Emboîtant le pas à un lamentable Seven Samurai 20XX, Bujingai Swordmaster essaiera de redorer le blason du beat'em all sur PS2. S'appuyant sur de nombreux hits vidéoludiques et un imaginaire chinois issu de nombreux contes, légendes…et wu xia pian, le titre de Taito possède en l'état une capacité à attirer le regard et l'attention du joueur friand d'envolées lyriques, d'envolées héroïques et ceci est déjà une très bonne chose pour une « simple » version preview.
Heureux hasard qui fait que je me retrouve à tester la version de Bujingai sur PS2. C'est en effet après avoir terminé le premier Dot Hack, que je me décidais à entrer dans une petite période beat'em all, histoire de souffler un peu avant l'arrivée du deuxième épisode de la saga de Cyber Connect 2. Ainsi, après avoir terminé un sympathique (bien qu'un peu court) Van Helsing, je jetais mon dévolu sur Seven Samurai 20XX malgré le test peu flatteur de l'ami Jihem. En résultait alors une grosse surprise tendant vers le franchement négatif. Il est clair qu'entre un titre mille fois trop basique, une gestion de la caméra maladroite, des décors glacials (eu égard au talent du grand Moebius) et des ralentissements abominables, on se demandait bien qui pouvait prendre du plaisir à jouer à ce soft. Bref, je prenais dès lors la décision de revenir très rapidement à un petit Dynasty Warrios 4 Xtreme Legends quand Bujingai tapa à ma porte. Je la lui ouvris et après les formalités d'usage je l'enfournais dans ma PS2, dure vie que celle d'un jeu PS2 qui subit moult outrages sans broncher et qui n'a alors qu'une solution : tourner et encore tourner pour nous faire plaisir à nous autres joueurs.
Tout ceci pour dire que Bujingai doit beaucoup à une ribambelle de jeux et de films. Citons au hasard Devil May Cry, Prince Of Persia, Otogi, Dynasty Warriors, Tigre & Dragon, Once Upon A Time In China, etc. Les influences demeurent diverses même si au final, la magie mélangée à la fantaisie (voire la féerie) est le ciment commun qui solidifie toutes les oeuvres dont je viens de parler. Le soft de Taito est donc un beat'em all, un vrai de vrai, un de ceux qui va vous faire traverser de gigantesques niveaux en affrontant une pléthore d'ennemis, en vous faisant ramasser des items de soin, de défense, de magie ou en vous mettant aux prises avec un boss, un commandant, qui gardera bien sagement chaque stage. Le principe est connu (mais nullement éculé) et c'est bien dans ce cas la réalisation de l'ensemble qui fera la différence. Et justement, le moins qu'on puisse dire est que celle de Bujingai est d'un très bon niveau, même si le tout ne confine point au génie.
Tout d'abord, c'est bien l'ambiance du jeu qui ressort en tout premier lieu. Misant sur des couleurs très vives (tant au niveau du costume du héros et des effets spéciaux accompagnant quasiment chacun de vos coups ou de vos sorts) et des lieux sortis de la Chine ancienne, le tout est très flatteur pour la rétine. Ceci dit, on regrettera une fois encore la tendance qui tend à prouver que tout beat'em all baignant dans une ambiance "historique" se doit de comporter plusieurs niveaux contemporains ou futuristes (voir Devil May Cry 2, la série des Onimusha, Ninja Gaiden). C'est assez agaçant mais Bujingai ne déroge pas à la règle et c'est après un tutorial se passant dans un temple chinois que le jeu commencera véritablement dans une ville hong-kongaise noyée dans la nuit, malgré les néons jonchant les rues, très froides et peu accueillante dans tous les sens du terme. Reste que, la suite du soft partira vers d'autres horizons, le joueur étant par exemple inviter à visiter une forêt de bambous perdue dans la brume. Un éclectisme plus ou moins bien vu (en fonction des niveaux et de vos goûts bien sûr) qui est ici rendu possible par le fait qu'après chaque mission, vous reviendrez dans le temple de départ qui vous donnera accès à des portails magiques vous menant vers votre prochaine destination infestée de démons et attendant d'être purgée de toute enchance maléfique par vos bons soins ! Toujours au sujet de l'esthétique, on saluera le travail des compositeurs (qui ont créé une partition elle aussi à mi-chemin entre l'électro-rock et des sonorités typiquement chinoises) et des graphistes qui ont parsemé le jeu de plusieurs ennemis disparates (du samuraï géant en passant par des créations lorgnant entre le cyborg et le zombie) et de très nombreux effets lumineux constituant la charpente de nombreux sorts magiques, d'attaque fulgurante, de contres et ripostes en tout genre.
