Lors de longs trajets motorisés en direction d'une plage luminescente sous le soleil acide d'une journée moite, ou tout simplement dans la volonté de rejoindre un lieu de travail ou d'alimentation, beaucoup se sont dit ces mots, qui résument à eux seuls les innombrables situations rencontrées : "Si seulement ma voiture était un peu plus véloce, je pourrais doubler (sous-entendu le pauvre hère devant vous, qui semble désirer demeurer bien en dessous de la vitesse limite autorisée)". Et bien, réjouissez-vous, car votre remède à ces tourments se nomme la formule 1, et l'on vous propose justement d'en piloter une. Essayer avant d'acheter en somme.
A quoi sert une preview ? D'une part, et c'est là son principal usage, elle vous permet d'avoir un aperçu d'un jeu en préparation avant de commencer à fantasmer sur ce dernier, et nous aide à synthétiser un avis premier qui fondera le final. D'autre part, ce qui reste encore une utopie, nous espérons tous secrètement que les développeurs en tiennent compte. Vous aurez par conséquent aisément deviné que ce n'est pas le cas avec Formula One 2004. Malgré les appels au secours, les cris, les heurts, peu de choses ont été modifiées, et de toute façon fort succinctement. Qu'a donc à nous proposer cette nouvelle mouture estampillée SCEE, un tantinet paresseuse ? Et bien tout d'abord, et dans l'ordre de la découverte, l'aventurier en quête de sensations fortes trouvera sur sa route un design général de très bonne facture, sachant demeurer épuré et se faisant oublier dans ses nuances de blanc très agréables. L'habillage des menus s'intègre admirablement bien dans cette mouvance, et sans atteindre la richesse d'un Colin Mc Rae 4, surprend plaisamment. Une route de contentement s'ouvre alors à nous, et nous conduit vers un point non négligeable, la quantité de modes de jeu. Au nombre de quatre, ils s'avèrent très classiques, et typiques de chaque titre de course aujourd'hui rencontré. A croire qu'ils en deviendraient presque interchangeables. Vous avez donc la possibilité de concourir dans un registre davantage arcade ou plutôt simulation, via les sempiternels contre-la-montre, course libre, ainsi que championnat du monde (saison en arcade). Fort heureusement, des petites variations viennent dissiper les mornes nuages de l'habitude. Endémiques à la simulation, elles se nomment sobrement "Essais" (son nom indique le type d'épreuve qui s'y pratique), et "Week-End de course" (quelques séances d'essais, agrémentées d'une course). Pour finir, vous pouvez également créer votre parcours personnalisé, en choisissant le nombre de tours, et... c'est tout. Une option commune aux deux types d'approches, qui apparaît comme un tantinet risible. Et lorsque l'on rit au volant, l'accident n'est pas loin.
La morsure douloureuse des graviers fait son entrée lors du comparatif entre les choix arcade et la simulation. Le premier, comme son nom semble le signaler, devrait logiquement incarner une sorte de pouvoir ludique immédiat, une joie intense due à un gameplay intuitif et à un "fun" omniprésent. L'écueil est que ni l'un ni l'autre ne daignent se présenter correctement. En effet, et c'est là le plus gros défaut de ce mode, la physique des véhicules s'avère fort dérangeante, nuisant par la même au plaisir de conduite. Ce que l'on prend au début pour de la nervosité n'est autre qu'une rotation de votre fière Formule 1 autour d'un axe, reproduisant l'illusion certaine que certains titres véhiculent, à savoir le sentiment que la route se déroule sous vos roues, sans que vous n'influiez dessus. Une impression des plus désagréable qui brise un tant soit peu l'implication, ce qui n'est pas forcément grave en soi, mais qui plonge de manière identique le joueur dans le doute. La conduite arcade se doit par définition d'être plus accessible que celle misant sa force sur le réalisme, mais n'a pas à perdre toute crédibilité pour se faire. Le résultat n'est pas catastrophique, loin de là, mais l'on ne ressent pas suffisamment le bolide pour tenter des prises de risques nécessaires à une montée conséquente d'adrénaline. De plus, et nous touchons là un point sensible, vous disposez d'une barre de dégâts sur la gauche de l'écran, composée de plusieurs "étages". A chaque fois que vous encaissez une série de petits chocs ou un seul conséquent, une des lignes se teinte de rouge. Une fois l'ensemble de la jauge remplie, vous êtes déclaré hors-course, et devez abandonner.
