cas pour les 48 Monstres du soft. Pour parler chiffres, sachez que le titre comporte précisément 27 types d'ennemis et 34 démons bien distincts. Cependant le bestiaire est particulièrement réussi, plusieurs boss étant somptueux. D'ailleurs, une fois que vous aurez vaincu les 47 premiers Monstres (en revenant dans les niveaux déjà complétés afin de tous les trouver), vous pourrez affronter lors d'un ultime chapitre le dernier boss du jeu, quelque peu inspiré du Behemoth de la série Final Fantasy, et qui donnera lieu à un combat mémorable, mais je vous laisse le découvrir. Après, si on retrouve des squelettes, herbes démoniaques, golems, oiseaux possédés, on se délectera beaucoup plus des incarnations d'un imaginaire nippon présent sous la forme de renards géants, roues vivantes enflammées, démones surpuissantes ou autres chimères très impressionnantes.
Il est un peu difficile de conseiller l'achat de ce tire, même si j'ai pris du plaisir à y jouer et à le terminer. Sclérosé par de gros problèmes de gameplay (qui reste plus qu'abordable malgré tout), très linéaire dans sa progression, facile à terminer (comptez sur une bonne quinzaine d'heures si vous décidez de récupérer tous vos membres), Blood Will Tell est cependant un titre à découvrir pour ceux qui aiment le genre, l'ambiance japonaise féodale ou bien entendu le manga de Tezuka. Ceci étant, entre Astro Boy et Blood Will Tell, on peut tout de même se dire que les oeuvres de ce grand mangaka méritaient un peu mieux, surtout au regard de la richesse des histoires du maître, leur complexité et leur fabuleuse qualité de narration.
- Graphismes13/20
Le graphisme du jeu possède des hauts et des bas. D'un côté les décors sont assez pauvres et très redondants et de l'autre les Monstres et plusieurs ennemis disposent d'un superbe design. On notera aussi quelque belles idées graphiques bien que nombreuses, à l'image de ce passage où vous combattrez derrière un paravent, le rendu visuel renvoyant à un spectacle d'ombres chinoises. Enfin, la 3D du jeu n'est pas de toute première jeunesse, ce qui n'arrange pas les choses.
- Jouabilité10/20
Le gros problème du jeu vient du fait que nous ayons constamment des problèmes de caméra. Certes, ce n'est pas insurmontable mais recentrer constamment l'objectif, refaire un dizaine de fois un saut à cause d'une caméra mal placée ou être obligé de naviguer entre deux modes pour voir les boss et les stèles renfermant des objets de soins, n'est pas ce que j'appelle quelque chose de très intuitif. Il est aussi idiot de ne pouvoir replacer l'objectif à certains moments, ceci entraînant des passages très énervants où les ennemis apparaîtront au premier plan. Enfin, le système de combos est bien pensé mais il est dommage de ne pouvoir profiter de l'aspect visuel des enchaînements, le joueur étant obligé de garder les yeux rivés sur la liste des touches à rentrer afin que Hyakki continue à enchaîner ses coups.
- Durée de vie12/20
La difficulté est parfaitement dosée mais le jeu se montre globalement très facile, seul le 48ème monstre se montrant assez coriace. Comptez sur une durée de vie de 15 à 18 heures pour terminer le jeu si vous désirez trouver tous les Monstres. Une fois l'aventure principale terminée, vous débloquerez le mode Dororo qui vous permettra d'avoir accès à des artworks ou des vidéos. Malheureusement, ce dernier mode est sans intérêt et ne vous amusera qu'une poignée de minutes.
- Bande son12/20
Le doublage anglais sonne faux et on regrettera une fois encore de ne pas avoir droit aux doublages japonais, ce qui aurait été beaucoup plus réaliste compte tenu des personnages et du contexte historique. Les musiques sont discrètes et donnent plus facilement dans les compositions d'ambiance mais elles renforcent malgré tout l'atmosphère. Les bruitages, eux, sont corrects et n'ont rien d'extraordinaire.
- Scénario14/20
L'idée de base est excellente et si nous n'atteignons pas la maestria de certaines oeuvres du maitre Tezuka, le synopsis de Dororo est original. Dommage que les personnages de l'adaptation vidéoludique soient un peu stéréotypés, mais on appréciera malgré tout le travail des scénaristes pour donner au soft une progression, certes rectiligne, mais qui donnera lieu à quelques rencontres des plus intéressantes.
Si la jouabilité de Blood Will Tell avait été plus convaincante, nous aurions pu avoir droit à un très bon jeu. Malheureusement ce n'est pas vraiment le cas et si le gameplay est loin d'être insurmontable, on peste souvent contre cette caméra qui nous empêche d'avoir une vision claire de la situation, surtout lors des passages nous obligeant à effectuer des sauts. Un titre envoûtant pour les personnes qui apprécient les Chambaras, disposant d'une durée de vie plus qu'honorable, mais dispensable pour ceux qui recherchent avant tout un confort continuel en jouant.