L'historique vidéoludique relatif aux pompiers demeure relativement restreint lorsque l'on se penche sur son cas. Dignes représentants de la gamme "Game and Watch" au travers d'un jeu d'adresse consistant à rattraper des victimes sur une toile tendue, convoyant des accents futuristes dans Burning Rangers sur Saturn, ou s'approchant d'une simulation dans le cas de Fire Department pour les plus célèbres, les soft mettant en scène les soldats du feu ne font pas étalage d'une exhaustivité manifeste. Konami décide donc d'apporter sa pierre à l'édifice chancelant, en la personne de Firefighter. Un choix judicieux et libérateur d'une stagnation de l'originalité en passe de devenir maladive ces derniers temps. Une prise de risque sans aucun doute mûrement réfléchie, mais qui relaye un vent de fraîcheur étonnant du fait de l'importance massive de cette société. D'autant que l'entrée en matière est plus que prometteuse. Proposant un avant-propos inspiré indubitablement du film "Backdraft" de Ron Howard, le titre vous place très vite dans une narration classique mais disposant des principaux éléments nécessaires à une immersion sans heurts.

L'imbrication entre le lourd passé de Dean, le héros, les préoccupations vengeresses tenant de la folie clinique d'un mystérieux pyromane, et les sentiments de la jeune journaliste Émilie pour le beau héros à la combinaison ignifugée, met en place une cohérence et un attrait non feints. On pénètre le scénario à la manière de celui d'un long métrage qui neutralise rapidement la petite appréhension qu'il est possible de ressentir à l'annonce du type du soft en question. Le tout soutenu par des scènes cinématiques d'une qualité correcte graphiquement parlant, agrémentées d'une mise en scène d'un acabit similaire. Une base solide peut alors soutenir le corps du produit, qui se déploie de fait plus librement.

Influencées certainement par des occurrences rencontrées lors d'interventions réelles de Sapeur-Pompiers, les différentes situations que vous allez rencontrer et auxquelles vous devrez vous confronter vaillamment s'avèrent variées et respectueuses des conditions capricieuses de certains foyers "différents". Préparez-vous par conséquent à lutter contre des feux à la "personnalité" unique et dépositaires d'un mode d'extinction bien spécifique. Les brasiers de métaux, aux flammes d'une température avoisinant les 1000 degrés Celsius, ceux de liquides inflammables, violents et tenaces, ou encore la mise en cause d'appareils électriques, vous forceront à adopter votre mode de progression. De même, méfiez-vous des backdrafts (retour de flamme dans une pièce hermétique), ainsi que des "flash-over" embrasant en un instant une pièce entière. Dernière menace, mais de taille, les fumées toxiques, vous contraignant à un respect attentif et vital des normes de sécurité. Le danger peut surgir de partout, vif et silencieux. C'est une des grandes forces du jeu. Provoquant un état de stress permanent, vous balayerez chaque pièce des yeux afin d'apercevoir le moindre indice qui vous permettrait d'anticiper un danger à consonance mortelle.

Tout détail à priori mineur peut se révéler vecteur de drame associé à une source de chaleur ou d'électricité. Une flaque de solvant sur le sol, n'est par exemple que peu propice à la surveillance, mais devient une plaie si la moindre étincelle volatile s'écrase à sa surface. D'autre part, un foyer insuffisamment contenu peut reprendre subitement si vous n'y prenez pas garde, et les flammes, suivant les murs et le plancher vous procureront des sueurs froides lors d'apparitions surprises derrière ou au-dessus de votre personne casquée. Je vous assure que pris au piège et acculé contre un bureau avec le sous-plafond qui s'écroule petit à petit, l'instinct de survie n'est que faussement virtuel. Une profondeur émotionnelle et immersive dont peu de titres peuvent se targuer de posséder. Vous participerez à de véritables moments de bravoure ludique, traversant un mur incandescent avec témérité, dans l'optique louable de secourir un innocent en bien mauvaise posture. Prenant et fascinant. Surtout qu'en bon pompier qui se respecte vous disposez d'atouts majeurs pour inverser la tendance à l'embrasement.

Armé de votre lance à eau disposant de deux modes de dispersion, et d'une hache, l'aventure vous attend de pied ferme derrière ses chaudes barrières. Fort heureusement, le gameplay étant intuitif et intelligemment mis en place, les vagues enflammées ne vous résisteront que peu de temps. En effet, une seule touche suffit à faire basculer l'embout de votre lance d'une position concentrée à une seconde plus axée sur la propulsion large, mais moins puissante. A vous par conséquent de juger au centre du brasier de quelle façon aborder la menace. Sachez toutefois qu'il existe plusieurs types de fournaises de couleurs distinctes. La colorisation jaune s'applique à des foyers peu résistants et la rouge à une catégorie plus récalcitrante, qu'il faudra éradiquer en vitesse avec le jet le plus robuste avant de se voir submergé. Propulsant nombre de flammèches et de jets brûlants, cette dernière se montre irascible et pratiquement "vivante". Une donnée que l'on retrouve également avec la présence de boss de fin de niveau, apparentés à des phénomènes rares consécutifs à un incendie. Des tourbillons enflammées par exemple, résultants de prises d'air d'un conduit d'aération feront office de scène clôturant l'une des missions. Disposant d'une barre de vie, ils ne laissent aucun doute quant à leurs statuts.

Mises en place intelligemment, et sans trop d'artifices, ces apparitions demeurent crédibles et pour le moins imposantes. Désireux d'explorer de fond en comble les divers environnements, vous aurez sans doute besoin de votre hache, permettant de réduire à néant certains obstacles. Et c'est là que le bas blesse un tant soit peu. Très peu d'objets se révèlent destructibles et même interactifs. Impossible de monter sur une table si celle-ci ne fait pas partie des scripts inhérents au scénario de jeu, il n'est également pas de votre compétence de briser un bureau afin de parvenir plus rapidement à un blessé. Seuls quelques rares éléments sont propices à subir votre courroux. Un écueil pas vraiment handicapant, mais réfrénant le plaisir pris lors de vos pérégrinations au pays des flammes. Vous disposez tout de même d'un plan très précis et d'une aide spéciale activée par la touche "carré" qui vous permettront de sortir les pauvres gens de fournaises toujours plus inquiétantes.

Pas encore inquiétante mais presque, la qualité graphique demeure relativement mal équilibrée. Autant le rendu vaporeux de l'eau jaillissant sur le brasier s'avère convaincant, autant l'aliasing très présent surprend et attriste. Sans être omniprésent, il fait toutefois quelques apparitions remarquées. Modélisé sérieusement et disposant d'un niveau de détail agréablement important, votre soldat du feu possède une animation réaliste et plutôt bien décomposée, reflétant et faisant ressentir le poids notable de la combinaison aux lourds équipements. Les décors sont quant à eux assez vides, ne mettant en avant que quelques textures de qualité mais dramatiquement peu variées. A côté de cet état de fait, les divers effets, que ce soit ceux relatifs aux foyers ou à la fumée sont intéressants et participent à l'impression d'évoluer concrètement au coeur d'un brasier déchaîné. Mais tout cela ne saurait écarter une lassitude qui arrive malencontreusement rapidement, découlant de la variété quasi nulle des actions à effectuer. Circonscrire le feu et délivrer de leur prison enfumée de pauvres citoyens sera votre pain quotidien, qui s'il est logique et légitime, n'apporte pas suffisamment de motivation au bout de plusieurs heures de jeu. Remercions le scénario, nous permettant de demeurer quand même sous le charme d'un titre atypique... dans la forme.