Très peu permissif, ce système restreint notablement le divertissement ressenti, et se trouve en outre doté d'un jugement sur l'importance des collisions très perfectible. Garde-fou nécessaire, il n'en devient pas moins un handicap à l'amusement, et rend paradoxalement la simulation plus distrayante. A noter toutefois que vous n'êtes ici pas embarrassé des règles officielles, et des impératifs de respect vis-à-vis des concurrents. Le faux-départ n'existe pas, et la liberté règne sur ce petit univers insouciant. Bouffée d'oxygène après d'éreintantes courses au réalisme affiché, le mode arcade, apparaît plus comme un bonus, un havre de paix, que comme un principe de jeu convaincant. On aboutit donc à un renversement de situation qui s'explique par une démonstration d'idiotie notoire, ayant un rapport avec le mode simulation.
En fait, lors du choix d'un mode de conduite, il est naturel de se saisir de l'aspect simulation si votre coeur aime à se faire malmener. Vous débutez alors un championnat du monde, et, ô surprise, vous commencez à bousculer les autres voitures, à effectuer des coupes dignes d'un sécateur géant entre les virages en passant par la pelouse, ce qui n'a aucune incidence sur la tenue de route générale, et à dépasser vos adversaires d'une façon bien peu académique. Soudain, un doute commence à poindre en vous, et vous retournez promptement dans le menu principal pour vous rendre compte que non, vous n'êtes pas en arcade. La solution à cette énigme est pourtant simple Mr Watson. Dans sa grande sagesse, Mr Sony a décrété que la simulation serait "débutante (pratiquement arcade)" par défaut, et que nombre de personnes allaient être déçues de premier abord.
Seuls les plus aventureux se seront rendus dans les options pour activer les dégâts (!), les pénalités (!!) et la gestion de la consommation (!!!). On peut alors se dire que le jeu propose un libre choix de degré de simulation, mais ce serait mettre de côté le fait qu'il faut véritablement se placer en professionnel, accompagné de toutes les plus subtiles règles pour enfin entrevoir une prise en main délicate et sujette à concentration. L'interface n'est donc pas des plus efficace, et condamne les allergiques aux menus options à errer sans réponse dans le monde de Formula One 2004. Néanmoins, la récompense en vaut la chandelle. Plaçant entre vos mains un véhicule plus lourd, mieux équilibré, et surtout moins sujet au syndrome de l'axe, le titre change d'aspect, en vous donnant la possibilité d'expérimenter un pilotage sincèrement intéressant, et surtout peu avare en sensations, rattrapant sans difficultés les errances du mode arcade. Il vous incombe désormais de gérer les moindres prises d'appel, d'anticiper très longtemps à l'avance, et de calculer finement le moment et la courbe opportuns, afin de dépasser votre opposant le plus proche. Malheureusement, le tableau est trop beau. Bien que les dégâts soient plus que présents, leur manifestation tient souvent lieu de bizarrerie conséquente. Il vous arrivera de heurter des voitures de course violemment sans en subir les conséquences, alors que la traversée d'un bac de graviers vous endommagera une partie mécanique.
Puis vient naturellement le mode carrière, dans lequel vous débutez en tant que pilote plus qu'amateur et désireux de se faire un nom dans la société très fermée de la Formule 1. Vous inaugurerez donc votre entrée dans le monde du travail par des essais chronométrés sur circuits, au volant d'un véhicule aux capacités aussi restreintes que les vôtres. A vous de prouver aux différents dirigeants des écuries les plus prestigieuses (Renault, Ferrari, McLaren, etc... les licences sont là ne vous inquiétez pas) qu'ils auront raison de miser sur vous. Si vous êtes vraiment mauvais, ou tout simplement humain, étant donné la difficulté du challenge, il ne vous restera plus qu'à vous rabattre sur Minardi, et à rentrer dans une spirale de défaites. Pourquoi ? Tout bonnement, parce que votre monture se révèle être un désastre roulant, adepte d'un sous-virage catastrophique, ne vous permettant pas de faire vos preuves. Cela en sachant que le système calamiteux de qualification a été préservé. Effectivement, s'il vous arrive de rater votre séance, indispensable pour débuter une course, vous ne pourrez pas y participer. Une conséquence logique, mais qui rend rapidement fou, du fait de la médiocrité de vos premières automobiles, et de l'obligation de regarder attentivement trois écrans inintéressants, entrecoupés de chargements désespérément longs. Un mode passionnant, car incluant un aspect évolutif, mais clairement lacunaire dans son traitement. Néanmoins ce n'est qu'une broutille face à la partie plus "technique" du soft.