En parlant de cela, ce qui fait réellement plaisir dans Bujingai se situe au niveau du gameplay. On ne pourra ici pas vraiment pester contre un manque de mouvements ou d'actions, même s'il est fréquent qu'on ait tendance à mitrailler un bouton pour venir à bout des ennemis, le problème se situant donc plus du côté du joueur que des possibilités de jeu, et des possibilités, vous allez en avoir. Tout d'abord votre personnage (qui en termes de design me fait un peu penser au personnage de Yuda dans Hokuto No Ken mais qui doit malgré tout son apparence au chanteur japonais GACKT) pourra, pour évoluer dans les niveaux, marcher sur les murs, effectuer des doubles sauts pour grimper toujours plus haut, jouer au singe en sautant de poutrelle en poutrelle qu'on trouvera très souvent tout au long des stages ou encore planer quelques secondes. Autant de mouvements qui vous permettront d'atteindre des endroits inaccessibles. La jouabilité est assez bonne et si on peine parfois à réaliser quelques sauts (en fonction du level design), je n'ai pas noté d'énormes problèmes de caméra. Il est certes obligatoire de la recentrer manuellement derrière son personnage (à l'aide d'une simple pression sur un bouton) pour être à l'aise mais ce n'est pas extrêmement contraignant, sachant que vous pourrez user d'un niveau de zoom pour positionner l'objectif en hauteur. Je ne dis pas que c'est exquis mais on ne se retrouvera certainement pas à hurler à la mort à cause d'un problème de "prise de vue".
Les combats, eux, sont plutôt savoureux. Très Otogi dans l'âme, vous pourrez user de différents sorts magiques évolutifs en termes de niveau (et donc de puissance) et devrez en trouver d'autres en dénichant des items spécifiques cachés dans les niveaux. A noter, qu'il faudra ramasser des orbes pour remplir à nouveau votre jauge de magie si vous souhaitez user de cette capacité. En plus des sorts magiques, une attaque spéciale sera aussi disponible pour vous sortir des situations périeuses. Rien de tel par exemple qu'une attaque en toupie pour se défaire de plusieurs ennemis vous ayant encerclé. Continuons avec plusieurs combos à effectuer en calculant vos coups pour être en mesure d'asséner plusieurs attaques à la chaîne (aussi bien sur terre que dans les airs), des parades (via des roulades ou des triples sauts) ou les contre-attaques, idéales pour dynamiser les combats. Si les combos ne sortent pas très souvent (mais là, c'est clairement un manque d'entraînement de ma part), je dois dire que les contres sont absolument jouissifs, ceux-ci étant très simples à sortir et donnant lieu à une dramatisation de la mise en scène. Il m'est ainsi arrivé de combattre un boss, de contrer une de ses attaques (en appuyant tout simplement sur le carré au bon moment, une marge d'erreur bien venue étant autorisée), le boss contrant ma contre-attaque, moi-même contrant son contre. Etonnant mais purement génial, surtout que suite à ces manipulations, j'eus droit à une petite mise en scène me montrant les deux combattants s'envolant dans les airs en tournant sur eux-mêmes, en redescendant sur terre, le combat reprenant de plus belle, délectable pour les fans de wu xi pian !!
Maintenant, je n'irais pas jusqu'à dire que Bujingai sera un chef-d'oeuvre impérissable. Si le titre est graphiquement superbe au niveau des effets spéciaux, les décors, bien que variés, sont un peu vides et les ennemis vont du "superbe" à l'anodin. Il est aussi dommage que les niveaux soient trop longs, le joueur perdant au fil de la progression son enthousiasme, celui-ci remontant au beau fixe lors des affrontements contre les boss. Malgré tout, nous sommes devant un jeu des plus sympathiques à la jouabilité convaincante contribuant à donner aux joueurs des combats dynamiques et parfois très classieux. Il restera tout de même à juger de la durée de vie de l'entreprise, à constater que les bugs de langue auront bien disparu (l'italien côtoyant le français durant les parties) et à voir si cette hétérogénéité artistique parviendra à atteindre le coeur des amateurs de contes et d'action.