Avant d'en venir aux désagréments, attardons-nous sur les points positifs. En premier lieu, la qualité graphique de l'ensemble, si elle ne rend pas complètement hommage à la PS2 se révèle toutefois relativement convaincante, par le biais de la représentation des carrosseries rutilantes des monstres métalliques oeuvrant sur des circuits assez vides, et somme toute peu approfondis. Les textures, que ce soient celles ayant trait aux éléments comme l'herbe ou le sable demeurent correctes, bien qu'assez simplistes, et font preuve, tout comme les habitations et les décors champêtres d'une carence en détails perceptible. Malgré tout, et en compagnie d'une fluidité sans faille, on se laisse immerger dans des courses nerveuses et furieuses. D'autre part, relayée par une ambiance sonore retranscrivant admirablement le chaos auditif dans lequel sont plongés les pilotes, la plongée au coeur de ces engins frôlant le bitume brûlant parvient à nous happer. Tout serait donc parfait à ce niveau si quelques bugs ne déambulaient pas au détour des courbes très bien tracées des plus grands circuits mondiaux (à savoir Suzuka, Sao-Paulo, etc...), provoquant des répétitions inopinées d'un commentateur et d'un directeur de course peu concernés. Le pire dans tout cela reste l'i.a désastreuse des jeunes pilotes cherchant à obtenir comme vous les honneurs. Le fait de chercher à passer en force et de foncer droit en direction de vos roues dans le mode arcade reste crédible, mais demeure incompréhensible en simulation. Vos opposants sont prêts à tout pour vaincre, allant jusqu'à se jeter sur vous, et se désagréger en fumée tout comme votre monture. Une tendance qui s'atténue un tantinet en mode d'intelligence artificielle professionnelle, mais qui reste quand même sous-jacente. Étrange.
Au final, ce Formula One 2004 , déçoit quelque peu, et conserve trop de lacunes et d'erreurs manifestes pour se hisser au sommet des jeux de course automobile en général, et de Formule 1 en particulier. La cuvée 2003 n'était pas vraiment convaincante, et la relève ne parvient pas à repousser l'avancée des problèmes, incarnés, non dans la forme, mais dans le fond du jeu. Tout cela est bien dommage, car la conduite en mode simulation s'avère vraiment agréable, et pour une fois accessible. Espérons que l'année prochaine sera la bonne.
- Graphismes14/20
La modélisation des différents véhicules, et la réaction des reflets sur la belle carrosserie, s'avèrent correctes sans pour autant faire oublier les ténors du genre, comme Gran Turismo 3 par exemple. Le regret général que l'on peut formuler, s'en tient plutôt au dépouillement global du titre. En effet, mis à part vos bolides, donc, on a parfois l'impression d'évoluer dans un monde sans vie, sans relief, qui pourrait être plus chaleureux si la PS2 était utilisée dans ses derniers retranchements. De plus, et malgré le réalisme de la vue interne, on n'observe que très peu d'effets bien réalisés, que ce soient climatiques ou physiques sur la piste, ce qui est un peu paresseux de la part de Sony. La présence de 5 vues disponibles est par contre un plus non négligeable, permettant une approche sereine des virages.
- Jouabilité14/20
Nous avons a faire à deux types de gameplay en fait. Le premier, inhérent au mode arcade, se place comme le point faible du soft, donnant l'impression au pauvre joueur que sa voiture tourne sur un axe, et dont les réactions sont relativement étranges, et le second, fier défenseur du mode simulation apparaît comme agréable et digne d'intérêt, de par sa précision, et son aspect plus "massif". Non que le pilotage nerveux du mode arcade soit détestable, mais il demeure trop imprécis pour séduire. La prise en main est quand à elle immédiate, et il suffira de quelques entraînements pour comprendre le fonctionnement des valeureux monstres.
- Durée de vie15/20
Les championnats et saison ne sont pas très étendus, mais on a toujours plaisir à refaire quelques courses, afin de conserver les bons réflexes et de jauger ses compétences. Le mode carrière vous prendra quant à lui de nombreuses heures, si son fonctionnement particulier ne vous arrête pas, et si votre rêve est de vivre l'ascension d'un conducteur émérite. Le mode online quant à lui vous proposera d'affronter les fantômes des meilleurs chronos des plus grands joueurs du monde entier.
- Bande son12/20
Les bruits relatifs au moteur et aux chocs sont très bien retranscrits, et ne tranchent pas avec la réalité. Par contre, les voix auraient pu bénéficier d'un meilleur traitement. Risibles et dénuées de toute implication, elles s'octroient même le droit d'exécuter un petit bug de temps en temps. Les compositions musicales sont en voie de disparition, et mis à part celle accompagnant l'intro, peu dans le ton au passage, absentes.
- Scénario/
-
Pas encore complètement légitimée sur la tranche très sujette à compétition des produits vidéoludiques axés sur la course de voitures, Formula One 2004, n'arrive pas à se tailler une place, malgré quelques bonnes idées, et une progression notable depuis le premier épisode débarqué sur PS2. Néanmoins trop de lacunes l'empêchent une nouvelle fois d'atteindre les étoiles, et condamnent ce soft à poursuivre son peaufinement. Souhaitons que d'ici la sortie d'une nouvelle version, quelques modifications majeures auront été effectuées. Un conseil pour les fans de Formule 1, essayez avant d'acheter, car malgré toutes ses licences officielles, il pourrait bien vous décevoir.